Chapitre 47

Morgane serra les dents, ne voulant pas qu'il lui explique que tout était de sa faute. Car elle se doutait que son refus de l'épouser avait à voir dans les multiples tromperies de Dakota. Voyant qu'elle ne réagissait pas, il embrassa doucement son épaule. Sa peau se couvrit de chair de poule, et elle souffla pour qu'il ne recommence pas :

« - Non.

- C'est à cause de votre refus. »

Elle se retourna brutalement et le repoussa :

« - Donc, d'après vous, c'est de ma faute si vous couchiez avec toutes ces femmes ?!

- Non, Morgane ! Laissez-moi parler bon sang ! »

Sans répondre, elle s'assit en s'entourant du drap, et le fixa. Il se passa nerveusement une main dans les cheveux, puis soupira :

« - Ecoutez... Jamais une femme ne m'a résisté comme vous. Pas une demoiselle de la Cour n'aurait ainsi refusé de m'épouser. Elles auraient toutes accepté, pour jouir des faveurs, de la richesse et du pouvoir qu'a une femme de roi. Mais pas vous. Et... »

Il hésita, posant son regard vert sur elle. La rousse se composa un visage froid pour dissimuler son impatience. Elle voulait savoir. Le roi finit par hausser les épaules sans la quitter des yeux :

« - Alors j'imagine que... J'ai pensé que je n'avais plus le même pouvoir sur les femmes. Avant, il suffisait que je claque des doigts, et toutes les demoiselles me tombaient dans les bras. Je ne m'attachais pas, et cela m'était égal. Et puis vous êtes arrivée... J'ai toujours cru maîtriser mon cœur, mais à la vérité... C'était vous qui étiez maîtresse de mes sentiments. Lorsque vous étiez triste, je m'attristais à vos côtés. Lorsque vous étiez heureuse, alors je souriais aussi. Lorsque vous m'aimiez... Je vous aimais aussi. Et je vous ai détesté pour cela, Morgane... Je vous ai détesté. Qui étiez-vous pour ainsi jouer avec moi ? »

Elle l'observa se frotter le visage avec inquiétude. A quoi rimait ces aveux ? Que voulait-il dire ? Dakota s'adossa à la tête de lit, fuyant son regard :

« - Et finalement, j'ai fini par trouver le bonheur à vos côtés. Nous avions deux magnifiques enfants, j'aimais une magnifique femme qui m'aimait aussi, alors... J'ai longtemps hésité, mais... Je savais que tôt ou tard, cette situation vous pèserait. Vous n'alliez pas vivre toute votre vie dans ce manoir, seule. Car un jour, les jumeaux vous quitteraient pour aller vivre à la Cour. Et même, ce n'était pas une vie pour une femme telle que vous ! Je n'en pouvais plus de ne pas vous voir pendant quatre jours, j'avais l'impression que mon cœur se déchirait. Alors... Je vous ai demandée en mariage. »

Il finit par la regarder dans les yeux, légèrement honteux. Jamais il ne s'était livré à elle à ce point, et elle n'osait bouger de peur qu'il ne s'arrête. Un léger sourire illumina le visage du brun, avant de disparaître :

« - J'avais enfin trouvé le courage de le faire, certain que vous alliez accepter. Vous m'aimiez, je vous aimais. Mais... Vous avez refusé, pour des raisons que je ne connaissais, et que je ne connais toujours pas. Et sur le moment... Ce n'était pas mon cœur que vous brisiez, mais mon amour-propre. Comme je vous l'ai dit... Jamais personne ne m'a résisté. Vous refusiez, alors que je vous offrais tout mon cœur et tout mon amour, que je vous proposais de passer votre vie à mes côtés sans devoir vous cacher... Cela dépassait mon entendement. Et malgré moi, j'ai voulu recommencer. Vous redemander de m'épouser, espérant qu'à force... Vous accepteriez. Mais c'est l'effet contraire qui s'est produit. »

