CHAPITRE XVI

(version antérieure) 


C'était en mai 1961, c'était une journée banale. 

Du moins, elle semblait banale.

Allan travaillait comme à son habitude dans un magasin de disques. Il était d'ailleurs fan des Beatles. Il pouvait contempler leurs disques des heures et des heures sans rien faire d'autre et écouter leurs musiques tous les jours sans s'en lasser. Lui aussi aurait voulu avoir autant de succès qu'eux, surtout avec les filles. Mais c'était un garçon bien trop distrait, un petit peu tête en l'air aussi. 

«  Allan ! Au lieu de t'extasier devant ce que tu ne seras jamais, tu veux pas aller derrière le comptoir et faire payer les gens ?! cria son patron. »

Il le détestait mais il s'exécutait sans jamais broncher, bien qu'il pensait tout un tas de choses dans sa tête, il ne disait rien, pour ne pas perdre son travail. Il avait arrêté l'école, il séchait sans arrêt les cours, cela avait tendance à agacer sa mère d'ailleurs, mais l'école n'était pas fait pour lui. 

Il passa alors derrière le comptoir en souriant et en chantonnant la chanson qui passait. 

« Dans quelques années, vous ne direz plus ça Frank, fit-il suivi d'un sourire.

— Tu prends tes rêves pour des réalités, gamin. Tu es destiné à être un vendeur de disques et rien d'autre, jusqu'à ta mort tu contempleras le dernier single des Beatles mais jamais, au grand jamais, tu ne deviendras comme eux. Tu n'as même pas d'amis, comment veux-tu monter un boysband ? 

— Pas besoin d'amis pour ça, je n'ai qu'à rassembler des musiciens. »

Frank haussa les sourcils et croisa les bras un léger sourire dessiné sur le visage. Parfois, ça l'amusait de voir son employé rêver un peu trop grand. 

« Et toi, tu seras quoi ? demanda-t-il.

— Le chanteur ! 

— John Lennon ? 

— Et pourquoi pas ? Je lui ressemble un peu, non ?

— Pas du tout. Tu n'as pas son charisme.

— Vous devriez m'entendre chanter ! J'ai une super voix, sauf que je n'en fais profiter personne ... les filles tomberaient toutes folles de moi et je ferais de l'ombre aux autres.

— Mais bien-sûr ! »

Après cela, Frank partit faire ses affaires dans son bureau qui se trouvait dans une petite réserve faisant plus penser à un placard à balais. Allan soupira et appuya ses bras sur le comptoir, il lisait les dernières nouvelles, il aimait se tenir au courant aussi. Il rêvait réellement de devenir célèbre, de pouvoir avoir de l'argent et aider sa mère dans ses dettes depuis la mort de son père. Le petit salaire qu'il avait en étant vendeur de disque ne l'aidait pas vraiment, ce n'était pas assez pour vivre et il dépensait ses sous bien trop rapidement.

Quelqu'un toussota, Allan sursauta et se redressa. Il avait face à lui une magnifique jeune fille, les cheveux bruns, les yeux noisettes parfaitement maquillés d'un trait d'eye-liner et des lèvres bien dessinées peintes en rouge. 

« Excusez-moi... 

— C'est moi qui m'excuse. »

Elle sourit légèrement puis posa les disques qu'elle s'était procurés sur le comptoir. Allan analysa ce qu'elle avait pris. 

« Simon & Garfunkel, pas mal. Les Beatles, j'adhère totalement, leur dernière chanson est la meilleure ! 

— Je suis d'accord, je suis fan de ces deux groupes, je cherchais depuis pas mal de temps leurs albums, je crois que j'ai fait tous les magasins de la ville. 

