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D'habitude, j'aime les longs silences. Je trouve ceux-ci apaisants, reposants surtout.

Sauf que celui-ci me met mal à l'aise, fait bouillir mon sang, me tord le ventre.
Ce silence n'a rien de bon, bien au contraire.
Déjà, il est entrecoupé de sanglots, de soupirs, de regards en biais.
Aucun d'entre eux ne prend la parole, tous observent leurs mains, leurs pieds, ou leur téléphone.

J'ai du mal à comprendre comment cette famille a pu en arriver là. Quand j'ai eu l'accident, ma mère et ma sœur ont été d'un soutien sans faille. Elles ont été ma force, alors  que notre famille venait de perdre le pilier qu'était mon père.

Aucun reproche, juste de la compassion, du réconfort aussi.

Dans la famille de Hope, ils ne cessent de s'envoyer des piques. C'est à celui qui aura fait la plus crapuleuse qui gagnera. Ils ne s'écoutent pas non plus.
Quatre têtes de mules, voilà ce que j'ai devant moi.

Et ça me gonfle. 

Parce que je voudrais que ma Hope se sente mieux, qu'elle arrête ses foutus antidépresseurs, qu'elle marche la tête haute, qu'elle n'ait plus peur, qu'elle soit fière de la nana qu'elle est.

—Bon, on a assez entendu les mouches voler, dis-je fermement. Lequel prend la parole en premier ?

Ils se regardent tous mais leurs lèvres restent soudées. Je soupire, exaspérés.

—Très bien, je vais commencer. On ne m'interrompt pas, clair ?

Hope pose sa main sur ma cuisse et j'emmêle mes doigts aux siens.

—J'ai tué une fille il y a quatre ans, ma petite-amie précisément.

La famille d'Hope écarquille les yeux tellement fort que si je n'en avais pas ras le cul d'eux, ce serait risible.

—Elle baisait avec mon père, j'ai pété un câble et je l'ai embarqué dans ma bagnole. Ivre mort. Je me suis craché, elle a été tuée sur le coup.
Je déglutis, me force à continuer.

—Ma mère... Et ma sœur... Ont été mon soutien. Elles ont été là pour comprendre ce qu'il n'y avait pas à comprendre, justement. Elles ont été là pour m'épauler, pour me laisser hurler, pleurer, frapper. La seule chose qu'elles m'ont interdit a été l'autodestruction.
Ce que je vois moi... C'est que votre fils a vécu de terribles choses, vos filles ont été témoins de ces horreurs, Hope a tué le pédophile de votre fils. Au lieu de... De vous apitoyer sur votre triste sort... Au lieu de fuir la réalité qui est la vôtre... Au lieu d'haïr votre fille, de lui faire mal en agissant comme ça, vous devriez vous rappelez le courage qu'elle a eu de faire ça.

—Je n'ai jamais voulu d'enfant, sanglote la mère. Mais je les ai eus, je les élevés.

—Je sais, acquiescé-je.

—Je n'ai peut-être pas été la mère idéale, mais vous...

—Maman, la coupe Nora. Tu ne voyais jamais rien. Dès que Jonathan ouvrait la bouche, t'avais les yeux en cœur ! Il y avait des signes flagrants quand même !

—Non, bien sûr que non, se défend la mère.

—Mais si, grogne Nora. Baptiste ne mangeait presque plus, il fuyait la maison dès que possible, il ramenait de mauvaises notes. Sérieux ?

—Vous pouvez arrêter de parler de moi comme si je n'étais pas là, soupire Baptiste. Hope j'ai compris, t'as signé ce putain de papier parce que tu n'avais pas le choix. Maman, t'as toujours été aveugle, dès qu'un mec avait un peu de pognon, nous on existait plus et Nora, je sais que t'as voulu me défendre, toi aussi. Mais je n'y arrive pas. Vous voir... Vous voir tous me rappelle ce que j'ai vécu. Et c'est trop dur. Je suis fâché pour certaines choses, tristes pour d'autres. Mais je veux que vous sortiez de ma vie pour pouvoir me reconstruire.

J'ai besoin d'être loin de vous. Je ne suis pas seul, j'ai une copine, des amis aussi.

Baptiste se lève et s'accroupit devant sa sœur.

—Merci, Hope. Merci mais tu comprendras que mon rejet n'est que pour notre bien à tous.

Elle hoche la tête, se jette dans les bras de son frère. Ses sanglots me transpercent, m'oppriment. Je sais que ce qu'elle vit est compliqué pour elle mais malheureusement, c'est nécessaire pour qu'elle avance.

