Chapitre 27-1







Ici aussi tout était recouvert d'un nuage de poussière et de particules, et bien que l'électricité fonctionne toujours, tout apparaissait trouble et voilé. La première chose que je sentis fut...la pluie. De fines gouttes d'eau tombaient sur moi, en une douche fine et rafraichissante. Mais comment était-ce possible réalisais-je soudain...nous étions sous terre ! C'est alors que je pris vraiment conscience de ce que mes yeux voyaient, mais que mon cerveau refusait encore d'appréhender. Des débris en tout genre jonchaient le sol, se disputant la place avec les corps disséminés un peu partout dans la pièce par une terrible explosion. Car ici aussi une bombe avait sauté. Pulvérisant le réservoir d'eau, dont le contenu se déversait à présent sur nous, menaçant de noyer les pauvres malheureux, étendus juste en-dessous.

Je me précipitais maladroitement vers eux, pour tenter de leur venir en aide. Mais gênée par le corps de Sean se trouvant toujours sur mon dos, je m'empêtrais les pieds dans une poutrelle métallique tordue et tombais lourdement en avant. J'essayais instinctivement de me rouler en boule pour amortir le choc et protéger Sean, ce qui réussit en partie, mais ne m'empêcha pas de me faire un mal de chien à la hanche. Je tentais de me relever et chutais plusieurs fois, mes pieds glissant sur le béton mouillé. J'étais désespéré, je savais que si je continuais comme ça, j'allais finir par me tuer aussi, mais je n'arrivais pas à m'arrêter. Je ne pouvais pas laisser Sean là, même si cela était la meilleure décision à prendre, je ne pouvais tout simplement pas. Et pourtant ils avaient besoin de moi...les survivants...ceux que j'entendais gémir, appeler, crier tout autour de moi. Il fallait que j'arrive à sortir de là, il fallait...

— Hayden ?! Entendis-je soudain quelqu'un m'appeler, d'une voix tremblante et étonnée. Oh mon dieu, tu es en vie, c'est...attends je vais t'aider, me dit Connie en se précipitant vers moi aussi vite que ses blessures le lui permettait. Donne-moi la main, je vais t'aider à te hisser.

— Je...je ne peux pas. Si je lâche Sean, il va tomber et...on ne pourra plus le récupérer ensuite. Il...il est blessé, il a besoin...

— Hayden, me dit soudain Connie d'une voix douce et triste...il est mort. Tu peux le lâcher maintenant.

— Non, il n'est pas mort, lui répondis-je, essayant une nouvelle fois de grimper et dérapant encore et toujours, sur cette foutou plaque de béton glissante. Il respirait encore, il...il m'a sauvé la vie, alors...il n'a pas le droit de mourir, hurlais-je ! Tandis que, dans un dernier effort dont je ne me serais pas cru capable, je nous hissais enfin hors de cette cuvette infernale.

J'atterris sur le sol, épuisée et tremblante. M'autorisant enfin à lâcher les poignets de Sean, qui glissa doucement derrière moi, jusqu'à reposer à plat dos sur le sol. Je me penchais vers lui et cherchais son pouls. Mais j'eu beau m'acharner, écouter encore et encore, Connie avait raison...il était mort. Je n'étais pas allée assez vite, si...C'est à cet instant que Connie me prit dans ses bras, comme ça, spontanément et je me laissais aller à cette étreinte comme jamais auparavant. Comme si elle était une ancre, un phare, la seule chose tangible à laquelle je puisse me raccrocher dans ce monde devenu fou...et j'ouvris les vannes. Je pleurais, je pleurais tellement que même une fois mes larmes taries, je continuais à sangloter sans pouvoir m'arrêter.

Je ne sais pas combien de temps dura ma terrible prise de conscience, mais tout ce temps Connie resta avec moi. Pas une seule fois elle ne me parla, ni ne me bouscula. Elle me laissa le temps dont j'avais besoin pour reprendre mes esprits et quand enfin je m'écartai doucement d'elle, je constatai qu'elle aussi pleurait. Nous nous regardâmes durant quelques secondes, sans parler...les mots n'étant plus nécessaire pour nous comprendre. Puis je me relevai difficilement, mon corps me faisant subir une torture, à chaque mouvement.

— Sais-tu s'il y a beaucoup de survivants ? Qui s'occupe des blessés et...où les a-t-on emmené...à l'infirmerie ? 