— Et vous êtes tombée sur le bon, à croire que c'est le destin. »

Tout en lui parlant il passait ses achats à la caisse mais cette fille était ravissante, il n'avait qu'une envie, c'était de lui demander de sortir un jour ou juste de savoir son prénom, rien que son prénom. Était-ce réellement possible de flasher sur une fille sans la connaître ? Apparemment oui... elle semblait en plus de cela, plus vieille que lui mais qu'importe ? Il aimait les femmes plus mûres. 

« C'est possible, le destin nous joue des tours parfois, rétorqua la belle brune.

— Souvent même, mais je crois que celui là, c'est le meilleur. »

Il avait dit ça en la regardant droit dans les yeux, bien entendu elle avait sourit. Il aimait faire du rentre dedans même si ça ne fonctionnait presque jamais. Il avait confiance en lui et ce n'était pas quelqu'un de malheureux, sa bonne humeur touchait tous les gens autour de lui. C'était un atout dont il se servait. Éblouir la journée de quelqu'un, c'était ce qu'il préférait. Voir les clients sortir le sourire aux lèvres était pour lui un cadeau, une récompense pour le boulot qu'il fournissait. Son patron ne le voyait peut-être pas, mais c'était un très bon vendeur. Depuis qu'il travaillait dans ce magasin, les ventes se faisaient de plus en plus fréquentes et certains clients devenaient même fidèles à la boutique. 

Il tendit ensuite le sac à la jolie demoiselle. 

« Ça vous fera 45 dollars. Éditions limités, alors c'est un tout petit peu plus cher. 

— Je ne vous en veux pas, depuis le temps que j'attends de les trouver, cette fois je ne vais pas laisser ces bijoux me passer sous le nez, fit-elle en fouillant dans son sac. 

— Fan de musique ? 

— Vous voulez dire accro ! 

— Vous êtes musicienne ? 

— À mes heures perdues, oui, ça m'arrive. Mais je ne suis pas vraiment douée, j'essaye d'apprendre toute seule, les cours c'est bien trop cher et ennuyeux mais je dois dire que je ne suis pas vraiment autodidacte. »

Elle lui tendit l'argent tout en lui parlant et il l'encaissa, lui rendant la monnaie automatiquement. Il avait tellement l'habitude que le calcule mental était naturel chez lui. Un vrai génie, mais personne ne voyait son potentiel sauf sa mère.

« Je pourrais vous apprendre. »

Au début elle sembla surprise mais son visage se dérida pour laisser place à un magnifique sourire rayonnant. 

« Vous êtes musiciens ? 

— C'est si étrange que ça ?

— Pourquoi ne vendez-vous pas des instruments de musique ? 

— Parce que je préfère la musique que les autres composent. Je peux l'écouter toute la journée, regarder encore et encore les pochettes de vinyles... pour moi ce genre de magasin, c'est une caverne pleine de trésors. 

— Un vrai passionné à ce que je vois. 

— Vous n'imaginez même pas à quel point, un jour moi aussi il y aura ma pochette dans ce magasin et les gens se battront pour avoir la dernière. 

— Vous avez de l'ambition. 

— Oh que oui. Alors, vous acceptez ? Guitare, piano, violon, je suis doué pour tout. »

Elle hésita quelques instants tout en souriant puis finalement, elle accepta. Elle lui donna alors son adresse et lui proposa le soir même.  Allan ne put refuser, il était même aux anges, elle s'appelait Angela, magnifique prénom pour une femme plus que séduisante. Oui, Allan était tombé fou amoureux d'elle. 

La journée fut fabuleuse, une journée vraiment pas banale. Et il n'avait encore rien vu. 

Le soir venu, il prit soin de se parfumer, même s'il n'avait pas vraiment de vêtements très chics, le parfum le rendrait plus attirant peut-être. Sa mère était ravie qu'il ait enfin un rendez-vous, mais on ne pouvait pas vraiment appeler cela un rencart, il allait surtout lui donner des cours. 

« A tout à l'heure maman ! 

— Allan, attends ! »

Ce dernier soupira mais s'arrêta pour se retourner face à sa mère, elle lui sourit et l'embrassa sur la joue.

