- PUTAIN ! T'as tout fait foirer !
Il se détourna d'elle, avant de revenir brutalement écraser son poing à deux centimètres de son visage. Il avait résisté à l'envie de lui foutre en pleine figure, comme il venait de le faire avec les deux autres.
Sauf qu'elle, ça la tuerait sur le coup.
Une main placée a coté de sa tête, il se tenait le plus près possible d'elle de manière à la coincer entre lui et le mur. Il voulait lui montrer qui dominait. Il voulait qu'elle se sente vulnérable. Il voulait qu'elle ait peur de lui.
Pourtant, le visage relevé vers lui, ses yeux dorés plantés dans les siens, elle s'efforçait de soutenir le regard noir qu'il lui lançait.
Elle a du cran, cette poufiasse.
Il respirait beaucoup trop fort et ça l'empêchait de réfléchir. Il fallait qu'il se calme.
Détachant sa main du mur pour agripper ses cheveux, il se mit à marcher sans but, regardant partout sauf vers elle.
Mais la haine qu'il éprouvait déjà pour cette petite salope venait encore d'être amplifiée, et elle le consumait, l'empêchant de garder la tête froide. Relevant les yeux vers elle, il explosa, pointant un doit menaçant dans sa direction :
- On te dit de pas bouger, et toi tu fous quoi ? Tu me suis ? Mais bordel de merde, t'entends pas ou t'es juste trop conne, hein ?
Il fixa son visage immobile, déformé par une émotion qu'il n'arrivait pas à déchiffrer. Il pensait qu'elle se confondrait en excuse. Il s'attendait à ce qu'elle pleure, à ce qu'elle geigne, à ce qu'elle suffoque pour qu'il la pardonne, pour qu'il l'épargne.
Mais certainement pas à ce que cette tarée lui hurle dessus, le visage rougit par la colère :
- Je ne suis pas une chienne à qui tu peux dire cou-couche panier ! Je suis désolée que ça soit parti en vrille, d'accord ? Je voulais seulement des réponses !
Juste des réponses, hein ?
Crois-moi, poulette, parfois on se porte bien mieux dans le mensonge. Surtout dans ton cas.
- Mais y a rien à savoir putain ! Et peut-être que tu devrais poser les questions d'abord, non?
Elle écarquilla les yeux. Il savait parfaitement qu'il était de mauvaise foi, mais hors de question de s'aplatir devant cette meuf. Ni devant personnes, d'ailleurs.
- Pardon ? J'hallucine ! Tu te fous de ma gueule ? Tu me marmonne de la fermer et après tu te casses comme ça, sans...
- Attends.
Il leva la main pour qu'elle se taise, ignorant son regard courroucé. Il venait de prendre conscience de quelque chose.
- T'es venue comment jusqu'à là-bas ?
Elle s'interrompit dans sa tirade, interdite.
- Je... J'ai pris la moto de Chase.
Il serra les dents et contracta sa mâchoire.
C'est pas vrai.
- Et tu l'as laissée là-bas ?
Elle eut l'air effarée de sa connerie, mais se ressaisit en fronçant les sourcils.
- J'ai pas vraiment eu le temps de réfléchir !
Il ferma les yeux. Finalement, il priait pour que Chase ne rentre pas trop vite.
D'ailleurs, le soleil se couchait dehors et il n'était toujours pas rentré... Mais qu'est ce qu'il foutait, putain ?
- Ça va c'est qu'une moto, j'irai la récupérer !
Cette stupide gonzesse n'avait donc jamais l'idée de faire profile bas quand elle avait tort ?
- Figure toi que non, ce n'est pas qu'une moto ! Tu ne sais absolument rien de Chase, ni de moi.
- Répond à mes questions alors !
Questions. Il n'en pouvait plus de ce mot, et elle n'avait que ça à la bouche.
Pour se calmer, et aussi parce qu'il sentait son visage craqueler au moindre mouvement, il alla se rincer les mains et la figures à l'évier de la cuisine. L'eau transparente, mêlée au sang séché, prit une couleur rouille qu'il ne connaissait que trop bien.
