Chapitre 30
Morgane se réveilla en sursaut, et mit un instant avant de se rappeler où elle était. Le jour filtrait à travers les fenêtres, et elle constata qu'elle s'était assoupie, en plein après-midi. Encore une fois, elle avait rêvé de Dakota, de... De ses mains sur son corps, de ses baisers, de ses preuves d'amour, de lui. Elle secoua violemment la tête, mais sursauta quand un cri déchira soudain le silence, suivi par des coups de feu. Aussitôt, elle ramena d'un geste instinctif ses bras devant son ventre, comme pour le protéger. Plusieurs hurlements retentirent, et elle sentit sa respiration s'accélérer. Il lui semblait revivre le soir de l'attaque au château, lorsque le roi était venu la chercher en personne. A la différence que là, personne ne viendrait la sauver.
D'autres coups de feu explosèrent, la faisant sortit de sa léthargie. Elle devait fuir, protéger son enfant. Mais après un mois passé dans son lit, ses jambes n'avaient plus de forces. Lorsque la rousse posa ses pieds à terre, elle se sentit alourdie par son ventre, devenu très rond. Sans hésiter, elle s'aida des piliers du lit pour se mettre debout, mais après avoir fait un pas, elle sentit ses jambes se dérober sous elle. Sans réfléchir, elle s'agrippa aux rideaux qui entouraient sa couche, ralentissant ainsi sa chute. Malgré cela, elle tomba sur le dos, et resta un instant sonnée par la chute. Les cris atteignaient ses oreilles sans répit, la faisant frissonner de peur. Puis, elle roula sur le flanc, et se mit difficilement à genoux, cherchant un recoin des yeux.
Où pouvait-elle se cacher ? L'armoire n'était pas assez grande pour la cacher, et... Il n'y avait aucun autre endroit où se dissimuler ! Des larmes de désespoir lui montèrent aux yeux, et elle prit son visage dans ses mains. Qu'allait-elle devenir ? Qui étaient ces gens ? Que voulaient-ils ? Tant de questions tourbillonnaient dans son esprit, sans qu'elle n'ait aucune réponse. Mais la jeune femme était sûre de deux choses : elle n'avait nulle part où aller, et les intrus ne lui voulaient sûrement pas du bien. Elle se recroquevilla sur elle, pressant d'un geste inquiet ses mains sur son ventre. Peut-être allaient-ils être moins brutaux en voyant qu'elle attendait un enfant ? Elle en doutait, mais se raccrochait à cet espoir pour ne pas se laisser abattre. Ou peut-être cherchaient-ils quelque chose dans ce manoir, et qu'ils s'en iraient avant de l'avoir vue ? Mais elle savait qu'il n'y avait rien de précieux dans cette habitation, rien qui ne justifie une telle violence, ni une invasion pareille !
Brusquement, la porte s'ouvrit avec fracas, et elle sursauta de terreur avant de se redresser légèrement. Deux hommes entrèrent dans la pièce, et elle sentit son sang se glacer dans ses veines. Ils n'avaient pas l'air amical, bien au contraire. Ils avaient tous les deux un regard dur, et étaient bien armés. L'un était blond, et l'autre brun. Le regard du premier glissa sur son corps à peine recouvert d'une chemise, et il eut un sourire lubrique lorsqu'il contempla sa gorge. Mais son rictus disparut quand elle pressa instinctivement son ventre, comme pour protéger l'enfant de ces regards. Il échangea un regard entendu avec son compagnon, puis se rapprocha d'elle à grands pas.
Morgane voulut reculer, mais il agrippa brutalement son visage, la forçant à le regarder. Le blond la regarda longuement, détaillant chaque partie de sa figure, avant de la saisir par la taille et de la relever. Tétanisée, elle se laissa faire, et il la maintint debout tandis que l'autre homme approchait. Elle le vit se poster devant elle avec des yeux agrandis par la terreur, et eut un frisson de terreur lorsqu'il attrapa sa chevelure. Il examina longuement ses cheveux roux, puis prit son menton entre ses doigts. Le brun fouilla ses yeux du regard, s'autorisant un sourire satisfait quand il vit la terreur qu'il lui inspirait. Puis, il la lâcha et recula afin de contempler son corps d'un regard insistant. Si Morgane n'avait pas été aussi effrayée, elle aurait sans doute été mortellement gênée. Mais toutes ses pensées étaient tournées vers son enfant. Qu'allaient-ils lui faire ? Pourquoi la regardaient-ils comme une bête de labour ? Elle porta ses mains à son ventre, et détourna le regard.
Enfin, il hocha la tête, et le blond demanda :
« - Alors ? Qu'en penses-tu ?
- Elle vaut la peine de rester en vie. Tu as vu son corps ? Même enceinte, elle donne envie. Enfin, elle ne vaut pas la Kerange, mais... »
En entendant son patronyme, la jeune femme se sentit faiblir, et elle s'abandonna à l'étreinte de son agresseur, n'osant y croire. L'homme tituba un instant à cause de son poids, puis la lâcha et elle s'effondra brutalement à genoux, la respiration saccadée. Comment... Pourquoi ? C'était forcément sa mère, mais... Elle comprit en un éclair qui ils étaient. Des rebelles. Peut-être que le fait de dire que Marie-Louise était sa mère allait lui sauver la vie ? Puis, elle se souvint du ton méprisant sur lequel ils avaient évoqué sa génitrice, et décida de ne rien dire.
