Chapitre 1

L'air chaud se faufile à travers la végétation, ainsi que les bâtiments.

Dans l'atmosphère, une odeur prononcée de sel parvient aux narines de chacun. Le propre même de l'univers marin, et des ports qui se multiplient à travers le monde, sur chaque continent découvert. C'est ce qui en fait leur identité, interpellant tous ceux qui foulent ces terres.

Les gens passent presque outre ces effluves forgés et intenses, se concentrant sur les marchands qui déchargent leur cargaison. Ceux qui se mettent en route pour les marchés aux alentours, afin de vendre les marchandises produites. Il y a aussi les transactions qui se déroulent à quai.

Certains dévoilent le contenu de leur chargement ici, le cédant au plus offrant. Ils repartent avec une bourse pleine d'or, le sourire aux lèvres, bienheureux du tournant de leurs négociations, avant de reprendre la direction de chez eux .

D'autres s'arrêtent ici par dépit, le temps de faire une halte pour se réapprovisionner. Les voyages sont parfois longs et conséquents. Demandant une certaine quantité de nourriture et d'eau potable, ainsi que d'autres matériaux utiles lorsque le voyage s'avère plus complexe et ardu que ce qui avait été imaginé.

C'est le cas de cet équipage, qui vient tout juste d'arriver et de toucher terre, posant enfin un pied sur le quai. Leur bateau paraît quelque peu amoché. Les voiles sont repliées sur elles-mêmes, déchirées à de multiples endroits, ne tenant même plus en place. La figure de proue ne ressemble plus à rien, tandis que le mât semble ne tenir qu'à la seule force d'un miracle. Le pont est à peine praticable, puisque le bois craque dangereusement, empêchant sa traversée.

Les quelques fous qui se tentent à marcher dessus doivent prier toutes les divinités pour ne pas atterrir au fin fond de la cale, de ce qui est maintenant comparable à une épave. Ils n'auraient même pas dû être en mesure de naviguer jusqu'ici, avec un navire dans un tel état.

C'est la pensée qu'ils partagent à l'unisson, tandis qu'ils jettent l'ancre, et se chargent de s'arrimer pour descendre de la bicoque.

« - On fait quoi maintenant ? »

Le chef garde le silence, avisant son bien le plus précieux d'un œil. Son bras droit se tient fièrement à ses côtés, les bras croisés sur sa poitrine, une expression très sérieuse vissée sur le visage.

C'est un garçon qui en impose par sa présence, et que beaucoup craignent, juste par l'aura qu'il dégage. Pourtant, Eijiro Kirishima est un garçon très aimable avec le cœur sur la main, qui sait faire la distinction entre les instants où la colère est nécessaire ou non. Mais, avec son mètre quatre-vingt-dix-sept, et sa musculature on ne peut plus développée, il lui suffit de juste montrer ses canines pointues et acérées, pour dissuader quiconque de lui chercher des problèmes.

Sa carrure est ponctuée de quelques tatouages noirs, ainsi qu'un regard rouge vif, qui accroche immédiatement. Le tout accompagné d'une chevelure longue, mêlant curieusement des mèches noires et rouges, qui terminent le portrait.

« - On répare. »

La décision est sans appel, tombant telle une enclume sur eux, tandis que le forban à la tête de cette flotte tourne les talons pour donner ses ordres. Eijiro écarquille le regard, et ne peut s'empêcher de l'attraper par le bras, afin de lui signifier son étonnement.

« - Attends ! Katsuki, tu veux vraiment réparer cette épave ?? »

L'homme de 28 ans se retourne, avisant son camarade du même âge, d'un œil mauvais et très sérieux. Son regard, lui aussi d'un rouge très prononcé, est cependant d'une couleur plus profonde. Il est également porteur d'une certaine lueur, lui valant sa réputation de pirate sanguinaire, faisant froid dans le dos à quiconque ose tenter de le tenir.