« Maman... ronchonna-t-il en essuyant la trace de rouge à lèvres qu'elle avait laissé sur sa peau.

— Amuse-toi bien et fais attention à toi. 

— T'en fais pas. 

— Je t'aime.

— Moi aussi, en fait mon argent est dans le tiroir de mes sous-vêtements, je pari qu'il y a assez pour le loyer de ce mois-ci ! fit-il en sortant dehors. 

— T'es un amour, je t'aime plus que tout ! 

— Moi aussi, maman ! »

Il traversa la jolie pelouse fraîchement tondue et avança dans la rue le sourire aux lèvres et une chanson des Beatles en tête. Il marchait même en rythme. Il jeta un regard à sa maison, elle était belle, grande, parfaitement entretenue. À l'extérieur comme à l'intérieur. C'était là où il avait grandi, l'endroit où sa mère voulait résider jusqu'à sa mort et c'était pour cela qu'il faisait tout pour l'aider à la garder. Une grande maison comme ça voulait dire loyer élevé. Malheureusement, sa mère ne gagnait pas assez, alors à deux, ils s'entraidaient. 

Il sonna à la porte de chez Angela, c'était une maison plus petite que la sienne, dans un quartier moins chic, mais ça restait chaleureux et accueillant, peu de temps après, elle vint lui ouvrir. Elle lui fit un grand sourire et l'invita à enter. 

Elle avait enfilé une belle robe noire, moulante et montrant ses formes généreusement proportionnées. Elle était parfaite, c'était le cas de le dire. 

Ils s'installèrent, après avoir discuté un petit peu, sur le banc devant le piano. C'était l'instrument de ses rêves, Angela voulait absolument savoir en jouer à la perfection, c'était son rêve depuis qu'elle était enfant. Allan espérait pouvoir l'aider à le réaliser.

Alors il commença par lui apprendre quelques bases, il lui montra comment déchiffrer une partition, comment positionner ses mains sur les touches du piano, comment battre la mesure... Il lui apprit tout en plusieurs heures, après avoir appris les notions, il lui fit jouer un morceau plutôt facile, lui aussi avait débuté avec ce genre de mélodie. Elle semblait y arriver, elle semblait même aux anges. Il n'aimait pas donner des cours généralement, mais cette fois, ça ne l'avait même pas ennuyé, les heures passaient sans qu'il n'y fasse attention et tant pis s'il ratait son réveil le lendemain. 

« Continuez comme ça, vous y êtes presque. 

— Ne me déconcentrez pas ! s'exclama-t-elle en rigolant. »

Allan sourit à l'entente de son rire cristallin, l'un des plus beaux sons qu'il n'avait jamais entendu, encore mieux que le rock ou le jazz. 

Quand elle finit de jouer son morceau, elle se tourna vers lui, ils étaient côtes-à-côtes, serré l'un contre l'autre, assis sur le même banc. Elle était encore plus belle de près se disait-il. C'était sûrement la plus belle femme qu'il avait rencontré jusque là. 

« C'est génial, je ne pensais pas pouvoir apprendre si vite, tu es un génie Allan. »

Elle le tutoyait à présent, ça lui plaisait.

« J'ai voulu vous rendre service. 

— Je n'ai sûrement jamais rencontré quelqu'un d'aussi gentil que toi. 

— Et moi d'aussi séduisant... Enfin je veux dire... »

Elle rigola ce qui le fit sourire, il n'avait même pas retenu ses paroles. La voir là, face à lui ... Il avait très envie de l'embrasser, de l'enlacer aussi, il la désirait. Il se sentait ridicule d'être tombé amoureux d'une femme aussi vite mais pourtant, il n'y pouvait rien, c'était comme ça.

