18.
Peut-être que l'on aurait dû s'arrêter de boire à la première bouteille. Parce qu'on a dansé comme des fous sur le parking et qu'il a maintenant du mal à rentrer les clefs de notre chambre d'hôtel dans la serrure. Il rit quand il les fait maladroitement tomber sur la vieille moquette.
- T'as des mains de beurre !
- Je vais bien te beurrer, tu vas voir.
Je ris avec lui. Qu'il me beurre comme une tartine si ça lui chante. La porte s'ouvre enfin et il me prend par la main pour m'enfermer avec lui. Et plongé dans la pénombre, on s'embrasse. Nos vestes glissent par terre et l'on se bat avec nos chaussures. Toujours en se dévorant la bouche. Nos vêtements ne nous servent plus à rien. On va faire l'amour. Loïk me pousse sur le lit et grimpe au-dessus de moi. Sa bouche réclame de la mienne et mes mains sont avides de sa peau. On se caresse de partout, où chaque carré de chair peut l'être. Nous ne sommes pas bourrés. Juste plus libérés de nos appréhensions.
Il se lève subitement et sort de son sac, capote et lubrifiant. Donc oui, on va vraiment le faire.
- Donc... Toi ou moi ?
- C'est toi et moi, me sourit-il.
- Physiquement, je crois que ça marche pas.
Loïk ricane et pourtant, j'étais on ne peut plus sérieux.
Ses lèvres embrassent ma nuque et je sens ses doigts glisser le long de mon sexe déjà tendu.
- C'est toi et moi, ce soir. Juste un arrêt dans le temps pour oublier.
Mon état de béatitude vient s'envoler. La réalité m'a rattrapé. On va définitivement passer le cap ce soir.
Il déchire le sachet du préservatif et le déroule sur ma longueur avec son éternel air aguicheur. C'est donc à moi que reviendra le rôle de mener la danse. Ce qui ne me rassure pas vraiment. Mais je n'ai aucun doute sur le fait qu'il m'aidera.
Mon beau blond s'allonge sur le lit et prend la peine d'allumer la lumière de chevet. Il m'embrasse doucement et je me place simplement entre ses cuisses qu'il écarte.
- Tu me fais confiance ? me demande-t-il, sa main sur ma joue.
- Aveuglément...
Ses mains me guident et je sombre dans le plaisir avec lui.
*
* *
Loïk dessine des petits cercles sur mon torse et je me contente de le regarder faire. On se sourit et je ferme les yeux. Simplement pour profiter encore un peu de lui et de ses caresses. Car j'ai l'impression que tout s'est passé vite. Trop vite. Et je m'en veux.
- Loïk ?
- Oui, mon amour ?
Un frisson remonte le long de mes bras et une tendre chaleur entour mes reins. Il faut que je passe outre le surnom pour espérer reprendre mes esprits et parler avec lui de ce qui me tracasse.
- Il faut que... Je dois t'avouer quelque chose.
- Je t'écoute.
Sa main ne quitte jamais ma poitrine et mon cœur. Ce qui rend les choses d'autant plus compliquées.
- J'ai... J'ai pas aimé.
Mon regard dévie sur nos mains liées. C'est impossible pour moi de le regarder et d'affronter sa réaction.
- Mais tu... Enfin d'accord. On le refera pas.
Il se laisse tomber sur l'oreiller et je me mordille la lèvre.
- C'est pas le sexe que j'ai pas aimé, le rassuré-je. J'adore quand on le fait ! Je crois que c'est t'avoir en dessous de moi que j'ai pas aimé...
- Est-ce que tu sais pourquoi ou c'est flou ?
- J'ai du mal à imaginer que tu puisses ressentir à ce point du plaisir.
- Tu crois que j'ai simulé ?
- Oui ?
- C'est une question ?
- Je sais pas...
- Tu es sûr que ça va ? m'interroge-t-il sérieusement.
- Oui ! Non ! Enfin, oui ! Je... Merde.
Son bras me rapproche de lui et il dépose un baiser contre ma joue.
- Pardon, je te taquinais. Mais tu as eu peur de quoi, sérieusement ?
