Chapitre 3
Soen avait replongé sa tête entre ses bras après le baiser que lui avait donné Amédéo. Ce dernier ne pouvait s'empêcher de pouffer. Il attira Soen contre lui, dont la jambe gauche avait recommencé à tressauter. Amédéo posa sa main sur son genou et Soen se tendit.
- Tout va bien ? le questionna Amédéo.
- Oui.
Amédéo sourit et tira Soen contre lui en riant.
- Je n'en reviens pas ! Aurais-je réussi à gêner l'insensible Soen ? fit-il sur un ton enjoué.
- Jamais de la vie, rétorqua le chanteur.
Il releva légèrement la tête pour regarder Amédéo dans les yeux, ces derniers brillants d'une lueur de défi. Cela attendrit Amédéo qui l'embrassa. Soen se laissa faire, jusqu'à ce qu'il entende des bruits de pas. Il se recula précipitamment, troublant Amédéo, avant de diriger son regard vers l'horizon, comme si de rien n'était.
La baie vitrée coulissa dans leur dos.
- Nous retournons voir James Parker. Il a réussi à nous caser un rendez-vous dans vingt minutes, prévint Maëva. Tu viens avec nous, Soen ?
Le garçon ne répondit pas. Il se contenta de se lever et de reprendre une cigarette. Il ne se tourna même pas vers Amédéo.
- Tu m'appelles, lui dit-il simplement.
Amédéo acquiesça.
Soen suivit Maëva à l'intérieur de chez elle. Faël et Alanis attendaient déjà dans l'entrée. Par respect envers les parents de Maëva et elle-même, Soen attendit d'être dehors avant d'allumer sa clope ; ce qu'il fit dès qu'ils furent sortis.
- Vous avez tous signé le contrat ? demanda-t-il.
- Oui, il ne manque plus que toi, confirma Faël.
Soen tira nerveusement sur sa cigarette. Ses doigts trituraient le bas de son tee-shirt.
- Donc vous êtes sûrs de vouloir vous engager là-dedans... murmura-t-il.
Sa question sonnait plutôt comme une affirmation. Il s'étonnait même d'avoir parlé pour si peu. Troublé, il bascula sa tête en arrière pour cracher la fumée de sa cigarette vers le ciel.
- Pas toi ?
Soen regarda Alanis quelques instants.
- Bien sûr...
- Si tu n'en n'a pas envie, dis-le maintenant avant que nous soyons plongés dedans et que nous ne puissions plus reculer. Sans toi, nous ne pourrons rien faire, reprit Faël.
Le chanteur hocha lentement la tête.
Soen écrasa sa clope sur le trottoir et ils entrèrent tous les quatre à l'intérieur de la petite Citroën d'Alanis. Ce dernier roula tranquillement jusqu'à l'entreprise Parker&Co. Faël, Maëva et Alanis discutaient avec engouement de leur futur et prometteur avenir. Ils avaient hâte de débuter tout cela.
Alanis se gara sur un parking, un peu plus loin de l'entreprise de musique. Les quatre amis descendirent de la voiture. Soen reprit immédiatement une cigarette. Faël soupira en le voyant faire.
- Tu sais que tu ne devrais pas autant fumer.
Soen coinça son bâton de nicotine entre ses lèvres pour l'allumer aisément, sans rien dire. Faël secoua la tête.
- Le jour où tu n'auras plus de voix pour chanter... maugréa-t-il.
Maëva posa sa main sur l'épaule de Faël. Ce dernier traversa la rue sans attendre personne, suivi d'Alanis. Maëva resta avec Soen qui continuait de fumer, sans se préoccuper du fait qu'il faisait attendre James Parker, qui avait très certainement d'autres rendez-vous après eux.
- Tu sais, Faël s'inquiète beaucoup pour toi, dit doucement la jeune femme pour ne pas braquer son ami.
- Il n'a pas à le faire, ce n'est pas la peine, répondit Soen en se grattant nerveusement la nuque.
