Chapitre 44
Soen enfilait son casque sur sa tête, alors qu'à ses côtés Maëva se faisait aider par William. Au fond de la pièce, Edward s'adressait à une caméra elle-même reliée à un téléphone placée dans la poche d'une troisième personne. Le caméraman les avait rejoints peu après. Il s'appelait David. C'était un passionné de photographies et de vidéos. Il travaillait entre autre avec l'équipe d'exploration urbaine d'Edward et William.
Soen enfila son sac sur ses épaules, tout en écoutant ce qu'Edward disait :
- Bonsoir à tous et à toutes, soyez les bienvenus dans cette session d'urbex pour le moins spéciale. Nous serons cette nuit, William et moi, accompagnés du célèbre groupe The Devil's Tears.
Soen reporta son attention sur ses chaussures au moment où la caméra bifurqua dans leur coin. Edward et David s'approchèrent d'eux.
- Soen Richards, le chanteur, Maëva Willow, la bassiste, Faël Millard, le guitariste et Alanis Monford, le batteur. Leur assistant, Neven Given, se trouve également avec eux. Nous allons nous rendre dans...
Soen n'écouta plus. Edward résumait simplement ce qu'ils allaient faire et l'endroit où ils allaient se rendre. Lui était prêt. Il n'était pas de nature craintive. Explorer des lieux abandonnés ne lui faisait pas peur.
- Tu vas bien Neven ? Tu es tout pâle.
- Oui, oui, répondit Neven d'une voix mal assurée.
Soen regarda son assistant et, effectivement, il était blanc comme un linge. Faël lui tapota l'épaule.
- Ne t'inquiète pas, je pense qu'ils ont prévu des couches pour adultes dans les sacs, tenta-t-il de le rassurer.
Cela marcha puisque Neven pouffa de rire.
Une fois prêts, Soen, Neven, Faël, Alanis et Maëva, accompagnés d'Edward, William et David, se rendirent dans le mini-van de la compagnie d'urbex. Edward et William montèrent tout devant, tandis que le groupe se répartissait dans le véhicule. Alanis et Faël en premier, suivis de Maëva et David – qui filmait toujours – puis de Soen et Neven. Le début du trajet se passa dans le partage des craintes et des envies des différents membres du groupe. Même Soen décida de se prêter au jeu. Il avoua qu'il n'avait pas vraiment peur. Qu'il avait plutôt hâte de voir comment les choses allaient se dérouler. C'était la première fois qu'il affichait un réel intérêt devant les autres, ce que ne manquèrent pas de relever silencieusement ses amis.
Après une trentaine de minutes, le mini-van s'arrêta dans un coin plutôt reculé de Paris que Soen ne connaissait pas. Ils en descendirent tous et se regroupèrent devant. Soen releva la tête vers l'immense bâtisse sombre. Il frissonna des pieds à la tête.
- Chers fans de The Devil's Tears, rappelez-vous que tout est en direct et que rien n'est truqué. Vous pourriez être surpris du comportement de vos idoles confrontées à ce genre de situation pour le moins... inhabituelle et effrayante...
***
- J'ai peur. Je veux ma maman.
Soen entendit quelqu'un pouffer de rire. Il reconnut Alanis. David avait braqué sa caméra en mode infrarouge sur Faël. Ce dernier était accroché au tee-shirt de Neven qui était étonnement calme. Alanis se tourna vers lui, braquant le faisceau de sa lampe frontale en plein dans sa figure. Il affichait une expression amusée.
- Tu voulais tellement mettre ta vengeance à profit pour m'embêter que tu m'as cru tout à l'heure quand je t'ai dit avoir peur des hôpitaux. Ces endroits ne m'effraient pas, mais toi...
Alanis éclata bruyamment de rire en voyant Faël pâlir au moment où un lointain claquement résonna. Il s'approcha un peu plus de Neven qui n'avait pas bougé. Il les regardait en souriant.
- Toi tu me protégeras mon petit Neven, pas vrai ? Tu as toujours été mon préféré tu sais. Il n'y a que toi qui compte à mes yeux.
Tout le monde rit, sauf Soen. Son regard avait croisé celui de Neven qui était brillant. Il reflétait toute sa joie de se trouver ici en compagnie de ceux qu'il appelait amis. Passer tout son temps avec le groupe l'empêchait de voir Eban autant qu'il le souhaitait. Lui qui n'aimait pas la solitude, cela lui permettait de rester bien entouré.
- Ne mêle pas mon Neven à cela, rétorqua Alanis en contenant difficilement son sérieux.
