Chapitre 53
|| Attention : ce chapitre peut heurter la sensibilité de certains. Il contient des scènes choquantes. Je suis responsable de ce que j'écris, pas de ce que vous lisez. L'histoire étant placée en mature, pas besoin de la signaler. Bonne lecture ! ||
- Twill ?
Soen soupira. Il garda son front appuyé contre l'épaule de Neven, avant de la relever.
- Amédéo n'est pas la seule personne avec qui je suis sorti... Même si avec lui c'était plutôt une erreur.
Soen avait toujours apprécié Amédéo. Même s'ils se voyaient beaucoup moins qu'avant, il le considérait toujours comme son ami. Depuis la dernière fois où ils s'étaient vus, ils étaient restés plus en contact. Soen était plutôt content, il aimait bien discuter avec lui de temps à autres.
- J'ai déménagé trois fois au total dans ma vie. La première fois à neuf ans quand mes parents ont divorcé, nous vivions dans une petite maison. Ensuite, à l'âge de douze ans dans l'appartement que tu as connu. Et puis la dernière fois, l'an dernier, ici, à mes vingt ans.
« Après le divorce de mes parents, nous avons emménagé dans un autre quartier en dehors de Paris, encore à la campagne. Nous nous sommes rapidement liés d'amitié avec nos voisins. Ils étaient très gentils. La femme s'appelait Annie et son mari Piel. Ils avaient un fils d'un an mon aîné. Il s'appelait Twill.
Soen sourit à l'évocation du garçon. Il ne l'avait jamais oublié. Une partie de lui était et serait toujours amoureux de lui.
- Je suis devenu ami avec Twill. Nous passions nos journées collés ensemble. Quand on cherchait l'un de nous deux, on trouvait forcément l'autre en même temps. Ses parents et ma mère étaient ravis de nous voir si heureux. Twill avait même adopté Ethan. Il le considérait presque comme son petit frère, malgré leurs six ans d'écart.
« Les années passaient et du côté de Personne, rien ne changeait. J'allais toujours chez lui par obligation et il me faisait subir les mêmes horreurs, comme je te l'ai expliqué juste avant. J'étais très mal dans ma peau pendant toutes ces années. Heureusement, j'avais mes trois amis avec moi pour palier à ma solitude. Faël, Alanis et Maëva. Je ne leur ai jamais raconté ce qui s'était passé. Il savait que j'étais malheureux, mais ils ne m'ont jamais demandé pourquoi. Ils m'ont tous les trois accepté tel que j'étais sans me poser de questions.
« Il arrive qu'à certains moments de notre vie, on ait l'impression qu'il ne pourrait plus rien nous arriver de pire. C'est ce que j'ai pensé. A mes onze ans, j'ai commencé à me scarifier. J'en avais marre de la vie, plus rien n'arrivait à me changer les idées. Ni Faël, ni Maëva, ni Alanis... Pas même ma mère et Ethan ne pouvaient m'aider. Je me sentais seul. Affreusement seul.
Soen se redressa sur un coude pour chasser une larme du visage de Neven. Il l'embrassa avec tendresse et le serra contre lui. La tête de Neven se nicha contre sa poitrine. Ils restèrent silencieux de longues minutes.
- Je n'arrive pas à croire qu'un enfant ait pu affronter tant de violence, murmura Neven, une boule dans la gorge. Nous n'avons qu'une vie. De savoir que presque la moitié de la tienne ait été gâchée par ce monstre, ça me bouffe...
Soen lui saisit le visage et le regarda sans afficher d'expression. Il déposa ses lèvres sur les siennes et ferme les yeux. Les mains de Neven s'accrochèrent à son cou et la langue de Soen partit à la recherche de sa jumelle. Ils s'embrassèrent comme si cela leur permettraient d'oublier la douleur du passé du chanteur. Soen recula légèrement pour poser son front contre celui de Neven.
- Il n'est pas trop tard pour y remédier. J'ai fini par comprendre que c'était le principal.
Soen déposa de multiples baisers sur le visage de Neven.
- Je continue de te raconter ce qui m'est arrivé ?
Neven acquiesça faiblement. Il n'était pas certain d'être capable de l'entendre, mais il voulait être fort pour Soen. Autant qu'il l'était pour lui.
- L'été de mes douze ans a été particulièrement compliqué. Cela faisait déjà un an que je me scarifiais. La relation que j'avais avec ma mère et mon frère était un peu tendue. Celle avec Personne, je ne t'en parle même pas. Il n'y avait qu'avec Twill que les choses étaient à peu près calmes. J'ai commencé à développer des sentiments pour lui...
Soen jeta un regard à son petit ami. Neven affichait une moue contrariée, ce qui le fit sourire. Le chanteur lui caressa la joue.
- Je l'ai aimé très fort, mais avec toi tout est différent. Twill ne savait pas la moitié de ce que je te raconte.
- Je sais, je ne suis pas jaloux. Et tu sais pourquoi ? Parce qu'il a réussi à te rendre heureux au moins quelques temps.
Soen sourit. Il déposa un léger baiser sur les lèvres de Neven. C'était sa manière à lui de le remercier.
- Petit à petit, j'avais remarqué qu'il en était de même pour Twill. Peu après la fin de la sixième pour moi et la cinquième pour lui, nous avons commencé à... flirter ? Je ne sais pas si je peux employer ce terme pour des enfants de cet âge. Quoiqu'il en soit, nous nous sommes tournés autour et il a fini par m'embrasser, comme ça, sans prévenir. J'ai d'abord été surpris avant de réagir. C'était la première fois que je recevais un baiser. Dès le lendemain, nous sortions officiellement ensemble. Du moins, c'était officiel pour Twill et moi. Nous ne l'avions pas dit à nos familles ou à nos amis. Nous étions jeunes, mais pas assez stupides pour croire que deux garçons qui s'aiment était dans la norme. Alors nous restions discrets.
