Chapitre 24 : De rouge et de noir

[La déesse Dierika, elle n'est pas présente dans ce chapitre mais je n'ai plus tellement de dessins en stock donc je me rabats sur ce que je peux x). Déesse des messages, elle est la plus proche des humains]


 L'atmosphère à Diolyde redevint plus calme, drôlement apaisée, comme si les élèves préféraient omettre le danger qui rôdait non loin. Delkateï et les autres redoublaient de vigilance, surveillant le moindre comportement suspect. Ils se retrouvaient entravés par un manque cruel d'indices, de pistes, qui les conduiraient à l'assassin.

Les erreurs de jugement ne pouvaient difficilement être évitées, et leur inexpérience les menait régulièrement vers des hypothèses folles immédiatement démenties par l'un ou l'autre. Il n'était pas question de désigner le coupable du doigt sans en être absolument certain.

La vie reprenait également puisque, au fond, elle n'avait jamais cessé de s'agiter entre les murs. Les cours s'enchaînaient et les entraînements sportifs avec eux, un véritable libératoire pour chacun. Diolyde couplait ainsi le nécessaire à l'agréable dans un entrain tout particulier.

L'Italien contactait régulièrement sa mère tandis que croiser le regard de son paternel lui rappelait constamment ses mensonges. Devrait-il en parler à Joy ? Lui livrer tout ce que l'on avait refusé de lui transmettre en priant qu'elle détienne les réponses manquantes ?

Tout était calme et certains s'octroyaient le privilège d'espérer. Espérer quoi exactement ? Que Jyn se trompe, qu'il cherche à les duper pour une raison que connue de lui seul ? Que le meurtre de Céleste ne soit qu'un accident auquel on aurait prêté trop d'importance ? Delkateï n'envisageait pas un instant ce genre d'hypothèses.

Il rentra dans la chambre juste après le repas de midi, repu et prêt à profiter d'une heure rien que pour lui. Il était seul lorsqu'il découvrit une enveloppe blanche déposée sur son lit. Un mauvais pressentiment s'empara de son être alors qu'il l'ouvrait, d'un mouvement sec. À l'intérieur, une unique feuille soigneusement pliée en deux. L'Italien en rompit le pli tout en retenant sa respiration, une drôle de sensation prenant naissance au cœur de son être. Une écriture propre, presque calligraphique, ornait le papier presque vierge. L'adolescent déchiffra sans trop de peine l'étrange missive.

Je sais que tu es à ma recherche, Malédiction des Dieux. Cesse sans attendre avant que je ne les détruise tous. Toi compris.

Delkateï cessa de respirer, prenant lentement conscience de la menace à peine voilée. Il n'eut pas le temps de comprendre que le néant l'engloutit brutalement. Son champ de vision s'obscurcit jusqu'à se combler entièrement, le cueillant dans un cri informulé. Il n'entendit même pas le bruit étouffé du courrier qui chuta au sol, rapidement accompagné de son propre corps.

Rien.

Il n'y a rien de réel ou de perceptible autour de toi. Le noir grignote quelque chose quelque part et tu sembles en faire partie.

Tu gardes, bien malgré toi, un semblant de conscience.

L'atmosphère est curieusement glaciale et tu te surprends à émettre une comparaison hasardeuse. Les sensations qui s'emparent de toi sont bien pires que celles de tes précédents songes.

Le froid investit un corps qui ne t'appartient plus et ronge ce qui n'est pas encore sien.

Un frisson aurait pu t'ébranler si seulement ton enveloppe charnelle t'avait suivi en ces lieux. Ce n'est hélas pas le cas !

Tu sembles tenir sur un fil, sur un rien. Le noir dissimule bien des horreurs et l'imagination devient ton pire ennemi. Tu te sens sur le point de basculer dans le vide et celui-ci tend déjà ses bras en ta direction. Prêt à t'accueillir dans un tourment.

La peur te dévore en même temps que cette brise qui mord ton être. Le cœur battant, tu te tournes et te retournes.

