Chapitre 1 : L'Ultimatum (A)

La représentation va se terminer d'une minute a l'autre. Ils devraient tous sortir par cette porte...

J'étais devant le Carnegie Hall, à attendre que les gens sortent de leur concert de musique classique. Vêtue de mon jean noir, d'un sweat noir et de bottines noires (et aussi... de mes chaussettes à paillettes porte-bonheur), j'étais prête à me fondre dans la foule qui n'allait pas tarder à envahir le trottoir. Toutes ces personnes seraient encore trop absorbées par ce à quoi ils venaient d'assister pour me remarquer quand je passerai parmi eux.

L'année scolaire venait de se terminer, et l'air tiède de l'été qui arrivait réchauffait les coeurs et réveillait les ardeurs. Je pris une grande inspiration.

C'est la dernière fois. Après ça, tu te déniches un taff légal pour cet été, poulette.

Finalement, la porte s'ouvrit et les gens affluèrent dans la rue, brisant le silence du soir par leurs conversations animées.

C'est parti.

Je ne mis certainement pas ma capuche, et je ne baissai pas la tête. Au contraire, je passai sur le trottoir les yeux droits devant moi, des écouteurs enfoncés dans mes oreilles bien qu'ils ne transmettent aucune musique. Personne ne devait suspecter que j'étais furtivement en train de piocher dans les sacs des femmes et les poches des hommes pour remplir les miennes.

Bien sur que je ressentais de la culpabilité mais... j'avoue que franchement, j'étouffais ma conscience à grand renfort d'auto-persuasion.

Après tout, je suis comme une sorte de... Robin des Bois du 21ème siècle.

En peu de temps, j'avais achevé ma traversée, toujours parfaitement calme, n'ayant éveillé aucun soupçon ni attiré aucun regard. Avec le temps et l'expérience, mes mains avaient cessé de trembler et mes mouvements s'étaient faits plus précis.

Je repris la route de la maison, a pied puisque le bus qui desservait mon quartier n'étais plus en service. De toute façon, je préférais marcher et pouvoir courir s'il le fallait plutôt que d'être coincée avec des individus pas nets.

Après vingt bonnes minutes, j'arrivai dans un des quartiers douteux qui entouraient le miens. Le chemin était à peine éclairé par des lampadaires dont le grésillement lugubre venait troubler le silence de la nuit. C'était vraiment glauque. J'avais la désagréable sensation d'être suivie, mais, après m'être brusquement retournée pour la cinquième fois, il était devenu évident que c'était la peur qui me rendait paranoïaque.

Accélérant le pas, je venais de tourner dans une ruelle quand une main ferme s'empara de mon bras.

Et merde.

Je me retournai, tentant de me dégager, mais la poigne de celui qui me tenait était ferme. Son crâne rasé était tatoué, et ses yeux d'un vert presque translucide, que sa peau bronzée faisait ressortir, me sondaient d'un air mi-malicieux mi-joueur qui ne présageait rien de bon.

- Lâchez moi, dis-je d'un ton que je réussi à rendre ferme malgré mes tremblements.

Bien sûr, il ne bougea pas d'un pouce. Au contraire, il m'attira vers lui et approcha son visage du mien.

- Tes parents ne t'ont donc jamais dit que voler, c'est mal ?

Ce mec m'avait vu voler et il avait attendu de me suivre jusqu'ici pour me faire des remontrances ? J'avais du mal à y croire.

- Mes parents ne sont pas des références en matière de bien et de mal. Laissez-moi partir.

Je soutins son regard avec un air de défi. J'étais bien plus petite que lui et je commençais à avoir mal au cou à force de lever la tête. Après de longues secondes, pendant lesquelles il eut l'air de s'éclater à discuter avec lui-même, il se décida enfin à me répondre.

- J'ai une proposition à te faire.

Hein? C'était quel type de merdier ça encore ?

- Je n'écouterai rien tant que vous ne m'aurez pas...

- Me prends pas pour un con.

Il avait prononcé ces mots avec une telle sécheresse que maintenant il commençait vraiment à me faire peur. Je savais que je n'étais pas en mesure de me défendre, et crier au secours ne servirait à rien. Il n'y avait personne ici à cette heure-ci. Pas une seule bonne âme qui pourrait m'aider.

- Maintenant, écoute bien, ma belle. Je t'ai suivie jusqu'ici parce que j'ai vu ton petit manège. Et je sais que tu peux m'être très utile.

- Je ne vois pas où vous voulez...

- Alors, soit tu mets ton talent à mon service - tu y gagneras ta part du gâteau, bien sur. Disons juste que tu effectueras des opérations de plus grande... envergure. Comme si je t'offrais une promotion quoi.

