Avec la bonne identité
Quelques jours s'étaient écoulés depuis l'incident des cheveux. Yehana et Kahegami avaient tout expliqué au reste du groupe, qui malgré la confusion n'avait, pour le plus grand soulagement de leur ami, montré aucun signe de dégoût ou rejet comme il en avait eu peur. Pour ce qui est de leur patron, en revanche... En apprenant la nouvelle, il fut convoqué dans son bureau; c'est donc accompagné de Kahegami et Yura - qui avait été mise au courant - que Nana se retrouvait devant la porte du bureau de leur patron. Ses deux amies lui donnèrent une tape amicale dans le dos en signe de soutien avant de s'éclipser, leur présence n'ayant pas été requise. Les mains moites, il frappa à la porte.
- Entrez... Yehana?
- Oui, c'est moi.
Il entra dans le bureau et ferma la porte, ne prenant même pas la peine de s'assoir. Contrairement aux autres rares fois où il l'avait vu, le patron ne souriait pas du tout.
- Je suppose que tu sais pourquoi je t'ai fait venir, n'est-ce pas?
Yehana hocha de la tête.
- Je pense que tu n'es pourtant pas étrangère aux règles que nous avons instaurées avec vous... Pas de changements concernant vos cheveux sans notre accord! Enfin, qu'est-ce qui t'a pris?
- Je me sentais mal, monsieur.
- Parce que tes cheveux étaient longs?! C'est tout?!
- Parce que je ressemblais trop à une fille.
Confus, l'homme ne dit rien, et même s'il eût été tenté de dire quelque chose il ne l'aurait pu: Yehana, au bout du rouleau, commençait à péter les plombs lentement mais sûrement. Il parla de son mal-être, sa dysphorie, son corps de femme qu'il cachait sous ses vêtements amples, ses cheveux longs qu'il attachait presque en permanence afin de ne plus les voir, le petit pincement au cœur à chaque fois qu'on l'appelait "elle", la peur du rejet, le sentiment d'être une erreur, sa détresse profonde, les attentes envers lui en tant que femme, la pression de devoir être féminine quand ça ne lui correspond absolument pas... Tout en parlant, Nana pleurait de rage et de désespoir, regardant vers le sol, et sans s'arrêter.
Lorsqu'il eut fini et que le silence était revenu dans la pièce, le boss le dévisagea un petit moment, cherchant ses mots. Son expression n'avait pas changé. Il semblait toujours aussi froid, mais étonnamment plus calme. Enfin il se redressa sur sa chaise, et reprit la parole sur un ton posé.
- Yehana, je pense qu'on va devoir te suspendre un petit moment. Et tu devrais aller consulter.
Nana hocha lentement de la tête. Le patron se leva et le raccompagna, toujours aussi froidement mais calmement, vers la porte. Et en même temps que celle-ci se fermait probablement aussi son rêve de débuter un jour.
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