Chapitre 12 : Pas maintenant.
La tension est à son comble. Subitement, je vole. Mes pieds ne touchent plus le sol. Certes, j'ai un coup dans le nez, mais j'en suis sûr, enfin quasiment, je ne sais pas voler.
Je sens des bras qui m'encerclent et me déplacent, comme un vulgaire objet. Plusieurs hommes sont venus nous séparer. Sûrement les vigiles. Ce qui veut dire qu'à cause de mon inattention, notre super soirée va se terminer sur les trottoirs de New York, bien plus tôt que prévu.
Nous sommes toutes les trois réunies, prêtes à recevoir notre sentence. Sauf qu'après quelques minutes, rien ne se passe. Nous sommes toujours à l'intérieur. Les hommes qui nous ont isolés ont disparu.
Je ne comprends rien à ce qui vient de se produire. J'essaye de dénicher des informations en faisant rouler mes yeux autour de nous. Je tombe sur la madame que j'ai offensée et... William. J'aperçois William parler avec l'autre fury. Ils ont l'air de bien se connaître dit donc...
Il finit par nous rejoindre. Je comprends alors que les gros bras qui nous ont séparés sont, en fait, ses garde-corps.
- Alors comme ça, tu jettes des verres au visage des gens.
- Je n'ai jamais fait ça. Quelle... menteuse. Je n'ai pas voulu...
- Ne t'embête pas à te justifier. J'ai vu toute la scène, dit-il d'une voix calme. Seulement, pourquoi verser ton verre par terre ?
- Ça ne te regarde pas.
- Alors, moi, je viens gentiment te porter secours et je n'ai même pas le droit à une petite explication.
- Je ne t'ai jamais rien demandé, mais...
Même s'il m'irrite fortement avec ses grands airs de Superman, je ne peux décemment pas faire preuve d'impolitesse. Alors, je prononce le fameux mot, celui qui va me brûler les cordes vocales.
- Merci.
Un grand sourire, dont je me serais bien passé, étire ses lèvres.
- Tu danses ?, me balance-t-il en me proposant sa main.
- Non, lançai-je comme un réflexe.
- Pour me remercier plus dignement.
- Te remercier plus... ! J'en étais sûr, rien n'est jamais simple avec toi, il y avait forcément une entourloupe quelque part, commençai-je à m'emporter.
- Oh, détends-toi Amy. Aucun piège à l'horizon. Je connais Ludmila, ce n'est pas une tendre. Je t'ai vu en mauvaise posture, alors j'ai simplement voulu t'aider.
- Alors pourquoi tu me demandes de danser en contrepartie, pourquoi un merci n'est apparemment pas suffisant ?
- Tu as raison. Je reprends. Amy, acceptes-tu de danser avec moi ? Juste comme ça, en échange de rien du tout.
- Non, affirmais-je à nouveau.
Je tire les filles pour m'éloigner de lui. Je ne sais pas si c'est la meilleure décision, mais c'est celle qui me semble la plus adaptée. M'éloigner.
C'est quand même dans l'optique de ne pas laisser l'alcool me guider vers lui que j'ai failli me faire tabasser. Ce serait vraiment ironique de finir cette épopée en dansant avec lui.
Je vais rester à bonne distance, ça vaut mieux.
On se retrouve au milieu de la piste de danse. Elle est noire de monde.
- En tout cas, il nous a bien sauvées la mise, déclare Isabelle..
- Je les aurais toutes brisées une par une, se targue Mia et les dix verres qu'elle a bus.
- Alors là, je ne suis pas sûr, elles étaient genre douze et nous trois donc... l'interpelle ma sœur.
- Ça ne veut rien dire !
- Je crois bien que si, au contraire, me marrais-je. Tu n'es pas Jackie Chan, Isabelle c'est pas Bruce Lee et moi, je ne suis pas Jason Statham. Je ne te dis pas qu'on n'aurait pas arraché quelques touffes de cheveux au passage, mais c'est bien tout.
Alors que Mia continue de nous soutenir qu'elle aurait gagné la bagarre, à l'aide de plan tactique super précis, -ce qui est d'ailleurs surprenant, voir même impressionnant, compte tenu de son état d'alcoolisation-, nous passons doucement à autre chose.
Une bonne demi-heure plus tard, alors que nous sommes toujours en train de danser en plein milieu de la piste, une main se glisse doucement dans la mienne et commence à me tirer. Je lève les yeux pour me retrouver face à ceux de William. Je n'entends plus la musique.