Bien qu'il fasse quelques centimètres de moins que son bras droit, Katsuki Bakugo avoisine le mètre quatre-vingt-dix, et tout chez sa personne impose le respect. Sa mâchoire carrée et marquée se serre, ponctuée d'un début de barbe qu'il n'a pas encore pris le temps de raser, en raison de leur traversée, qui vient tout juste d'être avortée.

Sa chevelure, d'un blond cendré assez unique en son genre, qui a légèrement pris en longueur par rapport à ce qu'il apprécie, encadre son visage. Dans sa nuque, deux longues tresses ponctuées de quelques perles sont visibles, s'échappant d'un bandana noir qu'il se plaît à porter depuis bien longtemps.

Son corps est très musclé, témoignant de toutes les tâches physiques qu'il effectue. À quelques endroits, des cicatrices sont notables. Selon lui, des trophées de ses diverses batailles, mais surtout de ses victoires.

La plus grande de tout se situe sur son abdomen. Une blessure qui a bien failli l'emporter il y a de ça quatre ans, mais qui est encore marquée comme au premier jour.

« - Tu me suggères de laisser ce bateau à l'abandon Eijiro ? Sérieusement ? Crache Katsuki en grinçant des dents.

- Non c'est pas... Tu as vu tout ce que ça va demander comme réparation ? T'as les moyens d'acheter un nouveau navire, tu le sais.

- Jamais, tu m'entends ? Je dis bien jamais je n'abandonnerais ce bateau. Il appartenait à mon père. Et il est hors de question que je m'en sépare. »

Eijiro n'ajoute rien de plus, comprenant que la conversation s'arrête ici. Son capitaine est suffisamment borné comme ça, et même s'ils s'entendent tous les deux très bien, depuis de nombreuses années avant qu'il n'intègre son équipage, il reste son supérieur hiérarchique. Loin de lui, l'envie de vouloir outrepasser les limites.

Il a pleinement conscience des moments où il peut se permettre de pousser le vice, et de ceux où il doit se contenter de se taire. Ici est venu le temps de ne rien ajouter de plus, et de se plier à ce que Bakugo énonce.

Un air toujours mauvais greffé à la peau, Katsuki se retourne une nouvelle fois, lançant un vague coup d'œil à l'endroit où ils viennent de jeter l'ancre. C'est un port marchand, pas des plus grands, mais suffisant pour que les marins s'y arrêtent pour se réapprovisionner, avant de reprendre la mer. La route partant d'ici, rejoint diverses villes, qui réunissent des artisans de multiples métiers, faisant ainsi la richesse de cette île plutôt vaste du Pacifique.

Ce lieu, il l'a foulé à maintes reprises. Déjà lorsqu'il était un bambin, à peine en âge de se créer des souvenirs, et d'avancer sans trop s'emmêler les pieds entre eux. Et puis, quand est venu le temps d'apprendre à être un marin digne de ce nom, Katsuki a appris tout ce dont pouvait regorger cet endroit, point stratégique pour bon nombre de personnes, qui connaissent un tant soit peu les principes de la navigation. Alors, quand ses prunelles commencent à observer les alentours, à la recherche d'une enseigne bien particulière qu'il reconnaît entre mille, le garçon sait qu'il vient de taper à la bonne porte.

En une dizaine de minutes, les ordres sont donnés au reste de son équipage, tandis qu'il se rend en personne à la bâtisse en question, toujours accompagné de son fidèle bras droit. Le lieu est un genre de grand hangar en bois, dans lequel s'activent quelques personnes, ressemblant à des fourmis ouvrières. Ils agissent sous la coupe d'un homme plutôt grand, qui semble même dépasser Kirishima, mais qui est pourvu d'une bonne bouille.

