Lune Rousse - Chapitre VII
Chapitre 7
J'étais devant chez moi, je ne comprenais toujours pas pourquoi tout le monde m'avait menti. Je tombais à genoux, qu'est-ce que j'avais fait ? Pourquoi ne m'avait-il rien dit ? Maintenant je comprends mieux ma réaction la première fois que je l'ai touché... C'était comme si je venais de me poignarder moi-même et toutes les fois d'après où j'avais étouffé mes sentiments mais ils étaient quand même présents, chaque fois. Je pleurais à chaude larmes, rien que lors de mon dernier entraînement il était mal, je le sentais qu'il encaissait de plus en plus mal... Alors j'aurais vraiment pu le tuer... Tout s'embrouillait dans ma tête, les souvenirs se bousculaient, j'étais à bout de souffle ma main serrait ma gorge, mon souffle était si court que j'avais la sensation que mon cerveau ne recevait pas assez d'oxygène. Je suppose donc que le soir où je lui ai avoué mes sentiments soit il ne pouvait carrément pas se lever ou alors c'était trop risqué je me serais rendu compte du subterfuge, peut être bien les deux... Mais il fallait que j'y retourne que je m'excuse, que je vois s'il va bien, que je m'occupe de lui... Je séchais mes larmes et me concentrais de toutes mes forces pour le trouver mais je ne pouvais pas partir, c'est comme si quelque chose m'en empêchait... NON. Au bout d'un long moment, je me résolu à la triste évidence, je ne pourrais rien faire...
Je rentrais donc à la maison comme un zombie, Elijah n'était pas là, par contre Hailey, oui. Je poussais la porte de mon manoir. En temps normal j'aurais été ravi de rentrer mais là j'étais dégouté. Rien n'avait changé, tout était comme j'avais laissé. Je me dirigeai vers la chambre d'Hailey mais elle dormait profondément, il était encore tôt dans la matinée après tout. Je fermais la porte doucement derrière moi et je fis demi-tour pour aller chercher les ingrédients finaux qu'il me fallait, j'avais une dernière potion à préparer celle qu'Akira m'avait apprise, heureusement j'avais tout ce qu'il fallait chez moi alors ça ne prit pas longtemps. Ensuite je me fis couler un thé tout en m'installant sur le canapé devant ma baie vitrée. Le froid dehors et l'humidité du temps laissait une fine couche de brouillard au ras du sol ce qui donnait une teinte un peu mystique à mon jardin. Mes pensées étaient toutes tournées vers Dan quand j'entendis Hailey se levait, je tournais la tête pour voir ce qu'elle voulait et elle avait son drap autour d'elle. Sans rien dire il vint se coucher la tête sur mes cuisses et se rendormit aussi vite. Je lui souris et commençais à lui caresser les cheveux tout en revenant au plus profond de mes pensées. Et s'il avait fait tout ça pour moi... ? Comme il ne pouvait pas m'aider il a trouvé une autre solution... J'en reviens toujours pas, je peux l'aider j'en suis certaine mais pourquoi tout le monde semble vouloir me faire croire le contraire... Je me détendis au contact de ma petite poupée... Ca faisait du bien de la revoir à mes côtés, je me promis de chérir chaque moment auprès d'elle jusqu'à ce que Lis arrive comme ça peu importe l'issue du combat je ne regretterais rien.
Nous sommes restés comme ça un bon moment avec qu'elle ne se lève, j'en profitais pour l'envoyer prendre un bain pendant que je choisis ses vêtements. Je ne me souvenais plus à quel point j'aime choisir ses vêtements, je lui pris une salopette en jean foncé, une petite chemise fleurie à manches longues et des bottines noires vernies. Quand elle sortit de la salle de bain je lui tendis ces vêtements, qu'elle enfila sans rechigner et elle s'assis sur le lit pour que je lui tresse ses longs cheveux.
« Tu commences de tout en haut et t'en fais 2 ! » m'ordonna-t-elle
Assis derrière elle je penchais ma tête pour qu'elle me voit, un sourcil levé.
« Te plaît. »
« C'est mieux comme ça. » lui répondis-je
« Mama... Demain l'école reprend et le maître voulait te voir quand tu serais rentrée. Alors après l'école il faudra que tu viennes me chercher dans la classe je pense. » m'avoua-t-elle à demi-mot
« Il s'est passé quelque chose ma poupée ? »
Je n'étais pas du tout inquiète pour elle, je savais que c'était une gentille fille mais un accident est si vite arrivé en plus ni moi ni Dan n'étions là pour elle ces temps-ci.
« Je ne sais pas trop. Pourtant j'ai des bonnes notes à l'école et je suis gentille. »
Elle semblait vraiment inquiète.
« Quelque chose te tracasse ? » lui demandais-je en commençant l'autre tresse.
« J'ai peur qu'il me gronde. Il est moins grand que Dan mais il fait tout aussi peur. Il a une petite voix et soudain il prend une grosse voix pour qu'on se calme et cette voix elle me fait un peu peur. »
« Oui je vois très bien, je le connais. Il s'appelle Simon, non ? »
« Oui ! Simon Davis. Il ne veut pas qu'on l'appelle monsieur Davis alors tout le monde l'appelle Simon. »
« Dans ce cas, ne t'inquiètes pas j'irai le voir demain, si ça se trouve c'est juste pour me parler de tes supers notes ! » lui dis-je en la chatouillant sous les bras
Elle se mit à rire et ce petit visage souriant m'avait manqué.
« En parlant de ça tu as fait tes devoirs ? » lui demandais-je
Elle secoua la tête affirmativement en se regardant dans le miroir.
« Je veux être habillée pareil demain ! »
« Si seulement tu pouvais garder des habits propres, oui mais tu sais comment ça va finir ? »
Elle soupira puis tapa ses hanches en soupirant :
« Tant pis. »
Je la laissais dans sa chambre pour faire à manger parce que même s'il était presque midi j'avais faim. Hailey me suivit et en passant dans le salon je lançais un vieux vinyle d'un groupe cubain je crois. Il n'y avait pour la plupart des chansons aucune parole que des instruments qui donnaient envie de soleil et de danse. Hailey sembla très réceptive puisqu'elle continua de marcher derrière moi en remuant la tête et les hanches dans une dance approximative qui me fit sourire. Je mis le principal à cuire et après je la suivis dans sa danse. Elle riait aux éclats parce que ni elle ni moi ne savions danser on se laissait seulement porter par la musique. Et quand il y avait des chants on les criait à tût tête. Ce qui arrêta nos déhanchés endiablées était ma nourriture prête. Hailey décida de se mettre à table avec moi et elle me raconta ce que je ne savais pas déjà, un vrai moulin à paroles. La musique de fond nous donnait bonne humeur et nous faisais un peu oublier nos soucis à toutes les deux. Alors pour continuer dans cette si agréable ambiance je décidais de lui faire une surprise.
