12
Les rayons du soleil traversant les tentures trop claires de la chambre me réveillent. Je cligne plusieurs fois des yeux afin de m'habituer à la lumière et me blottis dans les bras de l'homme à mes côtés qui dort encore. Matthew soupire et je lève légèrement la tête pour pouvoir l'observer. Il est si beau que j'en suis troublée. Ses longs cils noirs, sa tignasse sombre en bataille... Sans parler de ses lèvres aux dessins parfaits. Je pourrais passer ma journée à l'embrasser tant je les aime. Tant je l'aime. Je n'arrive toujours pas à digérer ce qu'il m'a dit hier. Quand je pense que dans trois mois, il sera marié à une morue de New-York alors que moi je le pleurerais. Rien que d'y penser me serre déjà le cœur et je frissonne. Du bout des doigts, je caresse délicatement la peau hâlée de ses pectoraux et laisse évanouir une larme contre lui. La vie est injuste, dégoûtante. Je ne sais pas ce que j'ai fait pour mériter cela mais après tout, si telle est écrit mon histoire, je m'y ferais. Il faut que je reste positive malgré la boule que j'ai au fond de la gorge, malgré la peine qui découle dans mes veines. Peut-être qu'il changera d'avis ? Qu'il renoncera à son rêve pour être avec moi ? Je soupire longuement, sachant pertinemment qu'il partira. Qu'il m'aime ou non. Matthew s'est donné trop de mal pour ses études, pour ses stages pour tout abandonner.
-Déjà réveillée ?
Sa voix rauque me donne le sourire dès que je l'entends. Il s'étire en baillant et je glousse avant de monter à califourchon sur lui. Je dépose un léger baiser aux commissures de ses lèvres alors qu'il me regarde.
-Oui. Je dois voir Nicole aujourd'hui.
Il souffle mais ne dit rien. Je sais que cette idée ne lui plait pas mais je n'ai guère le choix. Je me dois te tout dire à Nicole même si mon père m'en détestera encore plus.
-Reste encore un peu, j'ai pas cours aujourd'hui.
Je me couche sur lui, la joue plaquée sur son torse alors qu'il referme ses bras autour de moi. Les battements de son cœur m'apaisent. Je suis en sécurité avec lui, je me sens bien et par-dessus tout, il m'aime. Waouh. Comment un mec aussi canon que lui peut-il être amoureux de moi. On est si différent que ce soit dans nos façons d'être, dans nos façons de pensées ou encore dans nos caractères. Mais on s'aime.
-Laure, promets-moi juste que tu ne retourneras pas vivre avec lui.
Je ferme les yeux, imaginant un monde plus facile. Un monde où mon père ne me battrait pas, un monde où ma mère serait encore en vie et un monde dans lequel Matthew ne devrait pas épouser une autre pour du fric.
-Où veux-tu que j'aille ? finis-je par répondre. Il cesse de jouer avec une de mes mèches de cheveux tandis que je sens son torse se gonfler d'air sous moi.
-On va te chercher un petit truc. Mais je ne...
Je le coupe d'un baiser. Je ne veux pas qu'il me rabâche la même chose tous les jours. On est censé profiter, passé du bon temps ensemble au lieu de parler des trucs déprimants.
Je romps notre baiser et plonge mon regard dans le sien.
-Je ne vivrais plus là. Promis.
Il me récompense d'un sublime sourire. Bordel. Ce gars est vraiment adorablement beau. Quand je sens son érection grossir entre nous, je me lève en pouffant alors qu'il grogne de frustration.
-Désolée l'intello, mais j'ai un rendez-vous avec la marâtre.
Je me dirige vers la salle de bain en balançant exagérément les hanches dans le but de le provoquer. J'enlève le t-shirt que je portais pour dormir et le laisse tomber au sol avant de m'engouffrer sous la cabine de douche.
Je ne suis même pas surprise quand deux mains chaudes se posent sur mon ventre. Matthew colle son torse contre mon dos tandis que son sexe se niche entre mes fesses.
-C'était quoi ce déhanché ? demande-t'-il d'une voix rauque.
Je souris en attrapant le shampoing sur l'étagère.
-Quel déhanché ?
Matthew sourit avant de semer des baisers dans mon nuque, sur mon épaule. Mes seins se font déjà lourds tant je suis excitée par lui. Ses mains glissent plus bas, avant d'atteindre mon mont de Vénus. Je ferme les yeux et appuie ma tête sur son épaule, lâchant le flacon.
-Tu sais très bien qu'en le faisant, je serais venu sous l'eau avec toi...
Je hoche la tête.
-Oui.
Il gémit avant de me retourner. Sa bouche dévore la mienne tandis qu'il me soulève et me colle contre le mur de faïences. Le contact froid de ces dernières me fait crier alors que Matthew rit doucement. Ce rire est super sexy, bas, rauque, Waouh.
