Chapitre 1

J'ai toujours détesté ma ville : trop de bruit, trop de pollution, pas assez de verdure... Et des gens qui ne font que grimacer ; aucun sourire, des visages gris comme le ciel. J'ai d'ailleurs l'impression que le ciel est tout le temps nuageux, chez moi. Les rues sont sales ; le parc, mal entretenu (les herbes folles s'y étalent partout) ; et les façades des maisons, recouvertes de traces noirâtres. Cependant, j'aime bien y vivre, parce que j'y ai mes copains, mon appartement, mon immeuble avec sa grande terrasse sur le toit – on n'y va presque jamais parce qu'il y fait trop froid, avec le vent – et surtout, ma voisine du dessous.

Cette dame là est absolument merveilleuse. Elle vit seule avec deux gros chiens qui me sautent dessus quand j'entre chez elle, et a toujours un sourire coincé au bord de ses lèvres légèrement gercées. Je n'ai jamais su quel âge elle avait. Plus que mes parents, ça c'est clair, mais pourrait-elle être ma grand-mère ? Aucune idée. Il émane d'elle une vitalité assez incroyable, impressionnante. Elle inspire le respect. Pourtant, elle est très gentille, tout sauf rigide et accueillante. Je vais toujours prendre le thé chez elle après les cours.

D'ailleurs, je quitte mes deux amis qui se dirigent vers celui qui habite un peu plus loin dans la rue. Ils me font coucou avant de reprendre tranquillement leur route. Ils ne savent pas que je vais chez Hortense. Personne ne le sait vraiment, hormis mes parents. Et encore.

J'entre dans l'immeuble, monte deux étages en courant, sans toquer à la porte. Je la pousse sans attendre, me déchausse en lâchant mon sac puis m'avance dans l'appartement. Je m'attends à l'accueil des deux chiens, qui ne tarde pas : Tyni jappe en me voyant, elle secoue la queue, la langue pendante. Je lui gratte affectueusement la tête puis manque de tomber, Flack s'amusant à passer à toute vitesse entre mes jambes. Il me faisait toujours tomber, au début, mais maintenant je le connais par cœur. Je retrouve mon équilibre à l'aide du dossier du vieux canapé plein de poils, puis vais vers la cuisine mettre de l'eau sur le feu. Je la fais bouillir tout en sortant du placard des gâteaux et les sachets de thé.

Hortense est arrivée dans le salon, je sais qu'elle installe la nappe sur la table basse. Elle vient ensuite chercher le plateau de biscuits, en profite pour passer ses mains rêches dans mes cheveux, puis repart sans un mot. L'eau est brûlante, j'en verse deux tasses dans lesquelles je mets chacune un sachet à infuser. Je laisse mes yeux traîner sur le plan de travail recouvert de plantes séchées, de fruits à coques (Hortense les adore, je lui en rapporte dès que j'en ai à la maison), d'ustensiles plus ou moins utiles, et de livres. Son appartement en est rempli du sol au plafond, de toute façon. Je prends les tasses avec agilité – je ne me brûle plus depuis longtemps – et vais la retrouver. Elle est assise sur le vieux canapé aux couleurs passées, Tyni sur les genoux. Je ne vois pas Flack, il est probablement à la fenêtre donnant sur la cour intérieure de l'immeuble, les pattes avant sur le rebord et le museau pointé vers le ciel. Il adore se placer là et y rester de longues minutes.

Je m'assieds et tends sa tasse à Hortense. Elle me sourit en l'attrapant délicatement ; on boit sans parler. On profite. Je prends un biscuit que je trempe dans mon thé, le grignote en fermant les yeux, puis sens un coussinet sur ma jambe. C'est Tyni qui a étendu sa patte, trop heureuse des caresses que lui procure sa maîtresse. Je n'ai jamais rencontré plus affectueux que cette chienne. Ceci dit, je n'ai jamais vu beaucoup d'animaux.

