II

« Je marchais, pressé, dans les couloirs interminables du Centre alors que les scientifiques, fous, couraient de part et d'autre. Je déboulai dans le bureau de Silvas sans délicatesse et fit claquer mes paumes contre le bois de son bureau. Mon geste le fit fortement sursauter.

-C'est maintenant qu'il faut y aller, Silvas. Il n'y a plus de temps à perdre!
-N-non! On ne peut pas! Ça ne fonctio–
-Si, ça fonctionnera! La Résistance est à nos porte, merde! Que faudra-t-il attendre de plus? Qu'ils aient leur lame couchée sur notre gorge?
-Tu ne vois pas ce que je fais? Nous fuyons, Harry. On part, c'est fini. L'opération est annulé.
-Quoi?! m'exclamai-je. Comment ça?
-Les nobles n'auraient jamais accepté de se battre! hurla-t-il par-dessus mes protestations. D'accord? Ton plan n'aurait jamais fonctionné!
-Attend.

Je me glissai vivement entre le scientifique et sa bibliothèque, l'empêchant de fourrer un autre livre dans sa valise.

-Que..?
-Tu veux dire que tu n'en as pas du tout parlé? À qui que ce soit?

Le vampire ricana.

-Pourquoi j'aurais fait ça? Tu n'es qu'une expérimentation de seconde zone, Harry. Tu n'es pas un sorcier faiseur de miracle ou l'élu de quoi que ce soit, non. Dès que nous aurons reproduit le P-136 qui coule dans tes veines, ce sera fini de toi! Enfin, marmonna-t-il plus bas, si nous t'avons pas encore déchiqueté en morceaux pour percer ton secret...
-Silvas! hurlai-je, fou de rage. Je suis le protégé de Lord! À ma première mission, j'ai piégé un des jeunes piliers de la Résistance! Sans moi–
-Sans toi, ladite Résistance ne courrait pas dans les rues!

Il tira ensuite une des encyclopédie de sa bibliothèque ce qui révéla un passage caché et disparut dans le tunnel sombre. Je restai figé à regarder l'énorme meuble pivoter à sa place d'origine sans rien tenter. J'aurais pu facilement le rattraper et ressortir avant qu'il ne s'aille refermé, mais je n'en trouvai pas l'énergie. De toute façon, j'avais une défense à organiser.

Le sang bouillant dans mes veines, je courrai de nouveau à contre sens. Les lumières rouges clignotaient partout et les couloirs se faisaient de plus en plus déserts. Pourtant, une mince lueur filtrait du bas de la porte qui cachait la salle du trône.

-Lord! m'exclamai-je en poussant les massifs panneaux.
-Qu'est-ce que tu fais encore ici?
-La ferme, lançai-je au garde. Lord, vous fuyez?
-Bien sûr, ricana-t-elle.
-Que deviendra vos institutions? Tout ça, n'est-ce pas précieux à vos yeux?

La vampire se déplaça si vite que je ne pus la voir avant qu'elle réapparaisse juste sous mes yeux. Elle glissa un de ses ongles rouges le long de ma mâchoire alors que des frissons gelés me parcoururent le dos.

-Mon enfant, tu m'es précieux. Jamais je ne pourrai reproduire un tel chef-d'œuvre. Viens avec moi, me susurra-t-elle. Oublions tous ces pauvres carnivores barbares et installons-nous sous un autre bidonville miteux comme garde-manger.
-Non.
-Non? Allons, soit raisonnable...
-Je combattrai pour couvrir votre fuite, Lord, avec tous ceux que vous appelez esclaves. Il ne reste que de loyaux à cette heure, les misérables sont déjà perdus dans la nature.
-Je te reconnais bien là, mon chou.

Elle laissa ses dames d'honneur déposer sa longue cape cramoisie sur ses épaules et disparut sous une pluie de tissu. La salle avait été complètement désertée quand ses mots résonnèrent dans le hall.

-Tâche de me retrouver, cher Harry...

Je grimaçai. Quel orgueilleux personnage. Elle était si magnétisante et pourtant complètement égoïste. Un fortement me fit tourner la tête.

-Tu ne cesseras jamais de m'étonner, petit, siffla le dernier des nobles que j'aurais voulu voir.

Il disparut lui aussi, mais sa lenteur me permis de découvrir la trappe qui leur avait permis de fuir derrière le trône.

Un mince sourire s'installa sur mes lèvres. C'était le temps d »

Mon nez se cogna contre la poitrine de quelqu'un, me stoppant brusquement dans ma lecture.

-Hé!

Je levai les yeux, furieux d'avoir été interrompu pour instantanément me figer. Pas de chance, c'était encore Ducon auquel, malheureusement, je devais une belle somme.

-Alors, Harvey? On fait une lecture matinale?
-Uh, pour être parfaitement exact, ce n'est pas vraiment une lecture matinale si ça fait depuis hier soir que je lis, non?
-La ferme!
-Oups, désolé, tu disais?
-Tu me dois 70 dollars au moins, vieux. Crache-moi ça. Maintenant!
-Ce n'était pas une centaine de billet que tu voulais la semaine dernière, toi? Mais, ne t'inquiète pas, tu t'améliores, vieux. Tu devrais attendre le niveau d'une maternelle en mathématiques d'ici la fin de l'année, et je suis généreux.
-ENCULÉ!
-Bonjour Enculé, moi c'est Harvey.

