Chapitre deux

14/04/2015

Ma vie n'a jamais été vraiment intéressante. Je suis une fille banale, avec une famille banale, avec une vie banale. Tout est banal chez moi sauf ma meilleure amie, Noémie. Elle est juste extraordinaire et incroyable. Bien sûr, elle n'est pas parfaite et a ses défauts, tout comme moi, mais elle m'apporte tellement dans ma vie si ennuyante et monotone. On passe notre temps ensemble, comme deux soeurs jumelles et c'est pareil au collège. Il faut dire aussi qu'on n'a pas d'autres amis non plus. Les dures lois du collège. Juste parce qu'elle et moi avons eu notre puberté qui s'accompagne de quelques formes et quelques boutons disgracieux sur le visage, nous sommes exclues de leur société. Tant pis pour eux, ils ne savent pas ce qu'ils ratent. Enfin, ça c'est ce que je me répète tout le temps. Parce que en réalité, être à deux contre le monde impitoyable du collège, c'est un peu l'enfer. Tous ces regards sur nos corps, toutes ces paroles blessantes, toutes ces moqueries, toutes ces blagues, c'est beaucoup à la fin d'une seule journée. Heureusement, nous ne subissons aucun harcèlement ni violence alors je me dis que l'on s'en sort plutôt bien. J'aimerais tellement pouvoir être comme toutes ces filles de ma classe ; belle et fine. Je sais très bien, même si ma mère s'obstine à me dire le contraire, que j'ai du poids en trop. Il n'y a qu'à voir mes cuisses, mon ventre, mes hanches et mes bras. Gros, comme un sac à patates. Avec mon petit 1m61 et mes 55 kilogrammes, on ne peut pas dire que je sois fine ni maigre. Quant à Mimi, alias Noémie, elle est un peu comme moi morphologiquement, mais elle est beaucoup plus belle que moi avec ses cheveux bruns et son 1m65 que j'envie. D'autant plus qu'elle, elle pèse 60 kilogrammes et, pourtant, je fais tache à côté d'elle même si elle fait plus que moi. Je sais, il ne faut pas s'arrêter à un chiffre ni n'être que un chiffre, mais quand on est gros comme moi, on pense exactement ça. Je

-Qu'est-ce que tu fais, Spencer ? me demande ma meilleure amie, en s'affalant sur le lit à côté de moi.

-J'écris dans mon journal. je réponds, en le posant ainsi que mon crayon.

Je m'allonge ensuite sur le dos, les bras derrière la tête et m'imagine fine, belle, heureuse. Tout le contraire de ce que je suis actuellement.

-Ça ne va pas ? s'inquiète-t-elle.

-Pas trop, j'en ai marre du collège. je souffle.

-Oui, moi aussi. soupire-t-elle, tout en prenant la même position que la mienne, nos corps côte à côte. Je déteste tellement tous ces gens qui s'arrêtent seulement au physique. Je trouve ça naze d'être à part juste parce qu'on n'est pas comme elles.

-Oui, moi aussi, je voudrais tellement leur ressembler.

Et à peine ai-je fini ma phrase que mon amie me reprend d'un air faussement grave :

-Tu vas pas t'y remettre ! On est très bien comme on est, ce sont juste eux qui sont trop cons pour le comprendre.

-Tu crois pas que l'on serait plus heureuse et acceptée si l'on était plus fine ?

-Peut-être bien que si, mais ne compte pas sur moi pour me mettre au sport ni pour faire un régime. pouffe-t-elle.

Je la rejoins dans son rire et l'imagine courir ce qui fait redoubler mes rires.

-Je t'imagine déjà courir, en sueur et puante.

-Grosse vache, me lâche-t-elle, en me balançant un coussin dans le visage.

Quinze minutes nous suffisent pour être chaos toutes les deux après s'être battues comme des lionnes affamées. J'aime tellement tous ces moments-là, de bonheur avec elle.

-Plus sérieusement, j'en ai marre de toutes ces critiques et rires dans la classe, c'est pesant. je reprends finalement, voulant exprimer mon mal-être.

-Ne te prends pas la tête, sérieux, Spence'.

-Je sais, mais tu n'y penses jamais toi ? je questionne, en tournant ma tête vers elle, ce qu'elle fait également, alors nos visages se font face.

-Si, bien sûr. Mais je me dis que je t'ai toi et que c'est amplement suffisant. Je n'ai pas besoin de plaire aux autres, mais de plaire à ceux que j'aime.

-C'était profond ce que tu viens de dire. je me moque.

Et ça suffit pour nous provoquer un énième fous rire.

-Mais, merci en tous les cas.

Elle me sourit puis vient me prendre dans ses bras.

*

Le lendemain matin, c'est toute souriante que je retrouve ma meilleure amie.

-J'ai une proposition à te faire, déclare-t-elle avec un grand sourire que j'aime tant.