- Il faut te recoudre l'arcade sourcilière, sinon ça va continuer à saigner, déclara calmement la fille dans son dos.
- Merci Einstein, mais il est hors de question que je me pointe à l'hôpital. Ca va cicatriser.
Elle soupira et disparu à l'étage. Pas trop tôt. Sa présence commençait sérieusement à lui peser sur le système.
Il se dirigea vers la salle de bain et ouvrit l'armoire à pharmacie, à la recherche de bandages et de désinfectant. Putain mais où est-ce que Chase pouvait bien foutre ces merdes ?
Après voir retiré son t-shirt couvert du sang d'un autre, il se mit à fouiller partout, sans succès. Il n'avait pas fumé depuis trop longtemps et perdit patience au bout d'une minute.
Alors qu'il se retournait pour réouvrir une troisième fois le même putain de placard, il vit la brune réapparaitre dans l'encadrement de la porte, l'air exaspéré.
Elle s'étrangla à moitié quand ses yeux se posèrent sur son torse nu, toussota pour masquer sa gêne, et s'efforça de le regarder droit dans les yeux pour ne surtout pas détailler ses tatouages... ou les muscles qui se cachaient en-dessous.
Il ne rata pas une miette de ce spectacle qui chassa instantanément sa mauvaise humeur. Un sourire taquin étirant ses lèvres, il s'apprêtait à assouvir son envie dévorante de la charrier cruellement, mais elle retrouva une contenance avant qu'il ne puisse en placer une.
- Bon viens.
Quoi ? Il fronça les sourcils et son sourire s'effaça. Qu'est ce qu'elle lui voulait enco...
- Je vais te recoudre moi-même.
C'est à ce moment là qu'il aperçu dans sa main du fil, une aiguille, et... un putain de rasoir ? Elle voulait qu'ils s'épilent ensemble ou quoi ? C'était la meilleure.
- Ca va pas ? Tu m'approches pas avec ça. Un pas de plus et tu finis noyée dans la baignoire.
Elle éclata de rire sans prendre une seule seconde sa menace au sérieux, et s'avança vers lui pour attraper son poignet, qu'il retira d'un coup sec. Il ne voyait vraiment pas ce qu'il y avait de drôle. Avait-elle à ce point envie de mourir ? Contre toute attente, elle lui lança un regard digne d'une infirmière contrariée par un patient qui ne prend pas son traitement.
- Je ne peux pas passer le fil s'il y a plein de poils. J'ai déjà vu ma mère le faire. J'essaierai de faire un truc clean. Promis.
Il s'en battait les couilles de ses promesses. Il allait avoir l'air de quoi, avec un trou dans le sourcil ? Au delà de ça, il n'avait pas le moins du monde confiance en elle. Elle ne l'approcherait pas avec ses trucs de merdes là. Hors de question.
L'instant d'après, une goutte de sang glissa jusque dans son œil, l'obligeant à battre des cils comme un débile.
Bon, elle n'avait peut-être pas tort. Il s'avança vers elle et s'appuya sur le lavabo.
- Tu vas faire plus qu'essayer si tu ne veux pas te retrouver chauve demain matin.
Après avoir soigneusement levé les yeux au ciel - décidément, il allait falloir qu'il lui apprenne les bonnes manières et le respect - elle lui prit une nouvelle fois le poignet pour l'entrainer dans le salon et le faire asseoir sur un tabouret placé sous la lumière, qu'elle utilisa pour passer le fil dans le chas de l'aiguille.
- Arrête. De toute façon c'est pas comme si je risquais d'abimer une œuvre d'art.
Il haussa les sourcils par réflexe, ce qui fut une erreur à la fois très désagréable et qui faillit lui couter un œil lorsqu'il vit l'aiguille de très près. Est ce qu'elle venait de le traiter de moche ? Son sourire mesquin et ses yeux pétillants lui confirmèrent que la réponse était oui.
Gamine. Je sais que tu crèves d'envie que je te saute.
