DEUXIEME CHAPITRE

- Dame... (Lidewij relut le nom) Dame Egyptys ? Vous êtes là ?

Soudain, dans le sinistre salle d'accueil du pensionnat se matérialisa une très jolie femme à la peau qui avait des reflets verdâtres. Ses cheveux étaient d'un blond miroitant qui teintait étrangement sur du vert et ses yeux d'une belle couleur pomme. Bien qu'elle sembla assez jeune, Lidewij perçut en elle la mélancolie habituelle de l'âge.

- C'est bien moi, jeune enfant. En quoi puis-je t'aider ? demanda Egyptys.

- C'est Maître Akyra qui m'envoie, dit Lidewij d'une voix quelque peu tremblante. J'ai un mot de sa part pour vous.

L'elfe sortit de la poche de son manteau un petit bout de papier marqué d'une écriture élégamment calligraphiée. Elle tendit le bout de papier à la dame qui, si elle se référait à ses connaissances, était une nymphe. (Tout le laissait penser : sa peau verdâtre, l'aura curieuse qu'elle dégageait). Egyptys s'en saisit et parut relire le mot plusieurs fois avant que son regard ne se teinte de tristesse. Elle resta silencieuse un instant avant de s'adresser à Lidewij avec un sourire forcé :

-Eh bien, ton nom est donc Lidewij ? Ravie de te connaître, belle enfant. Je vais te donner une chambre, suis-moi.

Egyptys s'avança vers une cage d'escalier proche d'un geste lourd, puis fondit en larmes en s'effondrant par terre. Pour une raison inexplicable, Lidewij aussi. Egyptys ouvrit ses bras, et Lidewij s'y logea. Elles pleurèrent ensemble la mort d'Aloysius Akyra.

* * *

Lidewij avait toujours pensé qu'il fallait rester chez soi.

Qu'il fallait avoir une grande maison, avec une salle de sport et tout ce qui faut pour la détente. Un supermarché à deux pas et un beau jardin. Comme ça, il fallait rester chez soi à faire ce que l'on voulait.

C'était ce que son esprit enfantin avait imaginé.

Ce n'était pas possible, bien sûr ! Il y avait le travail, aussi. Et plein d'autres choses auxquelles elle n'avait pas pensé. Son cerveau de treize ans en savait beaucoup plus que la plupart : tout ce qu'elle apprenait, que ce soit en le voyant, en le lisant, ou d'une autre quelconque manière, elle le mémorisait, puis avec d'autres données, les associait avec percpicacité ce qui en donnait une autre. Si on pouvait décrire ce bel univers qui se logeait dans sa tête, elle aurait dit... une planète, qui contenant ses habitants considérés comme les données, puis cette planète était entourée d'autres, qui elles étaient le cœur d'un énorme système galactique, lui-même dans un système stellaire, ajoutées à ça un enchevêtrement de lignes et de labyrinthes complexes, avec des centaines de lettres, de chiffres, de symboles... c'était à peu près ça.

Mais Lidewij n'aimait pas jouer les intellos. Elle préférait charmer les gens et les avoir dans sa poche. Elle était assez manipulatrice et calculatrice en fin de compte. Mais si elle aimait les appâter, avec ses mots ou son physique avantageux, elle n'était pas méchante. Sadique, certes, mais pas méchante. Son charisme et son franc-parler, accompagnés de son sarcasme plaisaient beaucoup aux gens. Alors, elle s'était imaginée qu'elle pourrait oublier cet instant sulfureux du passé et avoir une vie dans une grande maison avec la fortune de sa mère, à s'entretenir avec sa salle de sport et son supermarché. Elle s'était bien lourdement trompée.

Peut-être n'aurait-elle pas dû écouter Akyra et rester dans la maison... non. Elle devait honorer ses souhaits et, elle savait qu'elle ne pourrait pas rester dans la même pièce que lui, en voyant cet homme défunt qu'elle avait traité comme un grand-père enfermé dans un cercueil magique en verre qui avait elle-ne-savait quel effet bizarre. Elle ne le pourrait pas. Et puis de toute façon, à treize ans, pourrait-elle vraiment avoir une vie sans adulte, seule ? Elle n'avait pas de réponse à cette question.