-Ah oui ? Quoi ? je demande, curieuse.

-Pour ça, va falloir attendre ce midi.

-T'es chiante, dis maintenant. plaidais-je avec une bouille censée être mignonne.

-T'entends ? Ça sonne ? me nargue-t-elle, en partant vers notre salle de cours de Maths.

Je cours pour la rattraper et lui donne un petit coup de hanche pour me venger. Coup qu'elle me rend en évidemment plus fort. Nous arrivons à notre salle de cours et nous nous asseyons à nos places respectives. J'ai gagné le gros lot puisque je suis à côté d'une des pires vicieuses de ma classe mais aussi sûrement la plus belle : Émeline Rustberg. Son regard me dévisage de la tête aux pieds avant que je ne prenne place à ses côtés. Autre chose qui me blesse à part son regard sur mes, je suis sûre, bourrelets, le fait que je remplisse pratiquement toute la chaise et pas elle. Et c'est encore pire quand je regarde et compare nos cuisses. Les miennes font presque le double des siennes. Nous commençons le cours et c'est aussi là que les blagues commencent pour moi.

-Tu peux me passer ta calculette ? me demande Julian, un garçon de ma classe, devant moi.

-Oui, bien sûr. je réponds naturellement.

Puis il pouffe de rire et je comprends alors. Quel pauvre con. Émeline à côté de moi rit également et regarde mon visage avec attention. Ce qui est drôle, c'est que j'ai autant de boutons qu'elle mais pas la même silhouette ce qui fait toute la différence. Oui, je pense souvent, voire tout le temps à ça ; mon image et ce que les gens voient de moi. C'est pour quoi la vie est devenue un vrai clavaire et que je suis bien heureuse lorsque la pause de midi arrive. Je pars alors manger au self avec Noémie. On prend notre petite table de seulement quatre places et nous enlevons nos vestes avant de s'asseoir.

-Tu vas me la dire cette proposition ? j'attaque dès que nous sommes installées, impatiente de savoir de quoi il est question.

-J'ai repensé à notre conversation de l'autre jour, celle sur notre apparence, elle précise, et j'ai réfléchi. Moi aussi, je me sens mal finalement et je me suis dis qu'on pourrait faire du sport ensemble, comme ça, ça nous motiverait encore plus.

-C'est une super idée ! je m'exclame, ravie de cette proposition. On pourrait allait courir ce soir ?

-Wouah ! Déjà ? J'imagine que je n'ai plus le choix ! rit-elle, en avalant un morceau de pain.

Elle n'a effectivement plus le choix, puisque une fois que nous avons fini nos devoirs ensemble après les cours, nous sommes allées courir autour de l'étang près de chez Noémie. Ça a été un peu dur de reprendre et les courbatures lorsque nous sommes arrivées à ma maison ont été horriblement douloureuses. Nous nous étalons sur mon lit comme des grosses larves une fois dans ma chambre.

-On devrait se peser, je propose, comme ça, on pourrait voir nos efforts au fil du temps.

Noémie opine de la tête et me suit jusqu'à ma balance dans ma salle de bain. Elle passe la première dessus et un 60,5 s'affiche.

-Putain ! s'exclame ma meilleure amie. Je ne pensais pas que je pesais autant. commente-t-elle, en pinçant son ventre légèrement arrondi.

-Et moi donc, 55 kilos. lançais-je dépitée, après être à mon tour passée sur la machine électrique alias l'horreur pour moi. Il faut vraiment que je fasse quelque chose !

-Mais non tu es parfaite comme tu es. me rassure mon amie. Regarde-moi, je pèse plus que toi.

-Oui, mais tu es plus grande aussi donc c'est complètement normal.

-Dis-toi qu'on a fait du sport et que demain ça serait moins sur la balance.

Sauf que le lendemain, à mon plus grand désespoir, je pesais 55,5 kilogrammes. Je me suis donc emparée de mon journal et j'ai écrit pour me libérer :

16/04/2015

Je ne comprends pas, j'ai couru hier et, pourtant, j'ai pris du poids aujourd'hui. J'en ai marre. Marre d'être comme ça, marre de ce corps, marre de mes cuisses, marre de mon ventre, marre de mon double menton, marre de mes hanches, marre de mes mollets et marre de mes bras. J'en ai juste marre. Pourquoi je ne peux pas être fine, punaise ! La vie serait tellement plus facile et plus belle. Je crois que la course une fois par semaine ne va pas être suffisante si je veux perdre tous ces kilos en trop. Tous ceux que je vois et qui me déprime. J'aimerais pouvoir montrer à cette Émeline et Julian que je peux être belle et mieux qu'eux. Voir leur regard vert de jalousie.

Et j'ai honte parce que juste après j'ai mangé deux tranches de brioche avec du Nutella mais heureusement également une banane.

Super dessin de victooo56 , passez lire son histoire:)

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