Chapitre 48

     Une demi-heure plus tard, je me retrouvai devant la porte d'entrée de la maison de Salomé. À deux doigts du malaise mais j'étais là. J'avais réussi à marcher jusque-là. J'y étais arrivée. Je n'en revenais pas tellement cette étape était importante pour moi.

Je n'osais pas sonner, mais je savais que je devais le faire. Même si j'étais morte de peur, même si mon cœur s'emballait, je devais affronter mon passé.

J'avais 19 ans maintenant, il était temps.

Les phrases d'Anaïs tournaient encore de ma tête. Tout comme les conseils de mes parents, de Léonie ou de ma psy. Ils étaient comme une sonnette d'alarme. Comme un moteur pour enfin réagir.

Eléah ne pouvait pas continuer à mentir, surtout pas sur cette fameuse soirée où elle avait collectionné les infractions. C'était grave. Elle devait assumer ses erreurs et ses mauvais choix, mais surtout, elle devait se faire aider. Anaïs et Églantine ne pouvaient pas payer le prix fort pour des actions qu'elles n'avaient pas commises. Certes, Églantine était responsable de sa voiture et devait assumer ses choix. Elle avait laissé conduire Eléah alors qu'elle était saoule et en licence, mais je pouvais peut-être aider à alléger sa sanction. Je voulais la soutenir du mieux que je le pouvais.

Que serait capable de faire Eléah si personne ne l'arrêtait ?

J'appuyai enfin sur la sonnette, le souffle court. Je frissonnai en attendant que quelqu'un vienne ouvrir. Je n'avais plus mis les pieds dans cette propriété depuis si longtemps.

Soudain, Salomé ouvrit la porte et resta figée sur place. Elle ne s'attendait pas à me voir à sa porte. Elle me contempla sans voix.

-Salut Salomé, soufflais-je timidement. Je... je...

Oh punaise ! Si je pouvais arrêter de bégayer, ce serait tellement mieux.

-Tu as reçu le mail d'Anaïs ? demanda-t-elle.

Je hochai la tête, mal à l'aise.

-Tu comptes les aider ? demanda-t-elle, surprise.

-Oui, j'aimerais les aider.

-J'avoue que je suis surprise. Je croyais que tu étais toujours la meilleure pote d'Eléah.

Cette phrase me froissa, mais je ne pouvais pas lui en vouloir. C'était de bonne guerre.

-Tu avais raison depuis le début. Eléah n'a jamais été mon amie. J'ai coupé les ponts avec elle.

-Vraiment ?

-Totalement ! Si tu savais tout ce qu'elle m'a fait subir en secondaires.

Salomé me fixa, émue. Elle ne s'attendait pas à cette réponse de ma part.

-Je suis désolée, Salomé. Vraiment désolée pour tout ce que je t'ai fait.

-C'est du passé, tout ça.

-Je sais que c'est le passé, mais je tenais encore à te dire que je regrettais d'avoir été aussi nulle.

-Oh tu sais, je suis passée à autre chose depuis le temps.

-Peut-être et tant mieux mais... je te devais des excuses depuis longtemps... de vraies excuses.

Salomé me contempla pendant de longues secondes.

-Je t'en ai beaucoup voulu, tu sais, murmura Salomé.

-Je sais.

-Puis, j'ai grandi et j'ai fini par comprendre.

-Tu as compris quoi ?

-Tout ce qui nous est arrivé, c'est principalement de la faute d'Eléah. C'est à elle que je dois en vouloir. Pas à toi. Au fond, tu es aussi une victime dans cette histoire.

-J'en ai bavé à cause d'elle, mais j'aurais dû réagir plus tôt... J'aurais dû te défendre.

-Faut comprendre ce qu'il se passe pour pouvoir réagir.

-J'avoue avoir mis beaucoup de temps à comprendre... presque 10 ans.

Salomé me sourit timidement, mais elle souriait. Je réalisai à quel point son sourire m'avait manqué. Elle était irremplaçable et nous avions perdu tant d'années irrattrapables. Cela me retourna l'estomac rien que d'y penser.

Ces années perdues me donnèrent le vertige.

Je ne pus m'empêcher de bondir vers elle pour la serrer dans mes bras. Surprise et intimidée, elle se laissa faire malgré tout.

-À 12 ans, je t'ai vue dans ma rue, m'avoua-t-elle brusquement.

-C'est vrai ?

-Je suis désolée de t'avoir niée... Je n'étais pas prête pour te pardonner.

-C'est normal. J'ai été si injuste avec toi.

-Merci aussi pour la carte. Je ne t'ai jamais répondu, car je t'en voulais tellement à l'époque.

-Je comprends. Je le méritais.

Salomé me dévisagea mal à l'aise. C'était bizarre de se parler après tant de temps.

-Je peux te poser une question, Salomé ?

-Vas-y.

-Pourquoi as-tu accepté la demande d'Eléah sur Facebook ?

-Je ne sais pas trop ... Je pensais avoir tourné la page et je me suis dit qu'Eléah avait peut-être évolué de son côté... Mais je me suis trompée.

-Je suis désolée pour les insultes sur ton mur. Ta photo était pourtant magnifique.

-Merci pour ton commentaire. Cela m'a touché que tu oses le poster à la vue de tous.

-Tu ne me pensais pas capable de ça, n'est-ce pas ?

Salomé se mit à rire.

-Tu vas vraiment aider Anaïs et Églantine ?

-Oui et j'aimerais que tu viennes avec moi témoigner au poste de police.

-Témoigner ? Ce mot donne la frousse.

-En fait, c'est juste raconter ce qu'il nous est arrivé. J'aimerais qu'ils comprennent qu'Eléah est une menteuse.

-Pourquoi tu tiens tant à les aider ?

-Parce que j'aurais dû t'aider toi à l'époque et mieux te défendre, mais je ne l'ai pas fait.

-C'est pas grave Slo.

-Chaque jour, je le regrette.

-Tu crois qu'on peut vraiment changer les choses ?

-Faut essayer pour le savoir, non ?

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