« Hailey tu savais qu'il y a une école d'équitation en ville ? » lui demandais-je en débarrassant mes affaires.
« Oui une des filles de ma classe y va et se vante tout le temps. » me répondit-elle la tête entre ses petites mains.
« Est-ce que ça te dirait que je t'y inscrive ? Je veux dire je sais que tu sais monter mais je ne sais pas pour t'amuser ? »
« J'y ai pensais mais apparemment ce sont les chevaux du ranch qu'il faut monter mais moi je ne veux monter que Glaïeul. »
L'idée du caprice ne me plaisait pas vraiment mais en l'occurrence je pouvais y accéder facilement.
« Il se trouve que Glaïeul a été débourré là-bas alors je vais leur demander, ça te dit ? »
« Maintenant ? Maintenant, maintenant ? » me demanda-t-elle surprise.
« T'es habillée non ? Alors on y va ! » lui ordonnais-je en avalant mon thé à toute vitesse.
Je ne pouvais pas la garder enfermer à la maison, il fallait qu'elle s'occupe et si je pouvais rendre sa vie un peu plus normale, alors je prendrais le risque pour qu'elle soit heureuse. Je pris un manteau et nous nous sommes dirigés vers les chevaux. Elle sortit, scella son cheval rapidement et efficacement, Glaïeul était beaucoup moins nerveux à son contact, il était même parfaitement serein. Ce qui me rassura, je fis de même avec Tournesol et nous sommes vite partit. La route fut silencieuse, ni elle ni moi n'ouvrait pas la bouche, nous regardions la forêt défiler autour de nous et c'était parfaitement suffisant. Mes pensées étaient toutes aussi tournées vers Dan, je ne pouvais pas me le sortir de l'esprit. Le froid glaçait même le bout de mon nez alors qu'une larme coula le long de ma joue mais je l'essuyais vite avant qu'Hailey ne la voit, après tout c'est elle qui m'avait demandé de m'occuper de Dan et j'avais tout foiré. Je ne voulais absolument pas qu'elle le sache. Egoïste ? Oui probablement. En attendant tout était bon pour la distraire, juste le temps qu'il soit remis sur pieds. Parce qu'il sera vite sur pied j'en suis certaine, c'est de l'autopersuasion, absolument mais je n'avais que ça et des regrets pour me tenir compagnie, et je ne sais pas vraiment ce que j'adviendrais cette fois ci si je devais le perdre... Encore un fois par ma faute qui plus est.
« Tu traînes ! » me cria-t-elle loin devant
J'accélérai le pas en silence et prit rapidement la direction du ranch. Nous sommes passés comme des flèches en ville sans nous arrêter, pas vraiment poli tout ça mais qu'importe. Une fois devant la propriété nous avons déposés nos chevaux devant le bureau et je suis rentrée avec elle.
« Tiens quelle surprise, Al ! »
Joe se leva immédiatement de son bureau pour venir me prendre dans ses bras. Je la connaissais depuis presque aussi longtemps que Gary, elle et son mari Sooha avait était d'une grande aide après les évènements il y a un an.
« Ça faisait longtemps Joe. » lui répondis-je attendrit par son enthousiasme
« Qu'est ce qui t'amènes à part l'envie irrépressible de venir nous voir ? » s'exclama-t-elle en riant
« Je te présente Hailey, j'héberge son père mais tu as dû entendre parler d'elle puisqu'elle est dans la même école que Ken. »
Hailey sortit de derrière mes jambes pour tendre timidement la main.
« Chez nous Hailey on aime les bisous ! »
Sur ceux, elle prit Hailey dans ses bras sans délais pour embrasser sa joue. J'observais sa réaction avec attention mais elle sembla le prendre plutôt bien parce qu'elle se mit à rire puis Joe la reposa. Elle avait toujours son style bien à elle, deux tresses toujours plaquées comme une boxeuse, un pullover à capuche large en maille filé, bien usé mit dans un jean taille haute ajusté puis autour de sa taille pendait une veste en jean bien large en doublure sherpa, surement celle de Sooha d'ailleurs et des bottes western en cuir marron.
« Votre chapeau est très jolie » lui dit Hailey un grand sourire aux lèvres
Joe me regarda un sourcil en l'air fière de son petit effet et elle lui mit son chapeau en cuir sur la tête. Même si Hailey flottait dedans elle semblait ravie tandis que je la regardais étonner de son aisance, elle si mal à l'aise avec les autres adultes d'habitude.
« Tu as raison mais tu sais quoi il ira beaucoup mieux avec ta charmante salopette ! »
Hailey me regarda comme si mon approbation était importante alors je lui souris et me penchais à son oreille.
« Tu veux bien aller voir si Glaïeul a besoin de quelque chose ? Je viendrais te rejoindre bientôt. »
Elle hocha la tête en adressant son plus beau sourire à Jo. J'attendis qu'elle sorte du bureau avant de parler à Joe.
« Je viens te voir parce que j'aimerai inscrire Hailey à vos cours mais elle ne se sent à l'aise qu'avec Glaïeul, ça m'a étonné aussi mais ils semblent s'être trouvé. Je sais très bien que... » commençais-je
« Il n'y a pas de soucis » me répondit-elle tout de suite en s'accoudant contre son bureau.
« Mais dis-moi toi, comment tu vas ? » ajouta-t-elle
« Je vais beaucoup mieux depuis qu'ils sont dans ma vie. Je... Ils m'ont fait me rendre compte que je me complaisais dans une sorte de léthargie malsaine. »
Je soupirais en regardant Hailey dehors.
« Elle n'a rien à voir avec Colleen et il n'a rien à voir avec Rick pourtant je l'aime comme si elle était ma fille et c'est pareil pour elle, je crois. Dan son père adoptif l'a trouvé alors qu'elle gisait dans le sang de sa mère assassinée. Je suppose qu'il a appris pour moi et ma famille alors il s'est dit que je pourrais mieux la gérer que lui et au final il s'est pris d'affection pour elle. Mais elle a gardé quelques séquelles, je crois. C'est pour ça que j'aimerai l'occuper, lui faire reprendre un rythme de vie à peu près normal mais tu sais, elle a établi une relation singulière avec Glaïeul et il était hors de question pour elle de faire confiance à un autre cheval. De plus les filles parlent beaucoup à l'école alors elle a entendu parler de ton ranch et de vos cours. »
Joe se rapprocha de moi et frictionna mes bras avec tendresse, compréhensive.
« Sooha et moi on sera ravi de l'avoir parmi nous ! En plus on le connaît ce cheval, ça a beau être une tête de mule quand il se laisse dompter comme avec Rick il pourrait aller au bout du monde sur un seul ordre. Tu sais ce qu'on va faire ? Je vais la garder cette après-midi pour évaluer son niveau, tu n'as qu'à rester si tu veux et on vous invitera à dîner ce soir. Accepte ça me fait plaisir ! »
« Merci beaucoup Joe, vraiment. » lui dis-je en la serrant dans mes bras
« Pas de chichis entre nous, je suis ravie que tu refasses surface. » me répondit-elle de but en blanc
Je lui adressais un sourire timide et nous sommes sortis pour rejoindre Hailey qui rigolait en parlant à son cheval.
