Chapitre 6 | 2

"Out of the way, I'm in a hurry.

Hell is on hold, don't need to worry."

The Fear – Takida. (En média).


— Allez, dépêche-toi ! s'enquiert Liv.

Elle tire encore un peu plus sur mon bras pour que j'accélère alors que je trottine déjà derrière elle. La salle de sport n'est qu'à quinze minutes de l'appartement, pourtant j'ai l'impression que plus on avance, plus notre but s'éloigne. Le stress incontrôlable de cette fille déteint sur moi, on dirait. Mon cœur bat la chamade et je perds toute notion du temps ou de la distance qu'il nous reste à parcourir pour arriver à bon port. Des dizaines d'images de Wayne en pleine crise engorgent mon esprit, rendant mon souffle sifflant et irrégulier. Il faut que je me calme. Il faut que je me calme et que j'aille plus vite, mais l'énergumène toute paniquée qui me broie le biceps ne me rend pas la tâche facile.

Trop pressés pour faire attention à qui que ce soit, Liv et moi bousculons la moitié des personnes qui ont le malheur de croiser notre route. La foule paraît de plus en plus dense, elle semble se refermer sur nous et je me mets à croire que nous ne parviendrons jamais à atteindre l'entrée du gymnase. L'adrénaline est telle que lorsque les portes en verre apparaissent devant nous, je ne cherche pas à savoir si le centre sportif est encore ouvert : je fonce. À l'intérieur, l'air chaud m'étouffe mais la poigne de Liv qui se resserre sur ma peau me permet de garder le contrôle.

Un bruit sourd retentit, suivi de près par un hurlement douloureux et Liv se fige. En état de choc, elle me dévisage alors que je mords l'intérieur de ma joue pour ne pas me laisser déborder par l'angoisse. Le battement violent se fait encore entendre alors qu'un énième cri fait rage. Liv sursaute, elle paraît complètement perdue. Les gémissements écorchés de Wayne lui brisent le cœur en même temps qu'ils ne me broient l'estomac. J'aimerais lui assurer que ça va aller, que c'est bientôt terminé mais je n'ai pas envie de lui mentir. Ce genre de situation ne m'est pas inconnu, j'ai appris à apprivoiser les crises de Wayne et là, je sais qu'il est coincé dans son cercle vicieux habituel. Un coup, une douleur, un hurlement : c'est comme une boucle infernale. Un supplice qui se répète sans arrêt, sans une pause, sans lui laisser le moindre répit.

— Est-ce qu'on est en train de le frapper ? murmure-t-elle, terrifiée.

Désolé, je lui offre un sourire triste. Elle n'a jamais assisté à une telle explosion, et je sais à quel point ça peut être impressionnant. Derrière la porte en bois qui nous fait face, la torture continue et Liv se décompose contre moi. Elle semble tellement transie de peur, d'incompréhension, d'inquiétude que pour la première fois depuis que je connais cette fille insupportable, j'ai envie de la rassurer. J'éprouve la nécessité de l'apaiser, de lui dire que tout va bien se passer et que je sais comment gérer ce genre de problème.

— Non, Liv. C'est lui qui frappe.

Son regard s'abat sur moi tandis qu'un tremblement la traverse sans pitié. Elle me scrute, me supplie de lui expliquer ce qui se passe mais je me contente d'avoir l'air confiant. Je sais qu'elle a besoin de comprendre ce qui arrive à son petit-ami mais je n'ai ni le temps, ni le droit de lui raconter pourquoi Wayne se fait autant de mal et à quelle fréquence il le fait. D'ailleurs, ça m'étonne qu'il ait pu le lui cacher pendant presque deux ans.

— Écoute, je vais aller le voir, chuchoté-je avec plus de bienveillance que je n'en ai jamais eue à son égard. Toi, tu restes ici, okay ? Ça va aller, rejoins-nous dans quelques minutes.

