Chapitre 5

Helloo !

Et voilà, le retour d'Invisible !

Ça fait un moment que vous n'en avez pas entendu parlé, je vais donc vous faire un p'tit résumé des épisodes précédents :

On est dans la tête de Jyn, une fille invisible. Elle vivait avec sa mère dans un hôpital jusqu'au jour où Lonna la sort de là, marchandant ses services contre les visites qu'elle promet de rendre à sa mère. Jyn se met donc au service de Lonna. Elle garde un bon caractère et ne manque pas une occasion de la provoquer ou de critiquer les visibles (personnes artificielles qui basent tout sur la popularité), mais elle se retrouve quand même obligée d'accomplir les missions qu'elle lui donne dans le but de devenir la plus populaire de son lycée.

Puis, un jour, Jyn se rend compte qu'une autre personne est capable de la voir. Qu'une autre personne la connaît. C'est Ilan, personne d'autre que le copain de Lonna, qui l'accoste pour lui demander de faire attention à la jeune fille. Il trouve qu'elle va trop loin et, Jyn étant son alliée, il veut qu'elle l'aide à la calmer. Sauf que Lonna n'est pas du tout du genre à se calmer et Jyn est bien obligée de lui obéir, elle part donc pour une nouvelle mission : trouver quelque chose de compromettant sur Lyov (un concurrent de la populaire) pour le mettre hors jeu.

Voilà, c'est tout pour moi ! Maintenant, place au chapitre :

Bonne lecture !

* * * *

- Jyn !

Je m'arrête net, effrayée d'entendre mon nom crié en pleine rue. C'est une de ces nombreuses choses qui ne m'arrivent jamais, et qui ont le chic pour me donner des frissons.
Je prends une inspiration et me retourne, calmant tant bien que mal les battements affolés de mon cœur.

C'est Ilan qui vient de m'appeler, courant vers moi à toute vitesse dès le portail du lycée passé.

C'est gentil à lui de faire attention à moi, et aussi étrangement réconfortant de le savoir assez attentionné pour être capable de me voir. Mais là, ce n'est pas le moment de parler.

Surtout que Lyov est en train de se faire la mal !

Mais je ne peux pas lui dire ça. Alors j'esquisse un sourire de surface -un de ceux que je m'étais promis de ne jamais aborder- et me force à le laisser me rejoindre.

Plantée là, je dois bien dire que pour éviter ce genre de cordialités gonflantes, ça m'aurait pas dérangée d'être encore invisible.

- T'as prévu un truc pour ce soir ?

Je le regarde dans les yeux tout en me mordant les lèvres, ayant bien conscience que chaque seconde que je passe là me fait perdre un peu plus Lyov. Et il... me demande de passer du temps avec lui ?

Sans doute qu'il attend un non pour réponse, et ça annonce bien la couleur. Il me voit peut-être depuis un bon moment, mais ce n'est pas pour autant qu'il sait comment je fonctionne.
Ce n'est pas mon genre de céder aux visibles. Et en ce moment, j'ai bien autre chose à faire que d'accepter sa demande !

- Oui, désolée, je m'excuse avec une gêne forcée à me donne moi-même la nausée.

Son sourire se crispe.

- Bon ben... Une prochaine fois alors ?

Je hoche la tête, distante.
Curieusement, un poids pèse dans ma poitrine quand je le regarde s'éloigner. Peut-être parce que j'avais envie de passer du temps avec lui finalement... ?

- T'habites où ?

Les mots jaillissent de ma bouche sans que je ne cherche à les retenir. Et mes joues se mettent à chauffer tandis qu'il se retourne, un sourire chaleureux sur ses lèvres brunes.

- Appartement 154, immeuble Gaillagon.

Son entrain a de quoi marquer mon esprit. D'habitude, les visibles ne dévoilent rien d'eux. C'est pour ça que j'ai dû suivre Delma jusqu'à chez elle hier, tout comme je suis censée filer Lyov actuellement. Le fait d'être connu par tous les rend vulnérables. Souvent, des visibles sont assassinés ou sont forcés de disparaître à cause de ça.