J'enroule mes jambes autour de sa taille, il fléchit légèrement les genoux. Mes yeux se ferment, mes ongles se plantent dans ses épaules lors de ses nombreux vas et viens.
*****
Assise sur son lit, je regarde avec intérêt Matthew enfiler son t-shirt noir.
-Je crois que c'est la première fois que je te vois avec autre chose qu'une chemise, remarqué-je.
Il se retourne en haussant un sourcil taquin. Il est encore plus canon comme ça. Son t-shirt met divinement bien en valeur son torse.
-Je reste ici alors je ne vais pas faire d'effort vestimentaire. Ne m'en veux pas.
Je glousse et lui lance un oreiller qui atterrit à quelques centimètres de lui. Il le ramasse et s'approche du lit.
-Je crois que c'est la première fois que je te vois mettre une jupe. Il s'allonge sur moi, sa main caresse doucement ma cuisse. Mon souffle se fait court alors qu'il remonte ses caresses plus haut.
-Aussi courte en tout cas, ajoute-t'-il en mordant mon épaule.
-J'ai un petit-ami maintenant, il faut que je lui plaise.
Il esquisse un sourire, ses joues rosissent.
-Tu me plais Laure, en jupe, en pantalon...Même à poils tu me plais.
Je lui assène une chiquenaude sur le menton ce qui le fait rire.
-Faut vraiment que j'y aille le pervers, soufflé-je.
-Je ne suis pas pervers, ri-t'-il, je suis juste fou de toi.
Mon cœur se gonfle dans ma poitrine. Moi qui avais toujours cru que jamais je n'aimerais quelqu'un, je m'étais bien trompée. A chaque fois qu'il ouvre la bouche, je suis encore plus énamourée de lui.
-Avant de partir, dis-je, je peux te poser une question personnelle ?
Il hoche la tête et je m'en veux de ne pas avoir mieux réfléchis à cette question. Je ne sais pas vraiment comment la formuler.
-Si tu n'avais pas eu de rapports sex...
-Tu veux savoir si c'était à cause de ça ?
C'est à mon tour d'acquiescer. Il roule sur le côté et replie son coude afin d'y poser sa tête.
-Ouai. (J'écarquille les yeux tandis qu'il baisse les siens). Tu sais... Je ne sais pas comment ce sera là-bas... Enfin, pour faire une réponse simplifiée, je ne voulais pas connaître le sexe. Pas que je n'en ai jamais eu envie, mais tout simplement parce que je ne veux pas baiser cette fille juste par manque de cul. Maintenant que je sais ce qu'avoir une vie sexuelle apporte, j'ai la trouille de me retrouver dans son lit par manque.
Je frémis de dégoût en imaginant Matthew avec une autre. Mais je ne suis pas débile non plus, je sais qu'il couchera avec.
-Tu seras son mari Matthew...
-Rien à voir.
-Bien sûr que si, ris-je. Ce sera ton devoir « conjugal » dis-je en mimant les guillemets.
-Laure arrête.
Son ton froid tranche avec le mien qui est sarcastique. Je n'ai pas envie de l'imaginer avec elle, cela me révulse, me débecte. Je voudrais l'avoir pour moi seule même si je dois me faire à l'idée qu'il ne le sera jamais.
-Tu as une photo d'elle ?
-Que veux-tu que je foute avec sa photo ?
Il parait indigné face à ma question mais je voudrais bien voir à quoi elle ressemble. N'empêche que je suis contente qu'il n'en ait pas. Je me lève, prends son pc dans le tiroir de son bureau et lui tends.
-Elle a bien un Facebook, non ?
Il soupire longuement en ouvrant l'ordinateur. J'ai conscience de le gonfler mais c'est comme ça. J'ai besoin de voir à quoi elle ressemble, j'ai besoin de mettre un visage sur ma rivale. Parce que oui, elle l'est. Si elle croit que je vais la laisser me prendre Matthew, elle se fourre un doigt dans l'cul...Euh dans l'œil.
Je m'installe à côté de lui, croisant mes bras sur ma poitrine. Je suis énervée de voir qu'elle est dans sa liste d'amis déjà. Même moi, je n'y suis pas. Je peste tandis qu'il fait défiler les noms de ses contacts.
Il s'arrête sur une blonde et clique sur le nom indiqué : Sophie Jamo. Pétasse. Je prends l'ordinateur des mains de Matthew et observe cette fille aux dents extra-white.
-T'appelles ça une morue ?
Je suis sidérée. Elle est belle à en crever. A côté d'elle, même Miranda Kerr n'aurait aucune chance.
-Ce n'est pas mon style, dit-il en haussant les épaules.
Putain je lui foutrais bien une tarte avec ses « ce n'est pas mon style ». C'est impossible qu'il ne craque pas pour elle, cette fille est tout bonnement sublime.
