Chapitre 31
PDV Zoé
Le paysage défile à toute vitesse, alors que je m'efforce de ne pas regarder le compteur de vitesse, qui doit afficher un nombre largement supérieur à la vitesse autorisée. J'ai finalement décidé de me rendre au centre où se trouve ma mère, après deux jours de réflexion.
Nous sommes donc en route, pour environ une heure. Scott reste silencieux, comme souvent, mais le silence ne me dérange pas. Au contraire, il m'aide à penser. J'essaye de ne pas trop imaginer comment peut être ma mère. Je ne veux pas avoir une désillusion en arrivant. J'ai décidé de ne pas emmener Innaya. Je veux d'abord être sûre de l'état de notre génitrice avant de prendre le risque de l'emmener dans un endroit pareil. Ce n'est pas franchement un lieu pour les petites filles.
Je stresse, je suis obligée de l'avouer. Et si au final elle était toujours la même loque qu'il y a quelque temps ? Si ses mots n'étaient pas vraiment les siens ? Et puis, je ne sais pas comment me comporter... la serrer dans mes bras ? Je ne m'en sens pas vraiment capable. Jouer la fille aimante n'est pas dans mes cordes. Ce n'est pas que je n'aime pas ma mère, évidemment. Mais après tout ce que j'ai dû traverser à cause d'elle, je suppose qu'il va falloir du temps pour que nous retrouvions une relation mère/fille fusionnelle. Si nous la retrouvons un jour.
Au fur et à mesure de mes pensées, le centre se dessine à l'horizon. Je reconnais ce lieu que je n'ai vu que sur des photos. Au moins, je peux voir qu'elles sont fidèles à la réalité. Le bâtiment en bois, entouré de verdure, est tout ce qu'il y a de plus accueillant. Un cadre idyllique pour des personnes ayant besoin de reprendre pied dans la réalité. Scott gare la voiture et tourne la tête vers moi. Je sais qu'il va me demander si je souhaite qu'il m'accompagne.
- Oui. Et non. Enfin, je veux dire, à l'intérieur oui, mais je ne pense pas que tu ai le droit de venir à l'entretien. Et puis c'est sûrement inconvenant. Enfin, pas que tu sois...
Ses lèvres se plaquent sur les miennes pour me faire taire. Le baiser est rapide, mais il me surprend suffisamment pour que je ferme ma bouche.
- J'ai compris. Calme-toi. Respire.
Je me rends compte que ma diarrhée verbale n'est que le reflet de l'angoisse qui m'habite. J'angoisse de voir ma mère, je suppose que peu de gens peuvent dire cela.
Je fais comme il me dit et je me calme, en plantant mon regard dans le sien. Je me raccroche à lui pour empêcher toutes mes pensées de m'assaillir. Quand je me sens prête à y aller, je dépose un chaste baiser sur ses lèvres avant de quitter la voiture. Il me suit jusqu'à l'accueil, où je regarde la réceptionniste sans oser l'interpeller. Celle-ci, dos à nous, est en train de fouiller dans des dossiers.
J'en profite pour jeter un œil au hall. Des personnes marchent ici et là, sans pour autant porter de blouses d'hôpital. Je suis rassurée de voir que les patients peuvent garder leurs vêtements. Au moins, ils ont leurs repères, et ne se considèrent pas comme malades, bien que l'alcoolisme et la toxicomanie en soient. Cela aide sûrement grandement leur évolution.
- Oh, je suis désolé ! J'espère que vous n'attendez pas depuis longtemps !
Je lui souris du mieux que je peux avant de la rassurer et de lui indiquer la raison de ma présence.
- Pas de soucis, votre mère vous attend. Par contre, je suis désolé, je crains que votre petit-ami ne puisse pas entrer, le médecin n'a autorisé que la famille.
Comme je m'en doutais, Scott va devoir rester ici, même si je jubile intérieurement qu'elle l'ai appelé « Mon petit ami ». On ressemble donc à un couple, et j'apprécie fortement cette idée. L'infirmière appelle le médecin de ma mère pour annoncer mon arrivée tandis que je me tourne vers Scott. Il m'annonce qu'il m'attend dehors, et dépose un baiser sur mon front. Je sens mes joues rosir quand j'aperçois le sourire de l'infirmière d'accueil qui nous regarde.
Il s'éloigne tandis que je signe les papiers nécessaires et un médecin s'approche ensuite de moi.
- Bonjour Mademoiselle Martins, je suis le Docteur Noore.
Je lui sers la main qu'il me tends et le suis à travers les couloirs, pendant qu'il m'explique les progrès de ma mère.
- Nous sommes très agréablement surpris de votre mère. Elle a tout de suite bien répondu à la thérapie. Elle parle énormément avec son psychiatre, ce qui l'aide beaucoup. Elle s'est mise au sport et a très vite su se trouver une place parmi les autres pensionnaires. Elle est très appréciée.
Ça ne m'étonne pas en un sens. Si elle est redevenue elle-même, se faire beaucoup d'ami est une de ses qualités. Elle a toujours su attirer les gens autour d'elle.
Nous nous arrêtons devant une porte.
