Chapitre 19 : l'inconnu de North Caldwell

Il faisait très sombre. Alors que j'étais en route pour rentrer chez moi, je vis une silhouette au loin agiter les bras. Heureusement, je parvins à freiner à temps, puis descendis de la voiture. La personne, aveuglée par mes phares, s'approcha de moi et dit d'une voix basse, presque dans un murmure :

- S'il vous plaît, aidez-moi.

Et la personne s'évanouit.

Elle tomba sur le côté, et sa tête vint heurter le sol, violemment. Sans réfléchir, presque incapable de bouger mes jambes, je saisis mon téléphone en tremblant pour appeler les secours.

- Je... bonsoir... je... quelqu'un vient de s'évanouir devant moi, en plein milieu de la route, et sa tête a cogné le sol.

- Bien, madame, dit une voix calme au téléphone. Pouvez-vous me communiquer votre position ?

- Av... avenue North Caldwell, dis-je en essayant de me ressaisir. Qu'est-ce que je dois faire ?

- Si vous êtes en voiture, mettez vos warnings, essayer de vous faire voir des autres voitures pour qu'elles soient averties mais surtout, ne touchez pas la victime. Un véhicule va arriver.

Je raccrochai. J'avais déjà mis mes warnings alors je ne savais pas quoi faire. Ne pouvant pas rester debout à ne rien faire, je m'approchai de la victime -en prenant bien soin de ne pas la toucher- et remarquai qu'il s'agissait d'un homme. Un jeune homme en fait, très certainement dans mes âges. Il faisait très noir alors je ne pus pas bien distinguer son visage. J'approchai donc mon téléphone de sa figure pour essayer de voir si je le connaissais. Et là, je fus prise d'un haut-le-cœur. Je ne pus retenir un petit cri.

Ce n'était pas un visage que j'avais devant moi : c'était de la bouillie. Ses lèvres avaient triplé de volume et étaient tiraillées par de nombreuses et larges entailles. Ses yeux, fermés, étaient tous deux recouverts de bosses violacées, aux vaisseaux sanguins apparents. Son visage n'avait rien d'humain : il était ouvert et gonflé partout, et rouge. On aurait dit qu'il portait un masque digne d'Halloween.

Ses vêtements étaient couverts de sang et de terre. Il portait une veste du lycée de Riverdale, la même qu'Archie : ça voulait dire qu'il était dans l'équipe de football. Et donc, que je le connaissais. Pourtant, il était tellement défiguré que je ne parvins à pas le reconnaître. Un frisson me parcourut l'ensemble du corps et je fus soulagée lorsque j'entendis la sirène de l'ambulance arriver.

Les urgentistes prirent soin de lui et l'installèrent dans leur camion. Ils me posèrent ensuite quelques questions mais malheureusement, je ne savais pas grand chose. Ils prirent ensuite mes coordonnées et me demandèrent de rentrer chez moi. Selon eux, je ne pouvais rien faire, ce qui n'était pas faux. Je repris donc ma voiture et partis, pressée d'arriver chez moi. Heureusement, je n'étais plus très loin.

Il devait être une heure du matin et nous étions vendredi soir alors mes parents ne dormaient pas encore. Je leur racontai donc toute l'histoire, enfin le fait que j'avais trouvé un lycéen évanoui sur le bord de la route.

- C'est horrible, murmura ma mère, comment peut-on tabasser à ce point quelqu'un ? Et qui plus est, un enfant !

- Peut-être un règlement de comptes entre Serpents, songea mon père.

- Je ne pense pas, dis-je. Je connais peu de joueurs de football qui soient les Serpents, et pout tout te dire, il n'y en a même aucun.

- Et sinon, c'était sympa l'anniversaire de Jughead ? me demanda ma mère pour changer de sujet et rendre la conversation plus légère.

- Ouais... bof. Il n'aime pas les fêtes alors bon. Je suis crevée, je vais aller me coucher.

Je dis bonne nuit à mes parents, et montai dans ma chambre. Bien qu'hantée par le visage ensanglanté du lycéen, je ne mis pas trop de temps à m'endormir.

Le lendemain, je me réveillai en espérant avoir un appel de l'hôpital qui m'ordonnerait de venir voir le garçon que j'avais trouvé. Je voulais savoir qui il était, et s'il allait mieux. Mais rien. En fin d'après-midi, je décidai donc de me rendre à l'hôpital, ne supportant plus de rester chez moi à ne rien faire, incapable de penser à autre chose.

Je me rendis donc dans le hall de l'hôpital mais je m'aperçus immédiatement que je ne connaissais même pas le nom du lycéen : il était donc impossible de savoir dans quelle chambre il était. Par chance, je reconnus de dos un rouquin qui portait sa veste de football aux couleurs du lycée : Archie.

- Archie ! m'écriai-je.

Il se retourna et fit un sourire, certainement content de me voir ici.

- Qu'est-ce que tu fais là ? demandai-je. Tu es venu voir...

- Nolan, me coupa-t-il, les sourcils légèrement froncés. Il paraît qu'il a été trouvé en plein milieu de la route, tabassé à mort.

- Attends, tu parles de Nolan Walters ? m'exclamai-je.

Archie hocha la tête. Je connaissais ce gars. Pas énormément, je n'avais aucun cours avec lui et ce n'était pas un des plus proches amis d'Archie, mais je voyais qui c'était. Il avait même l'air gentil.