Il est très souriant, avançant gaiement dans son tablier, déployant ses ordres à la volée, d'une voix très calme et douce. La totalité de ses employés l'écoute sans même chercher à contester, ni même trouver quelque chose à redire devant ce calme olympien. Ils se contentent d'exécuter tout ceci, dans une ambiance des plus sympathiques. Pratiquement un autre monde, quand on prend le temps de comparer avec le brouhaha alentour, qui n'en finit pas de prendre en intensité.

Le patron s'avance jusqu'au duo, toujours avec un grand sourire, ne semblant pas se formaliser des tenues des pirates qui lui font face.

« - Le grand pirate Dynamight en personne. Il y a bien longtemps que je ne t'ai pas vu dans le secteur, mon garçon.

- Il semblerait que je n'ai pas eu l'occasion de revenir ici avant. Mais j'ai besoin de tes services Ken. Tu penses que c'est envisageable ? » Questionne Katsuki, sans passer par quatre chemins.

Sous cette question se dissimule une affirmation ferme. Ken Ishiyama est un des meilleurs de son domaine, et connaît très bien le rafiot qu'il s'apprête à lui confier. Sans doute parce qu'il le réparait déjà, bien des années plus tôt, quand Masaru Bakugo était encore le capitaine de ce navire, qui a vu tellement de mers et d'océans depuis le début de son existence.

« - Bien évidemment, lâche-t-il gaiement. Je ne peux rien refuser au fils d'un vieil ami ! Mais dis-moi, es-tu pressé ? Vous avez tous deux l'air de vouloir repartir au plus vite. »

L'homme, qui paraît frôler la cinquantaine, se permet de les jauger par-dessus sa petite paire de lunettes. Malgré tout, il hausse les épaules, reportant son attention sur la pièce qu'il était en train de nettoyer avant leur arrivée. Katsuki tente de ne trop rien laisser paraître, même si cet homme semble le connaître depuis le berceau, et soit donc à même de lire entre les lignes, pour déceler ce qu'il ne dit pas.

Rien ne sert de mentir, ou même d'arrondir les angles avec lui.

« - Nous aimerions faire au plus tôt, effectivement, confirme-t-il.

- Mais il y a beaucoup à faire, se permet d'ajouter Eijiro, avant de se prendre un coup de coude dans les côtes, de la part de son chef.

- Je vois. Il faut que je jauge l'étendue des dégâts par moi-même de toute manière. Nous allons vite savoir ce qu'il en est. »

Après avoir laissé des consignes précises à son équipe, l'homme suit ses futurs clients jusqu'à leur bien afin de constater lui-même l'ampleur des travaux. Désormais dans son élément, son attitude change du tout au tout. Il observe avec minutie, dressant une liste des réparations qui s'imposent, afin de rendre le navire utilisable, ainsi qu'un devis.

Les finances ne sont pas l'aspect qui inquiète le plus Katsuki. Avec sa carrière de forban, s'étirant sur pratiquement plus de dix ans maintenant, il s'est construit une véritable petite fortune en plus de la réputation qui va avec. Peu importe la somme qui découlera de ce chantier, il peut donner tout ce qu'il a pour récupérer ce bien.

Peut-être qu'un jour il acceptera d'acheter un second navire, pour ses voyages les plus dangereux. Mais tant qu'il le peut, c'est celui-là qui l'accompagnera dans ses aventures.

« - Je suis désolé, mais cela va me demander plusieurs semaines. Il y a beaucoup à faire, et au vu des réparations nécessaires, il est hors de question de bâcler ceci. Ça risquerait de se retourner contre vous à la première bourrasque. Il faudra certainement faire appel à quelques artisans des villes voisines pour certaines pièces. Et regarde-moi ces voiles...elles sont inutilisables. Tu devrais prendre le temps de les emmener à l'une des couturières, pour qu'elle te remette tout ça en état. Je te donnerais des noms. »

Le pirate commence à pâlir devant cette liste de recommandations, qui n'en finit plus de s'allonger, à mesure que Ken ouvre la bouche. Les choses paraissent encore moins bien se profiler qu'il ne l'imaginait, et prennent une tournure qui lui déplaît sincèrement. Tout en grognant à voix basse, il serre les poings, laissant tout son surplus de colère émaner dans ce geste, pour ne pas exploser au beau milieu de ce port.

