Chapitre 2 : Badaboum.
Au micro résonne la voix du pilote, qui d'un soubresaut, me sort instantanément de mes pensées.
Mesdames, messieurs, nous allons amorcer notre phase d'atterrissage, veuillez attacher [...]
Des fourmillements commencent à me traverser les membres. Je secoue mes mains et secoue mes jambes, pour tenter d'atténuer la gêne.
En arrivant dans le hall, je cherche mon prénom des yeux. Je le trouve sur une pancarte, fièrement tenue, par une jeune femme incroyablement lumineuse affichant un sourire dont on pouvait presque palper la gentillesse. Sa peau foncée n'abrite aucun défaut, et tout sur son visage semble avoir été placé avec gout. Sa beauté frôle la perfection et parait être le résultat d'une séance intensive de Photoshop, où rien n'a été laissé au hasard.
Je m'avance timidement vers elle.
- Bonjour, je suis Johanna Spenwood, tu dois être Amy! dit-elle en m'enlaçant.
- Oh euh oui, répondis-je, un peu surprise d'une proximité si rapide! Pas que cela me gêne mais je ne m'y attendais simplement pas.
- J'espère que tu as fait un bon voyage? Me demanda-t-elle, vraiment intéressée par ma réponse.
- Oui, même si j'étais légèrement anxieuse vu que c'est ma première fois en avion.
- Ah, des premières fois tu vas en vivre pas mal ces trois prochains mois.
Elle fait signe à un homme, qui vient directement me délester de toutes mes valises. Instinctivement, je ne desserre pas les mains et l'incompréhension prend naissance dans les yeux de celui-ci. Je lâche alors mes précieuses affaires et le laisse m'en débarrasser. J'agrémente mon geste d'un sourire embarrassé. De là où je viens, si quelqu'un vous prend votre valise, vous pouvez être sûr d'une chose : vous ne les reverrez jamais.
Aussi, j'avoue ne pas être extrêmement à l'aise avec le fait qu'une personne fasse à ma place ce que je suis largement en capacité de faire.
Johanna pose sa main en haut de mon dos comme pour me guider. Cette caresse se veut rassurante. Je suis un peu perdu et je pense que cela ne lui a pas échappé.
Nous avançons et nous voilà devant un énorme Range Rover noir. Mes yeux n'arrivent à le contempler autrement qu'en étant exorbités. Un chauffeur nous attend et nous ouvre la porte. Je le remercie d'un signe de tête, gêné.
Sur le chemin, Johanna conserve son amabilité et sa volonté de m'aider à apprivoiser mon appréhension. Elle fait la conversation et s'intéresse à moi. Mon parcours, ma vie, mes aspirations.
Après une bonne heure de route, le chauffeur nous signifie que nous sommes enfin arrivés.
À peine descendu du véhicule, je fais face à un immense et imposant hôtel. Je suis sans voix. Je ne peux m'empêcher de m'émerveiller. De le contempler avec un regard juvénile.
Un long tapis rouge nous attend dès les premières marches et mène à un noble escalier en colimaçon. Des lustres en cristaux, majestueux, sont suspendus au plafond, et le sol est couvert de marbre. Je ne sais plus où donner de la tête, mes yeux étant balancés d'une dorure à une autre.
- Putain mais je vais faire une crise d'épilepsie moi, dis-je en me parlant à moi-même.
- C'est vrai que ça fait un peu tourner la tête mais crois moi, on s'y habitue très vite, trop vite même, répondit Johanna qui m'a entendu marmonner.
- Je suis désolée, je ne voulais pas être grossière, m'excusais-je, le regard fuyant.
Elle me sourie et sentant sûrement ma détresse, change de sujet.
- Je vais t'accompagner dans ta chambre pour que tu puisses t'installer tranquillement et ce soir nous mangerons ensemble pour échanger sur ces merveilleux trois mois qui t'attendent.
Une fois seule dans ma chambre, je ferme la porte, me retourne puis marque un temps d'arrêt. Je balade mon regard ébahi. La hauteur sous plafond est folle, il y a au moins deux moi, voir trois qui passe.
Je commence à m'agiter, allant de pièce en pièce, touchant à tous, comme un enfant dans un magasin de jouets.
