- Alors cette potion, ça vient ?

- Mais ? Je vous en prie !

Harry croisa ses bras et gronda sourdement. Il poussa soudain un petit couinement de douleur et regarda Miss Maya qui baissait le bras.

- La prochaine fois c'est le chaudron que je vous balance dessus...

Le Gryffondor lorgna sur la cuillère en bois qui gisait à ses pieds. Penaud, il la ramassa et jeta un regard un peu craintif à Rogue qui semblait préférer ne pas intervenir dans la querelle entre sa compagne et son protégé.

- Nous sommes le deux juillet... grommela le Gryffondor. Il fait une chaleur à crever...

- Tondez-vous, répliqua la jeune femme blonde.

- Maya... dit alors Rogue.

Harry eut un sourire victorieux puis Rogue jeta des graines de quelque chose dans le chaudron. Il recula prestement quand une épaisse fumée verte comme de l'algue monta jusqu'au plafond et s'y accrocha comme de la mousse.

- C'est prêt, dit le professeur.

Il saisit une louche et la plongea dans le petit chaudron devant lui. De la taille d'un gros bol à petit-déjeuner, le chaudron était largement suffisant pour les potions qu'ils fabriquaient à tour de bras. Inutile d'en fabriquer pour cent hommes si elle ne fonctionnait pas.

- À mon avis cela devrait être meilleur que la dernière fois... dit Maya. Quoiqu'un peu épais...

Elle jeta un coup d'œil au plafond. La mousse verdâtre pendouillait comme de la gélatine et soudain, un morceau se détacha et s'aplatit sur la table. Les deux sorciers se protégèrent de leurs bras et Miss Maya gémit :

- Ma robe qui sort du nettoyage...

- Je vous paierais un autre nettoyage, soupira Rogue en regardant les dégâts sur sa propre robe de sorcier. Aller Potter, avalez-ça que nous allions nous changer et dîner...

Harry prit le gobelet de métal entre ses griffes et approcha son long museau du liquide.

- Yeurk ! s'exclama-t-il.

- Silence, dit Maya. Buvez !

Harry lui jeta un regard flamboyant puis il renversa sa tête en arrière, ouvrit la gueule et vida l'épais liquide dans sa gorge. Il regarda ensuite les deux sorciers, attendit une seconde en regardant autour de lui et haussa les épaules.

- Raté, fit-il.

- Flûte ! dit Miss Maya. J'étais certaine que celle-ci allait fonctionner...

De dépit elle ferma le livre avec tant de force qu'il sursauta et bouscula des fioles. Rogue lui prit le poignet.

- Nous continuerons demain... Allons nous changer... À ce soir Potter.

- Ce soir... marmonna le brun.

Les deux sorciers s'en allèrent et Harry tira la langue, comme si cela suffirait à chasser l'atroce goût de chou pourri. Il bailla soudain et, la bouche sèche, avisa une carafe d'eau et un verre. Il s'en servit un et le siffla d'une traite. La seconde suivante le verre se brisait sur le sol en milliers de petits éclats brillants et un bruit sourd secouait la pièce...

- Professeur Rogue !

Rogue et Maya pivotèrent pour voir approcher le Professeur McGonagall.

- Oui, Minerva ?

- Où filez-vous ainsi tous les deux ?

- Nous changer, dit Maya en montrant sa robe rouge maculée de vert.

- Hum, dit la vieille Directrice. Une potion qui a explosé ?

- Non, pas cette fois-ci, juste une fumée un peu... collante, dit Rogue.

McGonagall hocha la tête.

- Où est Potter ?

- Il était encore dans le labo quand nous sommes partis mais il doit aller chez Monsieur Weasley ce soir... Il est peut-être déjà parti d'ailleurs.

- D'accord. Dépêchez-vous, le gâteau d'anniversaire ne va pas attendre cent ans.

- Oui madame, dit Maya. Allez, venez vite sinon le professeur McGonagall va nous dévisser la tête.

Rogue grommela.

- J'aurais préféré passer la soirée chez moi...

- Vous lui devez bien ça, elle vous a remplacé au pied levé lundi, dit Maya, les sourcils froncés. C'est votre « gage ».

Nouveau grommellement du professeur. Maya lui sourit puis elle le laissa pour aller chercher une robe à la Lingerie, juste pour le dîner. Elle ferait laver sa robe quand elle rentrera sur le Chemin de Traverse.

Tout en se changeant, soigneusement enfermée dans la Lingerie, debout au milieu d'une centaine de grands sacs en tissu blanc remplis de robes de sorciers noires, Miss Maya se mit à réfléchir. Depuis lundi soir, précisément, entre elle et Rogue tout s'était brusquement accéléré. Une fois remise de son incursion dans l'esprit torturé de son compagnon, elle avait quitté Poudlard, sur les coups de dix-neuf heures, et était rentrée chez elle, dans son appartement au-dessus de sa Librairie, mais le silence pesant de l'endroit l'avait mise mal à l'aise. Elle s'y était vite réhabituée mais quelque chose lui manquait. La nuit qui avait suivi, elle l'avait coupée en plein milieu, réveillée par un cauchemar où Voldemort faisait irruption dans sa chambre pour la tabasser – n'importe quoi... –, malheureusement, elle n'avait jamais pu se rendormir...