Où es-tu ? Quel est cet endroit étrange à la fois familier, mais méconnu ? Que te veut-on cette fois-ci ? T'avait-on piégé pour une raison des plus sombres et malsaines ?

Soudain, alors que rien n'aurait pu prévenir quoi que ce soit, une emprise forte et sèche se referme sur toi. Tu étouffes une plainte tandis que cette présence inconnue semble s'enrouler autour de toi tel un serpent. Un reptile vil qui se s'accrocherait fermement à sa proie nouvellement dénichée.

Qu'est-ce que ?

Ta respiration se meurt au fond de ta gorge en même temps que ces mots. Tu ne peux pas te débattre, tu n'en as ni la force ni l'occasion.

Une main se referme lentement autour de ton cou. Comme si cette présence étrangère englobait tout ce noir et menaçait de te dévorer à ton tour. Dévorer l'âme qui s'imaginait un corps inexistant.

Une sorte de plainte t'échappe alors qu'un ricanement percute tes tympans. Un rire sardonique et rocailleux, comme sorti des entrailles de la Terre. Un frisson te heurte tandis qu'une voix t'atteint, comme un redoutable écho.

—Tu es bien stupide Delkateï. Tu oses penser que Diolyde compte sur toi, que c'est touchant ! L'école court à sa perte, visiblement.

Tu ne peux répondre, un vide remplace tes cordes vocales et un liquide épais se fond dans ta gorge. Tu es impuissant et le Mal continue sa progression. Cette entité sans nom ni visage exerce son pouvoir sur cette âme sans défense.

—Et tu me cherches partout, comme un gentil chien bien élevé. Mais qui suis-je ? Hein ? Dis-moi qui je suis !

Le silence mordant accompagne l'ordre de cette voix gutturale. Si tu en avais eu la possibilité, tu aurais certainement frissonné de dégoût ou de peur.

—Tu ne le sais pas... Toi et tes amis, n'en avez aucune idée.

—On te retrouvera. Ce ne sont... pas mes amis, mais on te retrouvera.

Ta rectification te coûte un effort énorme et ta propre voix t'étonne. Elle résonne étrangement dans tout ce qui constitue ce néant.

—Tu refuses simplement de l'admettre, mais ils n'hésiteront pas à sacrifier leur pitoyable vie pour toi. Alors qui penses-tu que je sois ? Une chimère dont l'on te bourre le crâne depuis ton arrivée ? L'un de ces mensonges auxquels tu ne crois plus ?

Ces interrogations lancées comme des menaces éveillent en toi ce que tu te refusais à envisager. Tu préfères oublier tout ce que l'on te cache depuis de longues journées, un réflexe typiquement humain destiné à te protéger.

—Imagine mon visage, la personne que je suis censée représenter entre les murs de l'école...

Des visages défilent juste sous tes yeux, ils s'imposent à toi sans te laisser le loisir d'en faire abstraction. Certains te sont familiers et d'autres presque totalement inconnus. Il s'agit des nombreuses personnalités qui composent Diolyde. Tu discernes Eole, Aaron, Déméter, Jyn, Andrew, Ludo, Calysta, Jo, Eléonore, Eran et même Kourrage. Un éclat momentané de lumière dans cette noirceur entière.

—Qui ça pourrait bien être ? Hein ? Tu ne sais pas ! Tout le monde est suspect, absolument tout le monde ! Même tes amis avec leurs belles paroles et Kourrage qui va perdre le contrôle, petit à petit. Qui te dit que ce n'est pas lui ? Lui qui vous laisse en pâture comme de vulgaires animaux !

Les traits tirés du directeur se matérialisent sous tes yeux avant d'être remplacés par d'autres. La voix caverneuse poursuit, comme prise d'une euphorie malsaine :

—Lui ? Ou lui ? Ou encore lui ? Lui ? Lui ? Ou peut-être même celui-là ?

