Chapitre 1
Carlito se revoyait sur le plateau du Fat Show lors de l’année 2013. Tous les jeudi à vingt heures, le duo était visible sur le grand écran. À faire les imbéciles avec un sérieux surprenant. À jouer les enfants avec leur corps d’adulte. À contaminer chaque ménage du syndrome de Peter Pan. La joie dans leur regard.
Le sourire aux lèvres.
Puis le Golden Moustache en 2014 en parallèle à leur émission. Ils avaient à eux seuls marqué le début de la troisième saison avec Il a mis son sexe. Pousser la chansonnette dès leur apparition était très téméraire de leur part ! Mais ils s’en moquaient. Ils faisaient ce qu’il leur procurait du plaisir. Et pour mettre une croix rouge sur leur dernière apparition sur cette même chaîne, la vidéo On fête les 4 ans du Mariage pour tous ! avait bien réchauffé des cœurs et attendri la plupart, en 2017, deux ans après la fin du Fat Show.
« … Excuse-moi bébé. C’est bon là ?
- Ouais ouais, avait-il dit par-dessus la voix de David, contournant stratégiquement l’inconnu qu’il interviewait dans la rue. »
Il avait volé un smack à son meilleur ami, sous les yeux ébahis de l’homophobe, qui ne se doutait pas de leur jeu pour les quatre ans du mariage pour tous. En reculant la tête pour le rompre, il avait senti comme une résistance qui maintenait cette attraction appliquée. L’étreinte avait malheureusement fini par céder.
« Voilà, m’nant retourne là-…
- Encore un autre parce que j’aime trop, avait interrompu David en le tirant par le tee-shirt pour enchaîner avec un second baiser. »
Cette fois, ce fut lui qui avait mené la danse. Carlito ne s’y était pas préparé, et pourtant, il ne l’avait pas refusé. C’était plus élancé. Plus doux. Plus tendre aussi, malgré le poids insolent de la caméra qui les capturait.
Se rappelant soudainement de la présence de celui-ci, il approcha sa main de la joue de McFly dans l’optique de le repousser doucement.
« Aller j’y vais, avait finalement conclu le plus petit avant de s’éloigner du champ. »
*
Mi-octobre 2019.
David se redressa en passant une main sur son visage, et les jambes encore sous la couverture plièrent un peu. Il attendit vingt secondes, le temps de ramener tout le courage nécessaire pour se lever, avant de déambulait jusqu’à la salle de bain.
Lorsqu’il revint après son passage nocturne habituel, il s’arrêta net devant le lit double. Il avait entendu un léger marmonnement.
« Hé, Raph’… Tu dors ? …»
Carlito émit un ronflement vibrant sans se mouvoir cependant, toujours dos à McFly.
« O-okay… »
Il se laissa glisser dans les draps, à nouveau, happé par le mutisme recouvré de la chambre. Raphaël avait discrètement changé de position, se retrouvant sur le dos et ne ronflait donc plus.
Les doigts du guitariste tapotèrent un rythme quelconque contre son ventre, le temps de retrouver le sommeil. Son autre bras était écrasé à l’arrière de sa tête, à demi sous l’oreiller. Il ne lui fallut que quelques minutes pour s’habituer à la nébulosité éphémère. Le réveille-matin d’Erika renvoyait l’heure contre le plafond, indiquant au meilleur ami de son époux qu’il était très exactement trois heures et quart. L’esprit grand ouvert, les yeux lui picotant subtilement, il réfléchit.
Lorsque la demie s’afficha en luminosité carmin, David, fatigué de cogiter sur tout et sur rien, roula sur le flanc droit pour faire face à son camarade aux traits détendues par la léthargie. Lui aussi avait changé de position, sans s’en rendre compte toutefois, seulement cinq minutes auparavant, finissant par les laisser face à face sur le grand matelas. Les paupières fermées du plus grand papillonnèrent subtilement tandis que McFly, délicatement, posa une main froide sur celle de son ami, qui elle, se trouvait être brûlante. Lorsqu’on dormait, le corps était toujours plus chaud. C’était agréable.
Dans un premier temps, il cajolait du pouce le dos de la main posée entre eux. N’obtenant aucune réaction d’éveil chez Carlito, David finit par faire glisser ses doigts entre les siens, et les entrelaça avec rassurance.
C’était terriblement agréable.
Soudain, la pression de leur étreinte se franchisa quoi qu’un peu, comme pour essayer de comprendre ce qu’il détenait. Raphaël, qui ne semblait pas plus réveillé que cela, prit du temps pour interpréter la main qu’il tenait dans la sienne, et pourtant, il n’arrivait pas à en être totalement convaincu à travers le velum qui broyait sa conscience de par la somnolence.