Je suis grand frère de trois ans d'une monstruosité que mes parents osent appeler « un trésor ». Ma sœur est, pour ainsi dire, mon pire cauchemar. Elle crie pour rien, pleure sans arrêt et se plaint comme elle respire. Mais parfois, elle m'aide à grappiller du chocolat ou à sortir en cachette, donc je l'aime bien malgré tous ses défauts. Disons qu'on a une relation d'intérêts. Mes parents ne sont pas souvent à la maison, sauf le week-end ; ils travaillent du matin au soir, et c'est pour ça qu'on a une nounou à l'appartement. Pour faire court, c'est une personne supposée nous garder et nous empêcher de faire des bêtises tout en veillant à notre apprentissage des leçons. Une gardienne de prison, exactement. Après on se demande pourquoi je suis toujours fourré chez Hortense. Ceci dit, ce n'est pas la seule raison. Hortense, c'est devenu une confidente, une alliée, une amie. Et, du haut de mes douze ans, j'en ai bien besoin. Évidemment, j'ai mes copains, mais ils ne comprennent pas tout ; on est bête quand on a mon âge. Hortense, elle, écoute quand je lui parle, elle répond quand j'ai terminé et me réconforte à tout moment. Elle est comme une bouée de sauvetage, la seule qui me voie vraiment, la seule qui sache réellement qui je suis. La seule aussi à s'y intéresser.

Garçon sans histoire, je suis bon à l'école sans pour autant être excellent, je travaille mais sans plus, et n'embête personne. Au-delà de ça, je suis un gamin qui devient transparent. Au sens propre. Mes mains, parfois, disparaissent ; et c'est comme si tout le monde trouvait ça normal. En fait, c'est plutôt que personne ne s'en rend compte. Hortense, elle, l'a vu. C'était un vendredi, et je mangeais un gâteau de sa confection, Flack à mes pieds et le regard dans le vague. J'ai repris une bouchée, et elle m'a dit :

– François, tu disparais.

« François », c'est le surnom qu'elle me donne toujours, je n'ai jamais compris pourquoi. Pour autant, j'y suis habitué. J'ai donc contemplé mes mains (transparentes, une fois de plus) et j'ai hoché la tête. Elle a regardé mes mains, puis mon visage, et a opiné du chef aussi. Après ça, je lui ai raconté que ça m'arrivait souvent, que je devenais invisible lentement mais sûrement. Ça avait commencé avec le bout des doigts, et maintenant ça m'arrive jusqu'à un peu après le poignet.

Elle n'a jamais trouvé ça étrange, tout comme moi je ne l'avais jamais traitée de « dérangée » ou de « bizarre ». Elle est simplement plus intelligente que les autres, elle sait tellement plus de choses que ceux qui l'évitent en la traitant de sorcière. Je n'ai jamais compris leurs raisons. Moi, la première fois que je l'ai rencontrée, j'ai vu une femme d'un âge indéfinissable qui promenait ses deux chiens, portant son regard malicieux sur tout et tout le monde, avec son éternel sourire au coin des lèvres. Je l'ai saluée de la main, elle a incliné la tête. Le lendemain, je toquais chez elle par pure curiosité, puis pour apprendre à mieux la connaître. Aujourd'hui, je goûte dans son appartement, sur son vieux canapé, comme tous les jours.

– Tu es perturbé, François.

Elle ne me pose pas la question, elle expose les faits. Je m'y suis habitué, comme je me suis habitué au fait qu'elle m'appelle toujours « François » et pas « Frank ». Je me suis d'ailleurs mis à préférer « François », dernièrement. J'opine donc du chef, tout en reprenant un gâteau au-dessus de Tyni. La chienne ne s'en rend même pas compte.

– Je disparais jusqu'aux poignets, maintenant, dis-je en fixant les iris verts d'Hortense.
– Ça ne s'arrêtera pas, me rappelle-t-elle en réponse.
– Je sais. Mais je ne veux pas devenir invisible.

Elle acquiesce et pose sa tasse. Je fais de même et elle me prend les mains sans quitter mes yeux du regard. Elle, elle ne fuit pas mes pupilles. Je sens ses doigts glisser entre les miens, mais je ne baisse pas les yeux pour vérifier. On s'observe longuement, puis Tyni descend des genoux d'Hortense et s'enfuit dans le couloir. Flack jappe et on entend leurs pattes crisser sur le parquet ; ils jouent ensemble. Les pouces de ma voisine caressent mes paumes, un crépitement que je commence à reconnaître part du bout de mes doigts et s'évase vers mes paumes, mes poignets, pour finalement venir mourir dans mes avant-bras. Il parcourra un jour mon corps complet. Et ce jour-là, je n'existerai plus pour personne. De semaine en semaine, le temps que mes membres passent invisibles augmente, je sais qu'un jour il sera infini. Hortense le sait aussi. Je n'ai aucune idée d'où me vient cette certitude, mais elle est ancrée en moi et je vis avec au quotidien. Ma vie est une course contre la montre, une course perdue d'avance. C'est triste qu'à douze ans, je sache déjà que les gens ne me voient pas.

