13 | Bien-être
Cela fait au moins une demi-heure qu'elle n'arrive pas à s'arrêter de pleurer. C'est à peine si elle arrive à respirer tellement son nez est bouché.
J'ai préféré la laisser faire, elle en avait besoin, mais maintenant je lui demande de respirer lentement et calmement pendant que je lui masse la tête ce qui l'apaise en un rien de temps.
« - Ça fait tellement du bien... Merci. »
Je continue à la masser puis dépose un baiser sur le haut de sa tête. Elle est assise sur moi sur le canapé puis se décale pour s'asseoir à côté de moi.
« - Ça va mieux ?
- Beaucoup mieux oui, merci. Et désolé.
- Ne t'excuse pas.
- C'est juste que tu dois avoir mieux à faire... Et puis je comprendrais si tu veux rompre le...
- Coralie ! En cet instant je n'ai pas pensé une seconde à faire ça. Alors ne dis plus de sottises pareilles, c'est clair ?
- Oui. »
Je place ma main dans son dos et elle colle sa tête contre mon épaule.
« - Qu'est-ce qui fait que cinq ans après ça te met toujours dans un état pareil ?
- Disons que je m'étais beaucoup attachée à lui et mon mode de vie dépendait de lui et j'aimais ça, j'en avais besoin. Quand il est parti je n'avais plus de repères, plus rien à quoi m'accrocher, plus personne pour prendre soin de moi et me dire ce que je devrais faire. J'étais un peu comme une petite fille qui perdait ses parents, encore... »
"Encore"... Ce mot résonne dans ma tête et je comprends petit à petit ce que cela signifie...
L'absence de photos de famille dans sa maison, quand elle disait avoir peur de perdre les gens qu'elle aime et sa phrase quand je lui ai dit que je ne voulais pas rencontrer ses parents : "ne vous en faites pas pour ça"... Sous-entendu que cela n'arrivera jamais, tout simplement parce qu'eux aussi sont morts.
Je sers davantage mes bras autour d'elle mais cette fois elle ne pleure plus, elle est juste las, fatiguée de s'être sentie souvent ainsi, paumée et seule.
Mais elle n'est pas seule.
« - Il me manque toujours... Et je n'arrive pas à l'oublier.
- C'est normal.
- Mais je ne vois pas comment je peux avancer en ayant toujours son souvenir en tête.
- Tu as, malgré tout ça, accepté de devenir ma soumise. Tu as fait un énorme pas. Tu pars même travailler avec plaisir. Bon sauf quand tu sais que tu vas croiser Irène... Mais tu vois bien que tu réussis petit à petit à t'en sortir. Tu as même un super meilleur ami qui veille sur toi comme un grand frère et tu m'as moi qui ne compte pas te lâcher sauf si tu me le demandes. »
Elle me regarde enfin droit dans les yeux et me sourit.
« - Merci.
- Arrête de me remercier, juste n'oublie pas ce que je t'ai dit.
- D'accord.
- Est-ce que je peux te poser une dernière question ?
- Oui.
- Est-ce que tu l'aimais ? »
~
Celle-là, je ne m'y attendais pas.
Honnêtement j'ai toujours essayé d'esquiver le sujet, même devant Diego lui-même.
« - Je... pense que oui.
- Et est-ce que... Est-ce-qu'il le savait ? Est-ce que tu lui as dit ?
- T'as dit que c'était la dernière question. »
Il me regarde avec insistance mais finit par lâcher l'affaire.
Je me blotti contre lui et nous restons un moment dans les bras de l'autre jusqu'à ce que j'arrive à dire ce que je n'ai jamais réussi à dire vraiment, même à Éthan.
« - Je n'en ai pas eu le temps. »
~
Sa confession me touche et m'attriste.
Est-ce que lui il l'aimait ?
Que se serait-il passé si elle lui avait avoué à temps ? Auraient-ils rompu leur relation ou est-ce qu'ils se seraient mis en couple ?
Trop de questions qui me traversent l'esprit et qui, je sais, hantent encore et toujours celui de Coralie.
« - Tu es déjà allée voir un psy ?