Il marqua un temps d'arrêt. On aurait dit le méchant psychopathe dans les films d'horreur, celui qui s'apprête à commettre des atrocités, mais toujours le sourire aux lèvres. Son regard pénétrant me détailla avec une intensité qui me glaça le sang, avant qu'il ne se décide à me dévoiler ma seconde option.

- Soit tu crèves. Là, maintenant, tout de suite, je veux dire.

Mon coeur rata un battement. C'était ça qu'il appellait une proposition ? Je ne voyais pas à quel moment le choix s'offrait à moi.

J'avais arrêté de respirer. Mon cerveau se mit à tourner à mille à l'heure. Mais au lieu de réfléchir, il ne faisait que s'embourber dans la panique.

Plus je pensais, plus les battements de mon cœur s'accéléraient, comme pour fuir l'évidence.

Il n'y avait pas d'échappatoire. J'étais prise au piège.

L'homme en face de moi s'impatienta.

- Bon, j'ai pas que ça à faire. Si tu veux mon avis, le choix est vite fait.

Il me fit un sourire entendu.

Ca devait être un cauchemar. Malgré la douleur que je commençais à ressentir dans mon bras, je tentai de me persuader que tout ça n'était pas réel. Je me faisais recruter par un gangster. Ca ne pouvait pas être réel.

Pourquoi moi ? Pourquoi fallait-il que ça tombe sur moi, bordel de merde? Comme si j'en bavais pas assez, hein ? Comme si ça ne suffisait pas de devoir trainer dans des endroits louches à jouer les délinquantes ? Il fallait aussi qu'un fou furieux m'attrape et menace de mettre fin à ma vie ? Même si je n'étais pas la plus heureuse du monde,  je ne voulais absolument pas mourir.

Un bruit sourd derrière moi m'arracha à mes pensées. Je vis les lèvres de mon agresseur s'étirer en un sourire mauvais.

Et tout alla très vite.

Il dégaina un révolver de je-ne-sais-où et tira sur un point par dessus mon épaule. Je me retournai juste à temps pour voir s'effondrer un pauvre type qui fouillait dans les poubelles, surement en quête de nourriture. Etouffant un cri, je plaquai ma main libre sur ma bouche, sous le choc.

Habillement, l'homme qui me tenait me fit sèchement me retourner vers lui et colla son arme sur mon front.

J'étais tétanisée. Mêmes les larmes ne coulaient pas de mes yeux écarquillés.

- C'était un aperçu de ce qui t'attends si tu ne me dis pas que tu vas coopérer. Je te donne trois dernières secondes, trésor.


---


Je marchais silencieusement à côté du sale mec qui était clairement en train de me kidnapper. J'étais loin d'être remise de mes émotions, mais la colère commençait à reprendre le pas sur la peur.

- Il est hors de question que je tue quelqu'un.

Il laissa échapper un rire avant de passer son bras sur mes épaules pour m'attirer vers lui avec force.

- Mais il n'a jamais été question de ça, honey. Tu vas seulement entrer dans un réseau où les gens sont assez, disons... tenaces, tu vois.

Il me lança un regard en coin, amusé. Ce gars était manifestement un psychopathe bipolaire.

- C'est quoi, ton nom ?

- Alexis.

- Alexis quoi ?

- Rey.

- Eh bah, Alexis Rey, fais pas cette tête ! Je suis sûr que tu vas te plaire chez nous ! Tu as du sang de rebelle dans les veines.

- Nous ?

- Je vis avec mon frère. Tu verras il est adorable.

Je le regardais d'abord sans répondre, méfiante. Si son frère était aussi "adorable" que lui, j'allais droit en enfer. Mais au fond de moi, j'étais résignée. Ce foutu Karma m'avait rattrapée. Et il avait manifestement une dent contre moi. Je n'avais pas le choix. Et dire que j'en étais arrivé là parce que j'avais besoin de liberté...

Tout à coup, le criminel me serra encore plus exagérément contre lui, frottant son poing contre mes cheveux.

- Ah, mais quel mal-élevé je fais! Je ne me suis pas présenté ! Chase Foxter, ton nouveau meilleur ami !

Alors que nous étions arrivé devant ce que je devinais être sa moto, il se plaça derrière moi et mis ses deux mains sur mes épaules. J'avais l'impression d'être le nouveau petit soldat de ce maboule.

- Alexis, poupée, bienvenue dans le monde des gangsters. Je sens que tu vas y faire un malheur!

—-

PS : au cas où, ça se prononce AlexiS😉

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