« - Les moussons commencent dans moins de quinze jours ! Je dois être reparti au plus tôt, si je veux que mon équipage et moi nous ayons une chance d'atteindre le continent voisin avant le début.

- Si vous voulez repartir immédiatement, prends-toi un autre bateau, mon petit. Je ne suis pas un faiseur de miracles. Et j'ai aussi toute une clientèle qui m'attend. Ce bateau je le connais bien, je le rafistolais déjà à l'époque où Masaru naviguait, et où bon lui semblait d'ailleurs. Il a du vécu, et je ne peux pas me permettre de faire n'importe quoi, si tu veux qu'il tienne le coup. Tu devrais être raisonnable. »

Katsuki serre les mâchoires, une fois de plus, et ronge son frein. Cet homme, qui prononce des paroles l'excédant au plus haut point, est sans doute son seul espoir de récupérer son précieux. Alors il n'ajoute rien de plus, se contentant d'emmagasiner mentalement les informations, pour gérer la période à venir.

La période des moussons s'annonçant, il est hors de question de reprendre la mer avant plusieurs mois. Malgré son caractère compliqué, ainsi que sa fâcheuse manie à vouloir avoir le dernier avis sur tout, il reste un capitaine responsable. S'il y a bien quelque chose qu'il ne s'aviserait jamais de faire, c'est mettre en danger son équipage de manière égoïste.

Alors, bien que cela coûte énormément à Katsuki de s'y plier, il est obligé de rejoindre l'opinion de son "sauveur". Ils doivent donc, lui et son équipage, accepter l'inéluctable vérité qui se présente à eux. La perspective d'un voyage en mer est à écarter en totalité. Ils sont coincés sur cette île, à devoir prendre leur mal en patience, jusqu'à ce qu'ils ne puissent reprendre le chemin du continent.

« - Alors ? Maintenant il se passe quoi ?

- T'as cru que j'avais une solution magique tête d'ortie ? On crèche ici autant que nécessaire, lâche Katsuki, après s'être mis en route vers un hébergement. On va en profiter pour gérer quelques affaires commerciales, et voir ce qui est exploitable dans le secteur. Vu que ça fait un bail que je suis pas venu dans le coin... Mais pour le reste, il va falloir prendre son mal en patience.

- Tout ce que ton équipage ne sait pas faire.

- Ouais, ben ils vont devoir s'y plier. Je peux rien faire de plus pour eux là. Ils ont qu'à prendre ça comme des congés.  »

Marchant sur ses talons, Kirishima lève les yeux au ciel, reconnaissant bien là le caractère bien trempé de son meilleur ami. Ils se connaissent depuis bien longtemps, leur première rencontre datant de leur enfance. Katsuki venait d'arriver sur une île modeste, celle où lui-même habitait et dans laquelle tout le monde se connaissait, alors qu'il était tout juste âgé de cinq ans.

Lui et sa mère venaient habiter ici, pour des raisons qui ont toujours quelque peu échappé à Eijiro. Enfin, jusqu'à ce que celui-ci grandisse, et finisse par comprendre les enjeux qui pouvaient découler de cette vie. Le père de son ami, un pirate possédant une certaine renommée, et bien connu pour parvenir à se fondre dans le décor, tentait simplement de mettre en sécurité sa famille, afin qu'ils ne pâtissent pas de ses activités.