Alors sans vraiment se retenir, se disant que ce serait peut-être la dernière fois qu'il la verrait, il se rapprocha d'elle. Elle resta immobile, le regardant droit dans les yeux. Hésitant, il fit tout de même le premier pas : il l'embrassa, tendrement et même timidement, sauf qu'elle ne le repoussa pas. Depuis le matin il avait eu envie de faire ça et maintenant qu'il était lancé, il ne voulait plus s'arrêter. Alors c'est elle qui se détacha de lui en premier, laissant ses mains sur ses épaules. 

« Quel âge as-tu, Allan ? 

— Quelle importance ? 

— Je crois que je suis plus vieille que toi. 

— Ça m'est égal. 

— Allan... soupira-t-elle. »

Il ne la laissa pas finir sa phrase, il l'embrassa à nouveau, plus fougueusement cette fois et elle se laissa entraîner par ce rythme devenant de plus en plus endiablé. Tous deux se désiraient alors pourquoi attendre ? 

Ils firent l'interdit, se connaissant à peine. Qu'importe ? Ils en avaient tous les deux envie. Leurs deux corps s'entremêlèrent, formant plus qu'un, le plaisir y était, la passion aussi. Sa peau était douce, tous ce qu'il avait espéré. Son corps était parfait, ses lèvres sucrées et tendres. C'était un moment parfait, un moment qu'il ne voulait pas oublier, un moment qui devait durer pour l'éternité. 


« Alors, quel age as-tu ? demanda-t-elle, la tête posée sur son torse. 

— J'ai eu 19 ans le mois dernier. »

Elle gloussa. 

« J'en ai 35. 

— Je m'en fiche, l'âge n'a pas d'importance.

— Tu crois ça ?

— Oui, j'en suis même sûr.

— Tu es toujours optimiste comme garçon, pas vrai ?

— Toujours ! »

Elle se redressa en s'appuyant sur son coude pour pouvoir le regarder, elle était si belle, elle l'était encore plus totalement nue. 

« Allan.;.. j'ai beaucoup aimé cette soirée mais je dois te dire quelque chose...

— Tu es mariée ? Tu as des enfants ? Tu ne m'aimes pas ? Je m'en fiche, laisse moi apprécier ce moment.»

Elle esquissa un léger sourire.

« Je ne suis pas mariée, je n'ai pas d'enfants non plus... J'ai un fiancé. 

— Il est gentil ? 

— Ça peut aller mais je viens de le tromper. 

— On commet tous des erreurs. 

— S'il te voit, il te fera la peau. 

— Oui, je pari qu'il est extrêmement fort, avec des abdominaux en bétons et des pectoraux énormes

— C'est surtout une brute. 

— Alors pourquoi tu restes avec lui ? 

— Nous sommes fiancés et je l'aime... D'après toi, je devrais le quitter ?

— Oui, tu serais plus heureuse avec moi, dis-moi que tu as déjà autant rigoler avec lui. »

Elle baissa le regard, ce fut alors une petite victoire intérieur pour Allan. Qu'elle soit plus vieille, qu'elle ait un fiancé, ça lui était égal, il avait passé le plus beau moment de sa vie. Il savait que ce serait inoubliable. 

« Est-ce qu'on se reverra quand je partirai ? s'enquit-il.

— Je ne pense pas... »

Il se leva, ramassa ses vêtements et les enfila. Elle aussi se rhabilla rapidement puis quelqu'un ouvrit brusquement la porte, elle sursauta et Allan réagit de la même façon, se tournant vers l'entrée. Un homme en sortit, il était grand, fort et même effrayant, il avait un visage ingrat. On aurait dit le genre de voyou qui ne faisait que boire et se droguer en matant des strip-teaseuses se déshabiller.  

« C'est qui lui ? demanda-t-il de sa grosse voix. 

— Il m'a appris le piano, répondit Angela.

— Alors pourquoi t'es en train de te rhabiller sale traînée ?! »

Elle soupira.

« Allan, tu devrais t'en aller, suggéra à son invité.

