Chapitre 26
Et Dakota avait tenu parole. Le lendemain, alors que Morgane était occupée à lire, une femme de chambre vint toquer à la porte de la chambre :
« - Mademoiselle ?
- Oui, qu'y a-t-il ?
- Un médecin est là, il dit qu'il est envoyé par le roi. »
Aussitôt, la rousse soupira. Mais elle n'avait pas le choix, malgré son aversion pour les saignées. Car elle savait que c'était la seule solution qu'allait proposer cet homme à son état de faiblesse et à ses nausées. A contrecœur, elle marmonna :
« - Fais-le entrer. »
.......................................................................................................................................................
Comme elle l'avait prédit, le médecin avait conclu qu'une saignée était nécessaire pour purifier son corps. Il lui avait donc entaillé le bras, laissant du sang s'écouler de la blessure, avant de panser l'entaille et de partir, promettant de revenir. La jeune femme se reposait dans son lit quand une vieille servant entra dans la chambre. Elle vint jusqu'à la couche, et lui demanda très sérieusement :
« - De quoi souffrez-vous ?
- Le médecin a dit que...
- Non, la coupa-t-elle. Qu'avez-vous ? Des évanouissements ? Vous toussez ?
- Oh, je... Je me sens parfois faible, et... J'ai souvent envie de vomir, et...
- Vous êtes inquiète.
- Oui, comment le savez-vous ? »
Morgane se redressa dans son lit, surprise. Comment cette femme pouvait-elle deviner les symptômes qu'elle avait ? La femme de chambre la considéra longuement, puis demanda avec douceur :
« - Puis-je vous parler en toute sincérité ?
- Bien sûr, allez-y. »
Son cœur se serra d'appréhension. Qu'allait-elle apprendre. Peut-être qu'elle souffrait d'une maladie rare et très grave, qui allait l'obliger à rester à l'écart, sans pouvoir voir Dakota, et...
« - Est-ce votre première histoire avec un homme ?
- Je... Je vous demande pardon ? »
La rousse fixa la vieille femme avec stupeur. Pourquoi lui posait-elle cette question ? La domestique soupira :
« - Avez-vous connu d'autres hommes avant le roi ?
- Mais... Non, bien sûr que non ! Comment pouvez-vous insinuer que...
- Je ne voulais rien sous-entendre, mademoiselle. Pardonnez-moi.
- Oh, non, ce n'est rien. Je suis parfois à fleur de peau. »
Soudain, elle surprit le regard de la femme de chambre. Elle semblait attristée à l'idée de ce qu'elle allait lui apprendre. Aussitôt, des larmes roulèrent sur ses joues, et elle agrippa les mains ridées :
« - Dîtes-le moi, je vous en prie ! Qu'ai-je ?
- Depuis quand n'avez-vous pas saigné ?
- Je... Je ne sais pas, environ... Deux mois, je crois, mais... Pourquoi ? En quoi cette question est importante ?
- Ma petite... Vous êtes enceinte. »
.......................................................................................................................................................
Morgane tournait et retournait cette information dans sa tête depuis le matin, sans oser y croire. Enceinte ? C'était impossible... Comment... Comment ? Elle n'avait aucune connaissance de la façon dont se passait une grossesse, comment donner naissance à l'enfant, ni même comment tomber enceinte ! Elle savait bien que c'était lié à... Ce qu'elle faisait avec Dakota, mais... Elle se prit le visage dans ses mains, et pressentit que cela n'allait pas plaire au roi. Elle ne pouvait pas dire précisément pourquoi, mais elle le sentait. Pourtant, elle ne pouvait garder cette nouvelle secrète, elle devait la lui dire !
Elle n'avait rien pu manger de ce qu'avaient apporté les domestiques, se contentant de boire de l'eau à petites gorgées. Sa gorge était nouée, et un voile de sueur recouvrait sa peau. Pourtant, le brun allait forcément être heureux, puisqu'elle l'aimait, il l'aimait aussi, alors... Alors elle n'avait aucune raison de s'inquiéter. Aucune, sauf une petite voix, qui lui soufflait désagréablement que tout était de sa faute, et que cette nouvelle signait la fin de son histoire avec Dakota.
Elle vit le jour baisser lentement, chaque minute passée ajoutant un peu plus d'angoisse à son cœur déjà inquiet. Et s'il ne venait pas cette nuit ? Si elle devait attendre encore plusieurs jours avant de pouvoir lui dire ? Si Alexy venait avant l'homme qu'elle aimait, et qu'elle ne pouvait garder le secret ? Trop de questions tourbillonnaient dans sa tête, et elle se sentait au bord de l'évanouissement.
Lorsque le roi entra dans la pièce, il la trouva assise sur le lit, cherchant comment lui dire que... Qu'elle attendait un enfant. Il se rapprocha d'elle avec un sourire, mais elle n'eut pas la force de le lui rendre. Aussitôt, elle le vit froncer les sourcils, et il lui prit les mains :
« - Qu'avez-vous, Morgane ? Êtes-vous malade ?
