7 - Zola
« La vie n'est qu'un piège où l'on finit toujours par tomber.»
– Minou Petrowski.
Si chacun de mes actes étaient orientés vers le bien, est-ce que je pourrais compenser tout le mal que ma famille a commis ?
J'ai entendu mille fois les gens me répéter que ce n'étais pas ma faute, que ce n'était, en aucun cas, ma responsabilité.
Ils se trompent. Je suis responsable, en partie au moins, parce que je sais ce qu'ils font et que je ne fais rien pour les en empêcher. Je n'ai jamais eu le courage d'intervenir, de dire stop. Jusqu'à aujourd'hui, je me suis toujours sentie trop faible pour le contrer.
J'ai fuis parce que c'était plus facile.
Mais je ne peux plus fermer les yeux; n'est-il pas temps d'agir ?
Dans cet absurde jeu qu'est la vie, c'est à mon tour de jouer, de déplacer les pièces sur ce grand échiquier pour faire basculer le cours de cette partie si férocement instaurée.
Oui, si j'ai le choix, j'essaierai de sauver quelqu'un d'eux. Je commencerai par une personne, et après, j'essaierai avec tous les autres.
Parce que rester les bras croisés revient à me transformer, chaque jour, un peu plus comme eux.
Debout dans la chambre de Jared, je restai figée alors qu'il venait de quitter la pièce après avoir l'avoir fermée à clé.
Que venait-il de se passer ?
Une heure plus tôt, je dormais paisiblement dans mon petit appartement, et voilà que je me retrouverai, maintenant, dans la maison d'un inconnu, ignorant si je pouvais avoir confiance en ses paroles.
Devais-je le croire ?
En quelques minutes, j'étais passée d'une peur intense à des doutes et une détermination sans faille, un étrange paradoxe de sentiments.
Car si Jared disait vrai, si cette fille était bien en danger à cause de ma famille ; j'avais été honnête au moment où je lui avait soufflé de suivre son plan. Bien que je détestais l'idée de les revoir, il valait mieux que se soit moi qui soit avec eux, plutôt qu'elle.
Je me baladai dans la chambre, promenant ma main sur les meubles pour essayer de me repérer. Un bureau, un lit, une étagère, rien de relativement original. La pièce était relativement bien rangée, ce qui différait grandement de Joe, mon unique comparaison de chambre masculine, qui était un indéniable bordélique.
Me laissant tomber sur la chaise du bureau, je soupirai, la boule au ventre, me demandant quelle décision Jared allait prendre. Je savais que peu importe son choix, il resterait fixé dessus. Il avait l'air d'être le genre de personne à qui il est difficile de faire entendre raison une fois son avis tranché.
J'avais peur, bien-sûr, peur qu'il refuse de me renvoyer là-bas et qu'une innocente meurt, mais je craignais également qu'il accepte et que je sois à nouveau confrontée à ma famille. Je savais qu'ils attendraient des explications suite ma fuite et qu'ils ne se montreraient pas tendres à l'instant où ils me trouveraient. Néanmoins, cela, j'avais omis de le dire à Jared. C'était mieux ainsi; ça aurait orienté sa décision si il se doutait de la raclée qui m'attendait.
Le son de la clé qui tourne dans la serrure me ramena à la réalité. J'entendis des pas et sentis une présence devant moi.
– Je t'ai fait un thé, m'expliquant Jared, maladroit, en posant la tasse dans mes mains congelées.
Je le remerciai tout en présumant qu'il prenait place sur le bureau à côté de ma chaise, suite au bruit que j'entendis.
– Tu as décidé ? demandai-je alors qu'il conservait le silence.
– J'ai appelé Ed, commença-t-il calmement, C'est lui le fiancé de Mercy, il est à Los-Angeles actuellement pour chercher des informations. Il m'a semblé que lui pouvait prendre une meilleure décision que moi, il est le premier concerné. Alors je lui ai tout raconté : l'enlèvement, ta réaction, aussi ta détermination à vouloir sauver sa copine. Je n'ai omis aucun détail.
Je hochai lentement la tête.
– Et qu'a-t-il dit ?
– Il m'a défoncé, ricana-t-il.
Cette réponse me laissa perplexe.
– Comment ça ?
– Il m'a engueulé pour le plan. Il ne valide pas du tout. Oui, il est désespéré et il veut revoir Mercy plus que tout, mais il dit que t'enlever toi et t'utiliser comme monnaie d'échange, c'est commettre un acte aussi lâche que ta famille. Et puis, il sait pertinemment que si Mercy avait appris comment on l'avait récupérée, elle ne nous pardonnerait jamais. Elle ne voudrait plus nous voir, elle se sentirait trop responsable. Elle te ressemble terriblement sur ce point.
Je passai ma main sur mon visage, désemparée.
– J'ai du mal à vous comprendre. C'était ton plan, pourtant, à l'origine. Pourquoi rechignes-tu tellement à l'accomplir ?
– Ce n'était pas mon idée, c'était celle de Klaus, cracha-t-il énervé, Ça va peut-être te surprendre mais on a jamais enlevé personne avant. Ce n'est pas notre passe temps du dimanche. Je suis en zone aussi inconnue que toi, actuellement.
