Chapitre 20 : remise sur pied

- Merci d'avoir accepté que nous rendions visite à Nolan, remerciai-je M. et Mme Walters.

- Et si vous avez besoin de quoi que ce soit, n'hésitez pas, ajouta Archie.

- C'est gentil, sourirent les parents de Nolan.

Ils avaient l'air vraiment touchés. En même temps, ce devait être horrible pour eux de se dire que leur fils avait été tabassé gratuitement, sans aucune raison. Surtout que Nolan n'était pas du tout le genre de gars à chercher des ennuis. Je me demandais bien pourquoi on l'avait agressé.

- On va y aller, annonçai-je. Bon courage à vous.

- Encore merci pour ton intervention, me sourit Mme Walters. Sans toi, mon fils n'aurait certainement pas eu les secours dont il avait besoin.

- C'est bien normal, dis-je avec un sourire, un peu gênée. Bonne soirée.

Puis Archie et moi nous éloignâmes du couple pour retourner à l'accueil de l'hôpital.

- Je te ramène ? lui proposa-je. Je suis venue avec ma voiture.

- Avec plaisir, accepta Archie. J'étais venu avec les gars de l'équipe mais sans grande surprise, ils ne m'ont pas attendu.

- Étonnant, pouffai-je. Alors bon, c'est parti mon kiki ! m'exclamai-je.

Nous primes l'ascenseur, puis nous marchâmes environ 7 minutes pour rejoindre ma voiture car je n'avais pas trouvé de place bien près. On ne savait pas trop quoi dire, je pense qu'on ne savait pas comment réagir face à l'agression de Nolan, ni même quoi penser. Une fois dans ma voiture, c'est Archie qui brisa le silence :

- Tu as... entendu ?

- Entendu ? répétais-je.

Il me semblait comprendre de quoi il parlait, mais je n'étais pas sure.

- Nolan, souffla Archie.

- Tu parles de ce qu'a dit Nolan quand nous sommes sortis de la chambre ? demandai-je avec une pinte d'inquiétude.

Archie hocha la tête.

- "Jason Blossom". C'est bien ce qu'il a dit ? murmurai-je à Archie.

- Ouais, dit Archie en se massant les tempes.

- Tu crois que c'est important ? demandai-je. Enfin que ça signifie quelque chose ?

- Je n'en sais rien. C'est bizarre quand même. Tu vois, Nolan et Jason se connaissaient mais sans plus, ils n'avaient aucun lien particulier, alors pourquoi il aurait dit son nom ? Et surtout, juste après s'être fait agressé.

- Mouais, il y a peut-être un lien, concédai-je sans grande certitude. Mais le quel ?

- Alors ça ... marmonna Archie, perdu dans ses pensées. Mais tout de même, tu ne l'as pas trouvé un peu distant ?

- Quand ça ? demandai-je.

- Un peu tout le temps. Tu vois, il était un peu mal à l'aise, surtout quand on lui a demandé s'il savait qui avait fait ça, exposa Archie.

En y réfléchissant, c'est vrai que Nolan ne donnait pas vraiment l'impression d'essayer de savoir qui étaient ses agresseurs. Mais d'un côté, il était peut-être juste sous le choc et avait du mal à prendre du recul.

- Peut-être, dis-je à moitié convaincue. Il faudra qu'on retourne le voir quand il ira un peu mieux. Mais crois-moi, les médecins ont déjà fait du bon boulot : je te jure son visage, la nuit où il a été agressé, était méconnaissable.

- Je n'ose même pas imaginer, avoua Archie en grimaçant légèrement.

Nous arrivâmes donc à destination. Je déposais Archie chez lui puis rentrai chez moi, pile à l'heure pour le dîner. En plus, c'était des pommes de terre sautées avec du bœuf, alors j'avais bien fait de ne pas rater ça. Mes parents en profitèrent pour me poser d'innombrables questions sur Nolan, comme ils aimaient tant le faire.

Cependant, quelque chose me tracassait. Depuis ce matin. Toute la journée, j'avais mis cette pensée de côté mais au fond de moi, je savais pertinemment de quoi il s'agissait : Jughead. Je n'avais pas eu de nouvelles depuis notre dispute chez Pop, après son "anniversaire", et ça m'inquiétait beaucoup. 

