Edilyn (Chapitre 57)
-Vous l'avez ?
L'homme s'incline sans un mot et me tend un petit objet qui tient facilement dans la main. Je m'approche et le prends en faisant très attention.
Il s'agit d'une petite sphère entourée d'un anneau qui semble suspendu autour d'elle. Devant mon regard interrogatif, mon ingénieur explique :
-De la gravité électromagnétique... Cela contribue aux propriétés de la sphère.
Je contemple entre mes doigts le petit objet avec un curieux mélange de répulsion et de fascination. Je murmure enfin :
-Comment l'active t-on ?
-Avec cet écran... Mais elle est très réceptive et il faut éviter de la prendre brusquement. Nous l'avons paramétrée pour que vous ne risquiez rien à son contact. Mais ce n'est pas le cas pour tout le monde...
Gardant entre mes doigts gantés la sphère à l'anneau, je demande :
-Rajoutez un paramètre de protection pour le maire d'Ivy.
L'ingénieur reprend l'écran de contrôle qu'il venait de poser sur la table à côté de lui et pianote pendant quelques secondes. Il me le tend ensuite avec un calme neutre :
-Tenez. Tout est paramétré.
Je prends l'écran dans ma main gauche et le pose derrière moi. J'articule ensuite :
-Merci. Les robots risquent-ils de déclencher la sphère à leur contact ?
L'ingénieur secoue la tête avec un petit sourire :
-Non, parce que nous avions besoin de personnes capables de la manipuler. C'est un problème ?
Je contemple la sphère intégralement noire dans ma main puis secoue la tête.
-Non, à vrai dire ça va même m'être plutôt utile dans le cas présent... En sortant, dites à l'un de mes gardes de m'envoyer l'un des robots du palais.
Il acquiesce, s'incline puis tourne les talons. Alors qu'il est déjà devant ma porte, il se retourne brusquement, semblant se raviser au dernier moment, et demande :
-Majesté... Vous allez vraiment vous en servir ?
Je demande froidement :
-Pourquoi ?
-Nous...
Il avale difficilement sa salive avant de poursuivre d'un ton plus sûr de lui :
-Nous avons hésité à la détruire.
-Mais vous n'avez pas osé par peur pour vos vies.
Je me retourne sans ajouter un mot avant de lâcher en devinant qu'il attend toujours ma réponse :
-Allez-vous-en. Vous n'avez pas à connaître les secrets d'Etat.
Je devine sans même le voir qu'il hésite de nouveau à dire quelque chose. Puis, semblant se décider, je l'entends conseiller :
-Alors soyez sûre de vos choix Altesse.
Et il quitte la pièce. La porte claque derrière lui tandis que je baisse les yeux sur la sphère noire à l'anneau argenté. Si cette arme est réellement aussi terrible qu'ils le croient tous... Je n'aurai peut-être pas à m'allier à l'Eveland, donc à épouser son roi, et je ne serais peut-être pas séparée trop longtemps de mes filles...
Sûre de mes choix ? Pour une fois je n'ai pas l'ombre d'un doute.
Je garde entre mes doigts le petit objet et le tourne et retourne lentement. J'ai presque la sensation de frôler le danger. Mais l'étrange magie de l'instant est brusquement rompue par l'ouverture de ma porte de nouveau.
Je jette un coup d'œil puis reviens à ma sphère. Un robot du palais... Comme je l'ai demandé.
Je finis pourtant par relever les yeux et ordonne :
-Viens.
Le robot s'avance de quelques pas et je relève les yeux, gênée par je ne sais quoi dans son attitude. Mais je finis par secouer la tête et par tendre la sphère :
-Va la donner à l'étage de garde numéro 21. Et dis au chef de ma garde que c'est l'arme que nous attendions.
Le robot s'incline et referme déjà ses doigts sur l'objet lorsque je fronce les sourcils.
-Quel est ton matricule d'identification ?
Une infime hésitation. Quelques secondes...
-Numéro 786.
Ce numéro... Il est valable mais j'ai une excellente mémoire. Soudain pâle, je hurle en m'avançant en avant :
-Rends-moi la sphère Mahaut !
Mais elle bondit en arrière prestement sans m'attendre et tourne déjà les talons pour se mettre à courir. L'arme dans ses mains est ma dernière chance...
Animée de cette idée, je me jette en avant sur ses pas et lorsqu'elle franchit les portes de mon appartement, je suis deux pas derrière elle et je hurle aux gardes :
-Arrêtez là ! Mais ne touchez surtout pas à ce qu'elle tient dans la main !...
Mes hommes jaillissent alors de leurs différents postes le long du couloir et Mahaut tente de se défendre en mettant en avant la sphère mortelle. Mais un garde finit par envoyer à terre l'objet et le petit robot récalcitrant est rapidement saisi par deux de mes hommes.
Je m'avance alors rapidement sans mot dire et ramasse dans le couloir l'objet qui vient de rouler sur le sol. Je le sers entre mes doigts, sentant les veines de mon front palpiter un peu trop vite. Tout a presque failli m'échapper en quelques minutes...
Et ce maudit robot de métal réussi encore à me tenir tête. Les gardes, échevelés, se tournent vers moi en attendant mon ordre. Mahaut ne se débat plus mais redresse la tête avec défi :
-Vous allez me tuer ?...
La question reste en suspens tandis que j'esquisse un sourire froid. Je fais rebondir dans ma main la sphère à l'anneau, si précieuse, puis me décide à répondre sans la regarder :
-Ce n'est pas ce que tu crains le plus si je me souviens bien...
Mahaut ne bouge pas pendant quelques secondes avant de pousser un cri et de tenter de nouveau d'échapper aux gardes.
-Vous... Vous n'avez pas le droit de me toucher !
Je rétorque, la voix froide de colère :
-Tu es venue me défier... Normal que tu perdes la mémoire non ? Il serait amusant que je fasse ensuite de toi mon plus précieux serviteur...
Mahaut pousse un nouveau cri à attendrir un cœur de pierre. Mais le mien est de métal.
-Noooon ! Nooon ! Je vous en prie, ne faites pas ça !...
Elle fait alors le geste d'inspirer fortement alors que je sais que les robots n'ont pas besoin d'oxygène, un reste des réflexes de Lydie sans doute, et murmure d'une voix plus posée soudain :
-Je suis à moitié humaine. Vous n'avez pas le droit de faire ça.
-C'est dans le code civil pourtant. L'oubli des données personnelles accumulées est une possible sanction. Je l'applique aujourd'hui. C'est tout...
Ses yeux brillent d'une haine si particulière qu'elle réussit à m'arracher un léger frisson. Mais je murmure à l'intention des gardes sans la lâcher des yeux :
-Emmenez-là. Qu'elle ne se souvienne même plus de qui elle est.
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