J'égrenais mes questions de manière mécanique, un peu comme une automate. Le seul indicateur de ma détresse étant ma voix qui tremblait, malgré le contrôle que je m'imposais pour tenir le coup et ne pas craquer. Connie elle, semblait s'enfoncer un peu plus dans la détresse et la panique, à chaque nouvelle question que je lui posais. Ne sachant à l'évidence, pas quoi me répondre.

— Je...je ne sais pas, confirma-t-elle mon analyse, d'une voix à la limite de l'audible. Quand les premiers tirs ont commencé, j'étais avec Justin...Connors nous a dit d'aller nous cacher dans le labyrinthe de grottes...que nous y serions à l'abri, mais...lorsque nous sommes arrivés ici...tout a sauté, termina-t-elle en éclatant en sanglots.

J'aurai aimé pouvoir faire ce qu'elle avait fait pour moi et lui permettre de reprendre ses esprits, mais je ne pouvais pas. Il y avait des blessés par dizaine et personne pour s'en occuper...je n'avais pas le choix, il fallait que j'avance et pour cela j'avais besoin de Connie.

— Connie, reprends-toi, lui dis-je gentiment mais fermement. Il va falloir que tu m'aides. Regroupe les personnes valides, celles qui sont en état de nous aider et ensuite demandent leur de t'aider à trier les blessés.

— Comment ça...trier les blessés, me demanda-t-elle les yeux écarquillés et le souffle court.

— Je crois que tu le sais, lui dis-je doucement. Tiens, continuais-je en lui tendant un morceau de bois calciné par le feu. Faites une marque sur le front des blessés avec ça. Un V pour les blessures légères, un S pour les blessures sérieuses, un C pour les critiques et une croix pour...

—...les morts, termina-t-elle à ma place, en faisant un effort manifeste pour se retenir de pleurer.

—...et les mourants aussi, crus-je bon de préciser. Je ne pensais pas avoir à dire ça un jour mais...je ne pourrais m'occuper que de ceux qui ont une chance d'être sauvé, les autres...

— Mais...Hayden, je ne suis pas médecin ! Pas même infirmière...comment pourrais-je être sûr ? Je...

— Ne t'inquiète pas...tu sauras, lui affirmais-je d'un ton triste mais rassurant à la fois. Tu as su pour Sean...

Ses yeux s'embuèrent durant quelques secondes, puis elle se reprit, me fit un signe de tête et partie à la recherche des survivants.

Une heure plus tard, nous avions dégagé deux zones, d'approximativement trois mètres de diamètres, où les rares personnes valides venaient déposer dans l'une les blessés et dans l'autre les morts. En tout nous n'étions que cinq, dans cette partie du complexe à nous en être sorti relativement indemne. En dehors de Connie et de Sean, je ne connaissais personne. Ce qui d'un côté, était plutôt une bonne nouvelle...il restait une petite chance de retrouver les personnes auxquelles je tenais, en vie. J'avais beau ne pas les connaître depuis longtemps, leurs disparitions me ferait beaucoup de peine, même celle de Lynch.

Sur la trentaine de personnes présentes dans la pièce au moment de l'explosion, quinze étaient mortes, huit dans un état sérieux mais gérable et deux dans un état critique. Le problème était que, pour les soigner, il me fallait du matériel. J'allais donc devoir aller jusqu'à l'infirmerie et rapporter ce dont j'avais besoin, le plus rapidement possible.

— Connie, peux-tu venir avec moi jusqu'à l'infirmerie, pour me guider ? Lui demandais-je, d'une voix qui d'un seul coup me sembla bizarre. Elle était comme...fluctuante. Avant qu'un éclair de douleur ne me traverse le flanc droit, suivit d'une grande faiblesse.

— Hayden, ça va ? Me demanda-t-elle, en me regardant avec inquiétude.

— Oui, commençais-je à lui répondre spontanément, d'une voix lente pâteuse.

Puis ma tête se mit à tourner, m'amenant au bord de la nausée. Connie se précipita vers moi alors que je me sentais tomber en arrière. Elle réussit à ralentir ma chute et m'allongea doucement sur le sol.

— Mon bandage, il a dû se défaire. Il faut juste le resserrer, lui dis-je en commençant à écarter ma veste pour constater par moi-même l'étendue des dégâts.

Au moment où Connie se penchait sur ma blessure, je vis son visage changer de couleur. Elle contemplait ses mains d'un air paniqué. Dans un dernier effort je me redressais et juste avant de tomber dans l'inconscience, eut le temps de voir ce qui recouvrait ses mains...mon sang.

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top