« Twill est parti deux semaines en vacances avec ses parents. Je me suis alors retrouvé tout seul. Malgré la tentative de Twill de me rendre heureux, il n'y arrivait pas. J'y pensais davantage en étant loin de lui. Ma mère et Ethan ne savaient rien. Mon frère ne se rappelle pas de notre géniteur. Il se souvient simplement de ses crises de colère récurrente, mais pas plus. J'étais le seul à savoir qui il était réellement.
« Un après-midi, alors que ma mère était au travail et qu'Ethan dormait dans sa chambre, je me suis levé. J'ai ouvert le premier tiroir de mon bureau. Il n'y avait rien dedans, excepté l'arme qui me permettait de faire mes conneries. C'est le nom que je donnais à mes scarifications. J'avais décidé d'en finir avec la vie. Nous étions dimanche et je savais que le soir même j'allais retrouver Personne. Je ne voulais plus subir tout cela. J'avais récemment eu douze ans, mais nous n'étions pas encore passés devant le juge. J'avais enfin l'âge requis pour choisir. Je pouvais enfin demander à ne plus aller chez lui. Sauf que l'attente était longue et mon corps était fatigué.
« Alors j'ai fermé ma porte, pris mes ciseaux et j'ai remonté les manches de mon tee-shirt. D'un doigt, j'ai caressé la fine peau de mon bras et j'ai attendu. J'ai attendu que quelque chose me retienne, comme s'il s'agissait d'un signe, mais rien n'est arrivé. Cela m'a mis en rage. Parce que j'avais l'impression que personne ne voulait me retenir, que je ne comptais pas. Je me sentais abandonné par tout le monde. J'ai enfoncé les lames de mes ciseaux à plusieurs reprises. Je me suis taillée la peau pour être certain de ne pas me raté. J'ai voulu mourir, j'ai tenté de me suicider.
Soen s'arrêta de parler quand Neven éclata en sanglots. Le chanteur changea de position. Il allongea Neven sur le matelas et l'emprisonna contre avec son corps. Soen essuya ses joues trempées.
- Ne pleure pas, s'il te plaît. Regarde, je suis là et bien en vie.
Il attrapa la main de Neven et la posa sur sa poitrine. Son cœur battait vite, parce qu'il se trouvait dans la même pièce que son petit ami.
- Je ne peux pas croire que tu aies...
Neven ne parvint pas à finir sa phrase. Soen le berça doucement. Les rôles avaient été inversés. De longues minutes s'écoulèrent.
- Continue, demanda Neven.
- Tu es sûr ?
- Oui.
Soen inspira doucement.
- J'ai fait plus de conneries que d'habitude. J'étais déterminé à en finir. Je ne me rappelle plus très bien quand, mais j'ai fini par m'effondrer sur le sol. Les ciseaux avaient glissé de ma main et le sang coulait abondamment de mes bras. Tout était flou autour de moi. Je me sentais léger. Je savais que j'allais m'en aller.
« Au bout d'un moment, qui m'a semblé être au moins dix minutes, j'ai entendu la porte de ma chambre s'ouvrir, suivi d'un cri. Les choses sont un peu plus confuses, mais je me souviens avoir vu Faël se pencher vers moi. Il pleurait parce que je sentais ses larmes tomber sur mon visage. C'est là que j'ai fermé les yeux et qu'il s'est mis à me crier dessus pour ne pas que je m'endorme. Sauf que je me sentais partir. La dernière chose dont je me souviens, c'est de mettre dit que je m'étais foiré. Parce que j'avais complètement oublié que Faël devait venir à la maison. Nous devions travailler sur un devoir à rendre au collège.
« Je me suis réveillé quelques jours plus tard, à l'hôpital. Ma mère m'en a voulu comme pas possible. Faël est passé. Il m'a crié dessus. Il m'a dit qu'Ethan m'avait vu allongé sur le sol baignant dans mon propre sang. Il m'a dit que je n'étais qu'un sale con égoïste pour avoir tenté de mourir. Puis il s'est effondré sur moi en pleurant toutes les larmes de son corps. Je lui ai promis de ne plus recommencer. Il m'a demandé s'il devait avertir Maëva et Alanis, j'ai dit oui.
« Peu de temps après, nous sommes passés devant le juge et j'ai demandé à n'habiter que chez maman. Personne était en colère, mais je m'en fichais. C'était la fin de mon calvaire. Alors je me sentais un peu mieux. C'est à partir de là que j'ai commencé à voir le Docteur Anderson. Malheureusement, il ne m'a pas beaucoup aidé et je ne suis allé en thérapie chez lui qu'un an. Après quoi, j'ai arrêté.
« Voilà, tu connais toute mon histoire.
Soen se laissa tomber sur Neven pour loger son visage dans son cou. Il y déposa un petit baiser qui déclencha une myriade de frissons chez son assistant. Neven lui caressa doucement le dos. La seule chose qu'il trouva à dire fut :
- Merci. Merci de me faire confiance.
Soen sourit simplement contre sa peau. Une dernière question s'immisça dans l'esprit de Neven et il la posa :
- Toute l'histoire, vers les débuts du groupe, autour de cette photo où on te voyait échanger un baiser avec un garçon... C'était vraiment toi, pas vrai ? Twill et toi ?
- Oui.
Les deux garçons restèrent silencieux. Soen se sentit soulagé de savoir que Neven le connaissait. Il sentait qu'il pouvait lui faire confiance. Ce poids sur ses épaules s'était légèrement envolé.
« Je suis libéré. » - Soen
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