Ducon fit craquer bruyamment ses jointures, la veine de son cou semblait vouloir exploser sous la pression. Son visage était aussi rouge qu'un panneau d'arrêt. Pendant un moment, je me sentis comme une souris face à un taureau de corrida enragé. Peut-être y avait-il une maigre chance que j'aille merdé. Encore une fois.

-Ok, je crois que c'est le temps pour moi d'y aller...

Je m'élançai dans la direction opposé sans regarder derrière moi. Au diable l'école, ce ne sera pas la première fois que je manquais un cours. Je sentis une main se refermer sur ma veste alors je fis un tour sur moi-même en balançant de toute mes forces le volume que je tenais encore dans mes mains vers la tête de mon agresseur. La force centrifuge fit glisser le bouquin d'entre mes mains, mais le résultat de l'attaque en fut que plus dévastateur.

Je repris ma course, catastrophé. Je me défis maladroitement des bretelles de mon cartable et jetai mon sac sur le bord du chemin pour m'alléger. Je ne pourrai supporter de me faire battre une autre fois par Ducon et ses acolytes, quitte à dépenser mon dernier billet vert pour un nouveau sac.

Les maisons se firent de plus en plus troubles et la rue de plus en plus sombre alors que courrais à perdre mon souffle sans regarder où j'allais. Quand je ne pus identifier les lieux et que je me convaincus enfin d'avoir assez distancé mes agresseurs, je me lassai choir contre le mur d'une des maisons entassées les unes après les autres. Je plissai les yeux, confus, mais n'eus pas le temps d'analyser les lieux avant d'être emporté par mon poids à la renverse. Le mur sur lequel je m'étais accoté se révélait être une porte et je me retrouvai dans une sombre cabane.

Je me relevai en dépoussiérant du mieux que je pus mes habits. Les pantalons que je portais, grossièrement rapiécés, n'étaient pas les miens, pas plus que le manteau sombre et bien trop grand que je portais. Je fouillai ses poches et trouvai tout d'abord trois bagues. J'en essayai une qui ne fut pas de ma taille. En la regardant pendre piteusement de mon doigt, je sentis un malaise m'envahir. Je tournai sur moi-même, repérai rapidement un tas de ferraille et m'y jetai. Je fouillai jusqu'à trouver un morceau assez grand et assez lisse pour y observer mon reflet. Ce n'était pas mon visage que j'y découvris, seul mes yeux étaient toujours bleus. J'étais aussi plus jeune et, malgré ce fait, ce n'était pas non plus une version rajeunie de moi.

Je reculai et trébuchai, stupéfait. Je faillis me blesser sérieusement, car, sans me rendre compte, j'avais passé une petite marche, « le sol étant rarement complètement égal ici ». Je blêmis et laissai courir mes mains le long du manteau pour enfin trouver ce qui confirma mes doutes. Une bouteille de médicaments.

J'entendis la porte se refermer derrière moi, dressant mes cheveux sur ma tête. Je me retournai lente nos pour découvrir, malheureusement sans surprise, deux hommes au visage caché sous des capuchons noires.

-Oh c'est pas vrai... pestai-je entre mes dents. Les gars! dis-je d'une voix bien trop fluette. Comment allez-vous?

Les deux hommes restèrent immobile. Un silence inconfortable s'installa. Je soupirai.

-Je suppose que je dois vous demander « Qu'est-ce que vous voulez »?
-Des médocs. On a entendu que vous en vendiez ici...

Sa voix semblait sortir des tréfonds des enfers ou bien c'était moi qui m'imaginait des choses à cause de ma nuit blanche de lecture...

-Messieurs, je suis désolé, mais je ne m'inclurais pas dans le « vous ». Vous voyez, je crois que je me suis un tout petit peu perdu...
-Nous vous donnerons 300 joyaux, le coupa un des hommes.
-Vous ne changez pas de prix, à ce que je vois, soupirai-je.
-À une seule condition, spécifia l'autre.
-Oui, oui, je sais...
-Que tu les testes.
-Et si je disais non? sifflai-je.

Je m'élançai entre les deux hommes pour tenter une fuite, mais un des deux m'attrapa aisément par les hanches. Je balançai mes jambes dans tous les sens dans le vain espoir de les atteindre, sans succès. Le second homme m'arracha rapidement la bouteille des mains, vida son contenu dans sa paume et la plaqua contre mes lèvres. J'essayai de les garder closes, mais l'homme appuyait trop fort et je finis par étouffer. Dès que je sentis les comprimés contre ma langue, l'eau coula à leur suite. Trempé, je toussai, crachai, mais le mal était déjà fait. Ma gorge devint brûlante et, sous la chaleur qui envahissait ma tête, je m'évanouis.

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top