Mes yeux se posent sur l'immense fenêtre. J'avance doucement dans sa direction, pour contempler le tout New York. La vue est juste incroyable.
Je me retourne et aperçois sur le bureau juste derrière moi, une caisse sur laquelle est collé un petit mot. "Pour que tu puisses travailler dans les meilleures conditions". Mon attention se porte alors sur ce que contient cette fameuse caisse. Un téléphone, un ordinateur, une tablette, un dictaphone, un carnet, des stylos et tout un tas de bricole utile à l'écriture.
Je me pince, pour vérifier que c'est bien réel et que je n'ai pas atterri dans la 4ème dimensions.
Puis vient l'explosion. Je sautille sur place en laissant s'échapper des petits cris de joie ! Je m'élance ensuite en arrière, d'un bond digne des plus grands films, et me laisse tomber sur l'immense lit, qui trône au milieu de la chambre.
- C'EST VRAIMENT TROP GENIAAAAL!! hurlais-je en me tortillant dans tous les sens.
***
Le soir venu, je rejoins Johanna. Un serveur m'apporte le menu que je reçois avec enthousiasme. "Merci Monsieur". Je suis heureuse et j'ai faim. Deux paramètres qui peuvent clairement altérer mes compétences sociales.
J'ouvre le menu et le sourire qui me montait à l'oreille, redescend net. Non mais attends, cette bouteille de vin coûte mon salaire du mois dernier ! Johanna qui ne passe pas à côté du "changement d'ambiance" de mon visage, intervient immédiatement.
- Ne regarde pas les prix, tu mets tout sur le compte de la chambre, c'est le journal qui s'en chargera. Tant qu'on parle d'argent, tiens, - elle me tend une carte bancaire -, tu paiera tout avec cette carte.
- C'est..
- Fabuleux, oui je sais, dit-elle en souriant.
- Encore plus. Je ne m'attendais pas à tout ça. Pas à autant.
- Tu apprendras que dans ce monde, l'image à une importance fondamentale. Le Johnson Magazine est le plus grand journal des États-Unis et il doit l'être dans tout ce qu'il fait.
- Je vois ça, répondais-je en triturant mes doigts.
- Et si cela peut t'aider à, je ne sais pas, relativiser, te détendre, dis-toi que tout ça ne représente pas grand-chose financièrement parlant pour le magazine.
Il est vrai que le Johnson Magazine possède une revue sur le sport, la santé, la politique, l'investigation, la finance, les peoples, ainsi qu'une chaine de télé, une chaine de radio, et se classe numéro un presque partout.
- Aussi, n'oublie pas que tu incarnes un investissement pour nous.
- Un investissement ?
- Ce n'est absolument pas péjoratif ou de mauvais augure. Ne t'inquiète pas. Ce que je veux dire, c'est simplement que pour être et rester les meilleurs, il faut avoir dans ses équipes les meilleurs. Il n'y a pas de secret. Nous pensons qu'ils ne se trouvent pas tous à la sortie des grandes écoles et que, comme toi, certains passent les mailles du filet. Au terme de c'est trois mois, quand tu auras fait tes preuves, tu signeras un contrat avec nous. Tu seras envoyé dans une excellente université pour terminer tes études et une fois diplômé, tu rejoindras nos équipes.
- Jamais une suite de mots ne m'a été aussi agréable à l'oreille.
Elle me sourit, puis attrape le verre de vin rouge qui venait de lui être servi. Elle me fait signe de me saisir du mien.
- Trinquons à ce concours qui va tout changer pour toi.
Nous continuons à discuter toute la soirée. Je bois littéralement ses paroles et me sens extrêmement à l'aise avec elle, ce que je sais être une chance dans cet univers où tout est nouveau.
***
Ça fait maintenant deux semaines que je suis arrivée à New York et le moins que l'on puisse dire c'est que je me suis acclimatée à cette nouvelle vie de façon extrêmement rapide. Fini la fausse timidité et la gêne des débuts, je suis déjà comme un poisson dans l'eau.
