Chapitre 13 : Diolyde

[En média, je vous présente Ludo. C'est certainement le personnage le plus jeune, il a à peine 15 ans. Un petit blondinet timide et assez peureux sur les bords. Il est très proche d'un certain Andrew]


 Delkateï goûtait au quotidien étrange qu'était celui de Diolyde. Un mélange ordinaire à la saveur particulière.

Il n'avait manqué aucun cours depuis son arrivée et découvrait l'apprentissage, au même titre que tout le reste. Tout autant de nouveautés pour un être qui en avait été privé.

L'éducation apportée par Joy l'y aidait, bien qu'il essuyait déjà un pénible retard. Les premières heures furent complexes, un interminable monologue sans l'espoir de compréhension. Mais les professeurs s'étaient montrés indulgents, magnanimes même. Delkateï avait été étonné de la patience dont ils avaient fait preuve à son égard.

Finalement, les jours s'enchaînèrent, emportant l'euphorie des premiers instants. Une agréable routine s'installait lentement. L'Italien se forgeait une connaissance des lieux et une aisance plus prononcée pour certaines matières. Les mathématiques, les sciences et les langues y étaient enseignées ainsi que des activités sportives en grande quantité. On leur inculquait même l'art du combat à raison de plusieurs heures par semaine. Le retard se comblait lentement, alors qu'il apprivoisait ces disciplines inconnues.

Delkateï avait aussi appris à se familiariser avec l'école en elle-même. L'atmosphère étrange, indescriptible, qui régnait entre ses murs et ses élèves, venus des quatre coins du globe. Comme si le monde entier pouvait se réunir ici, que l'établissement se révélait le point de convergence des peuples. Une richesse culturelle qui nourrissait l'espoir. La structure de l'imposante bâtisse ressemblait à celle d'un château construit pour résister aux offensives d'un quelconque ennemi. Était-ce la Sixième zone que Diolyde redoutait au point de dresser un dôme protecteur autour de ce lieu méconnu de tous ? La membrane à peine visible qui l'englobait les préservait du froid glacial, mais peut-être bien aussi d'autre chose.

Ses longues flâneries solitaires dans l'école lui avaient permis de découvrir la beauté de cette école. Les symboles s'invitaient partout, sur les murs des salles de classe, dans les chambres et dans les couloirs où des lampes étaient suspendues et diffusaient une lumière chaude et rassurante. Il lui semblait voyager dans un autre temps, dans une dimension où la magie se traduisait sans jamais apparaître vraiment, trop pudique pour laisser s'exprimer son omniprésence. Les Dieux avaient bâti ces murs, offrant l'hospitalier à leurs enfants sans même qu'ils ne réalisent l'étendu de ce sacrifice.

Delkateï parvint également à s'attacher quelque peu à ses camarades, un véritable miracle que lui-même n'aurait su expliquer. Chacun d'eux était spécial à leur manière, des êtres à part, des exceptions à l'écart du monde qui avait cessé de s'inquiéter pour eux.

D'origine australienne, Aaron s'avérait être le filleul du Kourrage. Un lien familial fort surplombé d'une confiance aveugle envers le directeur. Le jeune homme se révélait plutôt impulsif, mais aussi d'une extrême sociabilité. Un brin dragueur, il attirait tous les regards, masculins comme féminins. L'ambiance du groupe tenait sur ses épaules, et il en tirait tout le mérite.

Plus réservé, Déméter brillait par son calme à toute épreuve. L'équilibre qui le caractérisait ne le quittait jamais, faisant de lui quelqu'un d'agréable au quotidien. De nature polie et effacée, il surveillait les éclats de son camarade australien d'un œil discret. De plus, il était peu bavard et se contentait de s'exprimer uniquement lorsqu'il le jugeait nécessaire. Une part de lui que Delkateï appréciait tout particulièrement.

