Chapitre 24-2
Un silence de mort suivit ses paroles. Personne ne bougeait, trop fatigué, sonné ou choqué pour cela. Comment voulait-il que nous nous battions à cinq contre...on ne savait même pas combien ils étaient !
— Comment veux-tu...on ne peut pas...nous ne sommes pas assez nombreux. Intervint le jeune homme d'une voix découragée, comme s'il venait de lire dans mes pensées.
— Si vous pouvez, et vous allez le faire. Mais ce n'est ni le moment, ni l'endroit pour parler de ça. Il faut bouger d'ici et vite. Alors si vous voulez avoir une chance, fermez-là et suivez-moi. Ordonna Lynch d'une voix grondante, avec son tact et son empathie habituels.
Après ce petit discours très motivant, tout le monde le suivit sans un mot. Nous descendîmes encore une fois cette fichu falaise, truc...je ne savais pas vraiment quoi au juste !...en faisant attention à chacun de nos pas. Nous étions tous épuisés et vu les regards que certains d'entre nous échangeaient, convaincu que nous courrions tout droit à notre perte. Les filins noirs, ressemblants à des toiles d'araignées malsaines pendaient, à présent vide de toute présence, semblant nous narguer. Le silence et le calme, après le tumulte de l'assaut, paraissaient curieusement...assourdissants. Mais où étaient-ils tous passés ? Nous tendaient-ils un piège ? Attendaient-ils de voir ce que nous allions faire ?
Malgré la fatigue et le découragement ambiant, nous arrivâmes assez rapidement à destination. Nous débouchâmes à l'abri d'un mur à demi-éboulé, mais encore assez haut pour nous dissimuler efficacement, pour peu que nous avancions courbés. Arrivé dans ce qui ressemblait à un cul de sac, Lynch se pencha et souleva ce qui s'avéra être une trappe, dissimulée dans l'angle d'un mur. Tout le monde s'y engouffra précipitamment, sans manifester la moindre surprise, apparemment déjà au courant de son existence. Passant en dernier, j'eus un instant d'hésitation en constatant l'absence d'échelle, ou de tout autre moyen pour s'agripper. Finalement n'ayant pas vraiment d'autre choix, je fis comme les autres et me laissais tomber à l'intérieur.
Pour arriver dans...une galerie...encore. Super ! Sauf que celle-ci, en plus d'être sombre et étouffante, était aussi...humide. À tel point que j'avais atterri en plein dans une flaque d'eau croupis, me trempant au passage. Bien évidemment personne ne m'avait attendu, si bien que j'hésitais un instant sur la direction prendre. Des voix parvenant de la droite, me convainquirent de suivre cette direction. Au bout de quelques pas, les sons se précisèrent en exclamations étonnées et inquiètes, qui me firent presser le pas. Quelle que soit la nouvelle, elle n'avait pas l'air bonne...pour changer.
Je débouchais enfin sur une espace un peu plus vaste, que l'on aurait presque pu qualifier de pièce, et où l'on pouvait enfin se tenir debout. Mais le plus important était la personne avachie contre le mur de gauche et qui me regarda entrer avec espoir et soulagement. Ses cheveux, à présent défait, avaient beau lui cacher la moitié du visage, je la reconnus tout de suite.
— Isy...ça va ? Demandais-je, bêtement en me frayant un passage jusqu'à elle.
— Oui, t'inquiète, me répondit-elle avec un pauvre sourire fatigué. Ça va beaucoup mieux maintenant que je sais que tu vas bien.
Je me sentis mal un instant, à l'entente de ses paroles, mais me repris assez vite. Que je sois restée avec elle ou non, n'aurait strictement rien changé à ce qu'il s'était passé. Le plus important maintenant, était ce que je pouvais faire pour elle. Je m'accroupis donc à ses côtés et repoussant ses cheveux de ma main droite, commençais à l'examiner du regard. Elle arborait, comme nous tous, tout un tas de petites coupures et d'égratignures, dues aux débris projetés par les explosions. Ce qui m'inquiétait plus en revanche, c'était son bras gauche, qu'elle tenait serrée contre elle, tout en grimaçant à chaque mouvement.
— Laisses- moi voir, lui demandais-je gentiment, tout en avançant ma main vers elle.
— Non c'est bon. Il est sûrement cassé, mais tu ne pourras rien y faire dans l'immédiat, me dit-elle pragmatique. Alors occupes-toi de ceux qui en ont besoin, moi ça va aller.
