5 : Perte de Contrôle

Alors que je repasse par le lycée pour récupérer mon sac de cours que j'ai oublié en allant en sport, je croise Julien et Louis qui rigole bien tranquillement dans le couloir. Je me retiens de leur demander ce qui les fait tellement rire et récupère mon sac dans la salle de maths.

Tout à coup, les images du début du cours me reviennent en tête et surtout le coup de pied de Julien qui à créer cette horrible hématome sur la joue de Victor. Lui qui a un visage si angélique d'habitude. Je ne peux pas blâmer Julien pour l'avoir défiguré parce que j'ai fait la même chose, mais je n'arrive pas à me défaire de ma colère.

Quand je ressors de la salle de cours, les deux garçons sont toujours là à rigoler. Je me répète que je ne dois pas intervenir tout du long que je me rapproche d'eux mais les rires me tapent sur le système.

- T'as vu sa tête en sport ?

- Le prof la bien luncher tout à l'heure.

- Pas mal l'idée des vêtements dans la poubelle.

Je ne me retiens plus et plaque Julien sur le mur, une main autour de sa gorge et l'autre se déchainant sur son visage. À côté, Louis est horrifié et me répète de le lâcher mais je ne fais rien, voulant lui faire aussi mal qu'il en a fait à mon voisin.

Quand je me calme enfin, Julien pleur à chaude larme en essayant de retirer ma main de sa gorge. Quelle mauviette.

- Tu ne touches plus à lui sans mon accord, c'est clair ?

Je crache mon venin avec tellement de hargne que même Louis recule de peur que je ne me déchaine aussi sur lui.

- En plus, vous êtes stupide. Frapper un mec au visage, il vous est passé quoi par la tête ?

- On est désolé, Hugo...

Je foudroie Louis du regarde et il ravale aussitôt ses paroles. Je relâche Julien qui commence à devenir tout rouge. Il se cambre pour reprendre sa respiration.

- T'iras lui faire des excuses aussi.

Le garçon que je viens de défigurer relève des yeux de surprise sur moi.

- T'es sérieux ? On parle bien de Victor, là ?

- Il est où le problème ?

Julien avale sa salive tout en demandant de l'aide à Louis qui ne me quitte pas des yeux comme s'il avait peur que je n'explose comme une bombe à retardement. Il ne m'a pas encore donné de raison de le faire.

- Ouais, bon ok.

J'affiche un air désespéré, récupère mes deux sacs au sol et prends la direction de chez moi. Je n'ai même pas la force d'aller au centre d'entrainement, m'étant déjà défoulé à l'instant.

Quand j'arrive à la maison, ma mère me dit bonjour avant de lâcher ce qu'elle a dans les mains pour attraper mon visage, puis mes mains. Je ne sais pas ce qui la met dans un état pareil. Elle met soudainement sa main sur sa bouche et mon cœur se met à battre à cent à l'heure. Mais qu'est-ce qu'il se passe à la fin ?!

- C'est toi qui a frappé Victor ? Je l'ai vu rentrer chez lui avec le visage à moitié défiguré par un bleu.

- Non ! Bien sûr que non !

- Alors c'est quoi ça ? Et ne me mens pas, hein !

Elle me montre mes phalanges ensanglantées. Quand elle se met en colère, ma mère peut faire vraiment peur et même moi, je n'ose pas m'approcher dans ces moments là. Le problème c'est que maintenant, je ne peux pas lui échapper.

- Tu vas répondre !

- J'ai fracassé le visage du mec qui lui a foutue un coup de pied dans la figure !

Ma mère recule puis plisse les yeux, suspicieuse. Un sourire vient barrer son visage et c'est à moi de ne rien y comprendre. Elle me fait peur avec ses changement d'humeur en deux secondes. Elle regarde ensuite de tous les côtés avant de hurler dans une voix qui me parait totalement fausse à côté de son sourire :

- Tu as intérêt à ce qu'aucun parent ne m'appelle !

Elle pose sa main sur mon visage et caresse ma joue comme pour me féliciter avant de repartir dans la cuisine. Je n'ai rien compris et il me faut un moment pour sortir de ma léthargie. Au point où j'en suis, je n'en ai plus rien à foutre.

Le lendemain, je me réveille avec une tension dans la main. Je n'arrive même plus à plier les doigts, ça risque d'être difficile pour écrire en cours. Quand j'arrive au lycée, Julien m'évite comme la peste, ce qui me vaut une réprimande de la part de Jules.

- T'as vu sa tronche ?

- J'y suis peut-être allé un peu fort...

- Nan, tu crois ?

Je fais les gros yeux alors que tout le monde chuchote dans tous les coins au passage du garçon. Apparemment, il s'est bien gardé de dire à tout le monde que je l'ai tabassé. Tout s'intensifie quand Victor traverse le couloir.