Eole avait été le premier vrai lien du nouvel arrivant. Pourtant, il n'avait jamais manifesté de réel soutien, comme satisfait de rester un simple visage connu, un repère qui n'avait de rassurant que le nom. La froideur ne délaissait jamais son expression de marbre. Ses paroles demeuraient rares et méthodiques, professorales. Fidèle à ce détachement propre à sa personne, sans jamais en devenir provocant. Il constituait un mystère pour le Napolitain, dont les lueurs changeantes de son regard perturbaient profondément.

Que dire de Jyn ? Le Finlandais était un de ces mystères de la vie. Que ce soit dans sa manière d'agir ou même d'exister. Ses paroles faisaient toujours l'objet d'une réflexion, à tel point qu'en déceler le sens relevait du défi. Le silence l'accompagnait bien souvent, l'indifférence que lui inspiraient ses semblables était bien réelle. Il s'en détachait complètement, méprisant ces êtres vulnérables et imparfaits. Son intelligence dépassait l'entendement ou l'imagination humaine. Son génie n'avait d'égal que son estime de lui-même, un constat que peut avait le mérite de formuler.

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Le gazon s'étalait sur plusieurs dizaines de mètres. Delkateï observait la vaste surface monochrome avec une rare exaltation. Son état de santé lui permettait maintenant de reprendre le sport. Il avait découvert une grande diversité de disciplines, mais il privilégiait toujours le football. Ce qui le reliait aux autres, à ce monde qui n'avait pas voulu de lui. Le ballon roulait devant lui et juste sous ses yeux. L'Italien avait le sentiment que cet objet pouvait être son point d'appui, de repère. À défaut d'une personne, sa confiance était placée en cette chose, aussi incroyable que cela puisse paraître.

Laurian s'était révélé être un entraineur hors pair. Exigeant et patient, toujours en attente du meilleur de la part de tous. Il poussait les joueurs à leur limite sans jamais la dépasser.

Delkateï passait d'agréables moments ici, sur la pelouse. Il apprenait à découvrir ses camarades, à les jauger. Le sport en disait long sur les êtres qui l'entouraient, sur tout ce qui pouvait encore être caché. Une manière de communiquer universelle, il s'agissait de la seule signification pour le Napolitain.

Parfois, lorsque l'épuisement le gagnait, son regard se perdait vers le haut de ce vaste stade. Une voute formait un arc de cercle au-dessus de sa tête. Les sculptures y étaient d'une finesse sans pareil, comme si les Dieux eux-mêmes avaient fait de ce lieu une image de leur splendeur. Un bel exemple parmi tant d'autres entre les murs de Diolyde qui recelait de bien des merveilles.

—Delkateï Lytaël ?

Le concerné se retourna immédiatement, mu d'un réflexe primitif. Avant même de réaliser, il se trouvait déjà sur la défensive. Le jeune homme qui se tenait face à lui devait être plus âgé de quelques années. L'Italien se souvenait l'avoir vu à plusieurs reprises, il faut dire qu'il passait difficilement inaperçu. Du haut de ses un mètre quatre-vingt-dix, il dominait presque toute l'école. Sa peau s'apparentait à du cuir lustré, brillante et tannée. Andrew le fixait de son unique œil, d'une étrange couleur orangée. La épaisse cicatrice barrait le deuxième manifestement aveugle. Quelques mèches sombres masquaient une partie de son crâne nu.

—Ouais ?

Le regard du jeune homme s'aventurait sur les traits de Delkateï, sans même prendre la peine de répondre. Il retraçait même des arabesques invisibles autour du visage de l'Italien. C'était étrange, comme si cette prunelle distinguait l'imperceptible. Son homologue s'en fit la réflexion, avant de reprendre contenance :

—Y'a un problème ?

—C'est un honneur de te rencontrer. Nombreux sont ceux qui attendaient ta venue.

—Quoi ?

Andrew avait prononcé ces mots avec une grande conviction, fuyant méticuleusement le regard de Delkateï. Le ton était doux, bien loin de ce que l'on pourrait imaginer en vue de sa carrure imposante. Il n'y avait ni provocation ni méchanceté, pas mal d'envie. Les faits clairement énoncés, sans rien de particulier.