Alors comme tous les matins à l'aube, je me rends dans mon café préféré. Je l'ai découvert quelques jours après avoir mis les pieds à New York. L'ambiance y est douce, agréable. J'adore y venir avant et après le travail. L'intérieur rustique et convivial m'apaise et me rappelle un peu mon chez-moi.
Un autre point non négligeable : c'est un café où aucun de mes collègues ne se rend. C'est mon endroit. Pas que je ne veuille pas les croiser mais j'aime avoir mes moments de solitude choisie. Je passe déjà tellement d'heures au bureau...
Bon... Ok... oui, c'est peut-être aussi un peu, beaucoup pour échapper à Steeve. Ce collègue qui, malgré tous les signaux que je lui envoie, à beaucoup de mal à comprendre, que je ne suis pas intéressée par lui. Si au début je tentais la courtoisie, aujourd'hui je suis un peu plus directe et inventive :
"Amy ça te dirais de venir boire un verre?"
"Non, vraiment pas. Et puis je n'aime pas les verres de toute façon".
Je ne sais pas comment je pourrais être plus claire!
Je rentre dans le café, un peu ailleurs, réfléchissant déjà à l'organisation de ma journée. Grave erreur qu'est le manque de concentration, car à peine ai-je franchi la porte que je perds l'équilibre et manque de tomber. J'essaye de faire volt face mais mes joues rouges pivoine trahissent ma fausse nonchalance.
D'un pas que je veux assuré, je me reprends et m'avance jusqu'au comptoir, mais là, je trébuche, ENCORE et fait tomber un présentoir rempli de petit flyer qui vole dans tous les sens. Je m'excuse et me baisse instinctivement pour ramasser. Le serveur qui connait mes habitudes, m'a gentiment déjà servi mon café. Hors, çà, dans la panique du moment, je ne l'ai pas vu. Alors, en déposant tout ce que j'ai fait tomber sur le comptoir, je renverse l'in-té-gra-li-té de mon café! Je tente de le rattraper au vol mais rien à faire, tout coule par terre.
Et comme si ce n'était pas déjà -tellement- suffisant... Je glisse sur le précieux liquide et m'écrase violemment contre le carrelage.
Mortifiée de honte, je me relève d'un coup, et me confond en excuse.
Le serveur, lui, s'inquiète plutôt de mon état, comme les quelques clients présents.
Ils m'écartent tous de la scène de crime et me demandent de m'asseoir.
Ce que je ne fais pas.
J'effectue un mouvement de recul. Je viens vraiment d'enchaîner des maladresses à la Mister Bean pour finir par goûter le sol ?
J'aimerais fondre et n'être plus qu'une flaque.
Ils sont tous très gentils mais je ne peux pas rester là, il faut que je m'échappe de ce moment où ma dignité a pris feu.
Je me confonds à nouveau en excuse, clame que je vais bien et m'enfuis presque.
Alors que j'avance droit devant sans savoir où je vais, la main appuyé à l'endroit où je me suis cogné, j'entends quelqu'un qui court derrière moi pour arriver à ma hauteur. Qui peut bien vouloir finir de m'achever? Une voix masculine m'aborde.
- Mademoiselle, vous êtes sûr que vous allez bien ?
- Je pète la forme ! Merci Monsieur, et bonne journée, répondis-je en accélérant le pas et sans même le regarder.
Ma reponse est expéditive et mon ton n'est pas des plus agréable mais je n'aspire qu'à une chose : m'éloigner le plus loin possible de ce qui vient de se passer ainsi que de toutes les personnes qui étaient présentes et qui m'ont vu me couvrir de honte.
Et alors que je me rends bien compte que la demarche de cet homme est très sympathique, il est une de ces personnes.
Ça a toujours été un problème chez moi : le regard des gens. J'ai conscience que c'est stupide et que cela ne m'apportera jamais rien de bon, mais je n'arrive pas à m'en défaire.
J'ai toujours peur de ce que l'on va dire ou penser de moi. Les jugements positifs me passent par une oreille et ressortent par l'autre, tandis que les critiques négatives reste et m'entaille profondément.
À chaque fois.
Alors que je continue d'accélérer le pas, je sens d'un coup, une faiblesse dans ma démarche.
Ça ne va peut-être pas si bien.