- Tu crois sérieusement qu'en tabassant ses bourreaux tu vas marquer des points dans son estime ?

Je plaque ma main sur sa bouche avant de lui intimer de faire mon bruit. Je n'ai pas envie qu'on sache que j'ai pris sa défense. Des brides de conversation arrive à mes oreilles :

- Je n'aurais pas fait le poids. Par contre, quelqu'un a aussi décidé de prendre ta défense.

- Et personne ne sait qui c'est ?

Quelque chose me rentre dedans mais je n'y prête pas attention, pas plus qu'aux divagations de la fille que je viens d'entendre. Je prends la route des toilettes avant que la sonnerie de sonne son heure fatidique. Quand je reviens, Victor est figé devant Julien qui prend un air affolé pour finalement disparaitre dans la salle de classe comme une furie. Au moins, il a suivi mon conseil.

Je regarde ma main qui me fait souffrir, l'eau froide n'a eu aucun effet, la journée va être très longue. Par chance, je n'écris jamais rien en littérature et c'est notre première matière. Je surprends Victor à rêvasser puisqu'il prend bien plus de temps à répondre que d'habitude. Pendant ce temps, je tente de dessiner mais la douleur est insoutenable.

- Elle te regarde.

Je fronce les sourcils et me tourne vers Jules qui me montre Léa du doigt. Quand je tourne la tête, c'est Victor qui a le visage tourné vers nous, mais il ne remarque même pas mon regard sur lui.

- Je pense qu'ils ont compris que ça venait de toi.

Je souffle et reprends tant bien que mal mon croquis. La sonnerie est une vraie délivrance et je sors aussitôt de la classe. Alors que je me dirige vers notre prochain cours, je détecte une pression sur mon corps qui me force à entrer dans les toilettes. Je suis surpris de voir que c'est Victor qui me barre la route.

- Qu'est-ce qu'il te prend ?

Je tente de sortir sur sa droite mais il me plaque contre le mur à quelques pas de la porte et attrape l'une de mes mains amochées.

- Pourquoi tu l'as frappé ?

- De qui tu parles ?

J'essaye de le repousser mais sa force me semble bien plus puissante que d'habitude. Il est tellement déterminé qu'il m'est impossible de retirer ses mains de mes épaules. Ça devient très ironique quand on pense à ce qui s'est passé hier.

- Te fou pas de moi ! Julien est dans un salle état !

- Qu'est-ce qui te fais croire que c'est moi ?

J'essaye de paraitre sérieux pour qu'il lâche l'affaire. Je n'ai pas à me justifier pour mes actes, je fais ce que je veux. Sa poigne se desserre légèrement comme s'il était prêt à me croire mais je ne crie pas victoire, sachant qu'il n'est pas dupe. Il me connait trop bien pour savoir que personne d'autre n'aurait pu prendre sa défense de cette manière-là.

- Je ne suis pas stupide, ça ne peut être que toi ! Tout le monde me déteste dans ce bahut et Léa n'a pas la force ni l'envie de se battre contre un gars qui fait deux fois sa taille.

Je prends ses deux poignets tremblant contre mon corps et le repousse avec douceur. C'est amusant de voir qu'il sait toujours tout. Je suis quand même content de voir que malgré tout, il me croit encore capable de prendre sa défense, alors je lui donne raison.

- Je voulais te rendre service.

Il me regarde de ses grands yeux bleus comme s'il ne m'avait jamais vu avant, comme si je m'étais totalement métamorphosé sous ses yeux. La douceur et le piquant de ses iris m'hypnotise totalement. Je ne sais pas combien de temps nous restons là à nous redécouvrir d'un simple regard, mais j'aimerais que ça dure toute une éternité.

Puis soudain, ses orbes bleus prennent une teinte orageuse me faisant frissonner et sa colère devient lisible sur chaque partie de son corps. Il retire vivement ses poignets de ma prise comme s'il s'était brûlé et me crache :

- Je n'ai pas besoin de ton aide. Occupe-toi de tes affaires.

Il ouvre avec violence le battant pour trouver Jules et Léa entrain d'écouter comme des fouines. Son regard fusille sa meilleure amie avant qu'il ne pousse méchamment Jules pour s'échapper et partir loin de moi, la blonde sur les talons. Je sors à mon tour et tente une dernière approche.

- Victor.

Il se retourne et me montre son majeur avant de sortir de l'établissement. Je me laisse tomber contre le mur et me laisse glisser jusque sur le sol.

- Ça ne s'est pas bien passé.

- J'essayais juste de faire une bonne action.

Jules fait la moue devant mon état pitoyable et s'assoie en face de moi son portable à la main.

- Laisse-lui un peu de temps.