Elle ne dit rien de plus, et relâche mes mains pour reprendre sa tasse, qu'elle vide d'une traite. Elle se lève ensuite et m'invite à la suivre. Je zigzague entre les piles de livres qui encombrent chaque parcelle de son appartement pour arriver dans sa chambre. Je m'en doutais, mais en même temps son chez-elle consiste en un séjour, la cuisine, sa chambre et la salle d'eau. Et la pièce des chiens, avec la fenêtre qui donne sur la cour, et dans laquelle je n'entre quasiment jamais. La raison : elle a son odeur bien à elle.

Hortense me montre son lit d'un geste et va tirer les rideaux, nous plongeant dans une obscurité relative. On est au moment des confidences, et ça tombe bien parce que j'ai à la pelle des pensées embrouillées auxquelles j'aimerais trouver un sens. Elle s'assied face à moi, en tailleur. J'imite sa position et lui tends mes mains, toujours transparentes. Elle les attrape, les serre gentiment, puis m'incite d'un mouvement du menton à commencer. Ça fait longtemps que je n'hésite plus à me confier entièrement à elle ; même si au départ je lui cachais toujours des petites choses.

– Je me sens bizarre. Je réfléchis à tout un tas de choses en cours, à table, la nuit... Je pense beaucoup à un ami en particulier, mais...Je fais des cauchemars. Des rêves atroces pendant lesquels je disparais entièrement, et dans lesquels personne ne se souvient de moi. Je les vois tous vivre leur vie comme si je n'avais jamais existé. Et lui, lui il semble triste. Mais il ne sait pas pourquoi. Il est triste que j'aie disparu mais il ne se souvient pas de moi non plus.
– Dis-moi son nom.
– Faustin.
– Faustin est quelqu'un à qui tu tiens. Tu ne veux pas qu'il t'oublie. Tu veux rester dans son esprit.

Je hoche la tête par trois fois, tentant de me concentrer sur ma respiration pour ralentir mon cœur qui s'est emballé à la mention de son prénom. Mes joues chauffent sensiblement, je bouge légèrement ma jambe pour donner le change, mais mes pensées se tournent vers lui. Je me concentre sur les mains fraîches d'Hortense, et sens alors les petites étincelles naître dans mes poignets et fuser vers mes doigts.

– Tu es attiré par les garçons, je me trompe ?
– Il y a des chances, soufflé-je, je n'ai jamais été amoureux.
– Si tu n'es jamais tombé amoureux, alors qu'est-ce que tu ressens pour Faustin, ton « ami » ?

Je n'ai rien à répondre. Je n'y connais rien. Les seules sensations que je connaisse sont ces crépitements qui m'annoncent quand je deviens transparent et quand je reprends une consistance normale. Et mon cœur qui se serre quand je me dis que personne ne me voit, que personne ne se rend compte de ce qui m'arrive. D'une certaine façon, je suis déjà invisible.

Elle lâche soudainement mes doigts, et je me sens comme si on venait de me jeter dans une mer déchaînée sans aucun point d'ancrage. Hortense me calme toujours, mais dès qu'elle me lâche, je retrouve mes tourments de plus belle. Et des questionnements, par la même occasion. Je trouve toujours des réponses chez elle, mais aussi beaucoup d'interrogations auxquelles je ne parviens pas forcément à trouver de solution. Elle ouvre les rideaux, laisse danser son doigt sur les tranches de la multitude de livres recouvrant ses murs, et m'en sort un qu'elle me tend. Il n'a pas de titre, sa couverture est entièrement noire et seuls les coins cornés m'indiquent qu'il a été utilisé. Je l'ouvre avec précaution, mais elle le referme dans mes mains.

– Tu le liras chez toi. À l'abri des regards indiscrets, bien sûr.
– Bien sûr.

Elle quitte ensuite la pièce, me laissant avec l'intriguant ouvrage dans les mains. La curiosité fait naître une certaine excitation dans mon esprit, j'ai hâte de savoir quels secrets je vais découvrir dans ces pages. Les livres d'Hortense me plaisent toujours énormément. Ils m'aident beaucoup également. La plupart du temps, je me couche l'esprit serein quand je les referme. Je me lève en caressant la couverture nue, puis retourne dans le salon où m'attendent les deux chiens, tous contents de pouvoir me sauter dessus. Je protège le livre d'un bras, repoussant les animaux de l'autre tout en leur grattouillant les oreilles. Flack, mécontent de ne pas avoir pu me faire tomber, s'en va rejoindre sa maîtresse alors que j'enfile mes chaussures. Je récupère mon sac que je balance sur mon épaule, annonce à Hortense que je rentre et quitte l'appartement en prenant soin que Tyni n'en sorte pas. Elle qui adore se faire la malle...