Je ne pouvais qu'acquiescer à ses mots. Effectivement, il semblait aussi perdu que moi sur la marche à suivre du parfait kidnappeur ou de la parfaite otage.
Soudainement, je relevai la tête. Le prénom qu'il venait d'évoquer résonna dans mon esprit. Cela pouvait être une coïncidence, bien-sûr, pourtant...
– Klaus Harris ?
– Oui, c'est ça, confirma-t-il, visiblement très surpris, Tu le connais ?
– Oh putain, soufflai-je, éberluée, Je veux bien croire que le monde est petit, mais là, ça devient gros. Klaus Harris est le meilleur ami de mon frère Nick .
– Meilleur ami ? C'est impossible, le Klaus que je connais déteste les Black, démenti-t-il.
– Non, il ne les déteste pas, il bosse pour eux. Ça doit faire bien une dizaine d'année..., mumurai-je en me remémorant nos rencontres, Sa haine envers nous est une couverture. Il prétend qu'il a des infos sur les Black et qu'il les déteste ; comme il est plutôt convaincant, les gens finissent pas lui faire confiance, sauf qu'ensuite, il va tout raconter à ma famille. Ça a toujours fonctionné ainsi, ça leur permet de savoir qui s'intéresse à eux, quel sont leur potentiels ennemis pour mieux se préparer.
J'entendis un son brusque, je devinai que Jared venait de taper sur le bureau, furieux.
– Je suis pote avec ce mec depuis plus de cinq ans, s'écria-t-il, Je vais l'exploser.
– Tu n'es pas le premier à t'être fait avoir, si ça peut te rassurer. Ce qui me laisse perplexe, par contre, c'est pourquoi Klaus t'aurait soufflé l'idée de m'utiliser comme monnaie d'échange.
Le silence régna quelques instant, chacun de nous deux emportés par ses propres réflexions jusqu'au moment où Jared laissa échapper une exclamation de surprise.
– Oh mon Dieu, déclara-t-il brusquement en se levant, J'ai une théorie, mais elle ne va pas te plaire.
– J'ai déjà peur.
– Il y a cinq ans, comme je te l'ai dit, on a été en contact avec ta famille. En vrai, je n'en suis pas fière, mais on bossé pour eux. H, notre hacker, est un véritable génie, et je ne mâche pas mes mots, ses capacités sont hors-normes, supérieures à tout ce qu'on peut imaginer. Il arrive toujours à ses fins. Un jour, les Black sont venus nous demander de retrouver quelqu'un, ils avaient entendu parler de H et ils savaient que ce dernier saurait retrouvé n'importe qui, n'importe où. Ils prétendaient qu'ils cherchaient cette personne car c'était un voleur qui s'était enfui avec beaucoup d'argent et qu'ils devaient récupérer la somme.
Aïe, je voyais venir la fin de cette histoire à des kilomètres.
– Tu t'en doute, ce n'était pas le cas, reprit-il, confirmant mes craintes, Ils nous avaient menti, et à cette époque-là, on ne connaissait pas assez bien la réputation de ta famille pour se méfier. Cet homme était un innocent, c'était un contrat et ils l'ont tué après qu'on leur ait indiqué où il se trouvait. Clyde, notre ancien chef, était si furieux qu'il a cassé le bras de Nick Black -ton frère apparemment. Il leur a dit que si ils s'adressaient, à nouveau, à nous, un jour, il les anéantirait.
Cette histoire avait beau être affreuse, j'avais du mal à voir où Jared voulait en venir jusqu'à ce qu'il recommence à parler, après avoir repris sa respiration.
– Hors, tu dis que ta famille te cherche toujours depuis un an. A l'évidence, tu es bien cachée si ils ne t'ont pas trouvé, pendant tout ce temps. Du coup, ils ont cherché la personne qui saurait te trouver.
– Votre hacker, conclu-je alors que l'idée que Jared avait en tête se dessinait, peu à peu, dans ma tête.
– Exactement, sauf qu'ils savaient que après les menaces de Clyde, on ne serait jamais d'accord de les aider volontairement. Ils ont donc monté le plan parfait. Kidnapper la fiancée de l'un des notre pendant qu'elle se rendait à Los-Angeles, laisser courir la rumeur que l'enlèvement venait d'eux pour que nos sources soient au courant et demander à Klaus de se charger du reste. Il savait que je l'appellerai, c'était évident, c'est toujours lui qu'on appelle si on a un problème avec les Black. A partir de là, Klaus n'avait plus qu'à soumettre l'idée de t'utiliser comme monnaie d'échange pour récupérer Mercy, en faisant croire que ce plan était notre volonté et non celle de ta famille. Ils nous ont manipulés, depuis le début.
A mesure que tout s'assemblait comme les pièces d'un puzzle, à mesure que l'image du plan de ma famille se dessinait dans ses explications, mes mains commencèrent à trembler.
– Tu es en train de dire que...
– Mercy était un appât, expliqua-t-il, C'est toi qu'ils veulent récupérer. Tout ceci est un piège.
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