Chapitre 33-1




                  

Je me précipitai auprès de lui, l'empêchant de se redresser d'une main douce mais ferme.

— Restez allongé, vous devez vous reposer et reprendre des forces, lui-dis-je d'une voix que j'espérai un peu autoritaire, mais ou pointait malgré tout une once de soulagement de le savoir de nouveau parmi nous.

— Pas le temps...ça va aller maintenant, mais...il faut partir d'ici, me répondit-il en essayant de nouveau de s'assoir, ne tenant aucun compte de mes conseils.

Il finit par y parvenir, bien qu'avec difficulté et l'aide d'Isy. Il était très pâle, des cernes profondes encerclaient ses yeux et son regard semblait avoir du mal à faire le point, cherchant désespérément quelque choses sur quoi se fixer.

— Pourquoi sommes-nous encore là, d'ailleurs ? Où est Oliver, demanda-t-il en braquant son regard dans le mien.

— Mal en point, lui répliquai-je, piquée par sa remarque et son ton réprobateur. Comme plus de la moitié du groupe d'ailleurs ! Donc tant que je n'aurai pas soigné tout le monde...nous ne pourrons pas partir d'ici.

Je savais que j'aurai dû me montrer plus patiente et plus poli, mais sa manière de me parler me faisait bondir.

— Ce n'est pas une question de choix...mais de survie, reprit-il en commençant à vouloir se mettre debout, ce qui à mon avis, n'était pas du tout une bonne idée.

— C'est déjà un miracle qu'une patrouille ne vous soit pas tombée dessus, continua-t-il, avant de s'interrompre abruptement et de prendre sa tête entre ses mains, visiblement étourdi par son mouvement trop brusque.

Bien fait pour lui, ne pus-je m'empêcher de penser, tandis que je lui tournai ostensiblement le dos sans lui répondre, pour retourner au chevet d'Oliver à présent plus calme. Les convulsions avaient cessées et sa respiration me paraissait plus profonde et régulière. Je ne m'attardai donc pas sachant très bien, qu'a par attendre, il n'y avait pas grand-chose à faire. Je m'apprêtai à aller voir les autres blessés quand un bruit insolite, ressemblant à un bourdonnement sourd, retentit soudain dans le silence de la nuit, me faisant stopper net.

— Vite, tous dans le tunnel ! Entendis-je Lynch s'écrier à la seconde où le bruit se mit à retentir.

Oh non pas encore, ne pus-je m'empêcher de penser à l'entente de son ordre précipité, tandis que je courrais comme les autres me mettre à l'abri. En même temps, où aurions-nous pu nous dissimuler, hormis là ?! Je ne sais comment nous parvînmes tous les neuf à rejoindre notre cachette en si peu de temps. Mais c'est passablement essoufflé et apeuré que nous nous terrâmes dans l'ombre, attendant que la menace, quoi qu'elle puisse être, s'éloigne. 

— Qu'est-ce-que c'est? Demandai-je à Lynch, dans un chuchotement anxieux.

— C'est un drone, me répondit-il sur le même mode, tout en fouillant le ciel d'un regard inquiet.

— Ils nous cherchent ? Comment peuvent-ils savoir que nous avons survécu, demanda Elana avec sa perspicacité habituelle. 

— Pas nécessairement, avec un peu de chance ils nous croient tous mort. Non, depuis les incidents, des drones sillonnent toute la ville à intervalle régulier, surtout aussi près de la barrière extérieur. C'est juste un coup de chance fabuleux qu'il ne soit pas passé plus tôt...

— On fait quoi alors ?! On ne peut pas rester cacher là éternellement !

— Bien sûr que non ! Nous allons attendre que l'engin ait fini de scanner cette zone, puis nous auront exactement vingt minutes pour rejoindre notre prochaine étape.

— Nous sommes restés bien plus de vingt minutes à découvert, fit remarquer Lada. Pourquoi passerait-il plus tôt la prochaine fois ?

— Parce que le lieu où nous nous rendons n'est pas dans la même zone. Qui dit nouvelle zone, dit nouveau drone de surveillance, nous expliqua-t-il d'une voix lasse, avant de s'appuyer visiblement exténué contre la rugueuse paroi de béton du tunnel.

— Nous avons combien de temps à attendre, demandai-je à Lynch, soudain consciente de l'état général des personnes qui m'entouraient.

— Un petit quart d'heure environ. Profitez-en pour vous reposer, nous dit-il en s'asseyant lourdement sur le sol.