Tout le corps de Morgane se tendait d'appréhension. Elle avait peur de ce qu'il pouvait lui apprendre. Finalement, il soupira :

« - A chaque refus, j'avais l'impression que ma confiance en moi, mon assurance disparaissait. Vous vous refusiez à moi, et je voyais bien que cela vous énervait et vous attristais que j'insiste autant. Mais je ne pouvais m'en empêcher. Et... A un instant, j'ai cru que j'avais perdu tout mon pouvoir de séduction et de persuasion. Alors... Je n'ai trouvé que ce moyen pour me convaincre du contraire. J'ai repris mon ancien comportement, mais... Je continuais à vous aimer de tout mon cœur, comme je vous aime maintenant. Je vous le promets. Je sais que cela n'excuse pas du tout ce que je vous ai fait subir, mais... Vous aussi vous m'avez fait souffrir ! C'était horrible d'arriver vers vous le cœur gonflé d'espoir, pour... Être rejeté, encore et encore ! »

Dakota fouilla son visage du regard, attendant qu'elle réponde. Mais elle était stupéfaite. Ainsi, c'était uniquement pour se rassurer qu'il l'avait trompée ? Car il avait peur de ne plus être capable de séduire ? Mais... C'était stupide ! Il aurait pu lui en parler, elle lui aurait prouvé le contraire ! Il semblait attendre qu'elle se livre à son tour, mais elle avait peur. Ses raisons à lui étaient... Logiques, d'une certaine façon. Elle ne lui pardonnait pas son comportement, mais comprenait pourquoi il avait agi ainsi. Et la rousse reconnaissait que c'était en partie de sa faute.

Voyant qu'elle ne réagissait pas, le roi se releva, blessé, et siffla :

« - Visiblement, vous n'en avez rien à faire. Puisque c'est ainsi, vous n'avez qu'à partir, comme ça vous cesserez de me briser le cœur ! »

Il ramassa ses vêtements et se dirigea vers la porte. Aussitôt, elle sortit de sa léthargie. Il ne pouvait pas l'abandonner ! Sans réfléchir, elle se dépêtra des draps, et courut vers lui. Morgane l'enlaça, se moulant contre son dos et entourant son torse de ses bras. Elle posa son front contre son dos, cherchant les mots pour exprimer ce qu'elle ressentait. Elle finit par souffler :

« - Ecoutez... Si j'ai refusé de vous épouser... C'est que j'avais peur. »

Des larmes perlèrent à ses paupières, roulant sur la peau du roi. Elle sanglota, terrifiée à l'idée de le perdre :

« - Vous êtes un roi, alors... Vous devriez épouser une fille de roi, qui sera bien plus riche, intelligente, belle que moi, et... Moi, je ne suis rien, je ne connais rien sur les coutumes, ce que doit faire une reine, et... Et toutes ces choses-là ! Je n'ai pas de terre, peu de fortune, j'ai qu'un nom qui remonte à des dizaines de générations ! Et aussi... J'ai peur que vous ne vous lassiez... En m'épousant, je serais à vous, et ce pour toujours, alors... Vous aurez besoin d'aventure ou je ne sais quoi, et vous irez peut-être voir ailleurs... Et je n'aurais pas la force de le supporter ! »

La rousse resserra son étreinte autour de sa taille, tandis qu'il lui caressait doucement les mains. Elle hoqueta :

« - Et je sais que toute la Cour me traitera comme une intrigante, une comploteuse, une parvenue, et je serai aussi la fille de Marie-Louise, la traîtresse... Je ne veux pas subir, et que nos enfants subissent eux aussi les moqueries et les rumeurs ! Je n'aurais pas le courage de supporter leurs commérages... »

Doucement, Dakota écarta ses bras de son corps. Puis, il se retourna pour la prendre dans ses bras. Elle se raccrocha à lui en pleurant, et il la serra avec force contre lui en se balançant dans un mouvement apaisant. Il embrassa ses cheveux, lui caressa le dos, et lentement, ses sanglots diminuèrent. Mais il la garda dans ses bras. Cela ne dérangeait pas Morgane, qui ne voulait pas qu'il se détache d'elle. Elle avait peur que malgré ses aveux, il ne décide de partir. Et elle ne le supporterait pas.