- Oui mais j'ai dû arrêter très vite... trop vite.
- Pourquoi ?
- J'avais trouver une femme superbe qui m'aidait beaucoup mais du jour au lendemain, sans avertir, elle a déménagé assez loin. Et je n'avais pas le courage de faire cent kilomètres toutes les semaines pour aller à son nouveau cabinet. Et je n'avais pas la force de parler à un autre psychologue.
- Je comprends.
- Qu'est-ce qu'on fait alors ? »
~
J'ai posé cette question comme si de rien mais en vérité je suis très anxieuse. J'ai peur de sa réponse, peur d'être abandonnée alors que je me rends compte à quel point je me suis attachée à lui.
« - On essaie, on donne une chance à notre relation. Et on ne se cache plus rien qui pourrait y nuire.
- Ça me va. Mais alors... même après ça tu veux quand-même que je reste ta soumise ? Tu préférerais pas une personne sans problèmes qui...
- Coralie, je ne veux personne d'autre. Donc oui je suis prêt à prendre le risque mais à une seule condition.
- Laquelle ?
- Tu retournes voir un psy, le plus souvent possible et aussi longtemps que tu en ressentiras le besoin. Même si Éthan et moi on reste là pour toi, ça ne suffit pas, tu le vois bien.
- Oui... Tu as raison. »
Éthan lui-même n'a jamais réussi à me convaincre d'y retourner. Mais là c'est différent, je ne vis plus vraiment seule, je suis dans une certaine relation qui doit rester seine et pour cela je dois réussir à me débarrasser de mes démons, et être le plus en paix possible avec moi-même. Le chemin risque d'être long et pourtant Léandre n'a pas l'air d'avoir peur d'essayer de rester mon dominant.
Dans un sens j'ai peut-être besoin aussi de cette relation pour justement avancer. Et Léandre me paraît être le dominant parfait pour moi.
~
« - Ça te dit qu'on aille se promener ?
- Maintenant ? Mais il fait presque nuit !
- Et alors ? Tu te couvres bien et ça suffira.
- D'accord. »
Elle se lève et part se préparer. En attendant j'envoie un message à Éthan pour lui donner des nouvelles de la situation et que j'ai même réussi à la faire accepter de sortir prendre l'air.
Il me remercie et me souhaite bon courage, mais en vérité je ne suis ni déçu ni apeuré de la situation. Je pourrais pourtant choisir d'arrêter cette relation très imparfaite pour trouver une soumise moins tourmentée, avec laquelle je suis certain que la relation sera épanouissante et surtout durable, puisque ce dernier critère était mon objectif premier, mais bizarrement j'ai juste davantage envie de la protéger et de rester à ses côtés. Elle est loin d'être parfaite, certes, mais je me sens bien à ses côtés et j'ai l'impression qu'elle aussi.
J'espère alors de tout cœur que ça ira en s'arrangeant, et que l'on pourra s'épanouir ensemble.
~
Il m'a emmené au parc et à cette heure il n'y a personne hormis quelques promeneurs avec leur chien.
Léandre avait raison, respirer cet air frais après être restée enfermée chez moi pendant un bon moment me fait un bien fou. Je me mets même à sourire tellement je me sens bien, apaisée. Il avait également raison sur le fait que déballer son sac ça apaisait l'esprit. Mais je ne serai pas aussi heureuse en cet instant s'il n'avait pas réagi comme il l'a fait... J'ai eu si peur qu'il s'en aille. Je ne lui en aurais pas voulu, mais cela m'aurait fait si mal.
~
Je la regarde du coin de l'œil, essayant de savoir ce qu'elle peut ressentir en cet instant, et son magnifique sourire me retire toute crainte. Elle se sent bien, là, et c'était le but.
Je ne dis rien et continue de marcher simplement à ses côtés, le silence n'est pas pesant, mais agréable.
À la fin de notre balade, elle me propose de rester dormir et je ne peux m'empêcher cette fois d'accepter. Nous ne faisons rien de sexuel - ce qui me surprend moi-même - et nous restons juste allongés en cuillère sous les draps en attendant que le sommeil nous prenne dans ses bras, ce qui ne tarda pas.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top