Devais-je l'appeler ? Je ne savais pas si j'en avais le courage, pour tout avouer. Enfin, l'appeler, ce n'était pas le plus dur : mais qu'est-ce que j'allais dire s'il décrochait ?

Non, je préférais lui envoyer un simple SMS. J'optais plutôt pour quelque chose de court et efficace : "Salut Jug, je voulais juste savoir comment tu allais. J'espère que tu me répondras. Bonne soirée en tout cas."

Ce n'était pas parfait, mais je ne voyais pas bien quoi dire de plus. J'attendis une réponse mais rien n'arriva, et je finis par m'endormir.

Le lendemain matin, quand je me réveillai, la première chose que je fis fut de regarder mon téléphone : bien évidemment, aucun message de Jughead. Je me décidai alors à l'appeler, mais je tombai directement sur sa messagerie. Quelque chose n'allait pas, et je ne pouvais pas rester dans cette situation là. Il fallait que je fasse quelque chose. Même si les mots de Jughead m'avaient blessée et qu'il m'avait repoussé à plusieurs reprises, je me devais d'être là pour lui. C'était mon ami et je tenais à lui, alors j'étais décidée à faire quelques efforts pour renouer le contact et l'aider. J'étais tellement désespérée que je me résolus même à envoyer un SMS à Betty : "Des nouvelles de Jughead ?". Et elle me répondit presque instantanément : "Aucune". Il fallait vraiment que je fasse quelque chose.

Je descendis donc pour prendre un rapide petit-déjeuner, pris mes clés et sautai dans ma voiture. J'arrivais donc devant la "maison" de Jughead, du moins là où son père vivait. Les volets étaient fermés de l'extérieur, comme s'il n'y avait personne. Mais bon, je n'avais pas fait la route pour repartir sans tenter ma chance, alors j'allais frapper à la porte.

Rien.

Je recommençai une deuxième fois, parce que j'étais presque sûre d'entendre un bruit, comme la radio ou la télévision. Cette fois, une voix bougonna :

- C'est qui ?

- Jenna Thompson, criai-je.

Et la porte s'ouvrit aussitôt.

- Jen ? murmura Jughead.

Jughead apparût. Enfin, si l'on pouvait dire qu'il s'agissait de Jughead parce qu'en tout honnêteté, il était méconnaissable. Ses vêtements paraissaient vieux de dix ans : il portait un large jogging en moleton usé à quelques endroits, ainsi qu'un t-shirt blanc, presque jaune avec de petits trous. Quant à son visage... On aurait dit qu'il n'avait pas dormi depuis trois jours. Il avait des cernes violacées qui lui descendaient jusqu'à la moitié des joues, le teint gris et les yeux injectés de sang. Ses lèvres paraissaient tellement pâles que l'on aurait pu jurer qu'il n'en avait pas. Et pour une fois, il ne portait pas son authentique bonnet, mais ses cheveux étaient sans-dessus-dessous, et presque un peu sales.

- Jug... ça-ça va ? demandai-je difficilement face au désastre qui se trouvait devant moi.

- Yep. Tu veux entrer ?

- Pourquoi pas, dis-je en avançant tandis qu'il se décalait pour me laisser passer.

La pièce était plongée dans le noir, avec comme seule source de luminosité, la télé que Jughead avait mis en sourdine. Ce n'était pas très bien rangé, sans pour autant être sale. Il y avait un carton de pizza en plein milieu du salon.

- Ton père n'est pas là ? demandai-je en essayant de faire abstraction de ce qui m'entourait.

- Non, pouffa Jughead. Il n'est jamais là. Bon, qu'est-ce que tu veux ?

Sa voix était menaçante.

- Tu n'as pas eu mon SMS ? voulus-je savoir. J'ai même essayé de t'appeler.

- J'ai paumé mon chargeur de téléphone, m'avoua Jughead. 

Il me regarda ensuite avec insistance, comme s'il attendait que je réponde à la question qu'il m'avait posé juste avant. Je ne l'avais jamais vu aussi froid.

- Et bien, je voulais savoir comment tu allais, annonçai-je en essayant de prendre un ton un peu gai.

- Comme tu peux le voir, ça va, sourit faiblement Jughead.

- Cool, me contentai-je de répondre.