« Prête jeune fille ? » demanda Joe à Hailey
Elle la regarda avec des étoiles dans les yeux avant de se tourner vers moi, elle me serra fort dans ses bras.
« Merci, merci, merci mama ! »
Elle leva ses yeux vers moi et j'embrassais son petit front avant qu'elle ne grimpe à toute vitesse sur le dos de sa monture. Joe qui me regardait en coin et me sourit chaleureusement.
Je restais comme prévu l'après-midi durant à la regarder, elle se débrouillait très bien et semblait parfaitement dans son élément. Je ne vis même pas le temps passé quand Sooha posa sa main sur mon épaule.
« Al, quelle bonne surprise ! Ça me fait plaisir de te voir ! »
Sooha était fidèle à lui-même, habillé de deux longs tee shirt superposés avec des gros cols V à manches longues, un jean cargo marron, une grosse ceinture western et une belle paire de boots. Il arrangea ses cheveux mi longs et vînt s'assoir à côté de moi. Sooha était un bel asiatique, les yeux bridés, un visage carré et des yeux noirs profonds. D'une gentillesse sans pareil je ne l'avais jamais vu triste, déprimé ou en colère. C'était un rayon de soleil.
« Ça me fait plaisir aussi Sooha. J'espère que ça ne te dérange pas Joe nous a invité à dîner, Hailey et moi. » l'informais-je
« Au contraire, mais en fait je sais qu'elle ne t'a pas laissé le choix. » me répondit-il en rigolant
Je lui appris l'existence d'Hailey et Dan dans ma vie quand Joe nous interrompit.
« C'est bon pour moi ! On va pourvoir passer dans la maison en plus il fera plus chaud ! »
Nous l'avons tous suivis et Hailey comme à son habitude était collée à moi, ma main caressait ses cheveux en marchant pendant que Joe et Sooha ramenaient nos deux chevaux plus près de l'entrée. En voyant cette maison au style Ranch quelques souvenirs me remontèrent. Je les avais aidés pour la construire, ON les avait aidés Rick et moi puisqu'ils étaient ses meilleurs amis.
« Hailey tu peux rejoindre Ken il doit jouer dans sa chambre si tu veux. » l'informa Joe et elle partit en courant sans se faire prier.
Nous nous sommes retrouvés devant un verre de vin, Sooha et moi regardions Joe qui n'avait absolument pas besoin d'aide selon elle mais au fil de la conversation je remarquai plusieurs fois les regards insistants de Joe sur Sooha comme pour le pousser à faire quelque chose ou bien à dire je ne savais pas trop. Je n'osais pas non plus leur demander ce qu'il se passait quand Joe se lança :
« Ecoute Al, je... Ce n'est pas contre toi vraiment. »
Puis Sooha la coupa.
« On a appris des choses après la mort de Rick et on voulait t'en parler mais on ne te pensait pas prête pour l'entendre. On se demandait déjà comment tu faisais pour survivre alors on ne voulait pas rajouter de grain à moudre mais maintenant tu as l'air mieux, on pense tous les deux que c'est notre devoir de te le dire. Parce que c'était peut-être notre meilleur pote mais tu n'as jamais compté tes heures toi non plus avec cette maison qui nous en a fait voir de toutes les couleurs. Alors écoute moi ce n'est pas facile à entendre mais un peu avant la mort de Rick on a appris qu'il entretenait une relation plus qu'amical disons, avec Gary. »
Les deux semblèrent me sondaient pour voir ma réaction mais j'avais tourné la page déjà.
« Ils ne se sont jamais vraiment quittés. Je le savais mais je me voilais la face. Je ne saurais dire s'il est resté pour Colleen maintenant qu'il était là et du fait que Gary ne pouvait pas lui en donner ou parce qu'il en avait vraiment envie. Je n'en sais rien et j'ai tourné la page vraiment. Par contre j'apprécie votre honnêteté, ça me va droit au cœur. » leur avouais-je
« Comment tu as su ? » me demanda Joe sous le regard réprobateur de Sooha
« Il n'y a pas vraiment eu de moment particulier, à force j'ai mis des comportements étranges bout à bout. Même Hailey a remarqué que quelque chose n'allait pas. C'est des appels en pleines nuits, des textos que j'ai fait semblant de ne pas avoir vu, des soirées où étrangement ni Gary ni Rick n'était là, c'est des jours où il devait être à la maison je rentrais plus tôt et il n'y avait personne. Je ne pense pas qu'il nous a aimé toutes les deux pareil, je pense qu'il n'était tout simplement pas assez courageux pour choisir. Je sais pas je me dis que finalement je ne le connaissais pas si bien. »
« Je vois, oui... »
« Mais ce n'est pas lui le plus dur à gérer, c'est Colleen. J'ai beaucoup de regrets et de tristesses quand je pense que je ne le verrai jamais grand. C'était mon bébé, le petit gars à sa maman. » ajoutais-je le regard soudain absorbé par le fond de mon verre.
Joe vînt immédiatement vers moi pour me prendre dans ses bras pendant que Sooha me frottait le dos. Je pris une grande inspiration et Sooha dans son éternelle bonne humeur choisit de détourner l'attention.
« Alors tu nous présenteras quand ce Dan ? »
Joe retourna à sa cuisine avant de me lever le menton pour être sûr que je ne pleurais pas.
« Bientôt, j'espère. » leur dis-je très peu sûre de moi
« A table ! »
Les enfants arrivèrent comme des flèches et Ken sembla métamorphosé depuis la dernière fois que je l'avais vu. Maintenant ça devait lui faire 13 ans et son corps prenait des allures d'adolescent. Ken avait les yeux bridés et vert, savant mélange entre papa et maman. Le visage doux de sa mère, les cheveux noirs de son père, une grande mèche devant le visage, un sweat gris chiné avec une grosse tête de loup dessus, un chino noir et des baskets. Il vînt me saluer poliment, il semblait bien s'entendre avec Hailey ce qui me rassura.
« En tout cas Hailey tu t'es très bien débrouillée ! » affirma Joe
Je regardais Hailey qui était visiblement très contente de manger de la nourriture comme tout le monde. Elle me retourna un large sourire.
