"Je ne vois pas où est le problème."

Sa voix résonne encore dans ma tête... C'est ce qu'elle m'a dit avant que je ne rentre chez moi.

Non, évidemment ce n'est pas un problème de te vouloir pour la vie, le problème c'est que tu n'as pas compris le véritable sens de cette phrase...

Il faut que tu lui dises clairement les choses.

Je pensais que le fait de me demander de lui faire l'amour était un signe, un message qu'elle voulait me faire passer, mais je me rends bien compte que non... Si je lui dis qu'à présent je suis sûr de mes sentiments, qu'ils ne sont pas éphémères, va-t-elle partir ? Je ne veux pas prendre ce risque, pas pour l'instant.

Je me lève de mon lit et me prépare. Aujourd'hui c'est la veille de Noël et je suis invité à le fêter chez Éthan.
Je remercie sincèrement sa compagne, son compagnon et lui-même de m'accueillir pour un jour si particulier, cela m'évite de le fêter seul, comme chaque année.

~

À mon arrivée, Coralie est déjà là, portant une jolie robe rouge. Éléa s'amuse à lui mettre un bonnet de Noël sur la tête puis cours dans ma direction pour me demander d'en mettre un aussi.
Je me prête au jeu mais je me trouve vraiment ridicule avec. Coralie se moque même de moi, me disant que je n'ai vraiment pas une tête à chapeau, tandis qu'Éléa me dit que je suis "joli".

« - À table tout le monde. »

La voix d'Éden se fait entendre et nous nous dirigeons alors vers la grande table qu'ils ont préparée.
Niveau décoration, ils ont mis le paquet, c'est magnifique. Et puis la nourriture... Rien que l'odeur me donne extrêmement faim.

~

Léandre ne m'a pas dit un mot depuis qu'il est arrivé et c'est à peine s'il me regarde.

Ai-je été si nulle que ça la nuit dernière ?

Pourtant il m'avait dit avoir aimé... M'a-t-il menti ?
Non, impossible, pourquoi le ferait-il ? Il n'aime pas mentir.

Je tente alors une nouvelle approche, sous la table, en laissant glisser mon pied contre sa jambe. Et ça marche ! Il me regarde enfin. Je lui lance alors un regard noir et il fronce les sourcils, j'espère que ça suffira à ce qu'il m'accorde un peu d'attention.

Je me mets ensuite à discuter avec le frère d'Éthan, assis à côté de moi. C'est la première fois que nous faisons réellement connaissance.

Léandre de son côté discute avec une amie à Félicie qu'elle a invitée car elle était seule également pour Noël. Elle s'était disputée avec sa famille et donc n'était pas la bienvenue au repas.

Il a d'ailleurs l'air de bien rigoler avec elle...

Je recommence à lui faire du pied mais cette fois il décale ses jambes.

~

Je ne sais pas à quoi joue Coralie mais elle commence à m'énerver.
Quand arrive le moment du dessert, j'en profite pour m'éclipser et lui fait signe de me suivre.

« - À quoi tu joues ?

- Tu ne m'as pas adressé un seul regard ni sourire depuis que tu es arrivé. C'est à peine si j'existe. Si t'as vraiment détesté notre dernière soirée tu n'as qu'à me le dire.

- Quoi ?! Mais pas du tout. Coralie, j'ai vraiment aimé je t'assure.

- Alors pourquoi tu m'ignores ?

- Mais je ne t'ignore pas.

- Si !

- Bon si tu veux, j'ai pas envie de me disputer là.

- Mais moi je veux comprendre car tu es en train de me faire souffrir.

- Comment ça ? Je n'ai rien fait.

- Mais justement ! Pas de bonjour, pas de contact, rien. Mais avec Ophélie là par contre elle a l'air d'être la partenaire idéale. Tu rigoles, tu la taquine, tu poses même ta main sur son épaule.

- T'es jalouse ?

- Oui ! »

Elle tente de s'en aller mais je la retiens. Des larmes commencent à couler sur sa joue et je ne sais pas quoi faire pour la rassurer. Je ne pensais pas qu'être un peu distant allait la mettre dans cet état. J'ai juste besoin de réfléchir.