Un malaise se forme en toi au fur et à mesure que les identités défilent. Un rire déchire ton être alors que l'emprise se referme à nouveau autour ta gorge.

—Mais ce n'est pas une personne, Delkateï. Ça n'a jamais été qu'une seule personne ! Tu es naïf de le croire, d'espérer qu'arrêter un seul élève suffira. Pauvre idiot !

Tu sens la présence contre toi se faire plus tenace, plus vive et, surtout, plus oppressante. Comme si l'on essayait réellement de te détruire, de mettre fin à ton combat.

—Je suis bien un simple élève, mais j'ai derrière moi la Sixième zone entière et même la puissance des Dieux. Qu'est-ce que tu penses faire contre ça ? Résister ? C'est inutile ! Je vais détruire Diolyde de l'intérieur et sans que personne ne puisse réagir. Je suis la menace, la menace ultime, mais personne n'est en mesure de mettre la main sur moi. Même pas toi, Delkateï !

Une douleur indécente prend naissance au creux de ton être. Tu ne saurais dire où siège son foyer, car elle prend rapidement toute la place. Le noir se teint d'un rouge vermeil. La couleur du sang ! Ton âme se tord en vain pour échapper au Mal qui t'ulcère. Tu souffres et les mots ne t'atteignent que trop tard. Tu souffres et rien ne vient mettre fin à ton calvaire. Tu souffres et plus rien n'a d'importance !

—Tu peux toujours me chercher. Chercher une ombre, l'ombre d'un visage dont tu ne sais rien. C'est complètement dément et tu devrais le savoir. Tu n'es pas du bon côté, Delkateï. Dès le début, on a choisi pour toi ce que devraient être le Bien et le Mal et tu les as sagement écoutés. Rien n'est vrai, rien de tout ça ! Dis-moi, qu'est-ce qui est le plus juste ? Tu ne le sais même pas ! Nous nous battons tous les deux, mais moi au moins, je sais pourquoi.

Tu étouffes. Tu brûles de flammes incandescentes que tu ne distingues même pas. Tu te consumes. Tu te meurs.

—Tu me fais pitié, vraiment. Personne ne veut se battre sans raison. Et toi, tu te bats sans même savoir pourquoi.

La prise que maintient ton agresseur est toujours aussi forte. Lutter est vain, tu l'as compris à l'instant où tu t'es senti sombrer dans les méandres de ces lieux. Ces entrailles béantes dont tu n'étais pas certain de revenir.

—Alors retiens bien ça : je suis exactement ce qu'il pense que je suis. Le meurtrier de cette pauvre fille, son assassin, l'espion de Diolyde pour le compte de son ennemi juré, la Sixième zone. Je suis le Mal qui l'a déjà envahie, je peux abattre qui l'envie me prend de tuer, j'en ai le pouvoir. La menace est bien plus grande que Kourrage veut bien vous le faire entendre. Et qui voudra bien te croire, toi ? Les gens, les faibles humains, ont toujours préféré un beau mensonge à une cruelle vérité.

Tout disparait lentement, comme si la réalité s'apprêtait à te tirer de cet enfer. Tu entends encore, distinctement, et avant que tout ne s'efface :

—Profite de ta vie avant que je te l'enlève, Delkateï Lytaël.


Chapitre plus conséquent que les précédents, et avec un peu plus d'action.

Retour du "rêve" avec sa deuxième personne.  J'ai beaucoup aimé écrire ce chapitre. J'ai une période où je n'avais plus aucune idée sur le long terme. J'écrivais clairement  au "feeling" et c'était assez stressant dans le sens où je ne savais absolument pas vers où j'allais. Ce chapitre est un bon exemple x3

 Delkateï se réveillera de son songe, de ce "cauchemar". J'attends vos avis avec beaucoup d'impatience sachant que j'ai misé beaucoup sur ce passage et sur l'impact qu'il va avoir sur les prochains chapitres. Dites-moi tout !

Je vous embrasse <3

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