Selwyn regardait sa fille avec des yeux meurtriers. Son sourire écorché déformait son visage abîmé par le temps. Il tenait sa baguette et ricanait avec une voix glaçante.

-Je pensais que tu serais plus heureuse de me voir. Ça fait si longtemps qu'on ne s'est pas vus.

Jane secoua la tête. Une boule s'était infiltrée dans son ventre. Elle ne pouvait prononcer un mot, comme si on l'avait pétrifiée. Une larme coulait le long de sa joue.

-Tu n'es pas mon père... tu ne l'as jamais été... murmura-t-elle.

Elle tenta vainement de dégager sa jambe, mais Selwyn la tenait trop fort. La baguette de la jeune fille était trop éloignée pour qu'elle s'en empare. Il n'y avait qu'eux d'eux. Plus loin, ils entendaient les cris et les explosions.

-Oh, si. Je crois que Voldemort s'est chargé de te raconter ta jolie histoire. Comment l'as-tu trouvée ?

Jane arriva enfin à le repousser et se jeta sur sa baguette, tandis que son père tombait à la renverse. Elle se tourna vers lui pour lui jeter un sort, mais Selwyn fut plus rapide et la désarma. Sa baguette s'échoua à l'autre bout de la rangée.

-Oh, Jane. J'attendais de toi une réaction plus appropriée.

Jane sentit la colère monter. Ce n'était pas de la colère, mais de la haine. Elle fulminait de rage.

-Tu n'es pas mon père ! Tu as tué mes deux mères ! Jamais je te considérerai comme tel !

Selwyn ricana. Il murmura un sort que Jane n'avait jamais entendu, et la jeune fille se plaqua à terre avant qu'il ne l'atteigne. Elle se mit à courir et récupéra sa baguette, alors que Selwyn la suivait en riant. Elle se tourna vers lui et pointa sa baguette dans sa direction. Selwyn fit de même et lui sourit narquoisement.

-Tu veux me tuer ? Allons, Jane, tu sais très bien que tu en es incapable.

Jane avait la main qui tremblait. Son cœur tambourinait contre sa cage thoracique et elle se mordait la lèvre jusqu'aux sang. Une voix lui murmurait de l'achever, une autre de fuir.

-À cause de toi, mon père a failli sombrer dans la dépression et je n'ai jamais connu l'amour maternel. J'ai prié maintes fois pour que tu meures. Je pensais que tu étais mort, car depuis mon adoption je ne t'ai jamais revu. Mais maintenant que tu es devant moi, je ne sais pas ce qui me retient de te faire payer.

Selwyn ricana et Jane tenta de le pétrifier. Le Mangemort esquiva son sort de justesse et perdit son sourire.

-Je crois qu'avant que tu ne me tues, il faudrait que tu saches quelques petites choses, Jane chérie.

Jane frémit au surnom qu'il lui donna et serra les dents.

-Voldemort s'en est déjà occupé.

-Pas vraiment. Il ne t'a pas tout dit.

Jane lui jeta un autre sort. Selwyn avait toujours un temps d'avance et brisa son sortilège. Son sourire faussement enjoué s'était évanoui, et toute sa folie déformait ses traits.

-Quand ton cher Harry Potter a battu Voldemort, je me suis exilé avant d'être arrêté. C'est aux Etats-Unis que je me suis réfugié. Là-bas, personne ne me connaissait.

Jane refusait de l'écouter. Elle s'empara des prophéties et les lui jeta au visage. Elle criait des sortilèges, mais aucun n'atteignait le Mangemort. La haine l'empêchait de réfléchir, et les larmes brouillaient sa vue.

-J'ai rencontré une sorcière assez idiote pour tomber amoureuse de moi. Longtemps, je lui ai fait croire que je l'aimais, mais ce n'était qu'un mensonge afin d'assurer ma liberté, continua Selwyn comme si de rien n'était.

-Je m'en fous ! Ferme la ! FERME LA !

-2 ans et demi après mon départ, elle a insisté pour qu'on fasse un enfant. Après toi, je n'en avais plus envie. Mais en y réfléchissant, si Voldemort revenait, il pouvait servir notre cause. Je n'avais pas pensé à ça en t'abandonnant. Alors j'ai accepté, et quelques mois plus tard, j'avais un fils.

-TU MENS !

Jane s'effondra à terre. Elle n'avait plus la force de résister. Selwyn s'approcha d'elle et prit une mine faussement attristée. Il la détruisait à petit feu.

-Tu mens...