Je n'avais aucune idée de quoi dire. C'était horrible, j'étais totalement mal à l'aise. Alors je me contentais de regarder autour de moi. Et là, je vis un cendrier. Premièrement, il était plein alors que Jughead ne fume pas. Et deuxièmement... ce n'était pas des cigarettes dedans.

- Tu as fumé ? demandai-je. Tu as pris de la drogue ?

- Et ? dit tout simplement Jughead.

- Je croyais que tu étais totalement contre ! m'exclamai-je en m'approchant du cendrier.

Je comptais au moins quatre joints.

- Dis-moi au moins que tu as invité des amis pour fumer tout ça, dis-je en essayant de garder mon calme.

- Tu crois que j'ai beaucoup d'amis ? me rétorqua Jughead en restant statique.

Il était totalement serein. On aurait presque dit que la scène l'amusait.

- Tu as fumé ça tout seul ? m'énervai-je. Tu es malade ! Sérieusement, c'est quoi ton but ?

- Être tranquille, et être bien, m'annonça Jughead. Tout le contraire de ce que tu fais, quoi.

Alors là, c'en était trop. 

- Mais tu ne vois pas que j'essaie de t'aider ? criai-je.

- Dégage, me lança Jughead d'une voix froide. Juste, dégage.

Je ne savais pas comment réagir. D'un côté, ça me blessait profondément mais de l'autre, je devais être plus forte que ça. J'étais ici pour aider Jughead, je ne devais pas le laisser tomber même si c'était ce qu'il demandait.

- Ça ne risque pas, dis-je d'une voix ferme. Je ne compte pas te laisser dans cet état, Jughead.

- Tu ne peux pas m'aider, soupira-t-il. Il n'y a rien à faire. Je vois tout négativement, je n'arrive plus à être heureux. Mes notes sont en chute libre. Mon père n'est jamais là, et c'est sûrement mieux comme ça. Ma mère et ma sœur sont parties, tout ça à cause de mon père qui ne fait toujours pas d'efforts, et je ne les vois jamais. Et ensuite... Jenna, tu sais que je suis perdu. Dans mes sentiments, je veux dire. Je tiens à Betty, je tiens à toi et... je vous fais souffrir, toutes les deux. Je ne fais que te repousser, alors que je sais que ça te fait de la peine. Je suis nocif alors quand je te dis de dégager, crois-moi, c'est pour ton bien.

J'en avais les larmes aux yeux. Son discours était tellement touchant et plein de tristesse. Il avait vraiment l'air au fond du sceau, comme on dit, mais j'étais persuadé qu'il pouvait s'en sortir, avec un peu d'aide bien sûr. Et j'étais prête à lui apporter cette aide.

- Non, je ne vais pas "dégager", murmurai-je doucement. Je comprends qu'en ce moment tu traverses une période difficile, mais tu peux t'en sortir. Je tiens énormément à toi, tu es un ami et je ne veux pas te perdre, alors avec ou sans ta coopération, je vais tout faire pour t'aider. Et crois-moi, ça serait plus facile si tu acceptais de coopérer. On a tous des problèmes, chacun plus que d'autres, et je ne vais pas te tourner le dos parce qu'en ce moment, tu en as beaucoup. Alors Jughead Jones, tu vas bouger ton cul, arrêter de te morfondre, et tout ça avec mon aide.

Lui aussi avait les larmes aux yeux. Pour une fois, il ne trouva rien à répondre. Il s'approcha juste de moi, un peu lentement. Et tout à coup, il prit ma tête entre ses mains, et plaqua ses lèvres contre les miennes. Il m'embrassait. J'étais en train d'embrasser Jughead. Automatiquement, mes yeux se fermèrent. J'avais rêvé tant de fois de ce moment, mais jamais je ne m'étais imaginée que ce serait dans des circonstances pareilles. 

Il déposa donc un baiser long et appuyé, puis recula sa tête en me regardant droit dans les yeux.

- Désolé, s'excusa-t-il. J'en avais envie, je ne sais pas ce qui m'a pris.

- C'est parce que tu es encore... défoncé des quatre joints ? demandai-je.

Jughead fronça les sourcils :

- Alors non. J'en avais vraiment envie, je te jure. Et pas seulement aujourd'hui.

