Chapitre 30
- Bonjour, Sunshine...
Miss Maya plissa les yeux en levant la tête.
- Que me vaut ce surnom ? demanda-t-elle à l'immense silhouette qui venait d'apparaître dans sa boutique, entre deux étagères, dans un craquement sonore.
- Chaque fois que je vous vois avec vos mèches dorées, j'ai l'impression de regarder le soleil... répondit Harry.
Miss Maya soupira. Elle prit une pile de livres et passa devant Harry pour aller les ranger.
- Comment va le professeur Rogue ? demanda-t-elle.
- Bien, merci pour lui... Pourquoi cette question ?
- Eh bien, samedi soir, quand il m'a raccompagnée, il n'avait pas l'air dans son assiette...
- Oh il est toujours grognon le soir...
- Monsieur Potter... siffla la jeune femme à voix basse. Je vous en prie !
- Bien, bien, je n'ai rien dit.
Accroupi, sa lourde queue balayant le sol, Harry regarda la jeune femme qui envoyait les livres vers les hauteurs des étagères d'un simple mouvement du poignet. Il y eut un silence et Maya envoya son dernier livre vers son emplacement avant de baisser le nez.
- Dites-moi... dit-elle doucement.
- Oui ?
- Est-ce que... Est-ce que vous avez déjà vu les cicatrices du professeur Rogue ?
Harry haussa les épaules.
- Je ne suis que son « animal de compagnie », Maya...
La jeune femme se mordit la lèvre et baissa la tête.
- Cela vous intrigue autant ? demanda Harry.
- Intriguer n'est pas le mot juste, disons que... disons que cela m'ennuie.
- Quoi donc ?
- Aller, je sais très bien pourquoi vous m'avez amadouée... Vous essayez de me caser avec lui... Ais-je tort ?
Harry haussa les sourcils, feignant la surprise. La jeune femme rougit.
- Je crois que ça marche... Bon sang ! s'exclama-t-elle soudain en donnant un coup de pied sur le plancher.
Un client près des parchemins à l'autre bout de la boutique sursauta. Il ne dit rien, fit un signe de tête à Harry... et s'empressa de débarrasser le plancher.
- Vous faites fuir vos clients, signala Harry. Pourquoi vous fâchez-vous ?
- Il y a que je connais le professeur Rogue depuis des années, mais que là je le vois sous un autre angle... Il a terriblement souffert et même s'il le cache très bien, je souffre aussi...
- Vous êtes... Empathe ?
- Pour mon plus grand malheur, soupira la jeune femme en se détournant.
- C'est pour cela que malgré votre phobie des canidés vous ne vous êtes pas enfuie devant moi ?
Maya hocha lentement la tête, presque timidement.
- Oui, j'ai tout de suite sentit que vos émotions n'étaient pas animales mais bien humaines.
- Et pour le professeur ?
- Je crois que je n'ai jamais été aussi malade de ma vie... Il est torturé par ses propres sentiments... L'image de Miss Granger le hante jours et nuits, se mélangeant aux souvenirs d'Azkaban, de la guerre, la douleur de perdre des proches...
La jeune femme porta soudain une main à sa bouche. Harry la prit aussitôt par le bras et la fit asseoir sur un escabeau.
- Calmez-vous... dit-il doucement en lui caressant le bras. Respirez...
Miss Maya souffla alors longuement puis elle déglutit et dit :
- Cela fait... trente ans que je n'ai pas ressenti autant de choses face à quelqu'un...
- Trente ans ? À quoi est due la dernière fois ?
- La mort de mes parents... Tués par des Mangemorts, répondit la jeune femme en baissant les yeux. J'avais dix ans... Nous vivions à Langston, un petit village sorcier près de Glasgow...
- Je ne connais pas... répondit Harry honnêtement.
- Les Mangemorts l'ont rayé de la carte... Il ne restait aucun sorcier, aucune maison après leur passage. Plus rien...
- Mais vous avez survécu...
- Mon frère m'a sauvé la vie.
- Monsieur Barjow ? Le Monsieur Barjow de Barjow&Beurk ?
- Mon frère n'est pas un homme méchant, monsieur Potter... Il avait vingt-deux ans quand les Mangemorts ont tués nos parents. Il m'a cachée dans la cave de la maison et s'est fait passer pour mort auprès du corps de notre mère. Quand les Mangemorts sont partis, après avoir soigneusement mit le feu aux maisons, la nôtre également, il est vite venu me chercher, m'a fourrée sous son bras et a transplané à Londres. Nous n'avons pas quitté la ville depuis toutes ces années...
- C'est terrible... Ce sont les peurs de votre frère que vous avez ressenti alors ? s'horrifia Harry, choqué.
- Non... Du village agonisant tout entier...
- Oh Merlin...
- J'en ai été traumatisée. Je n'ai plus dit un mot pendant des années après ça. Ma voix est revenue le jour où j'ai reçu ma lettre pour Poudlard. Mon frère a alors estimé plus sain de brider mon pouvoir d'Empathie, disant qu'à Poudlard, je serais vite submergée par toutes les émotions des élèves.