- Il est rare que nous accordions des visites aussi tôt, mais vu ses progrès, nous n'avions aucune raison de refuser. Nous sommes arrivé dans une des salles de rencontre. Sachez que la psychiatre de votre mère ainsi que des infirmiers sont présents dans la pièce au moindre soucis.
Je le remercie et il s'éloigne, pendant que je fixe la porte sans oser rentrer. Je finis par prendre mon courage à deux mains et l'ouvre. Je me retrouve dans une grande pièce remplie de tables, dont certaines occupées par d'autres patients et leurs proches. Je cherche ma mère des yeux, avant de la voir un peu plus loin. Je m'avance doucement vers elle et elle se lève, remettant ses vêtements en place, comme si elle se souciait de ce que j'allais penser de sa tenue.
Elle semble avoir vieillit. C'est comme si elle avait prit 10 ans. Il faut croire que les addictions ne font pas bon ménage. J'arrive à sa hauteur, et je vois qu'elle ne sait pas comment agir. Elle hésite à me prendre dans ses bras, mais après un coup d'œil à une femme dans le coin de la pièce, elle se retient. Je comprends donc qu'il s'agit de la psychiatre, et je la remercie intérieurement.
- Bonjour Maman.
Je suis surprise que ma voix ne tremble pas. Je comprends donc qu'en réalité, je me faisais du soucis pour rien. Parler avec elle devrait être plus facile que ce que je ne m'imaginais.
- Bonjour ma puce. Comme tu es belle. Elle se tourne vers sa psychiatre. Ne vous avais-je pas dit qu'elle était magnifique ?
Je me sens rougir et je finis par m'asseoir tandis que ma mère fait de même. Elle joue avec ses doigts, comme si elle ne savait pas quoi dire. Pourtant je ne dis rien pour l'aider, car je pense que c'est à elle de le faire. Elle se lance après quelques minutes, d'une voix timide.
- Je suis contente que tu sois là. J'avais peur que tu ne veuilles pas me voir... Tu sais, je pensais chacun des mots de la lettre. Je l'ai réécrite au moins mille fois. Je suis désolé.
Elle relève les yeux et je vois alors la sincérité dans son regard. Elle s'en veut. Elle s'en veut terriblement. Et le fait de savoir cela me rends heureuse. Je suis peut-être une fille affreuse, mais j'aime le fait qu'elle se rende compte de ses erreurs, et qu'elle ne reste pas insensible.
- Je le vois.
Elle sourit, comme si je lui faisais un cadeau. Pourtant je n'ai pas dit que je la pardonnais. Mais le fait de savoir que je ressens sa culpabilité semble lui faire du bien. Elle devait avoir peur que je ne la crois pas.
Je lui fais ensuite comprendre que je n'ai pas envie de reparler du passé. Cela ne nous fera pas avancer, alors autant nous tourner vers l'avenir.
Elle se déride un peu et parle avec plus d'entrain.
- Comment va ta sœur ?
- Très bien. Elle adore Florence. Elles font beaucoup d'activités, et elle l'emmène au centre d'aide toutes les semaines pour qu'elle joue avec des enfants souffrant du même trouble.
- Elle doit avoir grandit, je veux dire, depuis l'époque où j'étais encore en état...
Je vois la culpabilité revenir et je n'ai pas envie qu'elle vienne compromettre cet échange, alors j'ouvre mon sac.
- Tiens, j'ai amené une photo de nous, elle date d'il y a quelques jours. Je me suis dit que peut-être tu en voudrais une, pour décorer ta chambre.
Une sourire immense apparaît sur son visage et une immense gratitude se lit dans ses yeux. Elle regarde la photo et relève la tête vers moi.
- Vous êtes si belle. Merci.
Je hoche seulement la tête, contente d'avoir décidé de la prendre. J'ai beaucoup hésité avant de la mettre dans mon sac.
- Et toi ma puce, comment ça va ?
Je réfléchis un instant à quoi lui répondre.
- Bien aussi. Comme je disais, Florence est super, et j'ai pu retrouver ma vie d'avant.
Je la vois baisser le regard, bien consciente que si je l'avais perdue, c'est de sa faute. Je décide d'enchaîner, afin de lui faire penser à autre chose.
- J'ai repris la danse.
Elle me regarde, des étoiles pleins les yeux.
- C'est tellement merveilleux ma puce. Je suis contente pour toi.
Nous discutons encore un bon moment avant qu'il ne soit l'heure de partir.
Même si j'ai trouvé ma mère bien, je sais que lui pardonner ne sera pas aussi facile. Il faudra plus qu'une entrevue pour en arriver là. Quand je me lève pour partir, elle m'attrape la main. Je la regarde et attends d'entendre ce qu'elle veut me dire.
- Je te promets de tout faire pour redevenir comme avant. Je te prouverais que je peux changer.
Je lui fais un sourire sincère, le premier depuis que je suis ici, et je vois que ce geste la touche.
- A bientôt maman.
Quand je m'éloigne, je sens sa joie jusqu'au fond de moi. Je viens indirectement de lui dire que je reviendrais.
