CHAPITRE SEPT

VOUS VOUS RAPPELEZ de l'époque où j'avais des principes, des valeurs et des rêves ? Moi non plus mais une chose est sûre, je risque de gagner le gros lot. Maria avait déjà vendu nos fameux godes à treize clients (dont deux garçons...) et on avait touché deux cent huit milles won* en deux jours, appelez ça comme vous voulez mais de l'argent reste de l'argent, mérité ou pas.
   
(NDA: deux cent huit milles won équivaux à environ cent quatre vingt euros.)

On avait pris soixante-neuf milles chacun en décidant que l'autre partie irait à Yixing, je n'en avais pas parlé à Brinda vu que je n'étais pas très proche avec elle mais j'avais tout raconté à Maria, vous savez, sur la situation financière de Yixing en passant par tous les détails chiant du style pourquoi personne n'aime les chinois en Corée et tout le tralala.

Si vous l'avez oublié permettez-moi de vous résumer très rapidement la situation sans évidemment mentionner que l'idée de retourner en Chine avait traversé l'esprit de Yixing, Han, Zitao, Yifan, Qian, Minghao, Junhui et que la grand-mère de Momo notre idole vient de mourir ce qui veut également dire qu'elle allait retourner au Japon. Bien sûr pas besoin aussi de vous expliquer qu'Amber a failli se bastonner avec Jongin car il lui a très amicalement dit je cite "rentre chez toi sale immigrée". Ce ne sont là que de petits détails contrairement à ce que j'allais vous raconter.

Yixing s'est violemment disputé avec son père, je ne sais absolument pas pourquoi mais en tout cas monsieur a une fierté tellement surdimensionnée (vous connaissez les chinois) qu'il refuse de rentrer chez lui donc actuellement je vous parle de mon lit où ce gros tas d'os m'a piqué toute la couverture.

— Chang, appelais-je.

Je ne reçus que des ronflements en guise de réponse, ce mec me casse les pieds.

— Chang, vociférais-je.

C'est pas possible, il a des nems dans les oreilles ou quoi ? Suite à mon manque de patience, je pris l'initiative de lui attribuer un coup de pied dans le dos, il était tellement lourd qu'il tomba de mon lit en entraînant bien évidemment la couverture avec lui, génial me voilà le zizi à l'air. Ah mais ça l'a pas empêché de continuer à dormir, en même temps ça m'étonnerait pas qu'il ait l'habitude, vous savez les chinois sont des gens très pauvres, l'électricité ça existe toujours pas chez eux.

Il était environ midi et on était tous assis dans le salon, quand je dis "tous" je parlais de ma sœur bien sûr mais aussi Maria, Yixing et Jisoo parce qu'apparemment ma maison c'est un hôtel. Comme tout asiat' qui se respecte, on faisait nos devoirs tout en regardant L'Incroyable Famille Kardashian en anglais car oui j'aimerais m'exprimer correctement auprès de Beyoncé si un jour j'ai l'honneur de la croiser dans la rue et lui dire à quel point j'aime son cul.

L'hispanique nous observait, elle trouvait ça "fascinant" de nous voir écrire en coréen, j'ai hâte d'aller au Canada au mois de Septembre car honnêtement, y a pas que son écriture qui me fascine chez elle si vous voyez ce que je veux dire.

— J'en ai marre, on est réellement obligé d'aller en cours demain ? Soufflais-je en thaï.
— On a un marathon de mathématique alors continue de réviser ! Il n'est que midi, on a jusqu'à demain matin ! Me répondit ma sœur.
— Ça me saoule ! S'écria Yixing en balançant son manuel. Je veux retourner en Chine !
— Ferme-la ou c'est pas en Chine que je vais t'amener mais six pieds sous terre ! Ordonna Jisoo.

Ça tombe bien, c'est Six Feet Under qui passait à la radio à ce moment là, j'ai toujours dit que Jisoo était une sorcière. Contrairement à ce que vous pourrez penser ça faisait non pas une heure mais deux semaines qu'on révisait pour ce marathon, les résultats seront affichés dans le hall donc après avoir cherché leur nom, les élèves vont regarder les "minables" qui sont arrivés derniers et les humilier jusqu'à leur mort donc on avait intérêt à bosser, déjà qu'on était mal vu.

En Corée, l'école est synonyme de temple, les révisions sont comparable à une prière, si vous voulez avoir un bon avenir, travaillez. D'autre solutions n'existent pas, personnellement je dédie trente-six heures de ma semaine aux révisions en plus des cours alors qu'un coréen lambda passe cinquante heures à étudier.

De six heures du matin à vingt-trois heures on a le nez fourré dans nos cahiers, j'ai le prestige d'être doué en maths et en sciences donc je ne révise que trois heures par jour, le reste de mon temps est consacré aux langues.

Je ne vais certes plus aux cours du soir car je veux faire une pause après le lycée mais généralement, dès vingt heures, je replonge la tête dans mes manuels de coréen, d'anglais et japonais. L'école ne veut pas que les élèves restent si tard : ce sont leurs parents qui le veulent ! En Corée, la compétition est très féroce entre les élèves. Ce n'est pas comme au Canada. Mon père nous a obligé à travailler autant que les autres élèves pour notre estime, pour ne pas que les autres pensent que les immigrés sont des glandeurs qui ne savent même pas compter sur leurs doigts.