Au lieu de suivre son conseil, j'en profitai pour administrer une dose intraveineuse d'antibiotique à tous ceux qui avaient été mordu et commençaient déjà à présenter les premiers signes d'infection. C'était fou comme ce truc était rapide ! J'espérai avoir été assez rapide dans la délivrance du traitement, sinon...je n'avais aucune idée de ce que pourrai faire d'autre pour les aider.

Comme je n'avais pas assez de temps pour vérifier que tous les autres, moi y compris, étions exempte de griffures ou coupures ayant pu s'infecter, je donnai à chacun un comprimé d'antibiotique à prendre en prévention. Sans eau ce n'était pas évident à avaler, mais bon...finalement ça passait.

Je m'apprêtai enfin à m'assoir sur le sol dur et caillouteux pour prendre un petit instant de repos quand, d'un petit signe discret de la main, Lynch me fit signe de m'approcher. C'est donc à contrecœur que je le rejoignis, me laissant couler le long du mur, pour finir assise à côté de lui sur le sol inégal et caillouteux.

— Comment va Oliver, me demanda-t-il dans un murmure, ne voulant de toute évidence pas être entendu par le reste du groupe qui se reposait de l'autre côté du tunnel.

— Mal...pourquoi ? Si vous espérez le faire courir, arrêtez tout de suite de rêver. De toute manière la moitié du groupe n'est pas en état de se déplacer, du moins pas au-delà de la vitesse d'un escargot moyen, lui répondis-je d'un ton sarcastique qui ne m'était pas habituel mais me vint avec un naturel déconcertant, à la seconde où j'entendis sa voix.

— Nous sommes trop nombreux. Pour que nous ayons une chance de nous en sortir, nous allons devoir nous séparer...et Oliver est le seul, à part moi, à connaitre le chemin, m'expliqua-t-il d'un ton moins agressif que d'ordinaire.

— Apprenez-le à quelqu'un d'autre dans ce cas, lui répondis-je automatiquement tellement cela me semblait évident.

— Trop long et compliqué à expliquer sans carte, me répondit-il le regard dans le vide, visiblement en pleine réflexion. Il est conscient au moins ?

— Je vois que son état de santé vous préoccupe, ne puis-je m'empêcher de lui faire remarquer d'un ton sec.

Pour toute réponse il me lança un regard indéchiffrable puis, décollant ses épaules du mur, pivota pour se retrouver à genoux devant moi.

— Bien sûr que ça me préoccupe, me dit-il d'une voix doucereuse en amenant son visage à quelques centimètres du mien, avant de m'épingler de son regard insondable. 

— En fait, il y a tout un tas de chose qui me préoccupe. Ton état, commença-t-il en passant doucement le dos de sa main sur une des égratignures ornant mon épaule, visible à travers les déchirures de mon haut. Le fait que nous soyons tous blessés et déshydratés, continua-t-il d'un ton de plus en plus dur alors qu'il s'approchait encore de moi, me rendant de plus en plus nerveuse.

— Mais tu peux me dire à quoi ça sert d'en parler, à part perdre du temps ? Me balança-t-il sèchement, en se reculant soudainement d'une pression de ses mains sur le mur. Je m'en préoccuperai vraiment, lorsque je pourrai faire quelque chose pour y remédier. Ce qui actuellement n'est pas le cas ! Alors si tu veux que l'on ait une chance de s'en sortir vivant, répond à ma question.

Malgré la douleur et mon état de fatigue extrême, je me levai. Pas question que je reste en position de faiblesse à présent qu'il me surplombait de toute sa hauteur.

— Oui, il est conscient, enfin la plupart du temps, lui répondis-je du bout des lèvres, plus qu'agacé par son comportement. 

Quoique pas tant que cela, me rendis-je compte, en le regardant s'éloigner pour aller s'entretenir avec Oliver, réfugier avec Lada et Ophélia à l'ombre du mur opposé. Sa manière brusque et beaucoup trop intime de me faire passer le message me révulsait, mais dans le fond, il avait raison. Faire de la sensiblerie ne nous mènerait nulle part, sauf à notre perte. Bien qu'un peu de compassion, n'ait jamais fait de mal à personne quand même !

Au bout de quelques minutes, il se plaça au centre et nous fit signe de nous approcher.

— Pour ne pas nous faire repérer nous allons devoir nous séparer en deux groupes. J'en guiderai un et Oliver, secondé d'Isy, guidera le deuxième. Nous n'allons pas prendre le même chemin pour des raisons évidentes. Hayden, Ophélia et Elana avec moi, les autres avec Oliver. Bonne chance à tous.

Dès que son petit discours fut terminé, nous nous regroupâmes avec appréhension. Et c'est dans la lueur rosée de l'aube, que nous sortîmes de notre cachette.

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