Toujours sidérée, elle me scrute un long moment, puis finit par hocher la tête. Ses doigts libèrent mon bras et je pose ma main sur son épaule avant de me diriger vers le capharnaüm qui m'attend dans la salle de boxe. Plus j'avance, plus les hurlements prennent de l'ampleur et plus la boule qui obstrue ma gorge s'enflamme. Respire. Et entre.

Je devrais m'habituer à voir Wayne dans un état déplorable à force, mais à la seconde où j'entre dans la pièce, mon ventre se tord. Il est là, à quelques mètres de moi, et sa douleur pourrait couper le souffle à n'importe qui. Debout, garde haute devant le sac de frappe suspendu au plafond par trois chaînes en fer, il rue le punching-ball rempli de sable de coups à mains nues. Putain, ces trucs sont plus utilisables, ils sont beaucoup trop durs, il va se défoncer les phalanges. Son torse-nu se soulève frénétiquement, sa respiration est bruyante, presque saccadée, mais il continue de cogner et chaque impact lui arrache un gémissement rauque. Même si je sais que taper là-dedans revient à taper dans un mur en béton, je suis persuadé que les cris de Wayne ne sont pas dus aux sévices qu'il s'inflige.

— J'ai fait sortir tout le monde pour que personne n'assiste au spectacle mais je n'ai rien pu faire pour que Wayne s'arrête.

Surpris par la voix grave de Ray, je fais volte-face comme si je m'attendais à ce qu'un danger quelconque surgisse dans mon dos. Je lui lance un coup d'œil rapide, mais me reconcentre très vite sur la tornade qui prend vie devant nos yeux. Ce mec a beau le voir et l'entraîner plusieurs fois par semaine, il n'a jamais su comment réagir lorsque Wayne perd la bataille face à ses démons et qu'il se retrouve la tête sous l'eau. J'observe sa carrure de boxeur professionnel passer d'un pied sur l'autre avant de me rendre compte qu'il triture le bas de son débardeur comme un petit garçon préoccupé.

— Je m'en occupe, monsieur Griffin, lâché-je, un peu froid.

Visiblement soulagé, le grand baraqué passe sa grosse paluche sur son crâne chauve en me remerciant du regard. Il quitte la pièce sans se faire prier, me laissant seul face à l'orage qui gronde à quelques mètres de moi. Prudent, je m'approche de Wayne dans une lenteur à la limite du supportable et analyse le moindre de ses mouvements. Sa peau est noyée de sueur, ses muscles plus crispés que jamais et ses poings baignent dans le sang. Putain... Mais depuis combien de temps il s'énerve sur ce truc ? Enfin à quelques centimètres derrière lui, j'hésite encore à le toucher. Il faut à tout prix que je parvienne à canaliser l'explosion qui est en train de l'anéantir, pourtant le doute m'envahit : et si j'aggravais la situation ?

— Wayne...

Fébrile, ma voix s'efface. Je n'ai aucun effet sur mon camarade qui s'acharne toujours sur son sac de frappe et pour cause, il semble à peine conscient de ma présence. La hargne qui boue en lui l'enferme sous une lourde armure protectrice ; c'est comme s'il oubliait le monde extérieur pour laisser une puissante déflagration l'habiter. Après une longue inspiration, je décide de prendre mon courage à deux mains et de ne pas me laisser impressionner par l'hémoglobine qui coule le long de ses avant-bras.

— Wayne, arrête ça, ordonné-je d'un ton plus sévère.

Je prends en confiance, mais je n'ose toujours pas le toucher. Comme en transe, Wayne ne s'arrête pas, je me demande même s'il m'a entendu.

— Wayne, putain de merde ! m'agité-je en me ruant sur lui.