Du regard, il me demande la permission de continuer son action. Ma raison me dit de lâcher sa main, mais ses yeux m'agrippent, me transpercent. Je n'y décèle aucune perfidie. Je le sens en ce moment aussi perdu que moi. Une vulnérabilité qui intime à mon corps une avancée lente vers lui. Il me tire alors un peu plus fort et je me retrouve, désormais, totalement contre lui.
Il place une main dans mon dos et laisse l'autre dans la mienne.
Au loin, juste en face de moi, j'aperçois une image déstabilisante. La jeune femme de tout à l'heure, me fixe. C'est presque effrayant. On dirait un hibou vénère.
- La fille... Elle n'arrête pas de nous regarder.
- Et elle n'arrêtera pas tant que tu danses avec moi.
- Oh, je vois... Pourquoi tu ne danses pas avec elle, alors.
- Parce que je n'en ai pas envie.
- Merci encore pour tout à l'heure, réitèrais-je pour changer de sujet.
- Elles étaient douze et vous trois, ce n'était pas loyal.
- Monsieur est un homme de principes, le taquinais-je.
- Je dirais plutôt qu'il y a des choses que j'aime, dit-il en me serrant un peu plus fort contre lui, et d'autres que je n'aime pas. Je suis un mec plutôt simple, tu sais.
Je ne peux m'empêcher de pouffer de rire.
- J'avais remarqué. Tu es l'incarnation de la simplicité. Je crois même que si l'on cherche le mot simplicité dans le dictionnaire, on va y trouver : William Peters.
- Je sens une pointe de sarcasme dans tes mots.
- Une pointe ? Ça ressemblerait plutôt à une bonne grosse épée de chevalier !
Cette fois, c'est lui qui ne peut s'empêcher de laisser échapper un éclat de rire. Mon cœur accélère quand, dans un sourire, il appuie un instant son front contre le mien puis commence doucement à me balancer.
- Je... Je ne sais pas trop danser, confessais-je.
- Je t'ai vu toute la soirée et tu avais l'air de savoir ce que tu faisais.
- Je dois comprendre que tu m'as espionné ?
- Oui.
Oh. D'accord. Ok. Je ne m'y attendais pas. J'étais prête à recevoir un pique comme à notre habitude mais certainement pas une petite affirmation emplie de sincérité. Je ne m'attendais pas non plus à la sensation de chaleur que ce mot provoque en moi.
- Arrête de me regarder comme ça, m'intima t'il.
- Je te regarde comment ?, répondis toujours perturbée.
- Avec envie.
Le revoilà.
- N'importe quoi !
- Tu me veux. Ne le nie pas, c'est une évidence.
- Je te veux ?! Je te rappelle que c'est moi qui t'ai laissé tout seul sur un trottoir. C'est moi qui ai dit non, me défendais-je.
- C'est faux.
- Ce n'est absolument pas faux ! C'est la pure, stricte et unique vérité.
- Tu n'as pas dit non...
- Oh alors, raconte-moi ! Qu'est-ce que j'ai dit ?
- Tu as dit pas maintenant.
- Je n'ai jamais dit ça !
- En tout cas, tu la pensais tellement fort que je l'ai entendu.
- Ah, parce que tu lis dans les pensées à présent, Monsieur le prétentieux ?
- Pas besoin...
Il atténue un peu plus la distance entre nos deux têtes.
- Ton joli visage n'arrête pas de te trahir. Il parle sans même que tu ouvres la bouche... murmura-t-il d'une voix grave.
Nous sommes si près que nos respirations s'entremêlent. Malgré la dangerosité de la situation, je continue à lui faire face.
- Juste une fille, balançais-je sans sommation.
Semblable à un éclair de lucidité qui me traverse encore. Je ne pouvais garder cela pour moi plus longtemps. Il fallait que ces mots sortent. C'était viscéral. Je ne pouvais pas réussir à accepter qu'il y ait un si grand fossé entre ce que je perçois, ce que je ressens et la réalité. J'avais besoin de réponses.
- Quoi ?
- C'est ce que TA bouche a dit à propos de moi, il y a quelques jours.
- Je dis beaucoup de conneries, tu sais.
- J'avais remarqué oui, mais là, tu te confiais à quelqu'un.