- Non, je... Enfin pas vraiment, mais...
- Que dîtes-vous ?
- Je... »
Elle se mordit la lèvre, et marmonna, voulant se débarrasser de ce secret au plus vite :
« - J'attends un enfant. De vous. »
La précision était bien sûr inutile, mais elle n'avait pu s'empêcher de le dire. Elle voulait qu'il sache vraiment qu'il était le seul qu'elle aimait, et ce depuis le début. Il eut un air choqué, et lâcha ses mains pour reculer de quelques pas. La rousse sentit son cœur se déchirer en analysant son air. Il n'était pas heureux, pas du tout. Mais pourquoi ? Après tout, c'était naturel, lorsque deux personnes s'aimaient, eh bien elles avaient des enfants ! Dakota se prit le visage entre les mains, et marmonnant :
« - Ce n'est pas possible. Qui vous a dit ça ? Le médecin ?
- Non, ce n'est pas lui, il s'est contenté de...
- Qui, Morgane ?
- Une femme de chambre, quand je lui ai dit que...
- Que quoi ?! rugit-il.
- Que je n'avais pas saigné depuis deux mois... »
Il releva le visage vers elle, et elle sentit des larmes rouler sur ses joues. Pourquoi ne se réjouissait-il pas ? Sans réfléchir, elle se leva et courut le rejoindre. Morgane voulut l'enlacer, mais il la repoussa brutalement, sans en avoir conscience. Elle s'écroula au sol, et le regarda faire les cents pas dans la pièce, atterrée. Il pointa soudain un doigt accusateur vers elle :
« - Vous avez tout manigancé ! C'est... C'est pour que je légitime cet enfant, n'est-ce pas ? Dîtes-moi !
- Mais non, je... Comment pouvez-vous penser cela ?
- Silence ! »
Son ton était dur, et elle obéit, effrayée de ce qu'il insinuait. Il la connaissait, pourtant, il savait donc qu'elle était incapable d'une telle machination ! Elle s'efforça de ne pas sangloter, l'écoutant marmonner des mots qu'elle ne saisissait pas.
Brusquement, il s'arrêta de marcher, et la considéra d'un long regard, dans lequel elle ne lut que du mépris et de la colère. Il lui siffla :
« - Et moi qui pensais que vous étiez une pauvre gourgandine innocente et ignorante... Vous m'avez bien eu.
- Mais je vous jure que...
- Taisez-vous ! la coupa-t-il. Finalement, vous êtes bien comme votre mère, manipulatrice et sans états d'âme ! Mais si vous pensez vous en sortir à bon compte, vous vous trompez ! Il est hors de question que je légitime cet enfant, ce... Ce fruit de cette horrible machination ! Jamais je ne le ferai, vous m'entendez ! »
La rousse sentit son cœur se briser, et s'effondra en larmes. Jamais il n'avait été si odieux avec elle, jamais ! Comment pouvait-il croire qu'elle ait fait exprès de tomber enceinte ? Instinctivement, elle porta ses mains à son ventre, et étouffa un gémissement de douleur. Il continua à l'injurier, la traitant de traîtresse, de femme pervertie, d'incarnation vivante du Mal, de putain.
Soudain, refusant d'en entendre plus et habitée par la rage, elle se releva et le souffleta sans remord, avant de lui hurler :
« - Taisez-vous ! Comment osez-vous proférer de telles... Calomnies ?! Je vous aimais, et je vous aime encore, et vous... Vous me traînez dans la boue, alors que je ne suis qu'enceinte ?! Mais vous... »
Sans mots, elle le frappa, encore et encore, abattant ses poings fermés sur son torse en pleurant. Elle finit par crier :
« - Vous avez juste peur d'être le père de cet enfant !
- Silence ! »
Il l'écarta brutalement de lui et la gifla, si fort qu'elle retomba à terre, et hurla à son tour :
« - Mais comment pouvez-vous me parler ainsi ? Je suis votre roi, souvenez-vous en ! Que ce soit clair, je ne veux plus vous revoir !
- Eh bien partez ! Je vous déteste de tout mon cœur, de toute mon âme ! Je vous hais ! Vous n'êtes qu'un lâche ! »
A travers ses larmes, elle vit le visage de Dakota déformé par la rage, et eut un instant peur qu'il ne la frappe. Elle ne l'avait jamais vu si en colère, pas même quand il avait été odieux envers Alexy. Mais il se contenta de serrer les mâchoires, avant de déclarer d'un ton glacial :
« - Je ne veux plus jamais vous voir à la Cour. Et si l'idée vous vient d'utiliser cet enfant contre moi... Sachez que je ne donnerai pas cher de votre réputation. »
Puis, il tourna les talons, et sortit de la pièce en claquant la porte. Aussitôt, Morgane laissa libre court à son chagrin. Il était parti. Et elle savait qu'il ne reviendrait jamais.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top