« Tu sais que nous on adopte le système de Galop français qu'on trouve très adapté. Et Hailey se situe entre le galop 5 et 6. Parce qu'elle a l'aisance à cheval d'un galop 6, pareil pour les obstacles, les critères de terrains variés je n'ai aucun doute puisqu'elle doit traverser la forêt pour aller à l'école, c'est évident qu'elle peut gérer des différences notoires de terrains, au niveau des soins elle a un niveau de galop 5 confirmé puisqu'elle s'occupe très bien de Glaïeul, maintenant elle n'a pas les connaissances nécessaire sur le squelette de sa monture donc je pense que dans certains cours elle va s'ennuyer mais le mieux c'est de la mettre dans un groupe qui s'entraîne à passer le galop 5. En parallèle je lui ferais passer tous les autres galops comme ça quand elle se présentera pour le galop 5 elle aura tous les autres. »
« Du coup tu seras avec moi, Hailey. J'ai les groupes de galop 4 à 7 par contre c'est Joe qui s'occupe de la dernière ligne droite avant chaque concours, elle qui s'occupe de toute la paperasse également. Tu n'as pas à t'inquiéter tu seras dans un groupe mixte il y a 4 filles et 3 garçons ils sont très gentils. Cependant tu seras la plus jeune puisqu'ils ont entre 15 et 20 ans. Ça ne te fait pas peur ? » compléta Sooha
« Non pas du tout. Et toi tu es où Ken ? » demanda Hailey
« Moi... Je suis bloqué galop 3. » lui avoua-t-il en détournant le regard
Elle se rapprocha de son oreille pour lui murmurer
« Si tu veux tu n'as qu'à passer après l'école et je t'apprendrais »
Il s'empourpra et marmonna qu'il verrait bien.
« D'ailleurs Joe, Sooha m'a dit que c'était compliqué en ce moment les cours à cause de vos juments ? » lui demandais-je
« Oui c'est vrai 2 d'entre elles attendent des poulains et je ne veux pas qu'elles soient montées, elles sont bien trop nerveuses et en plus elles ont bien le droit à leurs vacances, parfois on est un peu à cours de chevaux mais on tourne, on se débrouille... »
« Ce sera un soulagement qu'Hailey vienne avec son cheval alors, ça me rassure. Bon je n'ai que 5 chevaux avec des caractères pas vraiment facile mais Camélia et Dahlia devraient faire l'affaire. Pour Camélia il lui faudrait quelqu'un qui soit attentionné avec elle, cette jument est une princesse et Dahlia lui est très patient c'est l'idéal par contre il ne supporte pas vraiment les cavaliers autoritaires. »
« Je ne peux pas te demander ça, Al. Ce sont tes chevaux, je sais que tu y tiens comme à la prunelle de tes yeux et je comprends parfaitement parce que c'est pareil avec les miens. »
« Ecoute ça me fait plaisir de t'aider, en plus ils ne font rien à la maison à part des allers retours entre le pré et l'écurie donc je t'assure que c'est avec plaisir, le tant que tu as besoin, je sais qu'ils seront bien ici ! » lui assurais en lui frottant la main
Sooha la regarda et lui fit un signe de tête d'approbation.
« Joe, laisse la t'aider tu t'en mets trop sur les épaules en ce moment. En plus on les connaît ses chevaux, c'est nous qui les avons débourrés, ils pallieront très bien le manque de Plume et Anissa ! »
Elle me regarda une dernière fois comme si j'allais finalement retirer mon offre.
« Ce sera avec plaisir dans ce cas ! Je passerai les chercher demain avec le van. »
« Non, non ce n'est pas la peine. Je te les amènerai, un le matin et un en fin d'après-midi un peu avant d'aller chercher Hailey ne t'inquiètes pas ! » refusais-je
Ensuite le repas se passa très bien, jusqu'à ce qu'au dessert Joe se retourne vers Sooha prenne sa main et la retourna pour être face à sa paume. Nous ne comprenions pas vraiment jusqu'à ce qu'elle ouvre la bouche.
« Tu sais que je ne suis pas fine en général, alors tu vois le creux de ta main, bébé ? » rigola-t-elle mais la fin de sa phrase était cassée par l'émotion.
« Ton bébé pourrait tenir tout entier dans cette paume. »
J'étais émue de participer à une annonce pareille, Sooha se laissa glisser à genoux de sa chaise pour enlacer le ventre de Joe. Hailey eu la présence d'esprit de regarder ce qui dépassait sous la serviette de Sooha et elle trouva une photo de l'échographie.
« Il est aussi petit que ça ! » se demanda-t-elle en faisant des allers retours entre la photo et le creux de sa propre main.
« Ta main est un peu petite mais c'est presque ça, oui » lui répondis-je en lui souriant
Après avoir mangé le dessert sous les meilleurs auspices nous avons dit au revoir à tout le monde et sommes rentrés à la maison. Ça m'avait fait vraiment plaisir qu'il veuille me faire partager un moment pareil. Ken et Hailey avait fini le repas en spéculant sur le sexe bien évidemment ni l'un ni l'autre n'était sûr de quoi que ce soit.
Sur le trajet du retour il plût, j'étais complètement dans mes pensées et le cliquetis régulier de la pluie me réconforta. En arrivant, nous avons rangés les chevaux au chaud, et nous sommes rentrés en courant à l'intérieur. J'ai séché, mis en pyjama et couché Hailey avant d'aller prendre une douche, un thé et de me coucher moi-même. J'écoutais le bruit de la pluie sur la fenêtre, j'espérais que Dan aille bien. Il me manquait bien plus que je ne voulais bien le croire. Tous mes gestes étaient machinaux, mon corps était là, faisait ce que je lui demandais mais mon esprit était ailleurs. Tiens bon parce que je n'ai pas fini de t'aimer Dan...
J'étais soudain assise par terre. Une vallée entière et bien étrange me faisait face, d'une couleur pourpre et vaporeuse je savais qu'aucun endroit sur Terre ne pouvait ressembler à ça. Je regardais à droite et à gauche mais il n'y avait personne, ni même un bruit. Et puis une brise se fit entendre ce qui me surprit m'obligeant à me retourner pour me retrouver face à mon père et ma mère qui se tenaient la main. Je fis quelques pas dans leur direction pour les prendre dans mes bras, je pleurais sous le coup de l'émotion.
« Tu es une bien belle jeune fille ! Laisse-moi détailler tes yeux » me dit mon père
Il agrippa mon menton pour que je me rapproche plus de lui et je plongeai mon regard dans le sien. Ses yeux reflétaient une innocence et une naïveté touchante comme s'il n'avait jamais connu que les bons sentiments, les bons souvenirs.
« Tu as un regard bien triste » me répondit-il comme s'il avait lu mes pensées
Je lui souris, ma mère m'agrippait fermement le bras je pouvais sentir tout son amour dans ce simple geste.