Alors le sourire confiant d'Ilan et la facilité avec laquelle il m'avoue l'endroit précis où il habite a de quoi me surprendre. Peut-être se doute-t-il que je ne le vais le dire à personne, ce qui est bien vrai étant donné que personne ne me connait. Ou peut-être a-t-il simplement... confiance en moi ?

Ce qui est encore plus étrange !

- Je verrai si je peux passer, répondé-je, troublée.

Son sourire s'agrandit.

- Ça marche, quand tu veux !

Je lui rends son sourire, un arrière goût amère dans la bouche, puis fais quelques pas en arrière.

- Bon, je dois y aller, j'articule en voyant un bus passer à côté de nous dans la rue.

Et sans rien rajouter, je décampe, courant de toutes mes forces pour rester à hauteur du véhicule. Avec la chance que j'ai, à tous les coups, c'est le bus de Lyov !

Mais quand je vois le bus me dépasser et passer devant l'arrêt sans s'arrêter, loin d'être soulagée, l'agacement me fait souffler du nez. Pire que de devoir courir derrière un bus, c'est de le faire sans même avoir besoin de le prendre. Et en supplément, j'ai définitivement perdu Lyov !

Je m'arrête et frappe du pied contre le sol, effrayant des passants qui entreprennent un grand détour pour m'éviter.

Ça m'énerve encore plus.
Qu'ils me fassent pas croire que derrière leurs beaux airs distingués, ils n'ont jamais été en colère, ceux-là ! Et dire qu'ils osent me traiter de sauvage parce que j'extériorise. Eux, ce sont des monstres à toujours sourire comme des benêts !

Mais tout cris d'indignation meurt sur mes lèvres quand j'aperçois le blouson bleu et les cheveux décoiffés de Lyov derrière les vitres en plastique de l'arrêt de bus.

Le voilà !

Alors je me calme et j'attends en silence. Les minutes défilent jusqu'à ce que le bon bus s'arrête devant lui. Et quand il monte, je m'empresse de prendre sa suite.

- J'ai oublié ma carte, m'excusé-je au chauffeur qui hoche négligemment la tête, m'oubliant sans doute aussitôt.

Pff, comme si j'avais une tête à avoir une carte de bus.

Lyov descend quelques arrêts plus loin, et je le suis tranquillement. À distance raisonnable et loin des passants, il n'y a aucune raison pour qu'il me repère.

Je le vois se faufiler au détour d'un bâtiment désaffecté. Mon nez se fronce quand je m'y engage à mon tour. C'est pas le coin pour des affaires honnêtes par ici, dans ce quartier. Quelque chose me dit que Lonna va être ravie...

Et je ne me suis pas trompée. Là, devant moi, dans la lumière du soleil rasant se reflétant dans l'eau sale du Lethé, se tiennent deux hommes aux carrures imposantes.
L'un est Lyov. Et l'autre, je peux bien me foutre de son identité, ce qu'il porte dans les mains suffit largement.

Il faut être sacrément stupide pour ne pas cacher ce genre de drogue quand on l'échange. Même si on est dans un coin paumé, faut prendre ses précautions !

Lyov, même si mon avis ne t'importe pas le moins du monde, je dois dire que tu me déçois. Lonna va démolir ta vie à cause de ton imprudence. T'es finis, idiot !

Alors je tire mon petit appareil photo de la poche de ma veste et le tourne vers le soleil où se détachent les deux silhouettes et le large sachet reconnaissable entre mille. Le contre jour n'est pas terrible, mais le profil de Lyov se reconnait. Ce sera bien assez.

J'appuie sur le bouton comme sur la détente d'un pistolet. Peut-être aurait été-ce d'ailleurs moins cruel de tirer une vraie balle sur le jeune homme plutôt de le prendre en photo...

Pas le temps de me perdre en réflexions. Je rassemble mes affaires et m'enfuis sans demander mon reste.
Ce n'est pas le moment d'avoir mauvaise conscience !

- Jyn ?

Le visage d'Ilan dans l'embrasure de la porte reste un instant figé par la surprise. Il se reprend vite, m'offrant un ravissant sourire dont lui seul a le secret. Mais un instant, c'est déjà bien assez.

- Je te dérange ?

- Non non, c'est juste que...

- Ilan ? C'est qui ? s'enquit alors une voix que je reconnais aussitôt.

Lonna !