Je souffle d'exaspération avant de passer mes mains sur mon visage. Du temps, je n'arrête pas de lui en laisser, depuis six ans. J'ai peut-être fait le con mais aujourd'hui j'essaye tout bonnement de me rattraper. Sauf qu'il réduit tous mes efforts à néant. Le trou béant que je sens dans ma poitrine est incommensurable.

- Laisse-lui le temps...

Jules répète sa phrase comme un mantra pour me calmer. Et bizarrement, ça commence à fonctionner même si la phrase de Victor tourne en boucle dans ma tête : « je n'ai pas besoin de ton aide ». Ça devrait me faire plaisir qu'il puisse enfin se débrouiller tout seul mais au fond je sais que ce n'est pas vrai. Il s'est toujours fait marcher dessus et ça ne changera pas maintenant.

- Arrête de faire des nœuds au cerveau. Il reviendra un jour ou l'autre.

- Ou pas du tout.

Jules grimace puis pose les yeux sur son portable. Je viens de me prendre une violente claque dans la gueule quand même.

- Il m'a fait mal.

- T'inquiète ton égo surdimensionné est toujours là, je te rassure.

Un sourire se dessine sur mes lèvres et je le repousse. Il tombe en arrière puis éclate de rire.

- Il est quelle heure ?

- On peut aller vers notre prochain cours dès maintenant.

J'acquiesce et me lève en même temps que lui. Nous passons par le hall du bahut pour rejoindre notre prochain cours mais manque de chance, nous tombons sur un surveillant sur notre route.

- Vous faites quoi dans les couloirs ?

Je jette un coup d'œil à Jules qui grimace en rangeant doucement son portable dans la poche avant de son pantalon.

- On est en retard.

L'homme d'une vingtaine d'année me dévisage de son regard strict, comme s'il réfléchissait à notre prochaine punition.

- Ce n'est pas la première fois cette semaine monsieur Freigné. Une heure de colle vous aidera peut-être à vous acheter une montre.

Je jure dans ma barbe et tourne la tête pour qu'il m'oublie deux minutes.

- Dernier avertissement pour vous, monsieur Delgado.

Je n'écoute pas la réponse de Jules, trop concentré sur nos deux amis assis sur l'herbe à rigoler de bon cœur. A elle, il lui pardonne tout, mais moi, je dois ramper pour avoir un peu de considération. Ça m'énerve la place qu'elle peut avoir dans sa vie alors que je n'en fais plus partie. Je ne comprends pas comment il peut à la fois se mettre en colère contre moi et la seconde d'après rigoler avec cette gamine insupportable.

- Et eux, vous les laissez sécher alors qu'ils devraient être en cours ?

Le surveillant suit mon regard et fronce les sourcils. Jules m'envoie un coup de coude dans les côtes auquel je ne prends pas la peine de m'attarder.

- Vu l'heure qu'il est, je vous laisse aller à votre prochain cours.

Après qu'il est disparu derrière les portes auto-fermantes, Jules me fait les gros yeux. Des fois, je préfère quand il ne m'écoute pas et regarde son portable.

- Pourquoi tu as fait ça ?

- Je suis énervé.

Je me rends compte que ma justification est absurde mais plus le temps passe et plus je deviens jaloux de leur relation si fusionnelle.

- Des fois, je me dis que Victor à raison de te repousser continuellement.

Son changement total de discours en l'espace de quelques minutes me perd littéralement. Il sait comment je fonctionne, est-ce que tout cela voudrait dire que je devrais changer ? Je ne pourrais pas même si je le voulais. Mon caractère fait de moi ce que je suis, ça n'aurait pas de sens si je devais jouer un rôle.

Je le regarde s'éloigner et m'efforce de le suivre sans faire plus de vague. Même si je ne l'avouerais jamais, j'essaye de rendre mon meilleur ami fier de moi. J'ai besoin de savoir que mes efforts payent et il n'y a que lui qui peut me le dire.

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Coucou tout le monde !

J'ai une bonne nouvelle : j'ai presque finit le point de vue d'Hugo, il y aura donc une publication par semaine jusqu'à la fin des deux livres.

En attendant, je vais continuer de mettre des chansons à la place d'image en en-tête. Ce n'est pas obligatoire de les écouter.
Je les ais mis parce que je les aime bien et qu'elle parle assez bien, dans l'ensemble, de ce que peuvent ressentir mes personnages dans les chapitres qu'elles accompagnent.

Voilà ce que j'avais à dire. J'espère que l'histoire vous plaît toujours autant, que le dilemme d'Hugo est intéressant, et pour ceux qui lise les deux, que celui de Victor aussi.
N'hésitez pas à me laisser des commentaires, des avis et me faire part de vos interrogations.

Bonne lecture....

Aurore😍❤️

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