Je monte un étage, entre chez moi et vais m'enfermer dans ma chambre en évitant Marguerite – la nounou – et le petit monstre qu'elle garde. Je décide de monter ma cabane, c'est-à-dire que j'attache des grands draps aux poutres qui traversent ma petite pièce, de façon à ce qu'ils entourent mon lit et ma table de nuit. Personne n'a le droit d'y entrer, et tout le monde me fiche la paix quand je m'installe dedans. C'est donc ce que je fais. J'enlève mon pantalon et mon pull pour me glisser sous ma couette, allume ma lampe de chevet, et ouvre le livre. Ce n'en est pas un. Ça ressemble plus à un cahier. Ou un journal.

Tout a commencé avec mes doigts. Juste le bout, juste avant mes ongles. Ce sont d'ailleurs eux qui ont suivi. Je ne comprenais pas, je ne savais pas pourquoi, je ne savais pas comment, mais je disparaissais.Et c'était comme si personne ne s'en rendait compte. J'ai beaucoup pleuré, au début. Puis je me suis résignée, parce que je ne pouvais rien y faire. J'étais impuissante. Au départ, ce n'étaient que quelques secondes. Comme si je clignais des yeux. Mais au fur et à mesure du temps, les moments où mes doigts disparaissaient étaient de plus en plus longs. Puis il y a eu mes mains, et les crépitements sont arrivés. Je savais, je sentaisquand j'étais transparente. Mais je ne pouvais pas l'empêcher. Personne n'a su le voir, pas même ma mère. Pas même mes amis. Pas même mon petit-ami. Je me disais que c'était juste dans ma tête, j'ai continué à vivre comme si c'était le cas. Je m'en suis mordu les doigts.

Je referme le livre plus violemment que je ne l'aurais voulu. Je ne suis pas le seul. Et soudain, cette pensée me revigore. Il y en a d'autres comme moi. D'autres qui ressentent les mêmes choses, qui vivent les mêmes choses que moi. Mais j'ai peur, peur de savoir comment l'histoire se termine. Cette fille est-elle devenue entièrement invisible ? Vais-je le devenir ? J'inspire et expire plusieurs fois avant de retrouver une respiration plus calme, et attends que mes mains aient fini de trembler pour reprendre ma lecture.

J'ai continué ma petite vie. Je tentais de croire que j'étais, malgré tout, importante pour certains. Que certains m'aimaient, même s'ils ne me voyaient pas. Que quelqu'un pourrait me voir. Je l'espérais.J'ai continué à me comporter comme avant, à remplir ce carnet comme je le faisais avant. Mais à l'instant où j'écris ces lignes, il ne reste plus que ma tête de visible, jusqu'à mes épaules. Je suis une tête ambulante. Et le mieux, c'est que ça ne semble gêner personne.

Je remarque alors que la page sur laquelle sont écrites ces lignes aux mots serrés les uns contre les autres n'est pas la même que les suivantes. Ce que j'ai entre les mains est un carnet, dans lequel sa précédente propriétaire a ajouté une feuille expliquant qu'elle deviendra transparente au fur et à mesure que je tournerai les pages. Qu'elle est comme moi. Ou plutôt, que je suis comme elle. Et que ce carnet est mon futur. Je tourne la page, le cœur battant. C'est un dessin d'une petite fille, vêtue d'une grande robe multicolore, souriante. Je l'observe longtemps, puis constate que le bout de ses doigts n'est pas dessiné. Je regarde ensuite la note en bas.

Juste le bout des doigts. Même pas l'ongle. Début de l'enfer.

L'écriture est différente de celle de l'explication sur la page précédente. Plus ronde, moins pressée, plus jeune. La fille a probablement dessiné son évolution, au fur et à mesure, sous forme de différents personnages. Je tourne la page, mon intuition se révèle juste, car il représente également une fillette, cette fois-ci en salopette, à qui il manque le bout des doigts. Son visage représente une confusion enfantine.

Le bord de l'ongle. Prise de conscience.

