Chapitre quatorze
J’étais nerveux, et le mot était faible. J’étais en train de peser le pour et le contre de me lancer dans quelque chose avec Vic, et maintenant j’étais à mon cours de math, et je n’avais toujours pas pris de décision. J’avais envie de dire oui, mais c’était tellement risqué. On parlait de Vic Fuentes, après tout. Il était le type le plus craint de l’école. Je serais stupide de dire oui. D’une part, il m’avait montré son côté plus attentionné, et il me faisait me sentir mieux. Mais une fois encore, il m’avait aussi prouvé qu’il était capable de me faire sentir terriblement mal en quelques secondes.
Je pris ma tête entre mes mains, m’agrippant les cheveux. Comme si les cours de math n’étaient déjà pas assez compliqués, je devais aussi gérer ça. Au moins, je n’avais pas encore vu Vic de la journée, ce qui était une bonne chose puisque je n’avais aucune idée de ce que j’allais lui dire. La sonnerie retentit, indiquant la fin du cours. Techniquement, j’avais encore trois cours avant de devoir voir Vic, mais je connaissais bien son genre maintenant, et je ne fus pas surpris lorsque je sortis de cours et le vis adossé contre les casiers, en face de moi. Mes yeux croisèrent les siens. Il me regardait en retour, avec ce visage indescriptible, sans émotions, que je commençais à détester. Je détestais ne pas être capable de deviner ce que les personnes pensaient.
Pendant un instant, je considérais l’idée de l’ignorer, mais je savais que je devrais bien lui parler à un moment ou un autre. Cela serait tellement plus facile si j’étais capable de prendre une décision. J’étais figé sur place, au milieu du couloir, avec des personnes me rentrant dedans alors qu’ils se frayaient un chemin jusqu’à leur prochain cours. Je jetai des coups d’œil à quelques-unes des personnes passant par là. Certaines m’adressaient un regard de sympathie. Ils devaient probablement penser que Vic était encore sur le point de me causer des ennuis. Finalement, les couloirs se vidèrent, et on se retrouvait seuls.
« Salut. » J’étais le premier à parler. Ma voix était douce et calme. C’était un peu gênant, jusqu’à qu’il se mette finalement à sourire.
« Hey. » Il rigola légèrement. Maintenant que nous étions seuls, son comportement habituel s’était envolé, et il s’était détendu. Il vint vers moi et m’attrapa la main qui ne tenait pas de cahier, et on marcha à travers les couloirs ensembles, lui allant un peu plus vite que moi. Il me conduisit dans des toilettes, et une fois qu’il eut vérifié qu’ils étaient vides, il se tourna vers moi, me tenant toujours la main.
« Alors, par rapport à la nuit dernière. » Il hésita. « Est-ce que tu as pensé à ce que je t’ai dit ? »
« En quelque sorte. » Je haussai les épaules.
Il me dirigea vers les lavabos, et me prit mes livres des mains. Il les jeta sur le rebord du lavabo, et me tourna de manière à ce que mon dos soit appuyé contre. Il plaça ses mains de chaque côté de mon corps, et se tenait près de moi de manière à ce que je ne puisse pas m’échapper. Ma main se sentit instantanément seule, sans la sienne. Cela ne ressemblait pas aux pensées de quelqu’un qui allait le repousser.
« Parle-moi. », M’ordonna-t-il.
Je regardai ailleurs, tandis que mes nerfs s’emparaient de moi une nouvelle fois. Voilà le truc : j’avais déjà été embrassé par un garçon avant, une fois, et c’était tout. Alors tout ce qui se passait à cet instant, c’était complètement nouveau pour moi. Aucun garçon n’avait vraiment voulu quelque chose de plus avec moi. Et aucun garçon n’avait eu ce genre d’effet sur moi, vous savez, celui qui m’empêchait de respirer correctement quand il était dans les parages.
« Tu t’es décidé ? », Demanda-t-il.
« Non. », Répondis-je, en rigolant presque. « Je n’arrive pas à me décider. Tu es si… »
« Je suis si… », M’encouragea-t-il à continuer.
« Perturbant. », Terminai-je, le regardant de nouveau. « Tu continues de faire des trucs stupides pour me blesser, et je… Je ne sais pas si je peux te faire confiance. »
Il sourit et se mordilla légèrement la lèvre. Attendez, je lui dis que je ne peux pas lui faire confiance, et il sourit ? Il se rapprocha encore plus de moi, pressant son corps contre le miens. S’il essayait de me rendre encore plus nerveux que je ne l’étais déjà, il se débrouillait bien.