Le blond s'accroupit devant elle et lui agrippa le menton sans délicatesse. Il lui releva la tête vers lui, lui demandant durement :
« - Tu connais la Kerange, ma jolie ?
- Non, je... »
Sa voix tremblait de peur, et marmonna à toute vitesse :
« - J'ai eu... Mal au ventre. »
L'homme eut un rictus amusé, et susurra :
« - Ah oui. Tu es enceinte. Et dis-moi, ma belle... Qui est le père de cet enfant ?
- Un... Un gentilhomme. »
Elle avait menti instinctivement, se doutant que la vérité n'allait pas l'aider à rester en vie. Et il n'y avait qu'Alexy et... Et Dakota qui savaient la vérité. L'autre rebelle, le brun, vint à son tour se poster devant elle, et lui demanda avec un sourire moqueur :
« - Et où est-il ? »
Morgane baissa les yeux, ravalant ses larmes. Il était parti. Depuis longtemps. Les deux hommes le comprirent, et ils rirent avec méchanceté. Puis, le blond haussa les épaules :
« - Peut-être qu'on l'a déjà tué...
- C'est impossible. »
Les mots lui avaient échappé, et elle se mordit la lèvre d'angoisse. Ils la regardèrent avec insistance, et l'un demanda :
« - Et qu'en sais-tu ?
- Il... Il vit à la Cour.
- Oh, eh bien... Tu as sans doute raison. Et quel est son nom ?
- Alexy. »
C'était la première réponse qui lui avait traversé l'esprit, et sans doute la plus à-même de cacher la vérité. Ils échangèrent un regard, puis le brun soupira :
« - Son patronyme ?
- Je... Je ne sais pas.
- Vraiment ? »
Il haussa un sourcil, et elle sentit soudain des mains caresser ses cuisses. La rousse se crispa, mais lorsqu'elle voulut se dégager, le blond resserra son étreinte autour de sa taille avec un sourire satisfait. Une vague de haine déferla en elle, et elle lui lança un regard noir. Les mains de l'homme remontèrent lentement en prenant bien soin de rester en contact avec son corps, et elle serra les dents tout en respirant par saccades. Soudain, il s'écarta, et demanda :
« - Donc tu ne connais pas son patronyme ? »
Elle secoua la tête, et il se pencha pour lui susurrer à l'oreille :
« - Et pourquoi cet... Alexy, est-il parti en t'abandonnant ici, seule, et avec un enfant ?
- Il... Il n'a pas accepté l'enfant. »
C'était encore plus douloureux de le dire que de le penser. Des larmes perlèrent à ses paupières, et elle tourna la tête pour ne plus voir leurs regards moqueurs. Mais que lui voulaient-ils, à la fin ? Elle entendit l'un des deux murmurer à l'oreille de son compagnon, puis il reprit à haute voix :
« - Et quel est ton nom, ma jolie ?
- Cela ne vous regarde pas. »
Elle n'avait plus la force de mentir, de chercher un autre prénom. Elle voulait juste qu'ils la laissent, qu'ils arrêtent de promener ainsi leurs mains sur son corps.
Brusquement, le brun la prit par la taille et la releva. Morgane se débattit, mais il lui maintint le visage immobile, et siffla :
« - Je crois que tu n'as pas compris quelque chose. Ici, ce n'est plus toi qui décide. Tu dois nous obéir, car nous pouvons être très... Méchants. Alors je répète une dernière fois ma question : quel est ton nom ? »
Il la tenait pressée contre lui d'une façon extrêmement inconvenante, mais aussi douloureuse. En effet, le corps de l'homme appuyait contre son ventre arrondi avec force, et elle gémit de douleur avant de crier :
« - Morgane ! Lâchez-moi, je vous en supplie ! »
Elle essaya de le repousser de toutes ses forces, mais il attrapa soudain son poignet droit avant de lui demander :
« - Où as-tu eu ce bracelet ?! »
Elle vit entre ses larmes qu'il s'agissait du bijou que lui avait offert son père pour fêter ses quinze années. Mais pourquoi cela l'intéressait-il ? Elle murmura d'une voix brisée :
« - C'est un présent de mon père... Laissez-moi, je vous en prie ! »
Sans écouter ses supplications, il demanda au blond :
« - Te souviens-tu où nous avions vu ce bracelet auparavant ?
- Bien sûr.
- Dis-moi, ma belle... Quel est ton nom ?
- Mais je vous l'ai déjà dit ! »
Il comprima avec force son poignet, la faisant hurler de douleur, et lui susurra :
« - Tu ne t'appellerais pas Kerange, par hasard ? »
La rousse sentit sa respiration se bloquer, et ne put que le regarder en sanglotant. L'homme eut un rictus carnassier, et demanda à l'autre rebelle :
« - Regarde dans son dos, pour voir si elle a la même marque. »
Elle écarquilla les yeux, mais avant qu'elle ne puisse faire un mouvement, elle sentit sa chemise se déchirer, révélant son épaule gauche. Une main se posa sur sa peau, la faisant frémir, et écarta encore le tissu. Morgane ferma les yeux de honte, et entendit le blond s'exclamer :
« - Elle a la même. Presqu'au même endroit. »
Aussitôt, le brun rapprocha son visage du sien pour lui souffler, tout près d'elle :
« - Ca, c'est un coup de chance, ma chère Morgane. »
Elle le vit prendre une petite arme à feu dans sa main, et avant qu'elle ne puisse avoir peur, il abattit la crosse sur son crâne. Aussitôt, tout devint noir.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top