J'étais dans ma chambre entrain de faire mon sac, je n'arriverais jamais à bosser avec tous mes amis à la maison, Maria voulait venir avec moi alors que je l'avais prévenue sur certains points comme quoi elle ne pourrait pas faire de bruit et qu'elle allait s'ennuyer mais elle avait insisté, je me demandais si elle n'était pas en réalité portugaise tellement elle avait du béton dans le cerveau.

Quinze heures seize, pas un bruit dans les salles d'études du lycée (il était resté ouvert pour accueillir les élèves qui souhaitaient réviser), on était tellement à être venu que je faisais mes exercices dans le couloir, le cul sur mon sac et les bouquins sur mes genoux, j'avais sérieusement l'envie de faire une sieste, mes yeux étaient tirés par la fatigue à force de voir et de revoir les mêmes choses mais je n'avais pas le choix, hors de question pour moi d'arrêter l'école, je voulais être pris dans une grande université.

C'est comme si le temps s'était arrêté, pensa Maria, le nez à l'air entrain de balayer la salle du regard. La jeune femme s'était perdue, Kunpimook avait marché si vite qu'il l'avait semée et elle s'était retrouvée toute seule dans le lycée.

Elle ne lui en voulait pas car le stresse et le marathon étaient une justification valable à son comportement mais elle ne comprenait toujours pas cette branche de la culture coréenne voir même asiatique: les études. Asiatique car Pranpriya lui avait dit qu'en Chine, la tricherie était punie par cinq ans de prison ferme.

La grande brune se promenait, elle avait même enlevé ses chaussures compensées pour faire le moins de bruit possible car le silence était maître dans tout le lycée. Elle scrutait chaque élève, comment en sont-ils arrivés là ? Le pays du matin calme était la périphrase désignant la Corée du Sud mais pour elle, seuls le stresse, l'anxiété et l'oppression pouvaient le définir, elle avait l'impression d'être tombée dans une sorte de dystopie où la perfection était l'objectif de chaque habitant.

— Maria, chuchota une voix derrière elle.

La jeune femme se retourna et tomba sur Taehyung, un manuel de philosophie cachant la moitié de son visage. Elle lui administra un grand sourire, le jeune homme se leva discrètement sous les regards jugeurs de certains élèves, n'oubliant pas qu'une Noire dans un établissement en Corée ne passait pas inaperçue surtout si un coréen avait le malheur d'être tombé sous son charme.

Ils se dirigèrent vers un couloir dépeuplé afin de parler tranquillement sans être gêné par les incessant "chut" des autres, Maria remarqua le visage de son ami qui semblait ravagé par l'asthénie, lui aussi révisait beaucoup ?

— Je suis tellement content de te voir ! Avoua-t-il en souriant, même la lueur de son sourire ne suffisait pas à illuminer son minois où la fatigue avait laissé ses marques.

Pris d'un élan de tristesse et d'empathie, Maria enlaça son ami en resserrent son étreinte le plus fortement possible, cette mentalité de vouloir exceller dans tous les domaines que ce soit la beauté, le sport, les études, elle ne la comprenait pas, la perfection n'était pas censée définir un être humain.

Elle ne supportait simplement pas de voir ses amis victimes de la société Sud-coréenne, lorsque Kunpimook lui avait expliqué pourquoi les gens ne les aimaient pas (lui et ses amis non-coréens) elle n'avait pu que se sentir visée. Si les gens les détestaient, ce n'était pas à cause de leur caractère ou manières, c'était juste parce qu'ils étaient étrangers, c'est tout.

Quoi de plus affreux qu'être jugé par d'immondes clichés que par ses capacités ?

Le coréen avait littéralement le feu aux joues, la respiration saccadée et son cœur cognant contre sa cage thoracique, il sentait la petite tête bouclée de la jeune fille nichée contre sa nuque, quoi de plus satisfaisant pour un Homme de sentir une étreinte chaleureuse après un mois de pure désastre car les notes de Kim Taehyung avait littéralement flanché au cours de ce dernier trimestre si bien que les parents du coréen avait pris l'initiative de l'envoyer dans un hagwon* s'il n'arrivait pas dans les cinq premiers de sa promotion.

(NDA: les hagwons sont des établissements privés proposant des cours supplémentaires aux étudiants en parallèle des cours, ils coûtent deux milles cinq-cents euros par années et font étudier les élèves jusqu'à vingt-trois heures non-stop.)

— Je veux pas que tu fasses comme dans les films, je veux pas que tu te tues parce que t'es pas le meilleur. Parce que même si t'es pas le plus intelligent à l'école, t'es le plus intelligent pour moi car t'es le seul coréen qui soit venu me parler depuis que je suis ici, confia Maria.

Le bonheur ne se trouve pas uniquement dans de stupides bouquins ou dans d'horribles exercices d'algèbres, la Corée ne promeut pas le plaisir, réussir dans tout et avoir de l'argent n'a jamais et ne sera jamais une forme de satisfaction. Taehyung l'a bien compris, son bonheur ne se trouve pas dans le jugement de ses parents mais dans les yeux de Maria.

INTÉGRATION +6/05/2017.

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