« Bébé, je me tiens terriblement proche de toi en ce moment, et je ne vois aucun signe de ton adorable regard effrayé. Alors tu dois déjà me faire un minimum confiance. », Dit-il. Mes joues devinrent rouges dès qu’il m’appela ‘bébé’. Je détestais ce surnom, et pourtant je l’adorais quand c’était lui qui le disait.
« Peut-être que j’ai juste appris à mieux le cacher ? », Questionnai-je.
« Tu ne peux rien cacher. T’es comme un livre ouvert. », Répondit-il.
« Je ne le suis pas. », Me défendis-je.
« Si, tu l’es. C’est facile, de lire ton esprit. Par exemple, en ce moment même, tu te chamailles avec moi pour changer le sujet, dans l’espoir que j’oublie pourquoi je suis venu te parler en premier lieu. Et maintenant, tu es en train de penser ‘Oh merde, je suis démasqué’, et maintenant, oh, ouais, c’est ton expression de ‘c’est un idiot’. », Dit-il.
« Et bien, tu es un idiot. », Répondis-je en levant les yeux au ciel.
« Allez, Kellin. Ne me fait pas attendre. » Ses mains se glissèrent sur mes hanches, et il frotta doucement ses pouces contre elles. Son contact me provoquait des choses inexplicables.
« Ugh, c’est pas juste ! Tu es pratiquement en train de me séduire pour que je dise oui ! », Me plaignis-je.
« Et est-ce que ça marche ? », Demanda-t-il. Ses lèvres effleurèrent les miennes, et mon cœur rata un battement. Ses doigts remontèrent sur moi, et il les laissa sur mes épaules. Je laissai échapper un glapissement involontaire, et le repoussai.
« C’est encore ton truc où tu n’aimes pas être touché ? », Questionna-t-il.
« No… Non. C’est rien. On devrait retourner en classe. » Je m’apprêtai à le contourner, mais il me maintint en place, me plaquant contre le lavabo. Il fronça les sourcils, inquiet, avant de tirer avec douceur le col de mon T-shirt, et examiner les marques que mon père avait laissé là.
« Ne fais pas ça. », Lui dis-je avant qu’il n’ait le temps de proclamer ses envies d’homicide envers mon père.
« Est-ce que ça fait mal ? », Demanda-t-il. Ses doigts effleurèrent légèrement l’un de mes bleus.
« Pas vraiment. », Répondis-je honnêtement.
Ses yeux se replantèrent dans les miens, et il mordilla légèrement sa lèvre inférieure. C’était quelque chose que je commençais à comprendre, à propos de lui. Il se mordillait la lèvre quand il était en train de prendre une décision dans sa tête. Il se pencha en avant, baissa sa tête légèrement, et il embrassa l’une des marques. Je me mis à frissonner, et ma peau picota. Il couvrit totalement mes hématomes de baisers, et il remonta jusqu’à mon cou pour l’embrasser aussi.
« Tu dois arrêter de faire ça. », Soufflai-je.
« Pourquoi ? » Il m’embrassa au même endroit. « Ça t’excite ? » Son côté mignon s’était envolé, alors qu'il se plaquait contre moi.
« Non. », Mentis-je.
Il embrassa ma mâchoire et se déplaça jusqu’à mes lèvres, sans pour autant les embrasser. Je me plaquais contre le rebord des lavabos, me posant sur mes coudes pour me tenir, puisque mes genoux me lâchaient. Oh mon dieu, pourquoi est-ce qu’il me faisait ça ?
« C’est ton tour. », Murmura-t-il.
« Tu n’es pas bon pour moi. », Lâchai-je brutalement.
« Comment tu peux le savoir, si tu n’essaies pas ? », Demanda-t-il, ayant une nouvelle fois raison. J’abandonnais face à lui rapidement. Je savais qu’à la seconde où je lui avais de m’embrasser la nuit dernière, j’avais déjà signé un accord.
Je penchai la tête et l’embrassai, lui donnant sa réponse. Mes yeux se fermèrent alors qu’il me rendit mon baiser avec intensité. Il enroula ses bras autours de ma taille, et je plaçais les mains contre son cou, jouant avec ses cheveux. Ce baiser fit tout ce que je savais qu’il allait me faire : les papillons dans le ventre, mon cœur devenant sauvage et mon corps essayant de ne pas trembler.
Ce ne fut que lorsque la sonnerie retentit, qu’on se rendit compte qu’on avait passé beaucoup plus de temps qu’on le pensait à s’embrasser. Ses lèvres quittèrent les miennes, mais son corps ne bougea pas, alors qu’on essayait de reprendre notre respiration.
« Tu viens manger avec moi et les autres les midis maintenant, j’espère que tu le sais. », M’annonça-t-il à travers sa respiration agitée.
« Okay », Soufflai-je.
« Et je te raccompagne chez toi. » Ce n’était pas une question.