- Il a bien fait. Vous avez débridé votre pouvoir depuis ?
Miss Maya hocha la tête.
- Oui, mais en travaillant dans une librairie, je ne craignais rien et mon frère était à deux rues d'ici au moindre besoin. Je n'imaginais pas rencontrer un jour quelqu'un avec autant de douleur en lui...
Harry serra les mâchoires et dit :
- Vous pouvez y remédier, vous savez ?
- J'imagine oui... Mais... Je ne suis pas prête.
- Vous avez tout votre temps, vous le savez. Le professeur Rogue ne s'engagera avec personne tant que je ne serais pas redevenu humain. Chercher un remède et s'occuper d'une compagne seraient trop pour lui et vous n'aimeriez pas avoir à subir ses sautes d'humeur. Cependant, vous êtes libre de venir à Poudlard dès que l'envie vous prend... Il vous apprécie, vous savez ?
- Vraiment ?
- Je ne pense pas qu'il vous l'avouera dès demain, mais prenez patience.
- J'en ai à revendre !
Harry découvrit ses dents et Miss Maya se mit à rire. Si elle avait su qu'un jour un loup humanoïde viendrait dans sa boutique lui demander de rencontrer un homme délaissé par la vie et malheureux, jamais elle n'y aurait cru. Et pourtant !
Harry était content. Il avait fait une bonne action. Transplanant à la maison Malefoy, il allait voir s'il ne pourrait pas en faire une autre...
- Salut...
Le grondement fit frémir Malefoy.
- Tu es tendu, dit Harry, surpris. Tu ne réagis pas d'habitude...
- D'habitude je t'entends transplaner... Comment es-tu venu ?
- J'ai réapparu sur le toit, comme la fenêtre est ouverte... Il n'y a personne dans cette maison ?
- Les enfants sont toujours chez ma mère, Segma a plié bagages et c'est le jour de congé du personnel, récita Malefoy sur un morne.
- Alors nous avons la maison pour nous seuls ? ronronna le Gryffondor.
- Tu débloques ? dit le Serpentard, choqué.
- Je rigolais. Je ne risque pas d'assouvir quoi ce soit à part ma faim dans ce maudit corps.
- Tu me rassures...
- Cela dit ... Mon sous-entendu ne t'a pas vraiment choqué...
Malefoy soupira.
- Segma est partie, dit-il. Le divorce a été accepté une fois que j'ai révélé que Kezra n'était pas ma fille...
Harry ouvrit de grands yeux verts.
- Tu le leur a dit ?
- Il le fallait. Kezra a perdu son héritage mais Rodolphus l'a toujours, je vais donc éviter de les séparer pour le moment. Ils vont rester vivre chez ma mère encore quelques temps.
- En septembre ils iront à Poudlard de toute façon. Kezra aura l'âge ?
- Elle aura onze ans le trois septembre, répondit le blond en soupirant.
Il rassembla des parchemins et Harry s'approcha.
- Des états civils ? demanda-t-il. Tu embauches ?
- Non... Je cherche un mari pour ma fille.
Harry sursauta.
- Quoi ? Déjà !
- Écoute Potter, j'aime cette gamine comme ma propre fille. Je n'ai aucune envie qu'elle s'en aille de la famille parce qu'elle y est obligée. Segma n'est plus sa mère à présent.
- Plus sa mère ? Mais...
- Elle a été bannie de la famille pour avoir aussi longtemps profité de moi et avoir abusé en osant ramener un enfant illégitime sous le toit marital. De plus le Conseil a reconnu s'être trompé en m'obligeant à donner mon nom à cette enfant. J'ai obtenu en dédommagement que Kezra garde le nom de Malefoy, et aussi que l'on me permette de la marier à un pur Malefoy. Voilà pourquoi depuis trois jours, je suis au milieu des parchemins.
- Quel âge ont ces hommes ?
- Ce sont des enfants, ils ont entre dix et treize ans, dit le Serpentard. Aucun d'eux ne vit en Angleterre, il n'y a qu'un seul clan Malefoy par pays. Ici, le mien « règne ». Ces enfants viennent de France, d'Allemagne, de Suisse, d'Italie et d'Amérique.
- Je vois... Et tu as arrêté un choix ? demanda Harry, comprenant qu'il ne pourrait pas aller contre la décision de son ami.
- Pas encore. Ils sont tous aussi bien élevés les uns que les autres, ont tous le titre de Comte, Baron ou je ne sais quoi... Ce sont des premiers de la classe bien entendu, et pas qu'en Magie Noire, toutes les familles Malefoy ne sont pas dedans comme la mienne...
Harry haussa un sourcil. Il soupira alors et croisa les bras.
- Tu sais quoi ? Je crois que j'ai réussi à dégeler le cœur de notre professeur de Potions... dit-il.
Malefoy le regarda de travers.
