Chapitre 36
Je ne voulais plus mettre un pied à l'école, hors de question.
Ma réaction fut la même que pour mes cours de piano. Traumatisée, j'étais tout simplement traumatisée. Il avait fallu que je touche le fond pour comprendre dans quel guêpier je m'étais fourrée.
Soudain, tout était de trop.
Je n'avais plus la force d'affronter les nouveaux coups bas d'Eléah. Impossible.
Je réalisais enfin tout ce que j'avais enduré sans vraiment réagir. Tout ce que j'avais subi, encaissé et je n'avais plus la force de me battre. Je me sentais vide, épuisée, lasse de batailler contre des ennemis plus forts que moi.
À la suite de longues discussions, mes parents comprirent que je n'avais plus l'énergie de retourner passer mes examens afin d'obtenir mon diplôme. J'étais vidée.
Et même si je me forçais à m'y rendre, je n'obtiendrai pas de bonnes notes dans cet état déplorable.
La plupart du temps, je dormais. Parfois jusqu'à 15 heures par jour. Et le reste de la journée, je trainais dans ma chambre ou dans le divan devant la télévision. Je n'étais plus bonne à rien.
Mes parents s'inquiétaient à force de me voir zoner comme un zombie dans la maison.
"Et si tu t'inscrivais à un cours de musique ou de dessin ?" "Et si tu passais ton permis de conduire ?" "Et si tu m'aidais à réaménager le jardin ?"
Aucune idée ne m'inspirait. Je n'avais envie de rien. Juste dormir et oublier ces horribles années qui m'avaient détruite. Pour finir, ils me proposèrent de me rendre chez une psychologue. J'étais réticente, mais je finis par accepter. J'avais besoin d'aide et je devais avancer. Peut-être que raconter mon histoire à une inconnue m'aiderait à tourner la page?
Au départ, je me rendais à pied au rendez-vous. Marcher me faisait du bien. Je prenais l'air et j'étais seule avec moi-même pour réfléchir. Pour faire le point sur ma vie.
Puis, un matin, mes parents m'attendirent dans le salon avec un énorme cadeau. Vu la taille, je devinai directement ce que c'était: une trottinette électrique.
-Comme ça, tu pourras aller te promener quand tu le souhaites. Tu passeras ton permis quand tu le sentiras. Rien ne presse.
Ce cadeau me toucha. Au fond, je n'avais pas envie de bouger de la maison. Je voulais rester toute seule dans ma chambre et que le reste du monde m'oublie. Mais lorsque je réalisai tous les efforts que mes parents fournissaient pour m'aider à aller mieux, je ne pus que les remercier.
Une trottinette ? Pourquoi pas ?
Le mois de juin fila entre mes rendez-vous chez la psy et mes balades sur mon bolide.
Soudain, j'entendis quelqu'un m'appeler.
-Sloann !
Je reconnus directement la voix. Paralysée, je stoppai ma trottinette. C'était Zachary qui promenait son chien dans le quartier de ma psychologue.
-Comment vas-tu ? demanda-t-il timidement.
-Ça peut aller.
Je dois avoir une de ces têtes. Outch.
-Tu ne reviendras pas pour le voyage scolaire en Italie ?
-Pour rien au monde. Je sais que ce serait une catastrophe si je venais avec vous.
-C'est dommage, mais je comprends.
-Tu ne reviendras plus à l'école ? Même pas pour la remise des diplômes ?
-De quel diplôme tu parles ? répondis-je en riant bêtement. Je n'ai même pas passé les examens.
-Désolé.
-Je ne reviendrai pas Zachary. Je suis incapable de revoir Eléah.
Zachary me dévisagea tristement.
-Tu te rappelles du jour où Eléah t'a traitée de tricheuse devant toute la classe ?
-Comment oublier cette horrible journée ? J'ai eu un zéro sur dix et une punition en prime.
-Tu te rappelles quand Eléah t'a crié dessus dans le couloir après les cours ?
-Oui.
-Et bien, j'ai tout entendu ce jour-là.
-C'est vrai ?
-J'ai tout entendu, mais je n'ai rien fait pour t'aider. J'ai eu peur d'intervenir... mais je le regrette.
Surprise, je fixai Zachary qui s'en voulait énormément. J'aurais pu lui en vouloir, mais ce ne fut pas le cas. J'avais aussi fait des erreurs que je regrettais amèrement.
-Ce n'est pas grave.
-Tu ne m'en veux pas ?
-Non pas du tout.
-Mais j'aurais pu t'aider. Si j'avais osé aller parler à madame Aria, ta vie aurait été complètement différente.
-Peut-être. Mais peut-être pas.
-J'ai l'impression que tout est de ma faute. J'aurais pu réagir mais je ne l'ai pas fait.
-Je ne suis pas certaine que ça aurait changé grand chose.
-Peut-être que si.
-Regarde ce que j'ai fait à Salomé. Je me dis souvent que je n'aurais jamais dû accepter de changer de place. Si j'étais restée à côté d'elle, ma vie aurait été complètement différente.
-Peut-être, murmura Zachary.
-Merci d'avoir voulu m'aider.
-Je n'ai pas fait grand-chose.
-Tu ne t'es jamais moqué de moi. C'est déjà énorme.
-Y a pas de quoi.
-Et merci aussi d'avoir dit à Eléah qu'elle était moche.
Zachary s'esclaffa, mal à l'aise. Je me mis à rire aussi.
-Tu sais, dans le fond, faut pas chercher absolument un coupable. Ça ne sert à rien. Eléah a fait beaucoup de mal autour d'elle, mais nous avons aussi fait des erreurs.
-Tu sais que Eléah a encore frappé à l'école ?
-Ah bon ?
-Elle s'est attaquée à Margareth.
- Oh la pauvre.
-Margareth s'est plainte au directeur de l'école, mais Eléah n'a eu qu'un avertissement. Le dirlo n'a pas envie de se mouiller comme c'est la fin de l'année. En septembre, Eléah sera l'université donc ce sera plus son problème.
-Mais que s'est-il passé ? Raconte.
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