— T'es sûre que ça va aller ? »

Elle hocha simplement la tête semblant presque triste. Allan contourna alors la brute, celui-ci lui empoigna fermement le bras. 

« Quand j'en aurais fini avec ma copine, je m'occuperai de toi sale gosse. »

Allan ne répondit rien et finalement, il desserra, le laissant s'en aller. Une fois dehors, il entendit des cris provenant de la maison, il voulait y retourner mais il avait bien trop peur alors il avança en traînant des pieds dans la rue, se remémorant cette soirée ou plutôt, cette journée fantastique jusqu'à ce que le fiancé de Angela vienne tout gâcher. 

Sa rue était silencieuse, les lumières des maisons étaient éteintes, il devait être près de une heure du matin. Il entendit des bruits de pas derrière lui. Lorsqu'il se retourna, il put apercevoir une silhouette le suivant. Du moins, il avait l'impression que cette personne le suivait. Il pressa alors le pas et traversa sa pelouse, c'est à ce moment là que quelqu'un lui bondit dessus, le faisant tomber tête la première dans l'herbe. L'individu le retourna brusquement sur le dos, grâce à la lumière de la lune, il put reconnaître le visage du fiancé de Angela puis celui-ci lui mit une droite, la tête du pauvre Allan tourna sur le côté par la force du coup que lui avait asséné son agresseur. Il se débattait comme il le pouvait, bougeant les pieds et les bras, mais le fiancé en colère tentait de l'immobiliser, ce qu'il réussit à faire en coinçant les bras du jeune garçon entre ses jambes. 

« Lâchez-moi ! Au secours ! hurla Allan. »

Au même moment son agresseur le frappa à nouveau. Six coups plus tard, Allan était presque assommé, sa vision était trouble, il sentait un liquide chaud couler de son nez et sa lèvre inférieur était fendue. 

« S'il vous plait... bafouilla Allan. 

— T'as aimé te taper ma petite amie ? »

Des lumières dans les maisons voisines s'allumèrent. 

« Je vais en finir avec toi salopard ! maugréa la brute.

— Tu ne la rends pas heureuse, moi si !

— Un gamin comme toi ? il rigola ironiquement. Tu ne peux pas rendre une femme heureuse, t'es beaucoup trop jeune. Elle n'est pas amoureuse de toi et elle ne le sera jamais.»

Et il recommença, encore et encore. Le frappant de plus en plus fort sans que Allan ne puisse rien faire, ses bras étaient coincés, chaque fois qu'il se prenait un coup, sa peau s'abîmait et du sang coulait. Bientôt sa respiration se fit sifflante, il ne pouvait même plus bouger, il avait l'impression que sa tête allait exploser. Des points noirs apparaissaient devant ses yeux, comme s'il allait devenir aveugle. Il sentait son cœur battre dans son crane comme s'il était à la place de son cerveau. Son agresseur se releva, le fixant quelques instants. 

« Tu retiendras la leçon comme ça, ne t'approches plus jamais d'elle. »

Allan se retourna doucement et difficilement sur le ventre, il s'accrocha à quelques touffes d'herbes pour ramper jusqu'à la porte de sa maison, mais l'individu écrasa sa semelle sur ses lombaires, Allan s'aplatit contre le sol en poussant une plainte presque inaudible. 

« T'as intérêt à ne rien dire aux flics ! »

Après cela, son agresseur disparut. 

Allan ne bougeait pas, il restait allongé sur le ventre, les bras tendus devant lui, dans l'herbe à seulement deux mètres de sa porte d'entrée. La lumière de dehors s'alluma, bientôt des exclamations venant des maisons voisines se firent entendre. Il entendit la porte de sa maison s'ouvrir, il reconnut le grincement de celle-ci, il avait promis à sa mère de la graisser.  Il leva doucement sa tête, il put voir les chaussons et le bas de la chemise de nuit de sa génitrice.