Ils se lèvent tous, comme si tout était fini, alors qu'ils n'ont même pas vraiment parlé.

—Taylor ? Je peux te parler ?

Je fronce les sourcils alors que Baptiste attend une réponse.

—Oui.
Je me lève, il relâche sa sœur et nous sortons tous les deux de la maison. Au moins les filles seront obligées de communiquer comme ça. 

******

La légère brise qui souffle me fait frissonner. Je regarde le lac, la boule au ventre. Ça faisait longtemps que je n'avais pas remis un pied ici, par peur des souvenirs heureux que j'y ai avec Steph. Le soleil est haut dans le ciel et nous avançons sous sa chaleur écrasante.

Baptiste traine les pieds dans les hautes herbes, les mains fourrées dans les poches de son gros pull.

Rien que de le regarder me donne super chaud. Je porte ma main en visière sur mon front, regarde le banc de l'autre côté du lac.

—On se met dans l'herbe ou tu veux aller jusqu'au banc ? demandé-je.

—Ici, ça me va.

Il s'assied et je m'installe à côté de lui. 

Je la revois encore dans son bikini bleu pâle, à courir pour se jeter dans l'eau. Je lui sautais dessus, la soulevais pour encore mieux la jeter dans l'eau et l'embrasser. Elle était tout ce dont je rêvais, tout ce dont je voulais. Elle était elle, tout simplement.

—Hum...
Le raclement de gorge de Baptiste me sort de mon passé, me ramène à l'instant présent et je fronce les sourcils.

—Tu voulais me dire quoi ?

—Je voulais te demander de ne rien dire. Je sais que tu veux tout étaler pour Hope, pour qu'on reconnaisse son geste mais je n'ai pas envie de relancer l'affaire, moi.
Je soupire, ramène mes jambes près de mon torse et joins mes bras autour de mes genoux.

—Pourquoi ? Enfin, je sais bien que ce n'est pas facile pour toi, c'est plus qu'évident même mais... Je ne sais pas toi, t'aimerais pas être reconnu comme victime de cette ordure ?

Baptiste enlève sa capuche et révèle des cheveux noirs, rasés. Il ressemble vachement à ses soeurs. 
—Non, qu'est-ce que ça changerait ? dit-il en haussant les épaules. Justement, je refais ma vie dans la ville d'à côté, ceux que j'aime savent ce qu'il est arrivé et je ne me sens pas capable de subir les regards ou la pitié d'inconnus.

—Mais Hope...
—Mais Hope est bien plus forte que tu ne le penses, me coupe-t-il. Elle a tué pour moi alors que je lui disais de laisser tomber. Ma sœur est toujours debout après ce qu'il lui est arrivé, n'est-ce pas une preuve de son courage ?

—Si, avoué-je. Mais je voudrais qu'elle soit fière d'elle, de ce qu'elle est. Je voudrais que ta sœur soit heureuse.

—Tu l'aimes vraiment, hein ? me demande-t-il en souriant.

Un sourire étire mes lèvres quand je pense à Hope. Ouais je l'aime, trop même. Elle donne un nouveau sens à ma vie, y insuffle quelque-chose de neuf, de frais, de bon, d'addictif.

—Ouais, je l'aime.

—Et il n'y a qu'à la voir pour sentir que c'est réciproque. Je pense vraiment que ce n'est pas en rouvrant tout ça aux yeux de tous qu'elle sera épanouie, tu sais. Il n'y a que toi qui peut la rendre plus forte encore, lui donner confiance en elle et la rendre heureuse.

—Mouais, soufflé-je.
—Elle en pense quoi, elle ?

—Comme toi... Elle flippe.

—Ne le fais pas alors. On est tous les deux les principaux concernés et aucun d'entre nous ne souhaite ça.

Il a raison, je le sais mais ça me fait chier. Ça me fait chier pour Hope que tout s'arrête de cette manière. Elle mérite tellement mieux. 

—D'accord mais à une seule condition, sifflé-je entre mes mâchoires crispées. Ne la laisse pas tomber. Envoie-lui de temps à autre des news. Elle souffre de ne plus te voir, je le sais.

Baptiste me tend son poing et je tape le mien dedans en guise d'accord. 

***
Rien à voir 😂😂😂 mais je voulais faire plaisir à la bande de cochonnes qui me suit 😂😂😂

J'ai kidnappé Tay et son anaconda 😱😱😱🐍🐍🐍🐍

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