- Non ? fit-il. Tu as utilisé quoi ? Un burin et un marteau ?
Harry lui tira la langue.
- Elle s'appelle Maya Barjow, elle a une quarantaine d'années environ, répondit-il, amusé.
- Tu la lui as fourrée dans les bras ? Tu es gonflé quand même... Et Hermione ?
- Hermione est mariée, Drago... dit Harry en baissa le nez. Elle et Rogue doivent impérativement rester loin l'un de l'autre pour les dix prochaines années à venir, au moins.
- Tu n'es pas sérieux ?
- Si. Rogue est misérable depuis le départ d'Hermione. Il passe son temps à grogner dès qu'on lui pose une question, il rembarre ses collègues, seule McGonagall arrive à avoir une discussion censée avec lui. Et moi, à l'occasion.
- Quand tu ne lui vrilles pas les nerfs...
Harry haussa brièvement les épaules.
- Je crois que Miss Maya l'apprécie. Elle est Empathe, tu sais ? fit-il.
- C'est une fille Barjow, tu as dit ? Comme Barjow&Beurk ?
- Monsieur Barjow est son grand frère, dit le Gryffondor en hochant la tête. Apparemment, ils s'entendent très bien. Leurs parents ont été tués par des Mangemorts, il y a une trentaine d'années...
- Oh... Je l'ignorais... Peut-être la raison de la singularité de Monsieur Barjow...
Harry ne répondit rien. Maya et son frère étaient plus qu'opposés. Si elle ne lui avait pas dit son nom de famille, jamais il n'aurait cru qu'il était son frère.
- Que fais-tu aujourd'hui ? demanda soudain le brun.
- Rien de spécial et toi ? répondit le Serpentard. Tu veux rester un peu ?
- Pourquoi pas. Ce sera toujours mieux que de traîner mes griffes dans les couloirs de Poudlard...
Malefoy eut un demi-sourire.
- Et bien dans ce cas tu vas m'aider à trouver un fiancé à ma fille.
- Je maintiens qu'elle est trop jeune...
- Nous n'allons pas le lui présenter maintenant, espèce d'idiot, dit le blond, les sourcils froncés. Il est aussi jeune qu'elle je te rappelle. À leur âge, il est exclu de penser au mariage. Non, nous allons sélectionner celui qui nous paraîtra être le meilleur et j'en ferais part à ses parents. Il est hors de question que Kezra quitte la famille Malefoy à sa majorité parce qu'elle n'en est pas une.
- Sa mère est une Malefoy pourtant...
- Sa mère n'est plus rien, Potter, gronda le Serpentard. Elle a été bannie du clan, elle n'a plus ni le droit de porter le nom des Malefoy, ni le droit de demander un quelconque héritage. Si elle avait survécu après moi, elle aurait reçu mon héritage et à sa mort, nos enfants l'auraient reçu, mais comme elle a trahi notre serment de mariage, elle n'aura droit à rien.
- Ton héritage reviendra à Rodolphus à ta mort ?
- Oui, ou à une nouvelle épouse.
- Ou à ton compagnon ? demanda Harry du tac au tac.
Malefoy soupira.
- Potter...
- Quoi ? J'ai le droit d'espérer non ?
- Même s'il se passe à nouveau quelque chose entre toi et moi...
- Ce dont tu ne serais pas contre...
- Jamais tu n'auras le droit de porter mon nom et donc de prétendre à l'héritage, acheva le blond en passant sur le phrase du Gryffondor. Et puis... Tu as suffisamment d'argent comme cela.
Harry se renfrogna et Malefoy ajouta :
- Ah et pour te répondre, non je ne serais pas contre à reprendre quelque chose avec toi mais qu'une fois que tu auras retrouvé ton corps... normal. La fourrure, c'est bien mais en tapis.
Harry tira la langue puis le blond soupira et lui tendit un paquet de parchemins reliés par un cordon argenté.
- Voilà les jeunes garçons de onze à treize ans. Je vais me charger de ceux qui ont entre sept et onze ans. Mets simplement de côté les parchemins des enfants que tu juges potentiellement aptes à entretenir ma fille une fois qu'ils seront adultes. Tout compte, les parents – il y a leur photo sur chaque parchemin –, le nombre de frères et sœurs, si c'est l'aîné ou non...
- Qu'est-ce que cela change que ce soit ou non l'aîné ? demanda Harry, étonné de ce critère.
- Parfois, le fait que le mariage arrangé tombe sur l'aîné de la famille encourage les parents à faire de même pour leurs autres enfants plus jeunes.
- C'est une bonne chose alors ?
- Pas toujours mais en général oui.
Harry secoua la tête.
- Franchement, j'aurais toujours du mal à comprendre votre façon de penser à vous autre les aristos...
Malefoy secoua la tête à son tour, d'un air blasé, puis Harry s'allongea sur le tapis et étala les parchemins autour de lui, se servant de la griffe de son index pour y faire un petit trou afin de marquer sa préférence.
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