- Mon Dieu, Archie, c'est moi qui l'ai trouvé sur le bord de la route et je ne l'ai même pas reconnu ! Je te jure, son visage était... c'est inexplicable.

- Il est si mal en point ? s'inquiéta Archie.

- Il s'est évanoui devant moi, expliquai-je. Je pense qu'il va s'en sortir, mais ceux qui lui ont infligé ça ne l'ont pas raté. Je voulais aller le voir, tu sais dans quelle chambre il est ?

- 202, dit Archie, mais ils ne font entrer personne dans la chambre à part la famille. On était venu avec toute l'équipe de football mais on a tous dû partir.

- J'aimerais quand même voir s'il va bien, murmurai-je à Archie. Tu m'accompagnerais ?

Ce dernier accepta et me guida jusqu'à la chambre. Au moment même où nous arrivâmes, une femme en sortit. Elle avait l'air complètement abattu, la mine grise et les cheveux en pétard. Quand elle nous vit, son visage devint rouge :

- Qu'est-ce qu'il y a ? Vous n'avez pas compris ? Pas de visites à part la famille ! Vous êtes de la famille ? Je ne crois pas, alors dégagez !

- Excusez-moi, Mme Walters, mais je suis celle qui a trouvé votre fils, dis-je doucement pour éviter qu'elle ne s'énerve davantage. J'ai appelé les secours et...

- Oh, me coupa-t-elle.

Son visage redevint un peu plus calme, et je vis qu'elle était gênée de m'avoir crié dessus.

- Désolée, souffla-t-elle. Je suis complètement sur les nerfs, comment a-t-on pu faire ça à mon enfant ?

- C'est horrible, oui, murmurai-je. Si Archie et moi pouvons faire quoi que ce soit pour vous aider, nous serions ravis.

- C'est gentil, sourit-elle. Et tu es ?

- Jenna Thompson, dis-je. Désolée, je ne me suis même pas présentée.

- Comment va-t-il ? demanda Archie.

- Mieux. Son visage a désenflé, il est hors de danger mais il dort la plupart du temps. Il a des bleus partout... c'est horrible.

- Pourriez-vous nous prévenir quand nous pourrons le voir ? demanda Archie.

- Sans problème, dit Mme Walters.

La porte de la chambre 202 s'ouvrit, et le père de Nolan dit à sa femme :

- Chérie, il est réveillé. Viens.

- Vous avez cinq minutes ? nous demanda Mme Walters. S'il va bien, vous pourrez peut-être le voir.

Nous acquiesçâmes et le couple Walters rentra dans la chambre. Je m'assis sur une chaise dans le couloir, tandis qu'Archie partit nous chercher un café.

- Qui a pu faire ça ? demanda Archie en me tendant le café. Nolan n'avait pas vraiment d'ennemis, ou du moins, pas à ma connaissance.

- Mon père a évoqué l'idée des Serpents, dis-je. Mais ça ne tient pas la route, non ?

Archie secoua la tête :

- Je ne l'ai jamais vu parlé à un Serpent.

- Et une histoire de drogue ? proposai-je.

- Bof. Il n'en prend pas, je crois.

Archie et moi restâmes quelques instants sans parler, perdus dans nos pensées. La porte s'ouvrit à nouveau.

- C'est bon, vous pouvez entrer, nous dit Mme Walters. Mais pas longtemps.

(Daniel Sharman aka Nolan Walters.)

Le couple sortit et j'entrai avec Archie dans la chambre. Nolan était allongé sur le lit d'hôpital. Certes, il n'était pas beau à voir, mais son visage n'avait rien à voir avec ce que j'avais vu cette nuit. Il avait bien désenflé, cependant les traces de coupures et bleus étaient nombreux. Il avait les yeux ouverts, mais semblait quand même un peu dans les vapes.

- Salut Nolan, dit Archie en s'approchant doucement du lycéen. C'est Archie et Jenna. Jenna Thompson. C'est elle qui t'a trouvé cette nuit.

- Oh, dit Nolan. Tu m'excuseras, mais je ne t'avais même pas reconnu.

- Pour tout te dire, moi non plus, avouai-je un peu gênée.

- En tout cas, merci, dit Nolan.

Je lui fis un sourire.

- Qui t'a fait ? demanda Archie.

Nolan parut hésiter une seconde, il fronça les sourcils et dit :

- Je n'en sais rien. Des hommes, mais ils étaient cagoulés, alors je ne sais pas qui c'était.

- Il y a des gens qui t'en veulent ? voulus-je savoir.

- Non, c'est bizarre... murmura Nolan.

- Vraiment, tu n'as aucune idée ? insista Archie. Si ces mecs étaient cagoulés, c'est qu'ils avaient prévu leur coup.

- Non, répéta Nolan.

Soudain, il grimaça de douleur et se mit à hurler. Mme Walters entra précipitamment dans la chambre, tandis que son mari courut chercher une infirmière.

- J'ai mal partout, hurla Nolan qui se tordait de douleur.

Un médecin arriva. Avec une piqure, il lui injecta un liquide pour le calmer. Aussitôt, Nolan se calma et il ferma les yeux.

- Il va dormir, annonça le médecin. Il vaudrait mieux le laisser tranquille.

Le couple Walters se dirigea vers la porte, suivi par Archie et moi. Alors que ses parents étaient sortis, Nolan murmura quelque chose :

- Ja...son.

- Quoi ? m'exclamai-je instinctivement.

- Blos...som.

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