- On l'est tous, souligna Maëva sans quitter le garçon du regard.
Elle marqua une courte pause avant de poursuivre.
- Depuis un certain temps, tu es de plus en plus renfermé sur toi-même. Je veux dire... avant aussi, mais tu ne l'étais pas autant. Tu nous parles de moins en moins. Même Amédéo s'inquiète. Il m'envoie régulièrement des messages pour savoir si tu vas mieux. On a tous peur pour toi.
- Mais pourquoi ? s'agaça Soen en recrachant la fumée de sa cigarette.
- Parce que nous sommes tes amis et que nous tenons à toi ! s'énerva Maëva. Tous les jours nous te voyons dépérir. Nous ne savons pas ce que tu as, si ce sont les souvenirs du passé qui refont un peu plus surface ou bien autre chose qui te ronge. Nous savions, quand nous t'avons rencontré pour la première fois, que tu n'étais pas comme tous ces gars joyeux et insouciants du collège. Dès la plus petite école, Faël t'avait déjà cerné. Tu crois qu'il te suffit de paraître indifférent pour l'être vraiment ? Tu te trompes lourdement, Soen. Même si tu ne le veux pas forcément, on te connaît un minimum. Faël est peut-être celui qui s'inquiète le plus pour toi. Il ne supportera pas de te voir refaire une connerie, comme il y a quelques années.
Soen ferma les yeux, tandis que ses doigts venaient pincer l'arête de son nez. Maëva ne pouvait pas lui dire cela. L'expression figée et détruite de Faël lors de ce funeste jour l'avait marqué au plus profond. Il faisait tout pour ne plus y penser. Il y arrivait pour le moment et ce n'était pas pour tout détruire à nouveau.
- Je sais tout cela, rétorqua Soen entre ses dents, tu n'as pas besoin de me le rappeler.
- Je ne peux pas te demander de changer. Je ne sais toujours pas ce que tu as vécu, mais si tu pouvais au moins cesser d'envoyer Faël sur les roses... Tu sais qu'il t'aime énormément.
Soen émit un rire sans joie, qui ressemblait plutôt à un ricanement. Il ne se moquait pas, au contraire. Il était simplement touché par ces mots, même s'il ne voulait pas le reconnaître.
- Sans blague.
Le garçon lança sa cigarette au sol d'un mouvement de doigt et piétina le mégot. Il toussa un peu et rejoignit l'entrée de Parker&Co avec Maëva. Alanis et Faël patientaient dans le hall qu'on vienne les chercher.
Soen soupira légèrement et s'approcha de Faël. Il le regarda sans rien dire. Il se plaça à sa droite et colla son épaule à la sienne en frissonnant légèrement. Il haïssait les contacts physiques. Mais Faël était son frère de cœur. C'était la seule chose pourvue de sentiments dégoulinants qu'il était capable d'admettre. Du moins... dans sa tête. Le dire à l'oral était une autre affaire.
Faël s'écarta un peu, le nez froncé.
- Tu pues la cigarette, articula-t-il à voix basse de façon à ce que seul Soen l'entende.
- C'est pour couvrir mon parfum de mâle qui attire toutes les filles et les garçons que l'on croise, contra Soen en regardant droit devant lui.
Un sourire fleurit sur les lèvres de Faël. Entendre Soen faire des blagues était rare. Il savait que c'était un moyen pour lui de ne pas avoir à dire pardon. Avec le temps, Faël avait appris pas mal de choses sur son ami.
- Tu n'as pas besoin de ça, tu as déjà une tête à faire damner n'importe qui.
Soen roula des yeux.
- Je pourrais devenir gay juste pour toi, gloussa Faël.
Soen le regarda, les sourcils haussés.
- Ce n'est pas déjà le cas ?
Cette fois-ci, Faël éclata franchement de rire. Soen, quant à lui, s'autorisa un minuscule petit rictus, qui ne passa pas inaperçu aux regards d'Alanis et Maëva.
« Je suis aimé. » - Soen
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