- Tim. Tim est particulièrement relou, alors je lui dis souvent ce qu'il veut entendre... Mais apparemment, ce n'est pas ce que toi, tu voulais entendre.
- Je n'ai jamais dit ça, mais c'est assez réducteur et déplaisant d'être qualifié de la sorte.
Il reste muet et abandonne mon regard tout en serrant la mâchoire.
- C'est pour ça que tu étais en colère dans le hall et quand tu es monté dans le bus.
- T'es décidément tout le temps en train de me regarder.
- J'ai déjà répondu à cette affirmation, dit-il en remontant ses yeux.
Ces derniers mots me coupent presque le souffle.
Il monte sa main au niveau de ma tête et la dépose sur ma joue pour y déplacer, délicatement, une mèche de cheveux.
Son regard tombe sur mes lèvres, puis remonte et plonge dans mes yeux.
Dans un dernier élan de dignité, je dévie mon visage et place ma bouche au creux de son oreille.
- Ce n'est toujours pas maintenant, soufflais-je doucement.
Car comment croire en la véracité de ses propos ?
Selon ses propres révélations, il m'a dénigré pour donner à son agent ce qu'il voulait entendre. Qu'est-ce qui me permet d'affirmer qu'il n'est pas simplement en train de faire la même chose avec moi ? Il me dit peut-être ce que je veux entendre pour avoir ce qu'il veut de moi.
Et c'est bien tout le problème avec William. Je ne sais pas. Je ne sais jamais ce qu'il ce passe dans sa tête. Quand il joue, quand il est sérieux. Je n'arrive pas à le cerner.
Je replace mon visage en face du sien. Il arbore un discret sourire qu'il ne cherche pas à camoufler. Je me défais de son étreinte.
- Je dois retrouver les filles.
À part un mouvement de tête pour acquiescer, il ne dit rien. Il n'essaye même pas de me retenir. Il a l'air d'accepter ma décision.
Je le quitte en me déplaçant difficilement à travers la foule. Perdues dans mes pensés, j'avance mitigé.
J'ai légèrement dérapé en dansant et en lui avouant que ses mots m'avaient touché, alors qu'à la base, je ne voulais faire ni l'un ni l'autre.
Mais j'ai aussi un peu avancé sur le cas William et surtout, je n'ai pas fléchi malgré l'envie enivrante de me laisser aller à lui.
Je ne sais pas ce que la suite me réserve, mais j'ai la désagréable sensation que la simplicité ne sera pas au rendez-vous.
J'arrive à rejoindre les filles. Elle tente d'avoir l'air normal, comme si elle n'avait pas du tout espionné toute la scène. Elles ne sont absolument pas crédibles.
Isabelle s'approche de moi, pour me gratifier d'un petit câlin, comprenant les émotions contradictoires qui m'habitent.
Elles sont crevées, moi aussi, alors, nous décidons de rentrer.
- Aller vient ma poupée, dit Mia en plaçant son bras autour de mon cou.
Nous nous dirigeons vers la sortie et rentrons paisiblement.
Point de vue : William.
Je me dirige vers mon groupe d'amis.
- Tu vois les trois filles là-bas, dis-je en arrivant à hauteur d'un de mes gardes du corps.
- Oui monsieur.
- Assure-toi qu'elles rentrent bien. Je te paierai le double.
- Avec plaisir, Monsieur.
Je m'affale sur une banquette. Une voix féminine me sort de mes pensées.
- Oh ta petite prude t'a laissé sur le carreau.
- Ludmila...
- La seule et l'unique.
- Unique ? Si je devais te décrire, personne ne ferait la différence entre toi et 80 % des filles de ce club.
- Je te conseillerai d'être gentil, William. Si tu veux t'envoyer en l'air ce soir !
- Je ne suis pas d'humeur Ludmila.
Visiblement remontée, elle tourne les talons en marmonnant des trucs. Elle s'avance vers un mec et l'embrasse à pleine bouche. Je ne sais pas ce qu'elle essaye de faire, mais c'est simplement gênant. Elle est si... fade.
Je détourne le regard d'ennui. Et là, sans que je m'y attende, une question s'insinue en plein dans mon crâne. Et si... Si elle avait cédé. Que se serait-il passé après ? Ça a beau tourner dans ma tête, rien ne vient. Même pas l'ombre du début d'une réponse. La seule chose que je sais, c'est que je ne sais pas. Je n'en ai aucune idée. Aucune foutre idée.
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MERCI.
& Take care of You 💕
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