Voyant cela, il s'interpose et se met devant moi pour me forcer à m'arrêter.
Je vois son visage et je le reconnais immédiatement. C'est William Peters.
***
Point de vue : William.
Je me réveille avec un mal de tête carabiné. Je me regarde dans la glace et au vu de mes yeux encore rouge, j'ai, comme souvent, bien trop bu hier. Heureusement que j'ai mes habitudes, pour que ça ne me ruine pas ma journée. Donc, après avoir bu ma mixture secrète, -à la couleur aussi douteuse que la texture-, pour atténuer ma gueule de bois, je décide d'aller boire un café en ville. Des fois ça me prend. Envie d'un peu de normalité. Alors, au hasard, je choisis un café et j'y vais incognito.
J'essaye de me débarrasser de tous les excès de la veille par une douche bien chaude. Une fois sec et plus frai, j'enfile un sweet noir à capuche, évidemment. Je prends ma voiture, la moins voyante, et je pars.
A peine arrivé, je commande mon café, et le déguste comme si c'était la première fois que j'en buvait un. Il est très tôt et il n'y a pas grand monde. L'endroit est agréablement calme, alors quand le petit carillon sonne, cela attire mon attention.
Entre une jeune fille avec de long cheveux châtains et des traits fins. Je n'ai pas le temps de la contempler plus que ça, puisqu'elle manque de chuter, dès les premières secondes de son arrivée. A partir de là, c'est un véritable enchaînement de malchance, qui la mène violemment au sol.
Je me lève d'un coup, comme un reflex.
Elle est vite entourée alors je reste en retrait. Au bout d'à peine quelques minutes, elle part, enfin non, elle s'échappe.
Mes yeux qui ne l'avaient pas lâché depuis son entrée fracassante, suivent son petit corps tremblant prendre la fuite.
L'instant d'après, le propriétaire du café, surgit affolé avec une trousse de secours. Les clients présents lui indiquent qu'elle vient de partir précipitamment.
- Mais elle s'est cognée si violemment !, lance le serveur.
- On ne peut pas la laisser dehors toute seule, si elle perdait connaissance ?, renchérit le patron, réellement inquiet.
Le vielle homme commence à enlever son tablier comme pour partir à sa recherche. Sans vraiment réfléchir, je m'avance promptement.
- C'est bon, restez là, je vais y aller.
De toute façon, papy t'es mignon, mais à l'allure où elle est partie : au mieux, tu la retrouves en 2030, au pire, tu perds une hanche au passage.
- Oh Merci jeune homme.
Un merci que j'accepte volontiers car il est évident que je n'avais pas imaginé commencer ma journée de cette manière. Jouer les héros et me taper un footing matinal pour partir à la poursuite d'une fille qui ne sait pas marcher.
Une fois dans la rue, je ne la vois pas. Je pars dans la direction qu'elle a prise et regarde dans toutes les petites rues adjacentes. Au bout de la troisième, je la trouve enfin.
Putain, elle a marché vite pour un si petit modèle. J'accélère le pas pour arriver à sa hauteur.
- Mademoiselle, vous êtes sûr que vous allez bien ? demandais-je gentiment.
- Je pète la forme ! Merci Monsieur et bonne journée !
Ses mots et son ton me disent clairement "va voir ailleurs si j'y suis, idiot". Pourtant je suis sympa là. Et ce n'est pas toujours le cas, même rarement quand on m'envoie chier. Alors qu'elle se calme la demi-portion.
Pas le temps de monter sur mes grands chevaux qu'elle perd l'équilibre. Je me place devant elle, pour arrêter sa folle course vers nul part, et dépose mes mains sur ses bras pour m'assurer qu'elle ne tombe pas.
Elle lève les yeux et son regard plonge dans le mien... Elle a un si joli visage, d'une douceur que je n'avais jamais vu auparavant.
→→→→→→→
MERCI d'avoir lu.
J'espère que vous avez passé un bon moment avec Amy & William.
Qu'avez vous pensé de leur rencontre fracassante ?
&& Si vous avez aimé,
N'oubliez pas de voter.
&&& Surtout, Prenez soins de Vous.
♡♡♡♡
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