Je me levais, consciente qu'elle avait raison, et jetais un coup d'œil alentours pour voir si quelqu'un avait un besoin urgent de mes services. Dans l'ensemble, nous étions tous plus ou moins amoché, mais rien qui, à première vue, ne nécessite de soins importants et immédiats. Heureusement d'ailleurs, car Lynch ne semblait pas disposer à faire une pause infirmerie.
— C'est formidable, nous sommes tous sain et sauf mais nous n'avons pas beaucoup de temps devant nous, dit-il soudain d'une voix forte et autoritaire, comme pour confirmer mes pensées.
Tout le monde sursauta et les quelques conversations qui se chuchotaient encore, se turent complètement.
— Nous devons décider d'un plan à suivre. Il faut à tout prix que nous les empêchions de pénétrer dans le complexe.
— Mais...nous ne sommes que six...
— Et ils doivent déjà l'avoir envahi...c'est trop tard !
S'exclamèrent simultanément deux des personnes présentes, s'attirant ainsi les foudres d'un Lynch, qui avait l'air au bord de l'implosion imminente.
— Arrêtez donc de vous lamenter. Il n'est pas trop tard et nous avons une chance. Il faut juste que vous en ayez le courage...
— Il a raison, intervint Isy en se levant pour rejoindre Lynch et se mettre à ses côtés. Ces crétins se sont bloqués eux-mêmes en détruisant la passerelle avec leurs grenades. Ils vont tourner en rond un moment et en attendant...ils sont à notre merci.
— Mais ils ont des armes et...
— ...et vous êtes des changeants, oui ou non ?! Explosa soudain Lynch, en nous englobant tous d'un geste du bras. Vous n'êtes pas sans défenses !
— Mais ça ils le savent déjà...ils s'y attendent même. Ce n'est donc plus un avantage.
— Bien sûr que ça en est un...et de taille ! Ils ont beau savoir que vous êtes des changeants, ils n'ont aucune idée de ce dont vous êtes capable. Sans compter qu'ils nous croient sans doute tous mort. Donc nous allons mettre tous nos atouts en commun pour les ralentir...en attendant que la cavalerie arrive.
Il y eu un moment de flottement, où tout le monde se mit à parler en même temps, voulant imposer ses idées et ses arguments. Lynch y mit rapidement un terme et un plan de bataille ou plutôt de résistance, vu le jour. Tout le monde y avait un rôle, sauf moi. Pas que cela me dérange, notez bien ! J'aurais bien aimé pouvoir apporter mon aide, mais en faisant quoi ? Le fameux test qui devait me révéler mais capacités, avait tourné au cauchemar...sans rien révéler du tout. Ce genre de truc ne pouvait arriver qu'à moi !
— Et elle, elle sert à quoi ? Demanda fort à propos et sur un ton agressif, Sean, le seul garçon de la bande, excepté Lynch bien sûr.
Même si je savais qu'il avait raison, son ton et son regard méchant, me firent réagir au quart de tour. Mais Isy fut encore plus rapide que moi.
— Elle ne t'a pas loupé tout à l'heure...Shadow ! Pff, tu parles d'un homme invisible !
— Je ne suis pas invisible, je me camoufle dans les ombres, lui répondit-il vexé. Visiblement piqué au vif, par son ton ironique et moqueur. Et puis...c'était surement juste un coup de chance.
— Ca, ça m'étonnerais, dit Lynch d'un ton pensif en reportant son attention sur moi. Comment as-tu su où il se trouvait, me demanda-t-il en réussissant l'exploit de me fixer intensément du regard, tout en me tournant autour.
Je réfléchissais à toute vitesse, ne sachant pas vraiment de quoi ils me parlaient. Je n'avais pas fait grand-chose à part fuir, durant cette mascarade, sauf...à la fin, quand les morceaux de mur c'étaient mis à me prendre pour cible.
— C'était toi...qui jetait les pierres ?! Demandais-je à Sean, dans un soudain éclair de lucidité.
— Je ne te les jetais pas, je les projetais sur toi...grâce à mon second petit talent, ricana-t-il apparemment fier de son petit effet et impatient que je lui demande de quoi il s'agissait...il pouvait toujours attendre. Pas question que je lui fasse ce plaisir !
