45 : tas de cendres
Harry,
Je ne t'ai jamais écrit, ce n'est pas aujourd'hui que ça va commencer. Je veux seulement avoir l'impression que cette lettre n'est pas écrite dans le vide. J'ai besoin d'imaginer que je ne suis pas seul avec moi-même, aujourd'hui. J'ai besoin d'imaginer que quelqu'un d'autre que moi parcours ses mots et qu'iel les comprendra... et je crois que tu es celui qui peut les comprendre.
Je suis dans ma chambre depuis je ne sais combien de jours, je ne sais pas combien d'heures, je ne sais pas combien de secondes... je n'ai pas d'horloge et si j'en avais une je la traiterai de menteuse. Le soleil s'est levé trois fois, mais ça ne peut pas faire que trois jours que je suis là. J'ai l'impression que je tourne en rond ici depuis toujours. La Terre tourne au ralenti. Ce n'est pas seulement de l'ennui. J'ai pleins de choses dans la tête. Je les écris pour les comprendre, elles se bousculent alors elles seront maladroites et brouillons, mais on s'en fou, puisque personne ne les lira.
J'ai peur, déjà. Heureusement que cette lettre brulera quand j'en aurai tracé la dernière ligne, je n'aimerai pas que tu me lise quand j'ai peur. Je ne voudrais pas non plus que tu saches que je t'admire, je sais que tu es dans le même état que moi mais que tu résiste. Tu as des milliers de raisons de plus que moi d'avoir peur et tu ne cèdes même pas à la panique, donc soit tu es con et inconscient, soit tu es infiniment courageux (je pense que c'est un peu des deux, t'es très con, Potter).Toi, tu en est capable. Moi j'ai peur. Parce que je sens la présence de mes parents.
Je t'arrête, je n'ai pas peur d'elleux. J'ai peur ce qu'iels sont, maintenant. Iels étaient mon dieu et ma déesse quand j'étais enfant, désormais je suis face à des diables. Iels ont perdu quelque chose
non
en fait c'est moi qui est perdu quelque chose. Je ne les aime plus. Je ne les vois plus embelli∙es par le filtre de l'amour.
non
En fait, le pire, c'est que je les aime encore.
C'est pour ça qu'iels me font si peur, je serai indifférent à tout ça si je ne les aimais plus. Mais je les aime. Malgré tout ce qu'iels ont fait, tout ce qu'iels feront, tout ce qu'iels font, maintenant, je les aime encore. Il y a toujours une partie de moi qui prend en compte ce qu'iels pensent et ce qu'iels m'ont appris. Il y a toujours une partie de mon coeur qui bat pour elleux.
Je me deteste de continuer de les aimer.
Je crois que j'ai un coeur trop fragile. Je déteste dire ça, c'est stupide. Mais je pense que c'est vrai. J'aime encore Blaise. J'aime encore mes parents. J'aime encore mon parrain. J'aime encore Cédric. Alors que certain∙es ne sont même plus de ce monde. Je voudrais pouvoir les gommer de mon coeur. Pourquoi est-ce qu'iels s'accrochent comme ça ?
Et toi aussi, Harry, pourquoi est-ce que tu t'accroches comme ça ?
Je voudrais quitter cette chambre.
Et je...
C'est stupide.
Je voudrais être avec toi. Tu me manque.
Je sais que je ne te manque pas, pas comme ça, du moins. Je sais que toi tu pense à d'autres choses mais moi, je t'ai dit, j'ai un coeur crétin, il ne pense qu'à toi. Je lui ai interdit mais il s'en fiche.
C'est stupide.
Mais je brûlerai cette lettre, peut-être que si je l'écris ça le brûlera aussi ? C'est un truc que je ressent et qui ne me plait pas du tout. Je le connais un peu, mais je ne veux pas qu'il débarque, pas avec toi. Ça aussi, ça me fait peur. Je veux pas perdre ce qu'on a.
Harry, je déteste cette maison. Je veux partir. Tu n'y peut rien, mais j'avais envie de te le dire, tu es la personne qui doit le savoir. Tu es le plus important.
Drago.
Il brûla la lettre d'un sort. La justice magique ne dirai rien, le luxe des bourgeois lui permettait d'utiliser sa magie au sein de sa maison sans être controlé.
Il balança les cendres à la poubelle comme si elles n'avaient jamais existé. Pour les autres, ce ne serait qu'un tas de cendres. Mais elles ne narguaient.
Il avait osé l'écrire.
Il plaça ses deux poings sur ses yeux clos pour forcer son esprit à chercher une autre préoccupation que toutes celles qui lui dévorait les organes.
Seule une chanson débarqua. Une de celle qu'il n'avait croisé qu'une fois au poste de radio de Dean et dont il était tombé amoureux. Elle avait débarqué alors qu'il se posait la question, sa mélodie s'était naturellement calquée sur les mots :
Is there anybody out there ?
La suite n'était faite que des pincements des cordes d'une guitare, mais elles exprimaient autant de choses que des mots. La question seule était suffisante pour résonner en lui encore et encore ? Il avait entendu cette chanson longtemps avant, la première année, peut-être, et il n'en avait pas vraiment comprit le sens. Maintenant, elle semblait parfaitement refléter ce qu'il ressentait.
Is there anybody out there ?
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