-Eh non. Après sa naissance, je l'ai enlevé et je suis parti. Qu'est devenue sa mère ? Je n'en sais rien et je m'en fiche. Une fois certain de ne pas être retrouvé par qui que ce soit, je me suis chargé de l'éduquer. Je lui ai appris les bases de la magie noire, je lui ai transmis le savoir des Mangemorts. Je lui ai appris à servir ma cause, à servir Voldemort sans limite. Il était bercé par ce que je lui racontais. Je lui contais tout ce que Voldemort avait commis, et il y croyait. Parce que personne ne pouvait me détromper. Il était persuadé que j'avais raison. Alors plus il grandissait, plus il devenait dangereux. Il n'arrêtait pas de me dire qu'il voulait devenir un Mangemort. "Papa, je veux avoir le même tatouage que toi", "Papa, je veux rencontrer Voldemort"... Il était aveuglé par ce que je lui avais enseigné. Et quand Voldemort est revenu, nous sommes immédiatement retournés en Angleterre. Il avait si hâte de servir comme son noble père. Et quand, enfin, il s'est retrouvé devant lui, j'ai compris que j'avais réussi.

Jane secoua la tête. La voix de serpent s'insinuait dans son esprit. Elle n'arrivait pas à décrocher. Elle voulait se persuader qu'il mentait, mais au fond d'elle-même, elle savait qu'il disait la vérité. Elle avait devant elle une vérité qu'elle avait longtemps ignorée : elle avait un demi-frère Mangemort. Ses sanglots se mêlaient à la douleur. Une douleur qu'elle n'avait plus ressentie depuis longtemps.

-Voldemort lui a tatoué la Marque des Ténèbres. Il en était si fier; tu aurais dû le voir avec son sourire cruel. Ainsi, il était devenu un véritable Mangemort à 13 ans seulement.

-TU MENS !

-Mais non, Jane chérie, je ne mens pas. Pourquoi mentirais-je? Et ce que tu ne sais pas, c'est que c'est lui qui a causé le crash de l'avion dans lequel ton amoureux se trouvait. Je lui ai parlé de toi, et le dégoût que je ressentais à ton égard, lui aussi l'a ressenti. Alors quand on a appris grâce un élève de Poudlard que ton amoureux prenait l'avion, il a insisté pour s'occuper de lui. Il avait si envie de te voir souffrir. Je ne lui ai rien demandé : il s'en est chargé comme un grand. Ton demi-frère a tenté de tuer ton amoureux pour t'anéantir, n'est ce pas horrible ?

C'en était trop. Jane lui donna un coup de pied dans le visage et se leva en quatrième vitesse. Elle tendit sa baguette vers son père et n'hésita pas une seconde.

-Endoloris !

Elle avait bien conscience d'utiliser l'un des Sortilèges Impardonnables, mais voir son père gémir de douleur lui procurait une satisfaction insatiable. Il lui avait tout pris : ses mères et son frère. Il lui avait brisé sa vie entière. Pourquoi n'aurait-elle pas le droit de le faire souffrir à son tour ? Une voix lui chuchotait de le rendre fou et de lui ôter la vie. Il ne méritait que ça, après tout. Elle ne ressentait aucune pitié envers lui. Le voir se lamenter lui procurait un bien fou.

-Jane ! Qu'est ce que tu fais ?

La jeune fille se retourna. A l'autre bout du couloir, Harry courrait dans sa direction. Quand elle le vit arriver vers elle, elle brisa immédiatement le sortilège. En voyant Selwyn à terre et inerte, elle fut pris de remords. Mais qu'avait-elle fait ? Ce n'était pas elle. Elle n'était pas violente à ce point. Même à la personne qu'elle détestait le plus, elle n'oserait jamais lui infliger une telle douleur. Elle n'oserait jamais utiliser un Sortilège Impardonnable. Que lui avait-elle pris ? Elle avait l'impression de se réveiller d'un cauchemar.

-C'est... C'est Selwyn ? demanda timidement Harry.

Jane n'avait pas la force de répondre. Les larmes se remirent à couler, et elle hocha simplement la tête.

-Jane...

Harry voulut dire quelque chose, mais une explosion les fit sursauter : leurs amis avaient besoin d'eux. D'autres Mangemorts s'en prenaient toujours à eux.

-Viens. Il... Il faut qu'on aille retrouver Ron et Hermione...

Harry lui attrapa le bras et l'entraîna avec elle. Jane jeta un dernier coup d'œil dévasté à son père qui gisait encore à terre, immobile. Il l'avait brisée, et ce pour toujours.

A Suivre.