—Ta venue était très attendue, ne le savais-tu pas ?

Le Napolitain eut un mouvement de recul involontaire. Un geste trahissant le malaise qui l'avait investi. Il y avait dans ces dires l'essence des propos insensés qui ne pouvaient pas se révéler totalement faux.

—N-Non, balbutia-t-il, bien moins assuré qu'à l'ordinaire, qui m'a attendu ?

Le colosse se pinça l'arête du nez, comme en prise à une violente migraine. Son œil valide se ferma un court instant et son visage se détendit. Finalement, il reprit :

—Moi. Eux. Tout le monde. Tu l'ignorais ?

Cette fois, Delkateï se sentit réellement agacé. Un sentiment brusque et inopiné, complètement incontrôlable. Le mystère ne lui était plus appréciable, mais cause d'un rejet puissant :

—J'ai jamais mis les pieds ici. Tu dois confondre.

L'acidité de l'adolescent ne sembla pas toucher son vis-à-vis qui y demeura totalement insensible. Andrew planta son regard dans celui de l'autre, avec une force non dissimulée :

—Tu comprendras bientôt. Tu sauras bientôt les véritables raisons de ta présence ici.

Le silence accueillit cette affirmation, Delkateï en restait incrédule. S'il avait cru à une mauvaise blague, le sérieux du plus âgé démentait cette pensée.

—Andrew !

Un jeune garçon courait en direction du dénommé et l'Italien le reconnut immédiatement. Ludo était le frère cadet de Jyn par adoption. Rien ne le laissait penser pourtant et deux êtres ne pouvaient pas être plus différents. Petit et menu, l'adolescent ne s'était pas encore débarrassé des rondeurs de l'enfance. Ses cheveux blond platine formaient une sorte d'auréole autour de son visage poupin. De grands yeux bleus mangeaient une majeure partie de son faciès.

Andrew suivit le mouvement, se tournant vers le nouveau venu. Delkateï vit les traits durs de son homologue se détendre, instantanément. Ludo pâlit en croisant le regard de l'Italien, la peur se lisant dans ses prunelles. Cette crainte que le Napolitain inspirait restait bien connue.

—S-Salut, bégaya le plus jeune.

—Salut.

Un silence s'installa, épais et lourd de menaces. La mâchoire crispée, Delkateï attendait sans vraiment savoir quoi. Une réponse ? L'espoir semblait aussi fou qu'interdit, mais il pouvait toujours entrevoir une parole de la part de son homologue. Ses questions se succédaient, rendues imprononçables par la surprise occasionnée.

—Heu... Andrew, on devrait y aller. Les cours vont bientôt reprendre, reprit Ludo, de sa voix fluette et au bout d'un certain temps.

Ledit Andrew acquiesça et obtempéra, suivant son vis-à-vis dans sa volonté. Le plus petit eut un rictus poli, maladroit, avant de raffermir son attention sur le géant.

—Hé ! Attends ! le héla le nouvel arrivant.

—Un peu de patience, la Lune ne saurait tarder encore, le coupa le colosse, d'une voix tranquille.

Et ils tournèrent les talons sans plus de cérémonie, laissant Delkateï totalement perplexe. L'abandonnant à ses réflexions décousues avec une once de culpabilité.  


Quelques explications sur Diolyde qui servent à placer le décor où l'histoire va se dérouler. J'en profite également pour faire un petit rappel concernant les camarades de Del. Et voilà Andrew ! Il est  presque aussi étrange que Jyn (j'ai dit presque). 

Il n'y aura plus de nouvelle vague de personnages alors vous en sortez-vous à ce stade ? Le prochain chapitre se nommera : Solitude et veille lunaire, il sera ... certainement perturbant XD 

Voilà, voilà. J'espère de tout coeur que ce chapitre vous aura plu. N'hésitez pas à voter, commenter, à sortir de votre cachette ;3

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