Gaëtan (Chapitre 171)

Je marche aux côtés d'Ergey dans les couloirs du fort jusqu'à rejoindre une esplanade en hauteur.

De là nous avons une vue imprenable sur les constructions déjà bien avancées et le jeune homme à la peau bleue esquisse un sourire en voyant la forme des rues commencer à apparaître entre les arbres.

-Alors comme ça tu es en train de m'expliquer qu'une femme machiavélique et dangereuse est en route vers nous ?

Je lui jette un léger coup d'œil de côté avant de reporter mon regard au delà des remparts. Les habitants se sont habitués à la présence du jeune homme et ne nous regardent même plus avec curiosité. Et demain, je le sais, les ambassadeurs de plusieurs cités rivales arriveront dans nos murs... Pas certain que cela nous apporte autre chose que des ennuis.

Mais je me contente pour l'heure de hocher la tête avec un léger sourire aux lèvres.

-La situation est bien résumée... J'espère que tu ne regrettes pas trop d'avoir accéléré les choses, pour me donner du pouvoir je veux dire ?

-Non. Mais j'aimerais savoir ce que cette fille représente pour toi.

-Qu'est-ce qui te fait t'interroger ?

-Tes yeux brillent d'une façon étrange quand tu parles d'elle... et je ne t'ai jamais vu ce regard pour personne d'autre.

Je sais bien que je ne peux pas mentir à Ergey. Peut-être tout simplement parce que son regard est trop observateur. On sent l'homme qui a toute sa vie été à l'affût du danger, habitué à observer tous ceux qui l'entourent pour ne pas succomber à leurs coups. J'avoue alors simplement :

-Je l'aime. Mais je ne la laisserai pas utiliser ce point faible. Pas de nouveau, pas après tout ce qu'elle m'a fait.

Ergey me jette un nouveau coup d'œil, avant de lâcher en s'éloignant d'un pas :

-Tu n'y arriveras pas !...

Je veux répondre mais il s'éloigne déjà le long de la coursive. Une nouvelle silhouette se profile alors et Thaïs ne tarde pas à me rejoindre, Sandra dans les bras.

Elle me lance un regard moqueur avant de demander :

-Que t'as dit Ergey ? Je parie en tout cas que tu n'as pas apprécié... Vu ton expression.

Je hausse les épaules, tandis que Sandra avance la main vers moi pour me toucher et dire :

-Ga'tan ! Ga'tan, tu as des bonbons ?

Difficile de résister à son air adorable. Mais je n'ai absolument pas sur moi les friandises demandées... en revanche, je sais d'où elle a prit cette sale habitude.

-Yves je parie non ? dis-je à Thaïs qui esquisse un sourire.

Elle acquiesce :

-En effet ! Je crois que tous les enfants de Tigracia l'aiment maintenant !

Je souris en songeant au nom que nous avons choisis d'un commun accord tous ensembles en conseil réduit hier pour la ville que nous voulons créer à partir du complexe.

Mais Sandra fronce les sourcils, grimace, avant de demander :

-Des gâteaux alors ?

-Gourmande ! Déjà ! Tu as quel âge rappelle moi ?

-Cinq ans !

Elle se redresse dans les bras de Thaïs, nez en l'air. Ses cheveux coupés en carrés rappellent furieusement ceux de sa mère, frisés et partant dans tous les sens.

Elle ajoute :

-Je suis trèèès grande ! Bientôt je te dépasserai !

-Mmm... Je n'en doute pas bout d'chou...

Thaïs sourit à son tour tandis que la petite fille me regarde d'un petit air hésitant entre rire avec moi ou froncer de nouveau les sourcils parce que je viens clairement de dire qu'elle n'est en fait pas grande...!

Je me détourne à regret avant d'expliquer à Thaïs puis de tourner les talons :

-Je vais dans mon bureau. C'est le seul endroit où je peux réfléchir à peu près calmement ! Et puis Natacha et Yves doivent m'y attendre...

Thaïs répond dans mon dos tandis que je m'éloigne à pas rapide :

-Aevin doit y être aussi ! À tout à l'heure Gaëtan. Je ne sais pas du tout où est passé Georges mais depuis qu'on est rentré il ne tient pas en place...

Je réplique en tournant légèrement la tête avec un sourire avant de pénétrer à l'intérieur du bâtiment :

-Comme ses parents !

Une fois dans le couloir, je marche rapidement jusqu'à la première cage d'ascenseur supersonique et m'y engouffre non moins rapidement.

Quelques minutes plus tard, je suis au bon étage et en quelques pas devant la porte de mon appartement qui coulisse devant moi. Un instant après, je rejoins mon bureau -l'ancien de Yves- toujours aussi encombré mais dont j'ai appris à aimer le bazars qui donne une ambiance sympathique et étrangement me permet de me détendre.

En plus des personnes que je m'attendais à trouver, je découvre également Kim et Eric en grande discussion, au sujet de... je ne sais pas au juste car dans le même moment Yves vient vers moi et me donne une grande tape dans le dos alors même qu'il sait que je déteste ça.

-Yves, s'il te plaît...

-Humeur sombre aujourd'hui ? Je vais essayer d'être calme et raisonnable...

Natacha esquisse une grimace dubitative avant que tout le monde redevienne sérieux, sauf Aevin comme toujours, et que Kim demande tandis que je me laisse tomber dans le dernier siège libre :

-Alors ? Maintenant que nous savons qu'Edilyn arrive, je veux dire c'est presque plus réel là... que faisons nous ?

Yves observe :

-Il peut toujours y avoir un problème... Le trajet Terre-Sagan n'est pas à cent pour cent fiable... Des météorites peut-être...

Une once d'espoir perce dans sa voix et je me retiens de le foudroyer des yeux pour me contenter de répondre :

-Je doute que ça arrive. Écoutez, je veux la laisser totalement libre, comme le suggérait sa nièce, Ysaïne...

Aevin sursaute tandis que Natacha se dresse aussitôt d'un bond, furibonde.

-Quoi ? Sans aucune surveillance ?

Eric grimace avant de lâcher :

-Les anciens terriens ne l'accepteront jamais... Affecte quelqu'un à son service... et pour voir un peu à quoi elle s'occupe.

Je n'aime pas cette idée. Mais une fois de plus je me laisse trop aveugler par mes sentiments... Ergey aurait-il raison ? Ne pourrais-je résister à l'ancienne reine aux yeux sombres ?

Cette idée achève de m'exaspérer et je me rends tout en ajoutant d'une voix rauque de frustration :

-Très bien, mais qui ?

Kim observe Yves, Aevin, avant de sembler se raviser et de porter son regard sur Natacha et Eric. C'est finalement ce dernier qu'elle nomme.

-Eric, non ? Ce serait celui qui lui déplairait le moins...

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