Exaspérée, je referme l'écran d'un coup sec. Je n'ai pas besoin de déprimer encore plus. Je me lève sans laisser le temps à Matthew de dire quoi que ce soit et file chez moi, où Nicole m'attend.
******
Je suis de suite rassurée quand je n'aperçois pas la voiture de mon père. Il n'est pas là et c'est tant mieux. Je ne crois pas que j'y serais allée s'il avait été présent. Je prends une courte inspiration avant de pousser la porte. Je m'avance et trouve Nicole, attablée dans la cuisine. Elle a les bras croisés sur la table et me regarde, hagarde.
-Tu ne devrais pas mettre ce genre de jupe.
Je lève les yeux au ciel avant de m'asseoir face à elle.
-Tu ne m'as pas fait venir pour parler de mes tenues j'espère.
Elle me fixe dans les yeux et je n'aime pas ça. Elle n'a pas l'air de vouloir sourire, ses sourcils froncés annoncent déjà une conversation houleuse, je le sens.
-Tu vas porter plainte ?
Elle porte ses doigts à sa bouche et ronge ses ongles.
-Je ne pense pas non, soufflé-je.
-Tant mieux. Parce que Laure... J'ai longuement discuté avec ton père.
Mon cœur s'emballe. Je ne sais pas ce qu'elle va dire mais sa façon d'être me stresse. Elle a l'air trop sûre d'elle, trop hargneuse.
-Et ?
-Tu l'as provoqué, répond-t'-elle platement. Tu le provoques sans cesse. Je ne sais pas pourquoi mais je sais que tu le hais. Tu nous déteste depuis le début alors que nous t'avons accueillie les bras ouverts.
Je suis bouche bée, vraiment. Je l'écoute déblatérer ces conneries en ne sachant pas quoi répondre tant elle ment, tant elle est haineuse à mon égard.
Je devrais lui dire la vérité ! Que je les ai surpris dans la cuisine, se plaignant de ma venue ! Je devrais lui dire que je hais mon père parce qu'il battait ma mère ! Parce que chaque soir avant de m'endormir, je n'avais pas d'histoire mais une paire de claques ! Je devrais lui dire que je la déteste parce que j'ai mal de la voir avec son fils alors que ma mère me manque !
Je devrais lui dire tout cela, mais je me tais. Elle ne me croira pas, et les sanglots nouent ma gorge.
« Parce que tu comprends, nous on a sacrifié une partie de notre vie familiale pour toi... Blablablablablablablabla... Et comment oses-tu faire venir ce garçon ici ? Blablablablablaba... Ton père était si heureux de te revoir après tant d'années... Blablablablabla... Et toi tu gâches tout, tu lui demandes de te frapper ?! Blablablablablabla... Mais qu'est-ce qu'on t'a fait ? ... »
Alors qu'elle ne cesse de jacasser, les larmes roulent sur mes joues. Je suis entourée de dingues. A moins que ce ne soit moi qui le suis, je ne sais plus. Mes jambes tremblent mais il faut que je me lève, il faut que je prenne le reste de mes affaires et que je parte d'ici.
Tant pis si je vais dans un foyer, tant pis si je finis prostituée sur le trottoir, tant pis. Je ne peux plus rester. Je monte les marches menant à ma chambre, Nicole sur mes talons.
-M'enfin, que fais-tu ? Tu vois, c'est impossible de discuter avec toi Laure !
Je ramasse un sac dans le fond de ma penderie. J'y fourre mes cours, mon chargeur de téléphone, mon carnet de notes. Je grimpe sur le lit et décroche l'unique poster des Twenty One pilots que j'ai et le replie soigneusement sous l'œil réprobateur de Nicole. Je suis vidée. Fatiguée de tout cela, fatiguée de ma vie, des cris, des coups, des mariages forcés, des soi-disant morues, des intellos, de tout... J'ai besoin d'être seule. Juste moi et le silence, juste moi et la liberté. Juste moi et... mes pensées de folle. Je n'en peux plus.
-Si jamais ta mère te voyait, soupire Nicole, elle ne serait pas fière de toi. C'est moi qui te le dit.
Je me fige en entendant cela. Mes mains se mettent à trembler, mes larmes roulent à une vitesse folle sur mon visage. Je me retourne et hausse un sourcil vers Nicole, appuyée dans l'embrasure de la porte.
-Quoi ? chuchoté-je.
-Tu m'as bien entendu.
Je ferme les yeux, respire doucement dans l'espoir de calmer mes nerfs.
-Tu n'as pas le droit de parler d'elle, sifflé-je entre mes dents.
Mes poings sont tellement serrés que je me fais mal, mais ce le cadet de mes soucis.