Je la prends dans mes bras et m'excuse, puis elle me demande une nouvelle fois de lui expliquer ce qui ne va pas. Mais Estelle nous appelle pour manger le dessert.

« - On en reparle plus tard, d'accord ? »

Elle hoche la tête puis se passe de l'eau sur son visage. Je repars m'asseoir en premier puis commence à manger. Ophélie tente de me parler encore un peu mais je ne réponds que vaguement. Elle a dû comprendre ce qui se passe car elle m'accorde un petit sourire gêné.

« - Je m'excuse, je ne savais pas que c'était ta copine.

- Elle ne l'ai pas.

- Oh... Mais pourtant...

- Mais je l'aime. »

Ça y est c'est sorti, enfin. Oh ça fait du bien finalement. Je continue à manger mais un certain silence s'installe dans la pièce. Je regarde à ma droite et vois Estelle me regarder avec un grand sourire.

« - Quoi ?

- C'est trop mignon. »

Mais... Quoi ?! J'ai parlé si fort que ça ?
Ophélie se met à rire doucement et me fait signe de me retourner.
Coralie est là, debout derrière moi, le visage décomposé.

« - Bon, je propose qu'on finisse le dessert tranquillement puis nous irons ouvrir les cadeaux.

- Il est déjà minuit ?

- Oui chérie.

- Oh ouii merci papa, et joyeux Noël !

- JOYEUX NOËL ! »

Estelle, Éden et Éléa continuent ensuite leur discussion tandis que Coralie s'assoit en face de moi mais touche à peine au gâteau. Éthan à sa gauche lui caresse l'épaule et son frère, à la droite de Coralie, me lance un petit clin d'œil.
Mais j'ai comme une boule au ventre. Et si elle ne m'aimait pas ?

~

« - Tiens Coralie. »

Éléa nous donne nos cadeaux en essayant de reconnaître nos prénoms qui sont écrits dessus. Chacun a fait un cadeau pour chacun et je trouve que c'était une très bonne idée.
Et puis, on peut remercier l'autre pour son cadeau puisqu'Éléa ne croit plus au Père Noël.

Je commence à ouvrir mon premier cadeau et tombe sur une écharpe rose et violette.

« - Merci Éthan. »

J'ai deviné assez facilement qui me l'avait offert puisqu'il me rabâche sans arrêt de mettre une écharpe quand j'ai froid... Ce qui arrive assez souvent en ce moment.

Le prochain cadeau est un ensemble de lingerie que je cache instantanément. Estelle se met à glousser et je devine aisément que c'est elle qui me l'a offert.

« - Merci pour ce moment gênant Estelle.

- Oh mais je t'en prie. »

Même Félicie me regarde avec malice.

La soirée se passe vraiment bien, tout le monde est heureux de ses cadeaux. Hormis Éden qui a reçu un pull moche de Noël car il a eu le malheur d'avouer à son compagnon et à sa compagne qu'il n'en a jamais eu...
Léandre aussi semble passer un bon moment. Mon cadeau, un stylo plume noir avec son initiale gravée en rouge, lui a fait beaucoup plaisir. Je me suis inspirée de mon collier de soumise exprès et il l'a très bien compris puisqu'il m'a fait un clin d'œil.

Le dernier cadeau que j'ouvre est celui de Léandre justement. C'est un joli cadre en bois avec, au centre, une grande photo où toutes les personnes présentes aujourd'hui y figurent. Je me rappelle, elle a été prise à la pendaison de crémaillère de nos hôtes.

« - Je trouvais que ta maison manquait de photos, en particulier de photos de famille... En voilà une. »

Mes yeux se remplissent de larmes et je me lève pour le prendre dans mes bras.
C'est vraiment le cadeau le plus adorable que j'ai pu recevoir de toute ma vie.

Nous restons un moment ainsi tandis que les autres invités discutent et que nos hôtes rangent leurs cadeaux et mettent à la poubelle les papiers cadeaux déchirés gisant au sol.
Je pense qu'il faudra opter pour une solution plus... économique et écologique. Comme utiliser et réutiliser des pochettes cadeaux pour s'offrir nos cadeaux.