« Prends soin de ceux que tu aimes Alice. J'aurais aimé être là pour toi et ta mère de mon vivant mais la vie en a fait autrement alors je vais te dire ce que je n'ai jamais pu te conseiller d'un père à sa fille. Ce qui donne du sens à la vie humaine c'est la façon dont on est aimé malgré tout si le chagrin est inévitable rappelle-toi qu'une personne déjà abîmée par l'amour est toujours récompensé par un amour encore plus profond que le précédent. Ce que j'aime avec l'amour c'est qu'il fait autant de bien à celui qui le donne qu'à celui qui le reçoit, c'est le sentiment le plus pur qui soit. N'abandonne jamais tout espoir, et fais-nous des beaux enfants ! » me dit-il sur un ton solennel
Mon front était contre le sien et il versa une larme qui en tombant sur ma joue me donna l'impression d'être glacée, ce qui me réveilla brutalement.
J-30. Je jetai un coup d'œil à ma montre poser sur ma table de chevet, il était bien trop tôt mais j'avais la sensation que je n'arriverais pas à me rendormir alors je me choisis des affaires et partis à la douche. La sensation de l'eau chaude sur ma peau me fit un bien fou, je me détendais peu à peu. Evidemment je pris mon temps vu l'heure, Hailey n'avait pas école avant au moins 3h. Je me séchais bien les cheveux et me maquillais déjà en prévision du rendez-vous avec Simon cet après-midi. Je mis juste du mascara et un rouge à lèvres rouge mat. J'arrangeai mes cheveux pour les dompter en boucles vagues, enfilai ensuite mes vêtements, je voulais absolument faire bonne impression. J'enfilai un pull court crop top bleu marine avec un pantalon de smoking bleu marine bootcut taille haute avec une paire d'escarpins rouge. Bon pour le cheval ce sera galère en talons mais au moins je serais prête. Je me dirigeais ensuite vers la cuisine pour me préparer un bon petit déjeuner que j'avalais avec un bon thé et je partis réveiller Hailey à qui il restait une heure avant que l'école ne commence.
« Tu te lèves ma poupée, c'est l'heure. » lui chuchotais-je en lui caressant les cheveux
« Ça sent bon... »
Sa voix était à peine audible et je m'étonnais toujours de son appétit. Elle ne voulait absolument rien d'autre que de la nourriture humaine, heureusement qu'elle vivait encore sur sa réserve personnelle de sang...
« J'ai fait de la brioche au thé ce matin mais ça ne te plaira pas par contre... Je pourrais te faire un bol de céréales maison ! »
« Raconte-moi comme tu vas faire... »
Elle avait visiblement beaucoup de mal à se lever ce matin pourtant je ne l'avais pas couché si tard hier soir.
« Je vais mélanger des flocons d'avoine, un mélange de noisettes, d'amandes, de noix, quelques noix de macadamia, un peu d'huile végétale, du sirop d'érable, des flakes d'érable, une pointe de vanille, et des pépites de trois chocolats pour madame la gourmande ! » lui dis-je en la chatouillant
« Laisse-moi une demie heure et ce sera prêt. Pendant ce temps-là à la douche ! » lui ordonnais-je en souriant
Elle se leva d'un coup et courra à la douche en criant youpi ! Je la regardais attendrit, puis commençais à préparer ses habits. Je choisis un joli tee shirt blanc, une veste de blazer bleu marine, un jean clair et une paire de basket blanche accompagnée d'une doudoune rouge. Je sortis ensuite de la chambre pour cuisiner son petit déjeuner. Ma mère me cuisinait souvent cette recette de céréales, elle trouvait qu'il n'y avait pas plus sain comme petit déjeuner. L'odeur alléchante sembla l'attirer comme un aimant parce qu'à peine quelques minutes plus tard elle était là, à table. Elle regarda étonnée devant elle puis se leva prit un bol, du lait végétal dans le frigo et se rassit à table sous mes yeux ébahis. Elle planta son regard dans le mien en me souriant de toutes ses dents. Son sourire, je dois l'avouer était communicatif alors je lui renvoyais mais avec un peu moins d'enthousiasme je dois l'avouer. Ma culpabilité commençait à m'oppresser de plus en plus, je n'arrivais même plus à sentir clairement les énergies autour de moi, je me renfermai petit à petit sur moi-même... Je ne pouvais évidemment en parler personne et je me rendis soudain compte ce que ma mère avait dû endurer pendant 12 ans. Dans mes souvenirs elle est toujours souriante et me regarde comme son plus beau joyau, derrière mes yeux d'enfant je n'avais pas pu capter ni retenir les nuances que devait cacher ce regard... J'aurais voulu être là pour elle, bien évidemment je n'aurais pas pu tout comprendre mais j'aurais pu être là pour elle... Peut-être que je l'aurais même empêché de donner sa vie pour moi... Je soupirais en posant une main sur mon cœur, ce si petit organe semblait être la source et l'essence même de toutes mes douleurs, ces temps-ci.
« Mama. MAMA ! »
Elle tirait frénétiquement sur ma veste de blazer ce qui me réveilla de mes rêveries brutalement.
« On va être en retard si ça continue ! » se plaigna-t-elle
Je jetai un coup d'œil à l'heure, effectivement nous étions bientôt en retard alors nous avons courus vers l'écurie, scellé nos chevaux, j'ai juste mis un filet à Dahlia et nous sommes partis. C'était un peu galère parce que j'étais déjà en talons à cheval ce qui est loin d'être une mince affaire et parce qu'évidemment je montais déjà Tournesol pour avoir un cheval au retour et ne pas traverser la forêt en talons donc je tenais Dahlia par ses rennes heureusement qu'il était sage. Seulement Hailey s'impatientait devant et je la perdis vite de vu ce qui fait que j'arrivais devant l'école bien après elle, les grilles étaient déjà fermées, remarque elle avait commencé depuis un bon quart d'heure vu l'horloge sur la devanture. Je descendis prudemment de cheval toujours les rennes de Dahlia en main en plus de ceux de Tournesol. Mes yeux étaient perdus en direction des grilles closes devant moi quand une grande tape sur l'épaule me fit sursauter et me sortit de ma torpeur immédiatement.
« Al ! Ça va ? » entendis-je derrière mon épaule
Je me retournais nerveusement vers ce que j'avais cru être la voix de Dan mais ce n'était que Joe. Je me frottais le front fébrilement, elle remarqua tout de suite que je n'allais pas très bien.
« Al... Allez vient on va chez moi ! Je prends Dahlia, Sooha rentrera seul avec le 4x4. »
Elle envoya un texto rapidement puis nous sommes partis toutes les deux au ranch à pleine vitesse. Une chance qu'elle ait toujours préférée monter à cru. Cependant mes pensées me tourmentées, j'avais besoin d'en parler à quelqu'un parce que je n'avais personne, je cachais ce que j'avais fait à Hailey et tout ça me pesait beaucoup plus que je n'aurais bien voulu le faire croire. Une fois arrivée, nous avons déposés nos chevaux, elle a déposé Dahlia dans son nouveau box et nous sommes allés dans la maison. Je me suis assise dans la cuisine sur une chaise de bar et posais ma tête entre mes mains les frottant jusqu'à la racine de mes cheveux qui devint douloureuse à force.