- Des questions que je me pose. Toi, le sexe, tu vivais ça comment ? Avec qui ? Tu as eu beaucoup de relation avec des garçons ? Est-ce qu'ils étaient actifs ? Passifs ? Est-ce que c'était bien ? Tu vivais des moments médiocres ? Puis après le sexe, tu restais avec eux ? Ils partaient ? Vous aviez une relation sérieuse ? Combien de temps ça a duré ? Pourquoi ça s'est terminé ? Tu-
Il m'interrompt en posant son index sur ma bouche.
- La seule chose à laquelle je vais répondre, c'est que je n'ai eu qu'une seule relation réellement sérieuse avec un garçon. Et que l'on s'est quitté simplement. Rassuré ?
- Pas vraiment... Est-ce que tu l'aimais ?
- Oui.
- Beaucoup ?
- Probablement.
Ni un oui. Ni un non. Et je crois que ça me rassure anormalement.
-Tu as encore d'autres questions ?
- C'était quoi son nom ?
- Vicktorien. Pourquoi tu me demandes tout ça ?
- Je crois que j'ai peur de pas être à la hauteur avec toi. Avec ce qu'on vient de faire... Je veux dire, tu as été bien plus actif que moi !
- T'as une drôle de vision du sexe !
Je retire ma main de la sienne, vexé.
- Mes seules expériences se déroulaient avec des filles. Et c'était bien différent de ce que l'on a fait ! Alors oui, j'ai fait n'importe quoi.
- Mais non, tu étais juste hasardeux dans tes gestes.
- Justement ! Je n'aurai pas dû l'être !
- Écoute Tristan. Je suis désolé que tu aies ressenti ça. C'est vraiment pas ce que je voulais pour nous. Pas pour notre première fois.
- Ce n'était pas la tienne.
Il s'assoit sur le lit, confus.
- Comment ça ?
- Tu l'as déjà fait ! Dans les deux rôles ! réponds-je en m'asseyant à mon tour.
- Et c'est ça qui te dérange ?
- Putain, oui ! Oui, ça me dérange ! Ça me dérange de penser que des garçons ont partagé avec toi un moment que j'aurai jamais ! Des garçons se sont trouvés à ma place et tu as certainement bien plus apprécié avec eux ! Merde. J'aurais tellement aimé vivre avec toi un truc aussi fort que ça !
Loïk se lève du lit et récupère ses affaires au sol et les enfile, sans rien dire et sans même un regard pour moi.
- Qu'est-ce que... Qu'est-ce ce que tu fais ? reprends-je, incertain en le voyant si pressé.
- Je vais faire un tour.
- Mais il est plus de minuit...
- Si je reste, je vais dire des choses que je vais regretter.
- Pourquoi tu pars ? J'ai dit un truc qu'il ne fallait pas ?
- Oui, crache-t-il en enfilant sa veste. Car de ce que j'ai compris, on n'a rien vécu de fort, donc je préfère partir avant d'avoir un mot de trop.
Je sors prestement du lit à mon tour pour mettre mes affaires, espérant le retenir.
- C'est pas ce que j'ai dit ! On vit des choses bien ! Mais pas ce que j'aurai apprécié vivre le plus !
- C'est quoi ton but ? Pourquoi même, tu restes avec moi ? Juste parce que tu voulais tester avec un mec au pieu ? Je suis une expérience ?
- Non !
- Alors dis-moi ! Pourquoi tu es là ? Pourquoi t'es dans cette chambre avec moi ? Pourquoi même, on a couché ensemble ?
Pourquoi. Il me demande pourquoi. Je sais qu'il veut une réponse. Cependant, je ne la connais pas.
Il secoue la tête, dépité. J'ai conscience qu'il veut des mots et pas un silence gêné. Mais c'est plus fort que moi. Une tristesse prend place dans ses yeux, face à mon absence de réponse, qu'il essaie tant bien mal de couvrir avec sa main. C'est à cause de moi. Je tente un geste vers lui qu'il repousse brusquement.
- Loïk...
- Tu sais ce qui est le plus difficile ? C'est de me rendre compte, encore une fois, que je me suis planté. Je suis tombé amoureux. Et c'est pas réciproque.
La porte claque derrière lui. Je reste planté sur place, ma veste glissant sur mes bras. Il m'a appelé mon amour. Il m'a dit qu'il est tombé amoureux. De moi. Loïk m'aime. Putain. Un garçon m'aime. Et je ne sais même pas si c'est mon cas.
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