Quand j'ouvre les yeux, Nicole recule d'un pas. Je suis à deux doigts de lui en coller une.
-Quoi ? Tu vas me frapper ?
Elle rit. Elle rit cette connasse ! La rage déferle dans mon corps, je la hais. Je la hais. Elle ne connait rien de ma mère. Que dalle même !
-Bon, quand tu auras fini ta crise, dis-le moi. Elle sort de mon champ de vision et je me laisse tomber au sol. Je la hais. Je la hais. J'ai envie d'hurler, de crier. Qu'ils aillent tous se faire foutre ! Je me relève, écrasant mes larmes et empoigne le sac que je n'ai même pas terminé. Je m'en fiche, qu'ils s'étouffent avec le reste de mes affaires.
*****
Ca fait déjà onze fois que mon téléphone sonne.
« L'intello » se marque encore une fois sur mon écran mais je n'ai pas envie de répondre. Pour quoi faire ? Pour lui dire que non, ça n'a pas été. Pour lui dire que je ne suis qu'une pauvre fille et qu'il vaut mieux qu'il m'oublie ?
Qu'il aille retrouver sa Sophie et qu'il me foute la paix lui aussi. « Elle est moche ». Menteur. Cette fille est magnifique et ensemble, ils formeront le petit couple parfait. Je ne comprends même pas qu'elle ne sache pas se dégoter un mec toute seule. Enfin soit, il m'oubliera vite quand il la culbutera partout dans leur maison de riches.
-Bordel ! Qu'est-ce que tu fous ici ?
Je soupire quand Matthew vient s'asseoir dans l'herbe, à côté de moi. Je replie mes jambes et passe mes bras autour de mes genoux.
-Laure, tu peux me répondre ?
Je n'en ai pas envie alors je fixe la plaine devant nous où les gamins jouent sur la balançoire. Pas que sa question me dérange en elle-même, juste que je n'ai plus la force de parler, de me plaindre. Je ferme les yeux quand il m'attire contre lui, dans ses bras.
-Bébé, dit-il doucement, pourquoi tu pleures ?
Je hausse les épaules parce que je n'ai pas envie de lui dire à quel point la jalousie m'asphyxie en ce moment.
-Racontes-moi... Elle t'a cru ?
Je secoue la tête par la négative, avant d'enrouler mes bras autour de son cou. Je pleure silencieusement sur son épaule tandis qu'il me caresse tendrement le dos. J'ai tellement mal. Je souffre de cet abandon mais je sais que le pire sera le sien. Je n'arrête pas de penser à ça depuis qu'il me l'a dit. Je ne peux pas effacer l'image d'un Matthew souriant en costume au bras d'une mariée. Je ne veux pas qu'il parte, qu'il m'oublie. Je veux qu'il m'aime moi et pas une autre.
-Laure, s'il te plait. Je veux savoir à quoi tu penses.
Je m'essuie le nez sur le dos de la main tandis qu'il prend mon visage entre ses paumes chaudes et douces.
-Tu veux bien me dire ?
-Il lui a dit que c'était de ma faute. Et... Elle a parlé de ma mère. Elle n'aurait pas dû.
Je pose un doigt sur sa bouche pour qu'il me laisse finir ce que j'ai à lui dire.
-Ce qui me fait le plus mal, là. C'est de me dire que... Tu m'oublieras. Vous allez former un beau couple, fonder une famille et moi...
-Je ne t'oublierais pas Laure.
-Tu m'oublieras Matthew. Cette fille est...
-Est quoi ? Belle ? s'énerva-t'-il. Après combien de passages sur le billard ? Je te le répète Laure, elle n'est pas du tout mon style. Je t'aime toi et pas une poupée en plastique. Fonder une famille ? Je ne veux pas fonder de famille avec cette nana, okay ? Si ce n'est pas avec toi que je la fonde, ce sera avec personne d'autre. Arrête de douter de toi, de moi, de nous. Je t'ai dit la vérité sur cette histoire parce que j'avais besoin que tu saches que je t'aime. Tu devais le savoir. Je refuse de te savoir malheureuse, battue par un connard. Qu'est-ce que tu veux que je fasse pour te faire comprendre que tu es la seule que j'aime ?
Je reste muette un long moment. Je n'avais encore jamais vu Matthew s'énerver de la sorte, même notre petite dispute d'hier était calme en comparaison. Je suis abasourdie par son ton mais surtout par ses mots.
-Je ne veux pas te partager, murmuré-je en posant mes mains sur son torse. C'est tout.
-Bébé...
-Je sais. Je vais m'y faire, ne t'inquiète pas pour moi.
Il saisit ma main et la pose sur son cœur. Je le regarde dans les yeux, mordant ma lèvre inférieure.
-Ca, dit-il en souriant légèrement, il est à toi. A toi seule bébé. Personne ne peut te le prendre.
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