« Okay. », Répondis-je de nouveau. Je vous jure qu’à cet instant, j’aurais pu dire ‘Okay’ à n’importe quoi venant de lui.
Vic s’écarta de moi, et une seconde plus tard deux élèves entrèrent dans les toilettes. Je me tournais rapidement, faisant semblant de me laver les mains. Je jetai un coup d’œil à mon reflet dans le miroir. Mes lèvres étaient enflées, mais pour une fois, elles formaient un vrai sourire.
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« Pourquoi est-ce que tu ne manges rien ? », Me demanda Vic quand nous étions à la cafétéria, à la pause de midi. J’étais assis juste en face de lui. Jaime était à sa droite, et Tony à sa gauche. Mike était assis à côté de moi, à gauche. Jaime et Tony m’avaient accueillis chaleureusement, et je m’étais rendu compte qu’ils n’étaient pas aussi rudes et effrayants que je le pensais.
« Pas faim. », C’était tout ce que je répondis.
« T’as que la peau sur les os. Mange quelque chose. », M’ordonna-t-il.
« T’es maigre aussi, toi, mange quelque chose. », Répliquai-je.
« Je reste maigre peu importe à quel point je mange. Maintenant, tu veux bien te lever et te chercher quelque chose à manger ? », Me demanda-t-il, ou plutôt, exigea-t-il.
« Non. », Répondis-je en croisant mes bras sur mon torse. J’avais vraiment assez mangé pour le petit-déjeuner, et je n’avais pas faim du tout. Je savais que je le serais cet après-midi, cependant.
Vic et moi nous fixèrent mutuellement, étant aussi têtu l’un que l’autre, mais je savais que je gagnerais car il ne pourrait pas vraiment me forcer à manger… N’est-ce pas ?
« Wow. », Nous coupa Jaime. Vic et moi le regardèrent. Il nous regardait l’un et l’autre à tour de rôle, avec un sourire narquois collé au visage.
« Je le savais : vous sortez ensembles tous les deux. » Annonça Jaime. Si j’étais en train de manger quelque chose, je me serais sûrement étouffé avec. A la place, j’écarquillais les yeux en grand, et regardais Vic. Puis, je jetai un regard à Tony, qui sembla lire dans mon esprit et hocha la tête, me donnant une réponse, mais je posai la question à Vic quand même.
« Attend… Ils, euh… Ils… » Je n’avais pas envie de finir ma phrase.
« On sait qu’il est un homo flamboyant ? Oh, ouais. », Répondit Jaime, comme si de rien n’était. J’ouvris légèrement la bouche, choqué, et me tournai vers Vic. (nb : dans la v.o., Jaime dit ‘flaming homo’, qui est une expression pour dire un homosexuel cliché, qu’on reconnait tout de suite, employé sur le ton de la taquinerie ici. Je n’étais pas sûr de comment y traduire, alors j’ai joué le littéral… Si vous avez des suggestions, n'hésitez pas !)
« Je ne leur cache rien. », Répliqua-t-il en haussant les épaules. Il ne leur cachait peut-être rien, mais je n’avais parlé à personne de ma sexualité, bon, à par Vic… Et puis, Mike et sa mère nous avaient vus… Et maintenant, Jaime et Tony savaient… Bon sang, qui d’autre était au courant ?
Je baissai les yeux, évitant leurs regards. Je n’étais pas habitué à tout ça. Je n’étais pas habitué à ce que les autres sachent que j’étais en couple avec quelqu’un, en dehors du fait que j’étais gay, et ces personnes que je connaissais à peine savaient tout. Vic leur faisait peut-être confiance, mais pas moi. Je ne fais confiance à personne. Je sentis Vic, ou ce que j’espérais être Vic, frotter son pied contre ma jambe. Je relevais le regard vers lui, pour le voir me regarder avec inquiétude. Je secouais la tête, ignorant son regard.
La sonnerie n’aurait pas pu retentir à un meilleur moment. Je sautais de ma chaise, saluant rapidement les autres, et traçai ma route jusqu’à mon prochain cours tout seul, ce qui était une idée stupide vu que c’était mon cours de Musique, que j’avais avec Vic. Il s’avéra que je n’avais pas besoin de me soucier à propos de ça, parce qu’il ne se pointa même pas en classe.
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Après les cours, ce jour-là, j’attendis plus longtemps que nécessaire avant de quitter ma dernière classe, et je traversai les couloirs lentement, tout seul. Vic m’avait dit qu’il allait me raccompagner, mais je voulais lui donner l’opportunité de partir sans moi s’il le voulait. Je commençais à penser qu’il était peut-être en colère contre moi, parce que j’étais devenu silencieux d’un seul coup, au repas, sans explications. Bon sang, j’étais vraiment nul question relations amoureuses, enfin, si Vic et moi étions bel et bien en couple. Je ne savais même pas.