— Et bien moi, je n'ai peut-être fait que te la lancer...mais je ne t'ai pas raté...Shadow ! Le titillais-je à mon tour.
— Vous allez cesser vos enfantillages ?! On se croirait dans une cour d'école, intervint Lynch visiblement exaspéré. Hayden, comment as-tu fait pour le repérer ?
— Je ne l'ai pas repérer comme vous dites. Je ne l'ai même jamais aperçu. En fait...je savais où il était, c'est tout.
— Tu savais où il était, répéta-t-il d'un air dubitatif. Comment ça ?
— Je ne sais pas, commençais-je à m'énerver. Je le savais, c'est tout. C'était une certitude.
— Elle raconte n'importe quoi ! Jeta Sean avec colère en me jetant un regard mauvais.
— Non...je ne pense pas, répondit Lynch pensivement tout en me regardant. Malheureusement nous n'avons pas le temps de nous appesantir sur la question. Hayden, tu vas rester avec moi. Les autres, vous savez ce que vous avez à faire. Alors allons-y, nous avons déjà beaucoup trop tardé.
Nous nous engageâmes donc un énième boyau étroit où je devais me baisser pour ne pas me cogner la tête dans le plafond et faire attention aux murs luisant d'humidité. Je fermais la marche, seule et morose, quand une des filles ralentit l'allure pour m'attendre et calquer son pas sur le mien.
— Ne t'en fais pas, ça lui passera, me dit-elle gentiment. Il a juste peur que tu ne lui prennes sa place de chouchou auprès du prof, me chuchota-t-elle en pouffant.
Cette ambiance bonne enfant, digne d'une cour d'école, comme avait-dit Lynch était bizarre, voir déplacé vu la situation dans laquelle nous nous trouvions. Mais ça faisait du bien, cela dédramatisait la situation, nous permettant de souffler.
— Il peut être rassuré, il n'y a aucun risque...Lynch me déteste ! En plus je ne sers pas à grand-chose, mais c'est gentil d'essayer de me remonter le moral, j'apprécie. Toi c'est Lada, c'est ça ?
— Non, Lada c'est la rouquine là-bas. Moi c'est Ophélia ou Sleepy. La black qui peut faire tomber la nuit à volonté...bonjour l'ironie, me dit-elle en se retournant pour me faire un clin d'œil complice.
Je me contentais de lui sourire pour toute réponse et notre échange s'arrêta là. Mais mon humeur s'était grandement améliorée lorsque nous arrivâmes à une intersection d'où partaient trois galeries encore plus petites et étroites que celle que nous venions de quitter. Depuis quelques jours j'avais vraiment la sensation d'être un lapin...ou une taupe ! Ce n'était vraiment pas le moment de refaire une crise de claustrophobie. Mais pourquoi pensais-je à ça maintenant, me dis-je tandis que l'air se raréfiait soudain dans ma gorge. Je me forçais à respirer calmement par le nez tout en fermant les yeux comme Connie me l'avait conseillé et petit-à-petit je retrouvais une respiration presque normale.
Nous nous séparâmes donc. Ophélia et Sean prirent le couloir du milieu, pour aller se cacher au milieu des ruines. Elle devait les plonger dans le noir, tandis que lui pourrais utiliser les ombres pour se déplacer et les bombarder d'objets divers, grâce à sa télékinésie. Isy et Lada prirent celui de droite, pour être plus mobile et pouvoir sortir à différents endroit pour les effrayer avec leurs cris amplifiés. Quand à Lynch et moi, nous devions prendre celui de gauche et remonter une nouvelle fois, pour nous poster près du couloir de sortie. Nous étions le plan B, au cas plus que probable, où le premier ne fonctionnerait pas.
Le trajet, salissant, mais relativement court pour une fois, se déroula dans un silence pesant. Une fois au bout du tunnel, Lynch jeta un coup d'œil prudent à l'extérieur avant de s'en extraire prudemment.
— Prêtes ? Me murmura-t-il, une ombre d'inquiétude semblant traverser son regard sombre.
Je déglutis et lui fit un petit signe de tête, assorti d'un sourire timide. Dans l'état de stress où je me trouvais, c'était ce que je pouvais faire de mieux.
— Eh Hayden...Si jamais cette certitude tereprend...surtout n'hésites pas, me dit-il sur un ton tellement grave, que je medis que même lui ne croyait pas vraiment en nos chances de réussites.
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