Mes joues s'empourprent furieusement. Merde, je le dérange au pire moment !

Ilan fronce un peu plus les sourcils, ses doigts se crispent sur le battant de la porte. Mais en dépit de son inquiétude, il me fait tout de même signe d'enter.

Je lui obéit timidement, tout en songeant qu'il prend de gros risques à faire ça. Lonna ne prendra sans doute pas la peine de me voir dans un moment pareil. Mais si elle le grille, il est vraiment mal barré ! Et moi aussi d'ailleurs...

- Longe les murs et suis moi, me souffle-t-il avant de répondre à la jeune fille en revenant sur ses pas : Rien, encore un démarcheur qui croyait qu'on voulait de nouveaux stores.

- Oh, j'espère qu'ils vont bientôt disparaître, eux ! râle-t-elle en tournant la tête vers Ilan.

Je suis silencieusement le jeune homme, avançant jusqu'à me trouver derrière Lonna pour pouvoir ouvrir une porte sans qu'elle ne s'en aperçoive. De son côté, Ilan s'approche d'elle pour attirer son attention.

Je ne m'attarde pas un instant de plus dans la pièce et passe la porte avant de la refermer silencieusement. Passée maître dans l'art de la discrétion et avec Ilan pour me couvrir, il ne fait aucun doute que Lona ne s'est rendue compte de rien.

Rassurée, j'entreprend alors d'étudier la pièce. Un bureau, semble-t-il. Avec bibliothèque et canapé, pour mon plus grand plaisir.
Je vais m'installer sur ce dernier, confortable à souhait, lève la tête vers le plafond et attends silencieusement, dans l'espoir d'entendre des brides de leur conversation. Mais ne résonne dans mes oreilles que le silence bruyant de la pièce. Foutus apparts de riches trop bien isolés !

Je passe donc mon temps à détailler la pièce du regard, m'arrêtant sur tout et rien, et redémarrant une bonne centaine de fois le compte des secondes que j'essaie d'établir dans ma tête.

Quand Ilan revient me chercher, j'ai atteint pour la quatrième fois -ou la cinquième- les 53.

- C'est pas trop tôt ! je m'exclame avec humeur.

Même si en soit, c'était pas si long pour un rendez-vous amoureux.

- C'est toi qui es arrivée trop tôt ! réplique-t-il, tout sourire.

Je ne peux empêcher mes joues de s'empourprer. Oui, ce n'est vraiment pas dans mes habitudes de déranger. Surtout dans des moments comme ça...

J'adopte alors une attitude désinvolte pour masquer mon embarras et passe tranquillement devant le jeune homme en gagnant le salon, esquivant son regard.

- Mon père ne rentrera pas avant 21h, m'informe-t-il en fermant derrière moi tandis que j'avise la pièce principale, réchauffée à la lumière orangée du soleil couchant. Tant qu'à ma mère, elle est en voyage d'affaire. Ça nous fait donc une ou deux heures, facile.

J'entends distraitement ses pas s'imprimer sur le sol métallique alors qu'il s'approche de moi.

- C'est beau, remarqué-je pour ma part en détaillant le paysage en proie aux flammes, là, derrière les grandes baies-vitrées.

- C'est sûr qu'on a une plus belle vue d'ici que de chez Lonna, reconnaît Ilan, un sourire dans la voix.

Je me retourne alors vers lui, et ai la surprise de le trouver plus proche que ce à quoi je m'attendais.

Mon cœur s'emballe aussitôt.
Je... n'ai pas l'habitude de me tenir si près de quelqu'un. Surtout d'un garçon...

Mon regard s'attarde malgré moi sur son visage. Le soleil dévore toute sa joue gauche et des flammes dansent dans ses yeux bruns. Rien que ça suffit à me faire perdre mes moyens.

- Alors, qu'est-ce que tu fais là ?

C'est vrai, je lui dois des explications ! Seulement... je me rends soudainement compte que je ne sais plus quoi dire.

Je m'écarte de quelques pas en baissant les yeux et serre résolument les mains. Mais toute l'assurance que je veux mettre dans mon attitude m'abandonne. Quand ma voix sort de ma gorge, elle est toute brisée.

- Je... balbutié-je, le souffle court et les mains tremblantes. Je ne sais plus quoi faire.

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