Prologue
Le bruit de ses pieds nus résonna lorsqu'elle dévala les escaliers de bois en direction du bureau de son père. Elle franchit en courant les pièces du château où elle avait grandi, puis s'arrêta devant une massive porte en bois verni. Elle y toqua trois légers coups, puis rentra.
Les bûches dans la cheminée crépitaient, et diffusaient une agréable chaleur dans la pièce, dont les murs étaient recouverts de bibliothèques. Un bureau en ébène trônait au milieu de l'endroit, et le sol était couvert par de riches tapis ouvragés. Un fauteuil était placé devant l'âtre, et elle s'y précipita. Un homme se trouvait enfoncé sur le siège, semblant perdu dans ses pensées. Quand il la vit, son visage ridé s'éclaira :
« - Oh, Morgane...
- J'ai reçu une lettre de mère !
- Ah, je vois. Viens, nous la lirons ensembles. »
La jeune femme, enthousiaste, s'assit au pied du fauteuil. Les flammes éclairèrent sa chevelure rousse, et ses yeux bleus étaient impatients tandis qu'elle décachetait l'enveloppe. Elle ne portait qu'un jupon long et un corset de nuit. Elle déplia la lettre, s'éclaircit la voix, et commença à lire sous le regard attendri de son père :
« - Morgane. Comme vous le savez, vous venez d'avoir vingt-et-un an. Il est donc temps pour vous de chercher à prendre un époux. Sa voix trembla. Et il me semble que la Cour soit le meilleur des cadres pour cette entreprise. J'ai donc prévenu les personnes qualifiées, et j'attends votre venue pour dans trois semaines. J'ai déjà prévenu votre père. Je vous embrasse. »
Elle replia le papier d'un geste mal-assuré, et leva des yeux affolés sur son père :
« - Est-ce vrai ? Vous étiez au courant ? »
Le vieil homme hocha la tête, et soupira :
« - Votre mère m'a épousée lorsqu'elle avait votre âge. Elle a donc raison, il est temps pour vous de convoler.
- Mais... Je suis bien ici...
- Je le sais. Son ton devint chaleureux. Mais ce n'est pas dans cette partie reculée de la Bretagne que vous trouverez un époux. Nous ferons vos bagages demain. Allez-vous coucher. »
La rousse se mordilla la lèvre, puis sourit à son père pour cacher son trouble, lui embrassa la joue avec douceur, et sortit de la pièce.
Elle remonta les marches bien plus lentement qu'elle était venue, et soupira en s'enfermant dans sa chambre. Elle s'écroula sur son lit à baldaquin, puis se pelotonna dans l'édredon pour relire silencieusement la lettre. Pas une formule ne témoignait de l'amour de sa mère pour elle, hormis les formules d'usage. Elle aurait très bien pu être une étrangère. Elle lâcha un souffle angoissé, et laissa le papier tomber par terre, avant de se rouler en boule. Elle n'avait connu tout sa vie que sa Bretagne natale, alors tout quitter pour aller à la Cour, rencontrer le roi et toutes les personnes influentes, cela l'effrayait. Mais elle n'avait pas le choix.
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