« Tu veux un verre de vin ? » me proposa Joe
Elle n'était absolument pas inquiète mais elle voulait savoir ce qui se passait.
« Il est presque 11h. » lui répondis-je sans la regarder
« Excellent, bientôt midi, c'est l'heure ! Rouge, rosé ou blanc ? »
« Rouge s'il te plaît. »
Elle me servit et s'assis en face de moi sans rien dire.
« C'est vraiment ce que j'ai besoin. » ajoutais-je larmoyante dans le silence de la pièce
Je parlais du vin mais aussi d'elle silencieuse en face de moi. Elle ne demandait rien mais sa seule présence en face de moi me prouvait qu'elle était présente pour moi.
« J'ai promis à Hailey de protéger Dan et j'ai échoué. Aujourd'hui il est entre la vie et la mort dans une clinique à cause de moi et je m'en veux parce que c'est ma faute. Mais je ne le savais pas, je... Je me sens tellement coupable chaque fois que je croise le regard d'Hailey je m'en veux un petit peu plus et les heures passent je sens ce poids sur mon dos de plus en plus lourd. J'avais fait mienne la sensation de solitude mais depuis que je le connais il m'a changé petit à petit et aidé. Sans que je m'en rende compte j'ai eu besoin de lui pour des choses insignifiantes comme significatives et j'ai l'impression de l'avoir poignardé dans le dos. J'ai peur d'avoir tué la seule lueur d'espoir que j'ai depuis plus d'un an. »
Je fondis en larmes devant Joe qui se leva immédiatement pour me serrer dans ses bras. Elle prit mon visage en coupe mit une mèche de cheveux derrière mon oreille.
« Je te connais Al. Tu n'es pas une mauvaise personne mais il t'est arrivé de mauvaises choses. Tu sais que je suis chrétienne et je crois que parfois on ne choisit pas le démon c'est lui qui nous choisit. Mais contrairement à ce que l'on pense il ne gagne pas avec des menaces ou des intimidations mais avec des promesses aux creux de nos oreilles comme à chaque fois. Quand on entend ses chuchotements, qu'il est là près de nous et qu'il nous promet l'impossible, l'impensable, il faut beaucoup plus de force et de courage pour lui répondre non. Tu as résisté durant cette année et même là quand un autre coup dur arrive tu fais face toujours là, toujours debout, tu ne le dois qu'à toi-même et je suis si fière de toi. Je vois bien que tu es septique face à la religion alors je vais te parler d'un point de vue scientifique, un peu différent. Dans les moments difficiles rappelle-toi que nos yeux peuvent voir 10 millions de nuances de couleur et parfois tout ce qu'il faut faire c'est se rappeler de lever les yeux vers la lumière, les couleurs et mettre un pied devant l'autre, c'est aussi simple que ça. »
Dis comme ça, tout semble si simple. Je me fis force pour garder la face devant mon amie quand soudain je me retrouvais nez à nez avec cette si terrible évidence :
« En fait je refusais de voir une vérité, une universelle si simple qu'elle me paraissait absurde mais une fois les yeux devant l'évidence je suis tombée à genoux. Tout m'est revenu en pleine tête comme un élastique que j'aurais tendu à son maximum. Je l'aimais. Enfin plutôt je l'aime. A partir du moment où j'ai accepté cette émotion je me suis sentie à la fois libre de mes souvenirs tourmentés et assujettie à cet homme, complètement dépendante de ses sentiments envers moi. Et d'un seul coup c'est comme si on m'avait forcé à lever la tête pour me mettre face à ce qui se passe vraiment, j'ai été accablée et j'essaye de sortir ma tête de l'eau, vraiment, mais chaque fois que j'y arrive j'ai juste le temps de reprendre mon souffle avant de resombrer... »
Joe m'observait attentivement, je pouvais voir dans son regard toute l'admiration et l'affection qu'elle me portait et ça me faisait chaud au cœur.
« Pour reprendre ton image je trouve que tu as beaucoup de volonté et de détermination pour toujours garder espoir sur ce souffle que tu pourras reprendre d'une seconde à l'autre. Et dans les moments difficiles comme ceux-là il n'y a aucune honte à avoir besoin ou demander l'aide d'amis. Devine quoi ? On est justement là pour ça ! » m'affirma-t-elle en me donnant un coup d'épaule
« Quoi qu'il advienne nous serons là pour toi d'accord ? Promets-moi que tu n'hésiteras pas à venir nous voir... » rajouta-t-elle
Avec un peu de baume au cœur accompagné d'un peu d'assurance devant ces paroles si encourageantes, je lui fis un sourire timide en hochant la tête.
Nous avons continué à discuter toute la matinée, nous avons mangé ensemble et je dois dire que de ne plus penser ne serait-ce qu'une seconde à la magie, aux vampires, aux tueries m'a fait un bien superficiel et fugace mais tellement agréable. C'était comme si j'étais redevenue innocente et insouciante à rire aux blagues borderline et le plus souvent vaseuse de Joe.
« Je peux te poser une question Al ? »
Mon rire s'arrêta soudain pour redevenir aussi sérieuse que son timbre de voix tandis que je l'aidais à débarrasser la table.
« Je t'écoute » lui répondis-je naturellement piquée au vif
« Est-ce que tu étais fatiguée pendant ta grossesse ? Parce que pendant celle de Ken j'étais épuisée mais je dormais, là je ne dors pas, j'y arrive pas. Je suis si fatiguée je t'assure, chaque pas est une foutue torture mais j'ai beau m'allonger le sommeil ne vient pas... »
C'est vrai que maintenant qu'elle en parlait je détaillais un peu plus son visage. Ses joues étaient légèrement creusées, des poches commençaient à faire tomber ses paupières vers le bas accompagnées de cernes violacés sous ses fameuses poches mais ça ne m'avait pas plus choqué que ça.
« Evidemment je suis surmaquillée, tu m'aurais vu ce matin, une œuvre d'art, un c*n de Picasso » me dit-elle pour répondre à mes interrogations silencieuses
« Dans ce cas, je t'aide à faire la vaisselle et on va chez moi je te concocterai une incantation pour appeler Morphée. »
« Oh je te remercie ! J'ai tellement besoin de sommeil, j'en rêve ! » m'assura-t-elle en rigolant
Nous n'avons pas mis longtemps à deux pour tout nettoyer et elle insista pour me ramener en van tout en soulignant le fait que ce serait plus facile pour moi surtout en talon comme ça elle prendrait Camélia en partant. Evidemment j'étais soulagée parce que je n'avais pas du tout la bonne tenue et j'avais trop peur de me salir en plus ! J'ai été récupérer Tournesol pour le mettre dans le van et nous nous sommes installées à bord direction chez moi, je pris le volant contenu de son état et en l'espace de quelques minutes nous étions à la maison. J'ai mis Tournesol au pré et j'accompagnais Joe vers l'entrée de mon manoir.