Je sortis du bâtiment scolaire, et regardai à travers le parking. Debouts près de la voiture de Vic se trouvaient les deux frères Fuentes. Il n’y avait pas grand monde aux alentours.
« Hey, Kellin ! », M’appela Mike.
Je me dirigeai vers eux deux, et regardai Vic avec précaution. Il avait son regard vide, une nouvelle fois.
« Tu peux grimper à l’avant. », M’indiqua-t-il, avant d’ouvrir la porte pour moi. Je ne discutais pas. Je me contentais de rentrer dans la voiture sans un mot.
« Kellin, tu devrais venir à la maison, cet après-midi. », Me demanda Mike depuis le siège arrière.
« Je peux pas. Mon père m’attend. », Répondis-je.
Je jetai un coup d’œil à Vic. Il fixait la route, mais ses mains étaient crispées autours du volant. Super, merci Mike, tu viens juste de mettre en colère le dragon.
« Oh, c’est dommage. », Dit Mike, déçu.
Vic s’arrêta chez lui en premier, pour déposer Mike. Je lui adressais un signe de la main depuis la vitre, et quelques instants plus tard, on roulait en directement de chez moi. Je levai mon regard vers Vic. Il me jeta un regard bref, avant de s’arrêter sur le rebord de la route. Nous étions dans la banlieue, alors il n’y avait pas beaucoup d’autres voitures, mais j’étais quand même intrigué par la raison pour laquelle il s’était arrêté ici.
« Qu’est-ce qui n’allait pas aujourd’hui, avec toi ? », Demanda-t-il avec colère. Je me contentai de hausser les épaules.
« Non. Ne hausse pas les épaules, putain. Tu as arrêté de me parler. Qu’est-ce que j’ai fait ? », Demanda-t-il. Il était furieux.
« Rien, tu n’as rien fait. C’était juste que… je ne sais pas. » Je m’arrêtai, et soupirai, frustré. Cela ne devrait pas être si difficile, de lui parler.
« Dis-moi. » Sa voix était plus douce, cette fois. Il prit ma main, et entrelaça ses doigts avec les miens. Il me lança un regard rassurant. Ugh ! Comment pouvait-il faire ça ? Comment pouvait-il être en colère contre moi, et en quelques secondes, se montrer gentil et adorable ?
« Okay. », Lâchai-je, et je me tournai vers lui. « Le truc, c’est que je n’ai jamais parlé à personne de… Bon, tu vois, et puis soudainement, toi, Mike et tes parents savent, ce qui n'est pas un problème. Mais d’un coup, Jaime et Tony le savent aussi. C’est trop de personnes qui savent, à mon goût. Je ne sais pas pour toi, mais je ne suis pas encore prêt à sortir du placard pour le moment. »
Il m’adressa un petit sourire, et se pencha en avant pour m’embrasser brièvement, avant de s’écarter de nouveau.
« J’ai confiance en Tony et en Jaime plus qu’en n’importe qui d’autre. Ils ne diront jamais rien à personne, jamais. Et je ne suis pas prêt à ce que les gens sachent non plus. Ce n’est pas comme si ils allaient le raconter à toute l’école, car crois-moi, je ne veux pas ruiner ma réputation. Je ne l’aurais jamais dit à Jaime et Tony si je ne leur faisais pas confiance à 100 %. Je sais que tu ne me fait pas confiance, mais au moins, tu peux me croire là-dessus. », Termina-t-il.
Je soupirai, reposant ma tête contre le siège de la voiture. Je croyais tout ce qu’il venait de dire. Cependant, la partie où il disait ne pas vouloir ruiner sa réputation me dérangeait un peu, mais je suppose que je pouvais comprendre.
« Qui d’autre le sait ? », Demandai-je.
« A part les exes, personne. »
« Combien d’exes est-ce que tu as ? », Questionnai-je, curieux.
« Hm. » Il s’arrêta, et parut réfléchir un instant. « Un. »
Un. Seulement un autre garçon était parvenu à le faire craquer. Qu’est-ce qui était si spécial à propos ce garçon, et pourquoi il n’avait pas eu d’autres petits-amis, et pourquoi j’étais soudain assez bien pour qu’il sorte avec moi ? Je veux dire, il avait l’air d’être un peu joueur, alors j’aurais pensé qu’il en aurait eu plus.
« Mais. » Il avait interrompu mes pensées. « Il n’est pas aussi mignon que toi. », Ajouta-t-il avec un sourire joueur, et il m’embrassa.
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NB : Voilà voilà, encore un chapitre tout mignon ! Merci pour les votes et les commentaires :3
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