Une sensation de chaleur me monta aux joues, et je me sentis rougir. Je ne savais pas trop quoi répondre, et je n'osais pas lui dire que c'était pareil pour moi.

- Mais tu es avec Betty, non ? murmurai-je avec une pointe de regret dans la voix.

- Je n'en sais rien, avoua Jughead. Pour tout te dire, je n'ai pas vraiment envie d'en parler.

Je voyais qu'il voulait changer de sujet. Cette situation était assez inconfortable pour nous deux.

- Je comprends, assurai-je. Bon alors, on la range cette maison ?

Jughead acquiesça. Nous commençâmes donc par ouvrir les volets, puis je décrétai qu'il valait mieux pour Jughead qu'il aille se laver et se changer. Il accepta, puis de mon côté, je vidai le cendrier, mis le carton de pizza à la poubelle, rangeai les différents verres qui traînaient un peu partout, ramassai les papiers qui jonchaient le sol et remettait les coussins du canapé en place. Je passai également un coup d'éponge sur la table basse et éteignis la télévision.

Jughead revint donc, tout propre, avec un jean et un t-shirt gris, propres cette fois-ci. Il avait les cheveux encore mouillés et certaines mèches tombaient sur son front, ce qui le rendait incroyablement beau. Il avait même reprit quelques couleurs sur le visage.

- Merci d'avoir rangé, dit Jughead, peut-être un peu mal à l'aise de ne pas m'avoir aidé.

Je lui souris.

- Tu as faim ? demandai-je.

- Heu... ça va, répondit-il en hésitant.

- C'est quand la dernière fois que tu as mangé ? voulus-je savoir.

- Ce matin, m'assura-t-il.

- Tu es sûre ? demandai-je en me dirigeant vers le frigo.

J'ouvris donc le frigo. Il était vide. Enfin il contenait du beurre, de la mayonnaise et des tomates un peu flétries. Je me retournai vers Jughead et il n'osait pas me regarder, comme s'il avait honte.

- Ça fait combien de temps que ton père est parti ? Et il ne te laisse pas de sous ? m'exclamai-je.

Jughead secoua la tête.

- Aller, viens, dis-je en le prenant par la main. J'ai la dalle, on va manger.

Jughead ne dit rien et se laissa traîner. On monta donc dans la voiture en direction de chez Pop.

- Mais je n'ai rien pour payer, murmura Jughead.

- Moi oui, lui lançai-je.

Il était énormément gêné mais d'un autre côté, il avait faim. Je dus bien insister quelques minutes mais de toute manière, même s'il avait refusé, je l'aurai traîné de force. 

Il engloutit son hamburger en moins de deux. Il mangeait d'ordinaire vite mais alors là, je n'avais jamais vu une telle rapidité. Ça me faisait plaisir de le voir manger. Je le ramenais ensuite chez moi, parce qu'on avait des devoirs à faire et que je savais qu'il ne les aurait pas fait tout seul. Il dit rapidement bonjour à mes parents, et nous montâmes dans ma chambre.

Nous étions tous les deux assis devant mon bureau à faire des maths. J'expliquai à Jughead les deux ou trois petites choses qu'il avait du mal à saisir, mais c'était facile parce qu'il comprenait vite. Il était loin d'être bête.

Deux heures plus tard, on avait enfin fini. Je m'écroulais sur ma chaise, signe que j'étais épuisée.

- Merci, me murmura Jughead.

- Oh, mais de rien, rigolai-je légèrement. Ce ne sont que des maths.

- Mais non, reprit Jughead. Merci pour tout, je veux dire.

- Reste pour le repas de ce soir, proposai-je à Jughead.

- C'est gentil, mais non. Tu en as assez fait.

- Reste, insistai-je en lui prenant la main.

Il baissa le regard sur nos deux mains qui se tenaient. Il se pencha doucement vers moi et pour la deuxième fois de la journée, il m'embrassa. Cette fois-ci, le baiser était différent. Plus intense et plus long. Je sentis le contact de la langue de Jughead contre mes lèvres, alors je les entrouvris, et nos deux langues se rencontrèrent. C'était tellement agréable que ça m'en faisait presque mal au ventre. Une sensation de chaleur m'enveloppa tout le corps.

Une chose était sûre : j'étais amoureuse de Jughead.





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