« Chaque fois que je vois ce manoir je suis époustouflée par tout ce travail que tu as fait seule. Je m'en rends d'autant plus compte maintenant que nous avons fait tous ses travaux au ranch. Cette entrée majestueuse avec ses marches d'origine en pierre qui se marie parfaitement avec la modernité de ton énorme baie vitrée... C'est magnifique. »
Sa remarque me toucha beaucoup.
« Ça n'a pas été de tout repos, plusieurs fois je me suis dit que j'allais tout laisser tomber surtout quand je faisais la verrière du haut de l'escalier la pluie battante m'allait directement dans les yeux puis j'ai continué et maintenant il n'y a pas d'autres endroits où je me sente aussi bien. »
Elle se tourna vers moi en souriant et poussa la porte de l'entrée. Il n'y avait personne, tout était bien silencieux sans Hailey.
« Je te prépare ta tisane installe toi sur le canapé en attendant ! » lui proposais-je
Elle s'exécuta immédiatement tandis que je préparais le remède si horrible en goût que je m'étais déjà préparée des tonnes de fois pendant ma propre grossesse. Evidemment j'ensorcelai un peu tout ça pour Joe.
Je fis bouillir de l'eau, mis ma mixture dans un infuseur. J'attendis quelques instants pour que l'eau boue puis je lui apportais le tout.
« Je te présente la tisane que j'ai le plus bu pendant ma grossesse ! J'en suis presque dégoutée »
J'en suis totalement dégoutée mais inutile d'aller au-delà dans les détails.
« Ça sent bon ! Qu'est-ce qu'il y a dedans ? » me demanda-t-elle curieuse
« De la lavande, pour t'aider à digérer, soulager ton insomnie, atténuer une migraine, tout en te relaxant corporellement. Ensuite il y a du Passiflore qui lui aussi favorise le sommeil, régule le rythme cardiaque et atténue les troubles nerveux. Puis de la camomille, qui va aider à digérer, apaiser tes douleurs à la poitrine, lui aussi agit contre l'insomnie, accompagnés de valériane aux mêmes propriétés. Le cocktail parfait de la femme enceinte, quoi. »
« Les meilleures conditions pour dormir en somme » me répondit-elle avant de boire une lampée.
Ces yeux s'illuminèrent soudain et elle planta son regard dans le mien alors que je buvais mon propre thé.
« Merci... Cette tisane a un goût de vin cuit... Tu devrais ouvrir une herboristerie en ville parce que tu es douée. De toute manière tout ce que tu touches se transforme en or » me dit-elle en luttant contre le sommeil.
Je lui souris alors que je la voyais boire vite sa tisane pour pouvoir dormir ou alors par besoin de sentir un peu d'alcool je ne sais pas. Joe est une texane, le plus de temps qu'elle passe sans boire d'alcool c'est entre le déjeuner et le gouter pratiquement. Elle s'endormit tranquillement sur mon épaule, je n'avais pas grand-chose à faire alors j'envoyais un texto via le portable de Joe pour prévenir Sooha et je m'endormis aussi.
« Salut Sooha, c'est Alice. Ne t'inquiète pas Joe est chez moi, elle avait besoin de quelques conseils et elle s'est endormie. Si elle ne t'appelle pas un peu avant la fin de l'école vient la chercher. »
« Merci pour tout Alice. Je passerai ne la réveille pas, elle en a besoin. »
Quelques heures plus tard, une main sur l'épaule me réveilla, je me retrouvais nez à nez avec Sooha. Je m'étais endormie sur sa tête et nous étions main dans la main depuis si longtemps que je ne sentais plus mes doigts. Je retirais mes doigts des siens tout en disant bonjour silencieusement à Sooha puis j'approchais ma bouche de l'oreille de Joe pour qu'elle m'entende.
« Sooha est là, il va te ramener à la maison. »
Elle entrouvra les yeux en grognant alors Sooha la prit dans ses bras.
« Je déposerai les clés du van à Simon si tu veux ? » lui proposais-je
Sachant que Simon était son meilleur ami, c'était la meilleure solution.
« Parfait ! »
Je jetai un coup d'œil à l'heure, je devais partir à l'école. Je raccompagnai Sooha à la porte et je fermai derrière nous. Je mis rapidement Camélia dans le van et montais à l'avant. Je n'étais pas ce qu'il y a de plus frais alors sur la route j'ouvrai la fenêtre en grand espérant que le vent sur mon visage allait me donner le coup de fouet dont j'avais besoin parce que j'avais l'impression de continuer mon rêve.
Evidemment peine perdue, malgré tout, j'étais toujours aussi inerte, engourdie et un tantinet apathique devant les grilles de l'école. Les enfants sortaient en courant sous le regard soulagé de leurs parents qui les attendaient à la sortie, d'ailleurs j'avoue, ne jamais avoir compris cette expression sur leur visage en tant que professeur je prends en charge les enfants la journée, leurs parents me les confiaient et je n'avais aucun intérêt à les garder. Je veux dire c'est évident qu'ils vont sortir comme tous les jours à la même heure, pourquoi cette expression d'apaisement sur leurs visages ?
Je passais à travers cette foule de parents s'entêtant à répéter la même phrase presque à l'unisson. « Ça a été l'école ? », pour un enfant de 8ans à priori s'il est dehors c'est qu'il n'a rien fait de condamnable, son seul drame pourrait se résumer à des épinards à la cantine ou une interro loupée à cause de l'oubli d'un S dans Etats Unis, de quoi être traumatisé, c'est vrai. Je constatais avec effroi, sans arrêter de marcher en direction des salles de classe, que j'étais de mauvaise humeur. Incontestable vu les dernières pensées cyniques qui venaient de me traverser l'esprit. Je parcourais le couloir inchangé de la seule école primaire des environs, m'arrêtais devant mon ancienne porte de classe et mon nom avait été remplacé, je pouvais désormais y lire « SIMON Davis ». Je toquais en vérifiant si je ne m'étais pas salie quand sa voix se fit entendre à travers la porte.
« Rentre ! »
Je m'exécutais et à peine avais-je ouvert la porte que Hailey s'était ruée sur moi, elle m'enlaçait les jambes de toutes ses forces. Je lui embrassais le sommet du crâne tout en m'approchant difficilement de Simon. Il n'avait pas changé. J'étais un peu plus grande que lui en talons ce qui me changeait de mes fréquentations actuelles, je dois dire. Ces cheveux roux étaient toujours aussi impeccablement coiffés, ses taches de rousseur envahissaient toujours autant son visage pour lui donner un air juvénile, il s'était aussi laissé pousser la barbe ce qui, je devais l'avouer lui allait très bien. Question vestimentaire il arborait toujours un style classique, chemise, cravate et petit pull, j'avais tout de suite remarqué qu'il avait, comme à son habitude, cette manie de remonter ses manches jusqu'aux coudes. Je lui fis la bise en le saluant avant de commencer :
« Est-ce que ça te dérange si Hailey nous attend dehors ? Je préfère lui en parler après entres filles » lui dis-je avec un sourire gêné.