Il l'attrapa pour le câliner. Faël afficha une mine choquée, la bouche ouverte et une main sur sa hanche. De l'autre, il essuya une larme imaginaire.
- Pourquoi tant de cruauté, Nevy chéri ? pleurnicha-t-il faussement.
- Parce qu'aujourd'hui tu te prends plusieurs râteaux ? rétorqua Alanis, un sourire au coin des lèvres.
Faël le fusilla du regard.
- Tu as de la chance que nous soyons filmés, sinon je t'aurais réduit en bouillie. Je ne voudrais surtout pas prendre le risque que les deux, trois personnes fans de toi essayent de me retrouver.
Soen était vraiment amusé par le comportement d'Alanis et Faël. Ils avaient autant de followers l'un que l'autre, mais cela ne les empêchaient pas de plaisanter à ce sujet. Ils continuèrent de se chamailler gentiment devant la caméra – qu'ils avaient totalement oubliée – quand William reprit la parole :
- Nous pouvons peut-être y aller.
Tout le monde acquiesça.
Soen commença à marcher, quand une présence se glissa à ses côtés. Il tourna la tête et vit Neven lui sourire. Son ventre se réchauffa et il le lui rendit.
Le groupe progressa tranquillement dans l'hôpital. Leur session avait commencé il y a une quinzaine de minutes déjà. Elle était rythmée par les commentaires d'Edward et William, ainsi que par les gémissements de peur de Faël. Au moindre bruit suspect, il criait presque de terreur et se terrait dans les bras de Maëva. Il était hors de question pour lui d'aller voir Alanis ! Il en était vraiment hilarant.
Ils s'arrêtèrent dans la salle d'attente principale de l'hôpital. L'endroit était immense, lugubre et insalubre. Soen observa chaque recoin avec fascination. Ce n'était pas qu'il trouvait un plaisir malsain à se trouver dans ce genre de lieux, pour lui c'était incroyable de penser que cet endroit grouillait de personnes... avant. Edward et William leur avaient expliqués que cet hôpital avait atteint son apogée dans les années cinquante, ce qui expliquait sa vieille décoration. Il était surtout utilisé pour soigner les maladies infectieuses et souvent orphelines. Bon nombre d'enfants, d'adolescents et d'adultes y avaient perdu la vie. Les outils médicaux de l'époque n'avait pas permis de résoudre tous ces problèmes aujourd'hui mieux encadrés.
Soen s'approcha du bureau de l'accueil et l'effleura du bout des doigts. Il devait y avoir pas moins d'un kilo de poussière dessus ! Neven vint de nouveau à ses côtés. Il imita les gestes de Soen pour se donner quelque chose à faire. Cela fit sourire le chanteur de voir son assistant si gêné.
- Tu n'as pas trop peur ? lui demanda alors Soen.
Neven haussa les épaules.
- Bizarrement... non.
- Tant mieux alors.
Ils s'observèrent tout en regardant les alentours, sans trop savoir quoi se dire. Ils continuèrent leur exploration et Soen fut étonné de voir des têtes d'animaux empaillés orner les murs. C'en était plutôt glauque. L'hôpital semblait avoir été déserté depuis des centaines d'années.
- J'ai presque l'impression de me trouver dans un film de zombies, chuchota Neven, nous serions des survivants.
- Je pense que je me serais tiré une balle avant, rétorqua Soen sur un ton lugubre.
Neven le regarda en frissonnant.
- Pourquoi ? l'interrogea-t-il.
Soen mit plusieurs minutes avant de lui répondre :
- Je ne peux plus vivre dans un monde qui me détruit.
Son regard croisa celui de Neven dans la pénombre. Leurs visages étaient faiblement éclairés grâce à leurs lampes frontales. Leur contact visuel perdura silencieux, jusqu'à ce que Neven reprenne :
- Est-ce que tu me raconteras un jour ? murmura-t-il.
Soen pinça les lèvres. Personne n'était au courant de rien. Faël, Alanis, Maëva, Amédéo... Ils ne savaient qu'une seule chose. Une chose que Soen regrettait aujourd'hui. Seul Twill en savait un peu plus. Quant à Elea et Ethan, ils ne connaissaient que la partie visible de l'iceberg. Ses secrets étaient enfouis au plus profond de lui.
Soen détourna le regard, incapable de continuer à soutenir celui de Neven.
- Peut-être, je verrais... souffla-t-il.
Il releva les yeux et surprit la caméra les filmer un peu plus loin. Son pouls s'accéléra. Il espérait que David n'avait pas enregistré leur conversation.
« Je suis stressé. » - Soen
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top