Je referme et repose le carnet sur ma table de nuit. Ma gorge est nouée, mes mains moites et agitées de tremblements. Je respire difficilement alors je me lève pour aller à la salle de bain. Je bois au robinet, laisse l'eau glisser le long de ma mâchoire, de mon cou, pour aller s'échouer dans le col de mon tee-shirt. La chatouille qu'elle laisse derrière elle me fait frissonner, je reste longtemps là, et finis par passer ma tête entière sous l'eau froide. Puis une voix me fait sursauter, et je me cogne contre le robinet.

–Bon sang, Frank ! Va sous la douche si tu veux laver tes cheveux.

Je secoue la tête, éclaboussant au passage le miroir et le mur, puis m'enfuis sans demander mon reste. Je plonge dans ma cabane où je me recroqueville sur moi-même, le cœur battant bien trop vite. Mes doigts disparaissent sous mes yeux, j'observe ma peau devenir translucide, puis mes veines perdre de leur couleur pour finalement devenir impossible à voir. Je sais qu'elles sont là, je peux encore fermer et ouvrir mes poings, mais je ne peux pas les regarder. Je vois à travers. Une larme perle à ma paupière quand je comprends que je n'ai aucune échappatoire ; que je n'en réchapperai pas. La fille du carnet l'a bien dit, qu'elle devenait invisible jusqu'à ce qu'il ne reste que sa tête. Sans doute est-elle entièrement transparente à présent. Sans doute vais-je le devenir. J'enfouis mon visage dans mon oreiller pour y étouffer mes sanglots : je ne veux pas d'une fausse compassion.

J'ouvre les yeux quand mes parents tambourinent contre la porte de ma chambre. J'ai retrouvé ma consistance mais, au contraire de d'habitude, ça ne me rassure pas. Je quitte mon lit pour leur ouvrir, ma mère m'annonce qu'on va manger. J'acquiesce en me traitant mentalement. Je me suis endormi, et je n'ai pas fait mes devoirs ni pris ma douche. Je vais passer un sale quart d'heure s'ils l'apprennent. Puis je me souviens qu'ils s'en fichent, d'une certaine façon.

Le repas passe lentement, mais je fais tout mon nécessaire pour aller dormir en quatrième vitesse, m'installant ensuite dans mon lit que j'ai libéré de son enceinte drapée. Je ne compte pas étouffer pendant la nuit. Je me munis du carnet, l'ouvre au troisième dessin. Ce n'en est pas un, mais une photo. Elle représente une jeune fille, probablement un peu plus âgée de moi, qui regarde par la fenêtre, assise sur le rebord. Le mur est recouvert d'un papier peint que j'ai déjà dû voir en magasin, puisqu'il me rappelle quelque chose, mais je ne m'attarde pas dessus. Je cherche ses mains, car je suis certain que ce sont elles qui importent. Et, effectivement, ses manches se terminent sur du vide. À côté de sa tête, elle a écrit quelques mots.

Jusqu'à la moitié de mes paumes. Mes manches trop longues ne servent plus à rien.

Je tourne doucement la page, vois des spirales dans tous les sens. Je remarque qu'elles sont formées de mots, et tourne le carnet pour essayer de les déchiffrer. Mais les lettres sont formées rageusement et les mots ne se suivent pas ; je ne les comprends pas.

Invisible !
Veux pas
S'il vous plaît...
Maman
Doigts

Et plein d'autres que je ne peux décoder. Cette feuille est en noir et blanc, entièrement recouverte de griffonnages, emplie d'une amertume que je ressens également. Au centre, en gros, deux mots :

Pourquoi moi ?!

Et je me pose la même question.





Coucou :3

Me revoilà avec une nouvelle histoire ! Ce sera un style assez différent de Bonshommes Bâtons, moins léger. Les personnages sont aussi plus jeunes, font plus d'erreurs.

Invisible est déjà terminée, j'ai déjà préparé tous les chapitres et je profite du confinement pour vous la partager. Je posterai probablement une fois par semaine, ou un peu plus si l'envie m'en prend, mais comme il n'y a qu'une dizaine de chapitres, je crois que je vais me restreindre à une fois par semaine. Pour faire durer le plaisir ;)

C'est une histoire que j'ai écrite il y a un moment déjà et même si maintenant, je pense que je ne l'aurais pas totalement présentée ainsi, je l'aime quand même donc voilà. J'espère que vous aimerez.

Prenez soin de vous, de vos proches. Coeur sur vous <3


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