Mitsuki, une grande femme partageant la quasi-totalité des caractéristiques physiques de son fils, faisait toujours bonne figure. Malgré les absences répétées de son mari, elle s'appliquait à raconter ses folles histoires à Katsuki, qui a élevé ce père absent au rang de héros. Depuis petit, il racontait à qui voulait l'entendre qu'il foulerait toutes les terres possibles et inimaginables, et écumerait les mers, pour devenir le forban le plus incroyable que le globe ait pu connaître.

Et le monde est forcé de reconnaître que cet homme a réussi son pari. Là où son père opérait en toute discrétion, il aime se faire remarquer et montrer un signe de son passage. Tous les continents ont eu vent de son histoire, et de la liste de ses méfaits. Katsuki, connu sous le nom du pirate Dynamight, en raison de son goût prononcé pour les attaques ponctuées de multiples explosions, est sans doute le plus riche et le plus avide qui existe en ces terres.

« - Tu crois que c'est toujours comme avant ? Lâche Kirishima, alors qu'ils viennent de rejoindre l'endroit qu'ils cherchaient.

- Y a juste à espérer. »

Arrivés devant une auberge modeste, ils avisent la devanture quelques instants. La pancarte de l'échoppe est complètement indéchiffrable, ployant sous la poussière et sérieusement amochée. Elle est marquée, certainement en raison des intempéries, et du temps qui passe, laissant des traces sur tout ce que chacun a pu connaître jusqu'à présent.

Elle était bien plus pimpante autrefois, et accueillante aussi. Si bien que le duo de camarades se questionne sur ce qui a bien pu se produire en ces lieux. Katsuki espère de tout cœur que le propriétaire de l'échoppe n'a pas changé, et qu'il s'agit toujours de ce vieux bougon, qui le connaît également depuis tout jeune. Bien qu'il n'en dise rien, le capitaine est traversé d'une forme de nostalgie, de revenir en ces terres qui l'ont profondément marqué, dans un registre très positif. Et, quelque part, Bakugo doit avouer qu'il est assez heureux de partager ceci avec son équipage. C'est un endroit qui regorge de tant de choses, et que certains n'ont pas encore eu la chance de visiter.

Il a beau ne plus être le même qu'autrefois, son âme continue de vibrer de cette passion, similaire à celle qui l'animait déjà lors de son enfance. Son regard brille de la même façon, comme les nombreuses fois où Katsuki a exploré les recoins de ces lieux, marchant fièrement aux côtés de son forban de père. Sa mère aimait les observer fièrement, heureuse de voir les deux hommes de sa vie progresser dans la même direction.

Elle-même fille d'un pirate, qui a tout de même connu une envergure bien moindre que celle de son mari, Mitsuki a toujours su les sacrifices que pouvait engendrer une telle vie. Elle s'est continuellement assurée d'offrir la meilleure éducation à leur fils, tout en encourageant les choix de son conjoint, qui est resté un homme aimant jusqu'à la fin.

« - Oh ? T'as peur ?

- Quoi ? Moi, avoir peur ? Tu te ficherais pas un peu de ma gueule, tête d'ortie ?!

- J'demandais ça comme ça. C'est pas moi qui regarde la porte depuis cinq minutes comme si elle allait me bouffer. »

Le capitaine se met à bougonner, pestant et clamant qu'il est décidément entouré d'incapables, qui ont le don de le mettre absolument hors de lui, tout en poussant cette fameuse porte. Eijiro hausse les épaules, réprimant un petit ricanement qui menaçait d'émaner de lui. Katsuki a beau être son meilleur ami, il lui collerait probablement une baffe monstrueuse, s'il continue à l'énerver comme ceci. Malgré tout, la situation a un attrait comique, qui l'amuse silencieusement.

Il sait pourtant que la peur ne fait que très peu partie du panel d'émotions qui traversent son ami blond.