« Ô mon dieu, Allan ! hurla-t-elle la voix pleine de sanglots. 

— Maman... »

Il laissa retomber sa tête sur le sol, sa mère le prit alors dans ses bras, il était impossible pour lui de bouger, les coups qu'il s'était pris en pleine figure avaient endommagé son cerveau, c'était similaire à un traumatisme crânien important. 

« Appelez une ambulance ! s'écria sa mère sans cesser de pleurer.

— Maman... je suis désolé, est-ce que... est-ce que...

— Ne t'occupes pas de ça Allan, fit-elle en sanglotant. »

Doucement il ferma ses paupières et il lâcha son dernier souffle, dans les bras de sa mère.

Une journée vraiment pas banale...



«  Allan, c'est horrible... avoua Jane les larmes aux yeux. 

— J'ai quand-même passé la plus belle journée de ma vie, si on efface la fin de la soirée. 

— C'est pour ça que tu ne quittes pas cette maison ?

— Parce que je me suis fait tabasser ? Non. Je ne quitte pas cette maison parce que c'est mon devoir de la protéger. Personne ne l'habitera. Je me sens rattaché à cet endroit et je ne me vois pas ailleurs.

— Mais regarde ce que tu es en train de devenir... Allan, tu disparais toi aussi. 

— C'est peut-être mieux que de se faire faucher par un traître comme Raphaël, tu ne crois pas ? »

Jane baissa la tête. 

« Vous êtes où ?! hurla quelqu'un. »

Elle put facilement reconnaître la voix cassée du démon. Ils sortirent alors tous les deux du mur, se retrouvant face à un Raphaël en colère. 

« Ils sont partis, mais ils vont très vite revenir, il ne faut pas rester là. 

— On ne partira pas avec toi, Raphaël, assura Jane.

— Je viens de vous sauver, s'étonna-t-il, presque égocentrique dans sa façon de parler.

— Comment on peut te faire confiance ? 

— Vous ne pouvez pas, mais sans moi, vous mourrez une seconde fois, tous les deux. Alors Allan, fais-toi violence et quitte cette foutue maison ! Il faut qu'on se tire avant qu'ils ne reviennent. 

— Et après ? Tu faucheras notre âme ? demanda Jane, provocatrice. »

Raphaël posa ses yeux sur elle, la fixant quelques instants dans le silence. 

« Je ne te demande pas de me faire confiance, je t'ai menti, mais si tu ne veux pas mourir une deuxième fois, il faut me suivre.

— Avec toi nous sommes faibles ! s'exclama-t-elle.

— Je vous donnerai de mon énergie, mais ne restons pas là, bordel ! »

Jane jeta un regard à Allan qui devenait de plus en plus faible, ce n'était plus le poltergeist très puissant qu'elle avait rencontré, sa fin était proche. Tout comme la sienne. Alors ils sortirent une nouvelle fois de la maison. Ce fut une vraie épreuve pour faire sortir Allan, il luttait, il hurlait, disant que c'était ici chez lui, qu'il ne pouvait aller nul part. Le problème de certains poltergeists, c'était leur attache pour un endroit ou un objet. C'était presque impossible de briser cette attache envahissante et obsessionnelle. 

« Je t'en supplie Allan ! Je ne t'abandonnerai pas ! cria Jane en tirant sur son bras.

— Je ne bougerai pas ! C'est ici chez moi ! Je ne peux pas sortir ! Je ne peux pas partir !  Je ne veux pas !»

Raphaël commençait à s'impatienter, regardant partout autour d'eux, il semblait à l'affût du moindre mouvement suspect. Finalement, il se tourna vers les deux fantômes affaiblis, il posa une main sur leurs épaules à chacun et ils disparurent. Contre le gré de Allan... 

Mais pouvaient-ils réellement lui faire confiance ? ...



En vous remerciant d'avoir lu ! 







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