Il ne savait pas ce qu'elle cherchait en le provoquant, mais si elle continuait, elle allait regretter amèrement de l'avoir trouvé lui.
Il se laissa faire lorsqu'elle mis la main dans ses cheveux et tourna délicatement sa tête de manière à placer sa blessure à la lumière. Il ne put empêcher sa bouche de prendre une moue contrariée à son contact, ce qui lui valu un soupir excédé.
Mais ce qu'elle ne savait pas, c'est que s'il était contrarié, c'était parce qu'il était horrifié de sentir qu'au fond de lui, ce contact... l'apaisait ?
Alors qu'elle était penchée sur lui, son souffle régulier venant caresser sur sa joue à chaque respiration, elle lâcha d'une petite voix hésitante qui témoignait qu'elle retournait la chose dans son cerveau depuis un bon bout de temps :
- Cet homme là... qui c'était ?
Il leva vers elle un regard suspicieux.
- Qu'est ce que ça peut te foutre ? Personne.
- Non... je... j'ai remarqué son expression quand il m'a vue. Il était surpris.
Il ne répondit pas tout de suite, ce qui eut le dont d'énerver l'infirmière-inspectrice qu'il avait en face de lui. Ses mouvements se firent plus brusques alors qu'elle peinait à maitriser sa colère.
- Tu vois, je n'ai jamais droit à aucune réponse !
- C'est juste une putain d'ordure qui ne s'attendait pas à voir débarquer quelqu'un dans son antre c'est tout ! T'es parano bordel. Et fais gaffe à ce que tu fous, t'as failli me crever un œil.
Il essaya de calmer sa voix et regarda ailleurs. S'il laissait la colère parler, il en dirait beaucoup trop. Le seul fait de s'énerver pouvait le trahir. Heureusement pour lui comme pour elle, elle n'insista pas, même si, quand il releva les yeux, il vit la moue frustrée que faisaient ses lèvres.
Il s'attarda sur cette bouche rose bien dessinée. Sous le coup de la concentration, deux dents vinrent soudainement mordre la lèvre inférieure charnue qui était si près de lui.
Elle n'était peut-être pas si repoussante après tout.
Mais quand il eut fini de remonter l'arrête fine de son petit nez et de s'attarder sur ses pommettes hautes, lorsqu'il parvint à ses yeux, à ces deux iris couleur d'ambre qui lui lancèrent un regard furtif, il ne put faire autrement que de détourner le regard.
Il ne pouvait tout simplement pas supporter de voir ces yeux.
De les revoir.
- Et voilà ! Sept points de suture, s'exclama-t-elle, l'arrachant à ses sombres pensées.
Il se leva sans la regarder. Non, il ne lui dirait pas merci. Après tout, c'était par sa faute qu'ils avaient du en arriver là.
Sa récompense serait qu'il la laisserait tranquille ; enfin pour l'instant. Mais d'abord, il restait encore quelque chose à régler.
Après avoir pu constater dans le miroir de la salle de bain que son sourcil droit, désormais entaillé au niveau de l'extrémité, ne le défigurait pas tant que ça contrairement à la couleur violacée que prenait sa peau, il rejoignit le salon et son autre plaie qui n'avait pas bougé.
- Bon. Bouge-toi, on va chercher la moto.
Elle prit un air effaré, ses bras retombant mollement le long de son corps.
Ah, elle en avait déjà marre ? Parfait. Elle allait morfler.
- Quoi ? Mais je viens de te recoudre !
- Et ?
- Et... c'est encore fragile ! Et il est deux heures du mat' putain !
- Exactement. Et de toute façon, t'as pas le choix. Tu dois nettoyer ta merde et si j'étais toi, je le ferai avant que Chase ne rentre.
Elle leva les yeux au ciel en poussant un soupir, grommela dans sa barbe, et se dirigea en trainant des pieds vers le casque qui gisait encore sur sol. Une vraie ado.
- Et arrête de faire l'insolente !
Le regard noir qu'elle lui lança le fit éclater de rire.
Lui rendre la vie infernale serait une distraction assez interessante, tout compte fait.
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