En effet, Katsuki est surtout du genre hargneux et dur à cuire. Connu pour son attrait colérique ainsi que son vocabulaire fleuri, il inspire chez beaucoup la peur. La simple mention de son nom peut valoir à certains des sueurs froides, ainsi que l'envie de s'écarter de son chemin, pour éviter tout incident fâcheux. Pour autant, Dynamight ne tue généralement pas par gratuité, mais uniquement lorsqu'il estime un tel résultat nécessaire, ou lorsqu'il se confronte à des ennemis sanguinaires, qui règlent tout par le sang. Ses capacités en termes de combat au corps à corps, en plus du maniement des armes à feu, en font un petit prodige qui ne rate jamais sa cible, ou presque.

De plus, le capitaine s'avère intransigeant sur beaucoup de registres, ne permettant qu'à peu de personnes de rejoindre sur équipage, préférant mille fois privilégier la qualité à la quantité.

Après tout, il ne voit pas l'utilité de s'encombrer de personnes, ne faisant aucunement preuve de loyauté, ou pas assez à son goût, plutôt qu'un groupe plus restreint en qui il peut avoir une certaine forme de confiance. Les membres qui avancent à ses côtés, parfois depuis ses tout débuts, n'ont jamais failli une seule fois à leur tâche, et se sont toujours montrés dignes de cette opportunité qui leur a été offerte. Venant tous d'horizons différents, ils se montrent complémentaires dans leurs attributions, ainsi que leurs capacités respectives, constituant un équipage d'une dizaine de personnages, tous plus intéressants les uns que les autres.

« - C'est dingue. Y a rien qui a changé ici, constate Eijiro, en jetant une œillade à la salle.

- On n'en est pas encore sûr, ça reste à prouver. »

Sans s'attarder plus sur la salle principale de l'auberge, qui est semblable en tout point à celle qu'il a foulée quelques années plus tôt, Katsuki se dirige vers le bar en bois foncé. Autrefois laqué précieusement, et sérieusement entretenu, le meuble a désormais perdu toute beauté et semble se faner dans cet espace triste. Le temps attaque absolument tout, ne laissant strictement rien perdurer.

Le pirate fronce les sourcils, tout en remontant les manches de sa chemise blanche, qui mériterait quelques points de couture. Il grimace, en constatant que son tricorne est resté dans sa cabine. Il déteste laisser ses biens de valeurs, ceux d'un registre sentimental, trop loin de lui. Katsuki préfère avoir un œil sur tout, et rester vigilant. N'importe qui pourrait chercher à lui dérober ses affaires, sous prétexte de les revendre à un bon prix, juste parce qu'elles lui ont appartenu.

Tapant sa main sur le comptoir, l'homme se racle la gorge, et prend le temps de s'adresser à une serveuse quelconque, qui gère visiblement le service en salle. Celle-ci sursaute, et se met légèrement à trembler devant la mine agacée de Katsuki, qui semble excédé d'attendre.

« - Je veux voir le propriétaire.

- Il...je suis désolé monsieur... Je ne sais pas... »

La jeune femme peine à répondre clairement, visiblement prise d'une peur effroyable devant ce regard rouge sang. Des cheveux bouclés, mi-longs et châtains, aux reflets étrangement rosés, encadrent son visage au teint mat. Ses iris sont d'une couleur assez surprenante, mêlant cette teinte d'un vert très clair à ses éclats dorés, qui sont tout bonnement hypnotisant.

« - T'as perdu ta langue, ma jolie ? Lâche le capitaine avec malice. Tu ne sais pas comment parler ?

- Katsuki, tu es prié de ne pas faire peur à mes employés. »

Apparaissant dans son dos, un homme à l'apparence fatigué avance jusqu'au duo, les mains dans les poches. Il est affublé de cernes immenses, pouvant soulever de nombreuses questions quant à sa condition physique. De longs cheveux noirs tombent en cascade sur ses épaules, tandis qu'il cache pratiquement entièrement son visage derrière une affreuse écharpe grise, et ce malgré les températures estivales qui règnent à l'extérieur.