« Ghm… David ? … marmonna Carlito sans ouvrir les yeux, sa voix encore brisée par le sommeil. »
Étant donné qu’aucune réponse ne lui parvenait, il risqua la contraction forcée d’une paupière rouillée pour jeter un vague coup d’œil devant lui. Il tenait belle et bien la main de son meilleur ami dans la sienne, et interprétant ses yeux fermés ainsi que le début de ronflement comme étant un nouveau cycle de repos, il ne chercha pas davantage et repartit à son tour. Il n’eut à peine le temps de se rendre compte qu’il n’aura aucun souvenir d’ici le matin, qu’il s’était déjà rendormi.
*
Le lendemain matin, un jeudi comme un autre, le soleil pointait enfin le bout de son nez. Les rayons qui franchissaient les stores de la fenêtre du salon s’imprimèrent sur le parquet et le bas des meubles. Carlito, fraichement sorti de son passage aux toilettes, déambula jusqu’à la cuisine et rangea machinalement une capsule dans la cafetière. Son doigt força le bouton et l’engin ronronna. Écoutant d’une oreille lointaine le crachotement des gerbes de café, il sortit des placards de sa cuisine le nécessaire pour un petit déjeuner équilibré. Il grimaça quoiqu’un peu en déchiffrant l’étiquette d’une boîte de céréale sans sucre ajouté qu’avait achetée sa femme pour lui.
Cela faisait tout juste quatre semaines qu’ils avaient commencé leur régime. Si au début ils étaient motivés, quelque fois, l’envie de craquer les tentait trop. L’activité physique n’était pas le plus pénible ; il s’agissait de l’alimentation. Il avait d’ailleurs fait les gros yeux devant le gâteau qu’avait apporté Oli pour fêter leur dixième tournage ensemble, avec McFly et Bigflo, lors d’une vidéo qui datait du début de mois. Mais il n’allait pas perdre aussi facilement ce parie, aussi, une vague soudaine de détermination le poussa à poser la boîte de céréale sur la table dans l’optique d’en consommer un bol.
Il se rendit alors compte que le bruit de fond avait disparu. Il fit volte-face à la cafetière et prit sa tasse encore brûlante. Il en préparait un deuxième pour son meilleur ami qu’il savait ne pas tarder à le rejoindre.
« Hey Raph’.
- Heeey, bâilla l’hôte en tendant sa main pour le checker. »
Il s’assied à demi contre le bord du plan de travail et sirota sa boisson à la chaleur ardente, tandis que, sans grande discrétion, il fixait David sortir la brique de lait.
Lorsque la machine se rendormit, Carlito posa sa tasse sur la table pour prendre celle qui venait d’être remplie.
« Cimer pour l’café.
- D’rien frère. »
Sur ce, Raphaël rangea dans l’évier son mug vide et prit deux bols, puis disparut dans le salon. Ce fut tout naturellement que le plus petit fit écho à ses actions, emportant quant à lui la boîte de riz soufflés et la brique. Ils se laissèrent tomber sur le canapé. Le regard dans le vide, McFly finit par jurer dans sa barbe et se dépêcha de se relever.
« T’as raison. Les cuillères, fit remarquer Carlito, quoiqu’un peu trop tard, car son meilleur ami était déjà revenu, armé. »
Ils se servirent et allumèrent la télévision. Il leur fallut seulement quelques secondes pour trouver une émission potable, fort heureusement.
« C’est quoi ton programme aujourd’hui ? »
Raphaël passa une main sur son crâne, pensif.
« Erika devrait rentrer avant midi. Il me tarde de revoir les enfants. Sérieux, c’est légal d’aller chez les parents avec les petits et me laisser seul un weekend entier ?
- Ça va, rassura le second père de famille. C’est pas tout le temps non plus. Et pis t’es pas tout seul, je suis là, moi.
- Non mais t’as compris ce que je voulais dire.
- Non pas du tout.
- Pas du tout ?
- Pas du tout pas du tout. »
David cligna plusieurs fois des yeux, la tête entre ses mains, accoudé sur ses cuisses. Carlito dévora les yeux verts de son vis-à-vis, jurant mentalement pourquoi ils étaient si beau, avant de faire glisser une main derrière la nuque de McFly et l’attirer contre lui avec rapidité et fermeté.
« Ghmm ! couina le plus petit en y mettant une certaine résistance.
- Embrasse-moiiii !!
- N-nooooon ! Jamaiiis !
- Je t’aime !!
- Aaaaaaaah !! »
Il finit par lâcher le pauvre David, peut-être un poil trop brusquement car celui-ci, à force de se tirer en arrière, faillit tomber sur canapé. Ils éclatèrent de rire.