Soupirant, la jeune femme boutonna les quatre perles qui ornaient le col de la robe prune et argent qu'elle s'était dégottée. Le nom « Hermeline Nuage » était inscrit sur le col mais Maya connaissait le professeur Nuage, elles discutaient souvent ensemble et donc il ne devrait pas y avoir de problèmes. Au pire elle se proposerait de la lui nettoyer.

Quittant la Lingerie, Maya tomba nez à nez avec le professeur McGonagall.

- Oh professeur ! dit-elle en souriant.

- Ha, Miss Maya, je vous cherchais justement. Hum, la robe d'Hermeline vous va très bien.

- Merci... Vous me cherchiez ?

- Oui, je viens d'avoir Monsieur Weasley par cheminée... Il m'a demandé si nous avions séquestré Potter...

- Mais je croyais qu'il était déjà là-bas... s'étonna Maya.

- Moi de même. Où est Severus ?

- Chez lui j'imagine...

Un fantôme passa soudain en trombe au bout du couloir puis revint sur ses pas en braillant :

- Madame la Directrice ! Madame la Directrice !

- Que se passe-t-il, Moine Gras ? demanda la vieille sorcière.

- Madame, c'est... c'est...

- Calmez-vous, dit sèchement la vielle sorcière, les sourcils froncés.

- Madame c'est... C'est Monsieur Potter...

- Monsieur Potter ? Qu'est-ce qu'il a encore fait ?

- Rien, il est à l'Infirmerie...

- A l'Inf... Mais pourquoi donc ? demanda Maya, surprise.

- Il... Le Baron Sanglant l'a trouvé dans un labo de potions, il gisait sur le sol... inconscient...

Maya et McGonagall se regardèrent d'un air effaré.

- Inconscient ? Mais...

- Un labo de potions ? dit McGonagall. Dans lequel étiez-vous avec Severus et Potter tout à l'heure ? demanda-t-elle à Maya.

- Le labo qui est juste sous le bureau de Severus...

- C'est celui-ci ! couina le Moine Gras.

Sa soutane tressauta avec son ventre puis soudain il fit volte-face et se jeta dans un mur. Les deux femmes se regardèrent avant de filer d'un pas rapide jusqu'à l'Infirmerie située deux étages plus haut.

Elles y arrivèrent essoufflées, et trouvèrent la pièce bondée de professeurs inquiets. Mrs Pomfresh était penchée au-dessus du corps immense du Gryffondor, recroquevillé sur un lit qui paraissait appartenir à une poupée.

- Poppy ! dit McGonagall sur un ton bref.

- Minerva, répondit l'Infirmière en se retournant. Je ne sais pas ce qu'il a... On dirait qu'il est comme paralysé...

- Est-il conscient ?

- Non. Ses yeux ne réagissent pas à la lumière et j'ai beau tirer sur ses bras, ils reviennent en place comme un ressort...

- Quelle est la dernière potion qu'il a prise, Miss Maya ?

- Une... Une potion de...

- Une potion censée combattre les effets d'un sortilège de Magie Noire, acheva Rogue.

Il interrogea Maya du regard puis dit :

- Il allait parfaitement bien quand nous l'avons quitté tout à l'heure.

- Il était un peu grognon mais comme toujours, dit Maya. Il... Il va mourir ?

- Je ne sais pas, répondit Mrs Pomfresh. À première vue, il a l'air Stupéfixé...

- Vous avez essayé de le ranimer ? demanda Rogue.

- J'ai tout tenté, sauf les potions, mais comme vous avez dit qu'il en avait déjà une dans l'estomac, je préfère attendre.

- Combien de temps ? demanda McGonagall.

- Suffisamment pour que tout le monde aille se coucher, rétorqua l'Infirmière, les sourcils froncés.

La discussion était close et cette phrase invitait tout le monde à regagner ses appartements ou ce qu'il faisait avant l'incident.

- Severus, restez, s'il vous plait, dit Pomfresh comme l'homme entraînait sa compagne vers la porte. Je voudrais que vous me montriez exactement quelle potion vous lui avez donnée.

- Entendu...

- Mais ?

- Rentre chez toi, Maya, dit Rogue en passant au tutoiement intime. Je t'enverrais un hibou demain pour te tenir au courant...

- D'accord...

L'homme l'embrassa sur le front puis McGonagall prit la jeune femme par le coude et la conduisit jusqu'à la cheminée la plus proche. Rogue, lui, suivit Pomfresh dans son bureau et ils s'y bouclèrent pour le reste de la nuit.