« - Mina, fini de servir les trois clients du fond. Après tu iras en cuisine pour manger. »

La serveuse approuve, et remercie son patron, avant de partir vaquer à ses tâches. Elle se garde de poser un regard sur les deux compagnons de voyage, et s'échappe pratiquement en trottinant.

Pendant ce temps, le patron de l'auberge prend place derrière le comptoir, afin de faire face à ceux qu'il connaît depuis bien longtemps maintenant.

« - Je commençais à croire que tu avais oublié notre île, cher Dynamight.

- Non Shota, je n'ai pas oublié cet endroit. Mais j'ai été bien occupé.

- Je sais. Ta réputation te précède jusqu'ici, tu sais. Tout le monde a connaissance de tes coups les plus marquants, et je dois dire que tu fais un pirate remarquable. »

Le dénommé Shota Aïzawa vient prendre une bouteille de rhum, et pose deux verres sur son bar, qu'il remplit pour ses vieilles connaissances.

« - Les joyaux de la couronne, qui t'ont valu de longs mois de cavale. Le trésor de l'île des dragons. Les rubis de Satan... Tu as été bien occupé. Et à ce que je vois, tu as toujours ton fidèle bras droit.

- Ravi de te revoir, Shota, salue respectueusement Eijiro

- Effectivement. Toi aussi, les choses ont bien changé par ici ? Lâche Katsuki, en avisant l'intérieur beaucoup moins chaleureux qu'autrefois.

- Certaines choses évoluent, répond l'homme en éludant la question. Allez, qu'est-ce que je peux faire pour vous les garçons ? Vous n'êtes pas venu discuter avec un vieil aubergiste, devant un verre, juste comme ça. Je me trompe ? »

Katsuki sourit devant tant de perspicacité, se rappelant avec nostalgie et un soupçon de joie, quelques vieux souvenirs poussiéreux, qui dorment dans les livres de sa mémoire.

« - On est à quai pour quelques mois. Est-ce que tu aurais quatre chambres à nous laisser ?

-Ce n'est pas la période la plus florissante en matière d'affaires... Je pense pouvoir accéder à ta requête. Mais les prix ont augmenté, même pour mes plus vieilles connaissances.

-Ton prix sera le mien. Aucun problème de ce côté-ci. »

Leurs affaires étant réglées, ils prennent tous deux congés de leur vieil ami, et repartent en direction du port, auprès duquel patiente le reste de l'équipage. Par pur réflexe, le capitaine attrape son tabac à chiquer qui dort dans l'une de ses poches. C'est une habitude qu'il a prise durant ses voyages, préférant cette pratique, plutôt que ces fameuses pipes à tabac. Parfois, pour fêter une grande victoire ou un événement particulier, il se laisse aller à fumer un cigare, mais rien de plus.

« - Les plus grosses questions sont apparemment réglées, chef. » clame Eijiro en sifflotant.

Katsuki le regarde déambuler, presque sidéré de le voir agir comme s'ils étaient en congé. Malgré tout, il peut comprendre l'emballement de son ami. Après ces années à déambuler ensemble, ils n'ont pas vraiment eu de période de répit, à simplement devoir se poser en attendant que le temps daigne bien s'écouler. Cette pause forcée pourrait bien présenter quelques avantages notables, surtout pour cet équipage épuisé, qui se donne corps et âmes constamment pour défendre son honneur ainsi que les couleurs de ses voiles.

« - Ouais... mais on a quand même des choses à voir.

-Mmh ? Quoi ?

- Notre bateau est comme ça parce qu'on a raflé un butin, tête d'ortie. »

Dans les yeux de Katsuki, cette flamme d'avidité recommence à brûler de manière incandescente. Tout ce qui l'anime, et l'incite à poursuivre en tant que forban de renom. Il aime partir à la chasse, harponnant des biens qui attisent son intérêt.

Et qui sait ce qu'ils peuvent bien avoir récupéré cette fois-ci...

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