*
Aujourd’hui, il n’y avait personne dans leur studio. La caméra était posée sur la table, mais elle était éteinte. Assiégés sur des tabourets utilitaires, ils fixaient l’écran de leur ordinateur.
Carlito avait passé le temps de midi avec sa petite famille retrouvée avant de rejoindre McFly dans leur fabuleuse tanière. Lui, n’ayant pas eu le temps de rentrer entre temps, avait mangé sur place et répondu aux mails importants sans voir le temps passer.
« Ça rend bien, la chanson trop honnête 2, fit remarquer Raphaël en détachant les yeux de la miniature.
- Hm… Hm’ouais, pas mal franchement, quoiqu’on aurait pu améliorer la qualité de la description, ajouta son voisin avec une moue faussement modeste.
- Rhooo ! Toujours à te plaindre ! »
Bien sûr, il savait que c’était pour rire. Mais Carlito adorait jouer le jeu, surtout quand il s’agissait de son meilleur ami.
« Bon, on se met au travail ?
- Des idées pour la vidéo de cette semaine ? »
McFly sembla réfléchir. Il sortit son téléphone.
« Je vais demander à Maxime s’il est toujours chaud pour la bataille des opés.
- Demande-lui d’inviter qui il veut alors, ajouta Raphaël, un sourire en coin, ravi que cette idée soit finalement maintenue.
- Ouais.
- Et aussi qu’il ramène des donzelles.
- Ouais ouais.
- Oh, et demande-lui de… »
Amixem décrocha à la troisième sonnerie, coupant Raphaël dans sa liste de requêtes comiques.
« Je vais m’chercher un café, tu veux quelque chose ? chuchota Carlito en articulant un maximum pour se faire comprendre. »
Entre deux réponses, David voulut lui demander d’aller chercher un petit quelque chose à grignoter mais s’abstenue à cause de leur régime. Il secoua la tête et replongea dans sa discussion avec leur ami. Après confirmation, Raphaël se leva et émergea du studio.
Carlito traversait le couloir sans le voir, par habitude. La machine à café se trouvait au rez-de-chaussée. Lorsqu’il en récupéra un gobelet, il rebroussa le chemin sans s’attendre à tomber sur Lucas. Natsu, comme à l’ordinaire, vint faire quelques tours autour des jambes du batteur. Celui-ci s’arrêta pour checker son ami, tout sourire.
« Salut Lucas, je pensais que tu venais plus tard.
- Non j’avais deux-trois trucs à récupérer dans mon studio. »
Le trentenaire sirota bruyamment son café. Si Squeezie avait horreur lorsqu’il faisait ça, il se contenta d’en rire et il échangea avec lui quelques mots. Finalement, après quelques minutes, ils finirent par se séparer sur un fou rire tout juste contrôlé. C’était qu’il devait rejoindre David, aussi, et Lucas avait des choses à faire. Raphaël s’étouffa à moitié en s’efforçant de boire une gorgée de café, alors qu’il pressait le pas jusqu’à l’ascenseur.
« Pauvre petite chose abandonnée, ronronna Carlito en poussant la porte de leur studio avec lenteur. Je t’ai manqué ?
- Oh bordel j’ai bien cru que tu étais parti pour toujours, sanglota-t-il en retour, trop théâtral pour que cela soit vrai.
- Non, McFly, ne pleure pas… »
Il déposa son gobelet en plastique à côté du téléphone de son ami, sur le bureau, et l’étreignit avec douceur. David laissa sa tête reposer contre le torse de son meilleur ami. Les doigts de Carlito se mêlèrent aux cheveux soyeux du plus âgé, comme le mutisme s’installa autour eux, souligné d’un infime mouvement de balance entraîné par celui qui consolait faussement.
« Ne me laisse plus… marmonna David, trop pris au jeu.
- Plus jamais… Il a répondu quoi ?
- Qui ?
- Maxime.
- Ah, oui. Il est partant. Il regarde de son côté qui veut être dans son équipe.
- Quel bel homme.
- C’est vrai qu’il est beau, Maxime.
- Toi aussi tu es beau, Vid’da.
- Pas aussi beau que toi.
- Non, j’insiste, tu es un très bel homme.
- Plus beau que Jamie Dornan alors ? demanda donc David en levant la tête, les yeux brillants d’espoir.
- Oui, si tu veux, répondit Carlito en le serrant un peu plus tendrement dans ses bras.
- Ou Laurent Delahousse ?
- Certainement.
- Theo James ?
- Mille fois plus beau que Theo James.
- Je suis même plus beau que Ryan Reynolds ? »
Raphaël s’écarta vivement.
« Ah non, faut pas déconner non plus. »
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