Elle l'entendit lui murmurer à l'oreille :

« - Pourquoi ne m'avez-vous rien dit ?

- Je... J'avais honte. Un roi me demande en mariage, et je refuse par peur... C'était stupide.

- Mais pas du tout ! »

Il releva son visage vers lui, plantant ses prunelles vertes dans les siennes :

« - Il est normal que vous soyez angoissée. Mais... Je vous croyais presqu'indifférente, alors que vous étiez juste terrifiée... Vous auriez dû me dire les vraies raisons de votre refus ! »

Honteuse, elle enfouit son visage dans le creux de son épaule. Oui, elle se rendait maintenant compte qu'elle aurait dû tout lui dire. Dakota prit une mèche rousse entre ses doigts pour jouer avec, et finit par soupirer :

« - Il est vrai que je devrais épouser une princesse. Mais elles sont toutes stupides, imbues d'elles-mêmes et soit terriblement innocentes, soit manipulatrices. Et vous, vous n'êtes pas comme cela.

- Mais...

- Non, écoutez-moi, la coupa-t-il. Je me fiche totalement de votre petite fortune, de votre manque de propriétés et de terrain. Et... Vous ferez une très bonne reine. La preuve en elle votre magnanimité à l'égard de votre mère. J'ai confiance en vous. De plus... Jamais je ne pourrais me lasser de vous ! Bon sang, Morgane... Je vous aime ! Si j'avais voulu vous quitter, je l'aurais déjà fait à de multiples reprises ! Mais je suis toujours là...

- Je sais... »

Il embrassa tendrement son front, puis haussa les épaules :

« - Quant aux commérages de la Cour... Je ne peux rien y faire, mais vous avez appris à ne pas vous en soucier, n'est-ce pas ?

- Oui, mais...

- Vous êtes forte. Et puis, quand ils verront à quel point je vous aime, ils cesseront de persifler. »

La rousse se mordit la lèvre. Il avait raison, après tout... Cela ne devait pas être si horrible de l'épouser... Au contraire, elle pourrait vivre à ses côtés, et il pourrait voir ses enfants tous les jours ! Elle se détendit légèrement, ce qu'il sentit :

« - Morgane ?

- Oui, je... Je vais bien.

- Je ne vous demandais pas cela. »

Dakota s'écarta d'elle avec un sourire entendu. Il passa son pantalon, essaya de se coiffer, et tendit sa chemise à la jeune femme :

« - Mettez-la.

- Mais... Pourquoi ? Qu'est-ce que...

- Faîtes ce que je vous dit. la coupa-t-il. »

En fronçant les sourcils, elle obéit. Elle enfila la chemise, et la boutonna à moitié, cachant ainsi sa nudité. Il la contempla longuement, puis se rapprocha d'elle pour sortir ses cheveux de sous le tissu. Ses mains se perdirent dans sa chevelure, tandis que ses yeux verts se plongeaient dans les siens. Rapidement, il effleura ses lèvres des siennes, puis s'écarta. Il se posta en face d'elle, et mit un genou à terre.

Aussitôt, Morgane écarquilla les yeux. Non, il n'allait pas... Pourtant, il sortit le même petit écrin de sa poche, l'ouvrit, et prit sa main gauche dans la sienne. Sans la quitter des yeux, il lui demanda doucement :

« - Je réitère ma demande une dernière fois. Morgane Marie Gabrielle de Kerange. Acceptez-vous de mettre vos craintes de côté, de me faire confiance, et de m'épouser ? »

Elle sentit l'angoisse l'envahir à l'idée de devenir reine. Ses entrailles se tordirent, mais lorsqu'elle croisa son regard empli d'amour, elle répondit sans réfléchir davantage :

« - Oui. »


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