Mais ma réflexion - sans grand intérêt dans cette situation - s'arrête nette lorsque je me souviens des mots de Léandre au repas... Il m'aime.
Et moi ? Suis-je prête à cela ?

Je m'écarte donc doucement de lui, ne voulant pas lui donner de faux espoirs. À son regard je comprends qu'il s'inquiète de mon changement d'attitude.
Je lui dis que ça va, que je me sens juste fatiguée.

Au bout d'une heure nous finissons tous par rentrer chez nous, à part Ophélie qui a bu un peu de champagne et qui reste dormir sur place.

~

« - Tu es sûre que tout va bien ? »

Je m'assois sur mon canapé et respire un bon coup. Non, ça ne va pas et je ne sais pas comment en parler...

« - Coralie s'il te plaît, il faut qu'on discute de ce qu'il s'est passé, il faut que je t'apporte des explications.

- Quelles explications ? Ça me semble pourtant assez clair. »

J'ai dû répondre de façon sèche sans le vouloir puisqu'il fronce les sourcils.

« - Excuse-moi ce n'est pas contre toi, c'est juste...

- C'est bon ne te justifie pas, j'ai compris.

- Je ne pense pas. »

Mais il fait demi-tour quand-même et s'apprête à partir.

« - Attends, Léandre !

- Je suis désolé que tu sois au courant si tôt de mes sentiments, mais ils sont bien réels. Je ne t'en veux pas Coralie de ne pas les partager, j'ai juste cru que toi aussi tu... Enfin tu vois... »

Puis il s'en va.

T'as bien merdé ma belle.

Quoi ? J'aurais dû lui dire que son intuition était juste, OK, mais après ?! Je ne sais pas si j'ai vraiment envie que tout change entre nous, tout était si bien jusque-là.

Je tente ensuite de l'appeler mais tombe directement sur sa messagerie.

« - Merde, il a éteint son téléphone. »

Féline arrive ensuite à la rescousse, se frottant à moi tout en miaulant.

« - Pardon de t'avoir réveillé. »

Je me déshabille et enfile mon pyjama avant de me mettre dans mon lit. Féline s'installe contre mon ventre et se met à ronronner.

~

En plus qu'il fasse nuit noire il pleut des cordes ! Quel temps pourri pour rentrer chez soi.
Je roule le plus prudemment possible, cette route étant vraiment très étroite.
Je décide ensuite de mettre la radio pour écouter un peu de musique, espérant que cela remontera mon moral, aussi maussade que la météo.

I feel so lonely
I'm waitin' for you
But nothing ever happens and I wonder
I wonder how
I wonder why
Yesterday you told me 'bout the blue blue sky
And all that I can see is just a yellow lemon tree
I'm turnin' my head up and down
I'm turnin', turnin', turnin', turnin', turnin' around
And all that I can see is just another lemon tree

Finalement cela ne me remonte pas davantage le moral... Malgré que j'apprécie cette chanson du groupe Fool's Garden.

La pluie devient ensuite de plus en plus intense et j'hésite à m'arrêter sur le côté. Mais puisque je suis bientôt arriver, autant continuer.
Et maintenant c'est une route avec des fossés sur les côtés que j'emprunte, je sais donc que cette fois je ne pourrai pas m'arrêter au bord.

Tout le trajet se passe pour le mieux, jusqu'à ce que j'aperçoive une lumière devant moi. Avec cette pluie, difficile de distinguer de quel genre de véhicule il s'agit, ce dont je suis sûr cependant c'est qu'il fonce vraiment vers moi, en contre-sens donc.

« - Et merde ! »

Je tente de faire des appels de phares mais rien n'y fait. Je tourne alors le volant en direction du fossé.

Malheureusement, je l'ai fait bien trop tard. Le véhicule finit tout de même par percuter le mien.

Les airbags déployés, je mets du temps avant de retrouver mes esprits, cherchant ensuite à tâtons mon téléphone.

Plus de batterie...

« - Putain... »

Je me sens si faible que le moindre mouvement, la moindre parole prononcée me causent des douleurs indescriptibles.

Mais au bout de quelques minutes, une voiture s'arrête enfin près de la mienne. Je n'entends presque rien de ce que la personne me dit, mes yeux se ferment doucement et je perds connaissance.