Et c'est ce que je fais. Une fois par semaine, nous faisons la route pour que je la rejoigne. Chaque fois, c'est un peu plus facile, chaque fois, c'est avec un peu plus d'entrain. Si elle était déjà bien la première fois où je l'ai vu, elle s'améliore tout de même de semaine en semaine. Si bien qu'après trois nouvelles rencontres, je décide qu'elle est suffisamment bien pour que je lui emmène Inna. Cependant, je ne l'ai pas mise au courant, afin de lui réserver la surprise.
Cette dernière est en train de plancher sur les finitions du dessin de retrouvailles, tandis que je me prépare dans ma chambre. La porte s'ouvre et Scott s'adosse à la chambranle de la porte, me regardant à travers le miroir.
- Qu'admires-tu ainsi ?
- Les formes délicieuses que te font ce jean.
J'attrape un coussin sur mon lit et lui envoie, mais il l'esquive.
- Pervers.
Il s'approche de moi et pose ses mains sur mes hanches.
- C'est ta faute.
Sa tête plonge dans mon cou où il dépose des baisers mouillées. Je me laisse faire, savourant le moment. Je penche la tête, lui laissant un plus grand champs d'action. Je retiens un gémissement et je sens la chaleur monter dans mon corps.
Il me retourne, et ses mains descendent sur mes fesses, me collant à lui. Il ne me laisse pas protester, ce que j'aurai fait juste pour dire, et il m'embrasse langoureusement.
Ses mains malaxent mon postérieur et cette fois-ci, mon gémissement est étouffé par sa bouche.
Nous nous séparons d'un coup, en entendant Inna nous appeler. La seconde d'après, elle est dans la pièce.
- J'ai fini, on y va ? Bah, pourquoi vous êtes essoufflé, vous avez fait du sport ?
Je sens mes joues rougir quand Scott lui répond.
- En quelques sortes.
Il sort de la pièce en me faisant un clin d'œil.
- On y va petit monstre.
Elle le suit en lui criant qu'elle n'est pas un monstre. J'attrape mon sac et descends à mon tour.
Tout le trajet, Inna ne se tait pas une seconde, et je dois m'avouer épatée par le sang froid de Scott.
Il finit par se garer et Inna me rejoint à l'extérieur de sa voiture.
- Pourquoi Scott il vient pas ?
- Ce n'est pas sa maman.
- Mais c'est ton amoureux.
Je décide de ne pas lui répondre et change de sujet.
- Tu as bien pris ton dessin ?
- Oui, il est là, regarde !
Elle me montre la feuille et nous rentrons. Après les papiers habituels, nous arrivons devant la salle. Je m'avance, Inna derrière moi, ma mère ne la voit donc pas.
Quand nous sommes suffisamment proches, je m'arrête et m'écarte, lui laissant voir qui se cache derrière moi.
Inna court vers ma mère et lui saute dans les bras, tandis que j'observe cette dernière retenir ses larmes.
Nous nous installons à table et elles discutent joyeusement. Ma mère nous annonce alors qu'elle a présent l'autorisation de quitter le centre pour des courtes durées, accompagnée d'une infirmière. Je réfléchis un instant, pesant le pour et le contre, avant de lui faire une proposition.
- Dans quelques mois... je participe au spectacle de mon école de danse. Tu pourrais peut-être venir.
Cette fois-ci, une larme coule sur sa joue, et un grand sourire apparaît sur son visage. Elle hoche vigoureusement la tête.
Ça peut paraître loin, mais son médecin m'a annoncé qu'il va tout de même falloir du temps avant qu'elle ne sorte définitivement. Il est tout à fait possible qu'elle sorte avant le spectacle, mais si ce n'est pas le cas, elle aura toujours la possibilité de venir, au moins.
- Bien sûr, j'adorerais.
Inna choisit ce moment pour lui offrir son œuvre, pensant que le voir ferait stopper les larmes de notre mère. Elle ne fait pas la différence entre des larmes de joie et de tristesse.
- Il est magnifique ma chérie ! Je l'accrocherais dans ma chambre.
- Mais maman, pourquoi c'est ici ta chambre ? Vous revenez quand à la maison avec papa ?
Ma mère baisse la tête et elle se ferme complètement. La psy remarque ce changement d'état et l'emmène un peu plus loin dans la pièce pour lui parler. En la voyant ainsi, je comprends que la guérison va être longue, comme l'avait prédit le médecin. Elle va peut-être mieux du côté des addictions, mais elle souffre encore de dépression. Quelque chose qui pourrait la faire retomber si elle n'est pas correctement suivie.
Elle revient à table mais l'on voit bien qu'elle est différente. Ne voulant pas qu'Inna ne le remarque et en parle ouvertement, ou bien se sente coupable, je décide qu'il est temps de rentrer. Elle est un peu déçue de partir mais je lui promets de revenir voir notre mère bientôt. En partant, je fais quelque chose que je refusais jusqu'à maintenant. Mais en voyant sa douleur intérieure, je ne résiste pas.
Je prends ma mère dans mes bras.
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J'ai pas grand chose à dire donc euh, à dimanche ! x)
Kiss :*
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