Elle poussa un soupir désespéré, appuya ses mains sur le lavabo en face d'elle et se regarda dans le miroir. Sa peau pâle, avec de petites imperfections, était parsemée de tâches de rousseur claires bleues (elle les avait toujours eues, et, bien qu'elle n'eût jamais compris pourquoi, son professeur d'autrefois lui avait expliqué que chez les elfes, chaque détail de l'apparence d'un elfe pouvait varier) qui sillonnaient son petit nez gracieux et droit et ses joues légèrement rougies. Ses grands yeux en amande d'un bleu très clair scrutaient les environs très rapidement, passant d'un élément à l'autre. Sa bouche pulpeuse et rosée lui donnait un air de poupée. Non, elle avait vraiment un air de poupée avec cette peau pâle, ces longs cils et cette bouche. Son habituel sourire narquois vint gâcher tout l'effet angélique et innocent de son visage. Elle prit un élastique transparent et souple pour attacher ses cheveux d'un blanc immaculé en une couette haute. Ils étaient soyeux et fortement ondulés. D'ailleurs, en regardant la couleur de sa peau et celle de ses cheveux, on aurait dû confondre, pourtant pas du tout, il y avait un certain contraste entre les deux qui lui plaisait. Sûrement parce qu'ils tiraient légèrement sur le violet tout en étant clairs. N'étant pas satisfaite, elle enleva l'élastique et prit une poignée de cheveux pour en faire un petit chignon désordonné sur le haut de sa tête, laissant tomber en cascade sa chevelure sur ses épaules. Maintenant, c'était sa coiffure qui contrastait avec son visage de poupée. Avec un sourire angélique, elle ressemblait à une petite ahurie tout de même mignonne. Avec un sourire narquois, elle faisait un peu moins sage et ça lui allait. Elle était sage tout de même, elle n'était pas une rebelle, mais pas non plus un petit ange tombé du ciel (même si elle aurait pu). Elle quitta la salle de bain, et passa dans la salle commune des filles : une énorme salle circulaire chaleureuse avec une moquette épaisse et des coussins partout, des baies vitrées, un énorme canapé rond lui aussi et juste en face une Telerys*. Il y avait aussi des tables, des chaises, des bibliothèques et beaucoup d'appareils modernes de la même marque que la Telerys géante, Derenys Corporation. Une quinzaine de filles de toutes races (elfes, vampires, loups-garou, brownies, sirènes...) s'occupaient diversement. Kalyawen, une vampire séduisante de son âge aux cheveux d'un blond or et aux lèvres rouge sang, très proche de Lidewij, la héla, l'entraînant à regarder la Terelys.

- Qu'es-ce qui se passe ? demanda Lidewij.

Kalyawen ne lui donna pas de réponse et se contenta de la tirer vers le canapé pour qu'elle soit face à la Telerys.

- ... a retrouvé un fugitif de la lignée Grace-Meneryn qui avait échappé au génocide. Le ministre Isilas, qui remplace le roi dans l'attente du couronnement de son fils Kelyorel (Lidewij grimaça presque de douleur) a déclaré que la chasse ne serait que plus ardue et assidue. Ainsi, nous vous demandons d'informer immédiatement la garde royale si vous apercevez ces individus. Voici la liste des fugitifs : (Une série de nom défilèrent ainsi que des photos)... elenysse Dalan... Lidewij Orsay Grace-M...

Lidewij poussa un sanglot étranglé et s'engouffra dans la salle de bain, sous les regards compatissants de ses camarades. Kalyawen la rejoint vite et l'enlaça pour qu'elle se calme. Lidewij était toute secouée de spasmes à cause de ses larmes. Elle pleurait parce que... pleurait-elle même de joie ou de tristesse ? Elle était contente car ses amis d'autrefois étaient encore en vie ; Daelenysse, Kimyokis et une petite poignée d'autres qui étaient dans son clan. Puis elle pleurait parce qu'elle était recherchée, ainsi que ses proches. Une vie de fugitive. Tandis que Kalyawen s'efforçait de la consoler, Gylenka Egyptys entra brutalement dans la salle, recouverte d'une cape vert foncé, capuche rabattue. Elle avait l'air frustré, énervé et elle déclara d'une voix basse avec un calme olympien, presque effrayant.

- Couvre-toi, on va au salon de beauté.

* * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * *

*Telerys : équivalent de la télé en Elvyr-Ercdaya, mais plat, fin, gigantesque et flottant, ne nécessitant pas d'être accroché.

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