Je colle mon torse contre son dos, et l'encercle pour emprisonner chacun de ses gestes. Soudain fulminant, mon ami se débat, gémit pour que je lâche prise mais même malgré sa force décuplée par l'adrénaline, je tiens bon. Je ne te laisserai pas te détruire. Une fois avoir suffisamment lutté, Wayne se baisse dans un élan que je n'aurais pas soupçonné et m'éjecte au-dessus de lui sans me ménager. Pris au dépourvu, je m'étale sur le sol du gymnase en retenant un grognement de douleur mais me relève dans la seconde pour me placer entre lui et son punching-ball.

— Pousse-toi de là.

Essoufflé, mon adversaire me fixe d'un air mauvais. Malgré sa fatigue évidente, je sais qu'il peut m'envoyer au tapis en une fraction de seconde mais je préfère ça plutôt que ne pas réagir du tout.

— Non, lancé-je, déterminé.

— Dégage ! s'énerve-t-il alors que sa respiration se saccade encore un peu plus.

— Si tu veux vraiment frapper dans quelque chose, tu n'as qu'à me frapper moi, rétorqué-je sans fléchir devant son regard menaçant.

— Tu l'auras voulu.

Aussitôt, il se remet en garde et j'ai à peine le temps d'apercevoir Liv entrer dans la pièce que Wayne bondit déjà. En l'air, il fait un tour sur lui-même pour m'envoyer un coup de pied sauté au beau milieu du torse, m'expulsant à deux mètres de lui. N'ayant pas la moindre chance de l'esquiver ou de me défendre, je m'éclate sur le sol en résine, le souffle coupé et le dos en miettes. Sonné par la puissance de l'attaque, je reste allongé par terre quelques minutes, plus capable de bouger. Je lève les yeux vers Liv et me rends compte qu'elle tient le visage de son petit-ami à deux mains et qu'elle lui parle. Elle déblatère, encore et encore, à une vitesse phénoménale. Son débit de paroles est si rapide que je ne comprends pas le moindre mot qu'elle lui envoie à la figure, mais une chose est sûre : le ton qu'elle emploie est aussi implorant qu'il n'est angoissé. Au bout d'un moment d'observation qui me paraît durer une éternité, Wayne opine et quitte la salle en silence tandis que Liv s'approche de moi. L'air alarmé, elle me scrute nerveusement quand elle m'entend gémir en me relevant. Excédé par son inquiétude exagérée, je lui offre mon rictus le plus provocateur.

— Si t'avais pu faire ça quarante secondes plus tôt, t'aurais eu le parfait timing, Poupée, bougonné-je.

Elle pouffe plus de soulagement que de rire, m'arrachant un sourire sincère.

— Il est parti où ? m'enquiéré-je.

— Ray lui a donné les clés de la piscine, apparemment. Il est parti là-bas. 


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Coucou tout le monde, 

Je suis désolé, j'ai pas été du tout présent sur Wattpad ces derniers temps, et en plus j'ai un jour de retard. Je crois que j'avais un peu peur de flop comme le chapitre 5 alors j'ai fait un blocage. Bref, c'est pas important, j'espère que cette partie de chapitre vous plaira.

Sachez que la prochaine partie est à la base une scène coupée, mais que je l'aime beaucoup trop pour ne pas vous la mettre. (Eh, ça faisait longtemps que j'avais pas teasé).

Du coup, qu'est-ce que vous pensez des agissements de Wayne, de ce qu'il fait dans la salle de boxe ? 

Et sa relation avec Liv, alors, elle vous inspire quoi ? Puisqu'elle a réussi à le calmer, ça veut dire que leur relation est solide ou pour vous ça ne veut rien dire ? 

À votre avis, qu'est-ce qu'il va faire dans la piscine, Wayne, à la fin ? 

Je ne sais pas si la musique vous plaira, elle est assez particulière, mais j'ai adoré son ambiance, son urgence qui m'a beaucoup rappelé l'ambiance de cette partie.

Voilà, voilà, c'est tout pour moi. J'espère que vous ça va. 

Je vous souhaite une belle journée, profiter bien de votre week-end et nous on se retrouve jeudi. 

Cœurs sur vous, les potes. 

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