27.
Je suis déçue. Je n'ai rêvé de rien. C'était un sommeil lourd, pâteux, sans saveur.
Lila n'est pas rentrée. J'ai dormi six heures.
Je m'avance vers la salle de bains, me regarde dans le miroir.
J'ai les traits tirés, le teint presque verdâtre, les cheveux emmêlés, la bouche craquelée, j'ai l'air fatiguée.
Je pourrais passer un casting pour un film de zombies.
Qu'est-ce que j'ai fait ?
J'ai honte. Pourquoi ai-je pris ces somnifères ? Je sais, pourtant, que je ne peux pas en prendre plus d'un. Je le sais depuis qu'on me les a prescrits, il y a dix ans. Pourquoi ai-je fais ça ?
Dégoûtée de moi-même, je me déshabille, entre dans la cabine de douche. L'eau chaude brûle ma peau. Le savon est rugueux, mais je frotte, frotte, jusqu'à m'en faire mal.
Je démêle mes cheveux, les tresse, étirant et entortillant mes mèches sans ménagement. J'enfile un jean serré, noircis mes cils de mascara, rougis ma bouche de gloss.
Je chausse mes escarpins vertigineux, ceux qui me mordent les talons.
Et je me rends jusqu'à l'appartement d'Aidan.
Je veux juste qu'il me voie.
Qu'il voie que j'ai avorté, et que je vais bien, maintenant, avec ou sans lui.
C'est Jimmy qui ouvre la porte mais, contrairement au jour de la soirée, il ne sourit pas.
« Iris. »
Il me contemple, l'air désolé. Ses yeux sont tellement emplis de compassion que cela en devient insultant. Pourtant, je sais qu'il ne cherche pas à me blesser : Jimmy ne cherche jamais à blesser qui que ce soit.
Mais ses yeux me dérangent.
Je vais droit au but :
« Aidan est là ? »
Jimmy hésite. Effleure le dragon d'encre étendu sur son bras.
« Iris, commence-t-il, tu ne devrais pas être là... »
Je ne l'écoute pas. Je me hisse sur la pointe des pieds, aperçois une ombre derrière lui.
Elle est rapide, fugitive, mais je reconnais les boucles cuivrées.
« Aidan ! »
Je bouscule Jimmy, m'élance.
Il est là, dos à moi, face au balcon.
« Regarde-moi. S'il te plaît. Juste, regarde-moi. Ensuite, je m'en irais. »
Il ne se retourne pas.
« Je t'avais dit de ne pas la laisser entrer, Jimmy. »
Voilà ses uniques paroles.
Les grandes mains de Jimmy se posent sur mes épaules.
« Viens, Iris. Ne reste pas là... »
Je le sens m'attirer vers lui. Je me dégage. Non, non, pas encore. J'ai l'impression de revoir la scène de la station-service. De me heurter de nouveau à un mur, alors que j'ai tellement, tellement besoin de lui.
« Aidan, regarde-moi ! Tu ne peux pas m'ignorer. Dis-moi que tu ne m'aimes plus, ou que tu es désolé, mais ne me laisse pas comme ça ! Tu n'as pas le droit. Tu entends ? Tu n'as pas le droit ! »
Il reste de marbre.
Pourquoi ne dit-il rien ?
Pourquoi ne se retourne-il pas ?
« J'ai avorté ! Il n'y a plus de fœtus ! On peut reprendre à zéro, si tu veux, mais regarde-moi, je t'en prie. »
Je pleure.
Jimmy me prend la main.
« Aidan ! »
Pas un geste.
La vue brouillée par les larmes, je me laisse guider jusqu'à la sortie.
« Aidan... »
C'était idiot de venir ici. Je n'aurais pas dû. Et pourtant j'ai cru qu'il avait réfléchi, qu'il se comporterait autrement, mais... Les gens ne changent pas. Les gens ne changent jamais.
Jimmy m'emmène sur le porche, je ne me débats même pas. Je ne suis plus qu'une pauvre fille, pareille à une poupée de chiffon.
« Je suis désolé, Iris. »
Il entre ouvre les bras, comme s'il espérait que je m'y jette.
Je n'en fais rien.
Je siffle :
« Je te déteste. Tu m'entends, Aidan ? »
Ma voix se casse, mais ça ne m'empêche pas de crier :
« Je te déteste ! »
Je descends les escaliers quatre à quatre, quitte l'immeuble.
Je le déteste...
Non, ce n'est pas vrai.
Je l'aime et c'est peut-être pour ça que j'ai aussi mal.
---
Et voilà, fin de ce chapitre ! (Et non, Iris n'est pas morte xD)
J'en profite pour vous dire que je viens de me rendre compte que j'avais oublié de publier la partie 25 --' Bon, elle n'était pas très importante, mais voilà.
A demain pour la suite, bisous ♡
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