Inquiétude

Jean Valjean tint bon des semaines ! Merde ! Deux mois sans aller au commissariat de la rue de Pontoise ! Deux mois sans aller frapper à l'appartement où vivait le commissaire, pour interroger Mme Levi ! Deux mois sans quémander des informations auprès de Vidocq, rue Cloche-Perce, l'ancien chef de la Sûreté devait être au courant de cette affaire.

Le mois de juin était beau mais humide. Il faisait grimacer l'ancien forçat, sa jambe le tirait toujours durant les mois de printemps. Valjean appréciait plus le froid sec de décembre que la petite pluie douce printanière. Il n'était pas fait pour vivre dans une ville et surtout pas à Paris. Il attendait avec impatience la chaleur de l'été qui ne devrait plus tarder ! Un mois de juin chaud et beau ! C'était tout ce qu'il désirait, n'est-ce-pas ?

Donc il se chargeait de son jardin en maugréant contre le temps. Il s'efforçait de ne pas penser à Javert.

Deux mois et il perdit la raison.

Il opta pour le Bureau de renseignement pour le commerce. Vidocq le vit entrer dans son bureau sans vraiment de surprise.

« Je ne peux rien te dire Valjean, si tu es venu dans cet espoir .

- Je l'étais en effet. Mais au moins est-ce que tu sais comment il va ?

- Il va bien. Il a eu du mal à se faire accepter mais il y a réussi. Maintenant, ça va mieux.

- Je voudrais le voir !

- Pourquoi Valjean ?

- C'est ton ami mais c'est aussi mon ami !

- Des forçats défouraillés. Javert n'a quand même pas de chance avec ses potes, non ?

- Peux-tu lui dire de me donner de ses nouvelles ?

- Il doit vraiment te manquer ton argousin, le-Cric pour que tu viennes t'aplatir devant moi ainsi ! Je vais voir ce que je peux faire, mais ce ne sera ni chez toi, ni chez lui !

- Au Café Suchet ?

- Ce n'est pas une idée stupide. Allez le-Cric, je transmettrais ton message.

- Merci Vidocq. »

Valjean était tellement soulagé, cela fit rire l'ancien forçat.

« Tu veux te rendre utile Valjean ? J'ai des tas de dossiers de faiseurs à vérifier et je commence à manquer de temps.

- Des faiseurs ?

- Tu as été patron d'industrie, non ? Tu dois avoir l'habitude de traiter avec les escrocs ?

- J'en ai connu en effet.

- Comment tu les traitais ?

- Avec fermeté. Et avec mon chef de la police quand l'affaire était trop difficile à démonter.

- Je n'ai pas Javert avec moi, mais je ne serais pas fâché qu'un autre patron me donne un coup de main.

- Avec plaisir Vidocq. »

Et Valjean s'assit en face de Vidocq, saisissant le premier des épais dossiers à examiner. Les escrocs étaient une plaie dans l'industrie, c'était juste, ils s'immisçaient dans les affaires, proposant leurs produits à un prix moindre, mais sans offrir de livraison, jetant de la poudre aux yeux pour écouler leur marchandise frelatée et demandant toujours des avances sur la moindre transaction qui n'aboutirait jamais.

Oui M. Madeleine avait eu maille à partir avec cette engeance-là.

Valjean travailla toute la journée. Il mangea sans y penser un friand à la saucisse qu'un adjoint de Vidocq vint leur servir, accompagné d'une pinte de bière. Des dossiers à lire, à résumer, il fallait chercher l'erreur, l'indice... Un travail de longue haleine. Cela permit à Valjean de se changer les idées.

Le soir, il rentra fatigué et les yeux douloureux. Il vieillissait, constata-t-il amèrement et devait songer sérieusement à se trouver une paire de lunettes. 

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