Je ne me sentais pas du tout à l'aise parce que cette salle de classe je la connaissais par cœur, y être maintenant après tout ce qui s'est passé et d'autant plus en tant que parent d'élèves m'embarrassait.
« Non non je t'en prie, c'est toi que je voulais voir avant tout »
Je le remerciais et prit la tête d'Hailey en coupe en m'accroupissant devant elle.
« Tu m'attends dans la cour devant, tu restes sous les fenêtres que je puisse te voir ma poupée. »
Elle en profita pour embrasser ma joue et me refaire un câlin. Je ne sais pas ce qui trottait dans sa tête mais elle avait besoin de réconfort et je m'en voulais de ne pas pouvoir être là tout de suite pour elle. Quand la porte claqua derrière Hailey nous nous sommes retrouvés comme deux imbéciles, debout, face à face alors il m'invita à m'asseoir derrière un des bureaux d'élèves.
« Je suis content que tu sois là. Tu as l'air en forme, enfin regarde toi ! » me dit-il un peu trop enthousiaste
Simon avait toujours eu un faible pour moi et je le savais mais il ne s'était jamais rien passé, il avait été mon assistant tout le long de ma petite carrière alors on se connaissait bien peut être trop bien...
« Je vais mieux, oui. Disons qu'on n'oublie pas, on apprend juste à vivre avec. »
« C'est bien. Bon je vais aller droit au but, j'ai appris que tu avais pris sous ton aile Hailey, j'ai entendu parler de la mort sordide de sa mère et je trouve ça vraiment bien que vous vous soyez trouvée. Quoi de mieux que deux personnes qui souffrent de la même chose pour se soulager... Et je dois dire que cette petite hormis le fait qu'elle soit très bien élevée, est même précoce mais je m'inquiète beaucoup. Nous trouvons avec le corps enseignant qu'elle montre des premiers signes de psychopathie. Elle m'a avoué ne pas vouloir aller vers les autres parce qu'elle ne comprend pas leurs émotions et qu'elle ne ressentait rien à part pour toi et son père. Elle ne s'intègre pas du tout aux autres, elle reste tout le temps toute seule, assise à regarder ces camarades jouer, c'est malsain. Pour le moment elle ne fait rien mais elle pourrait tout aussi soudainement basculer vers un comportement extraverti et manipulateur en se sentant trop exclu ou inférieur par rapport aux autres. Alors peut être que je me trompe, après tout je ne suis qu'enseignant et si ça se trouve c'est juste son cerveau qui a fait un blocage en lien avec ce qu'elle a directement vécu mais je préférai t'en parler pour que tu la surveilles. »
J'encaissais la nouvelle sans trouver de réponse adéquate. Je tournai la tête pour voir Hailey assise sur un banc au milieu de la cour, elle regardait ses pieds aller et venir. Serait-ce parce qu'elle a peur de mordre quelqu'un, parce qu'elle en a envie ou vraiment parce qu'elle ne ressent pas d'émotion ou alors parce qu'en touchant ses camarades elle voit trop de choses...
« Je ne sais pas quoi te dire Simon, je vais être honnête à la maison c'est une petite fille tout ce qu'il y a de plus normal, je veux dire, elle nous réclame, partage souvent son manque de nous voir son père ou moi. Je n'ai rien vu d'alarmant, elle a même sympathisé avec Ken quand je suis allée pour l'inscrire au club... »
« C'est vrai qu'aujourd'hui Ken est venu manger avec elle ce midi à la cantine. Cependant, il faudrait peut-être qu'elle voit quelqu'un... Tu sais Alice c'est pas à toi que je vais apprendre qu'un enfant a une manière bien à lui de réagir à son environnement et quand ce qui l'entoure est si sombre il vaut mieux se tourner vers des spécialistes... Sinon comme je te disais c'est une petite fille intelligente, on lui dit une fois les choses et elle obéit sans poser de questions. Pour reprendre ton expression c'est vrai que fréquemment elle me fait penser à une poupée. Parfois je l'observe et c'est comme si son regard était vide puis elle lève les yeux me regarde et je peux clairement la voir mettre un masque enjoué alors que la seconde d'avant le néant dominait son expression. Ce n'est ni agréable pour moi ni pour toi, sache que j'en suis terriblement désolé. »
« C'est quoi qui t'as mis la puce à l'oreille ? » lui demandais-je curieusement
Je ne répondais même pas à ce qu'il me disait de toute manière quoi dire de plus mais je savais de mémoire que Simon n'avait jamais été très observateur alors me dire qu'il a repéré juste en la regardant un manque d'empathie et d'émotions chez elle ne collait pas, il avait dû forcément avoir quelque chose de plus évident devant les yeux.
« J'ai gardé ta merveilleuse idée des cahiers du week-end. Je te montre le sien. »
J'avais instauré des 'cahiers du week-end' pour les élèves, pour qu'ils puissent s'entrainer à écrire tranquillement pendant le week-end de ce qu'ils veulent et le lundi je récupérais tous les cahiers je les lisais, les corrigeais et leur rendais le vendredi, c'est intéressant pour connaître un peu plus en détail les enfants qu'on a devant soi et souvent comme Simon aujourd'hui ça m'avait permis d'alerter les parents mais je n'aurais jamais pensé que ces travaux me mettraient dans cette situation... Je récupérai le cahier qu'il me tendait, fébrile. Je l'ouvris et mis une main sur ma bouche.
'Qu'est-ce que ressens la fleur qui pousse la terre pour se frayer un chemin de l'ombre à la lumière ? Et le hibou qui cri la nuit ? Quelque chose semble relier les êtres vivants entre eux, les émotions. Je connais l'amour, j'aime maman et papa mais pourquoi au-delà de ça je me sens vide, creuse comme un trou ? Je me sens si calme que parfois je me fais peur. Simon nous a montré un documentaire sur les déserts à travers le globe et je me sens comme le désert sibérien, froid, sec et vide. Je n'ai que 8ans mais je me sens différente, comme une étrangère, un dinosaure dans le monde actuel. L'école maintient un lien étrange entre le monde est moi, j'apprends à le connaitre en théorie sans comprendre la pratique. »
Comment une petite fille de 8ans peut écrire ça... Je me mordillais l'intérieur de la lèvre, les yeux embués, je m'en voulais de n'avoir rien vu, de ne pas avoir été là pour elle ces temps-ci, de l'avoir laissé à Elijah qui ne semblait pas s'en inquiéter plus que ça...
« On va voir ça ensemble... Je pense que je vais la faire voir une amie, une spécialiste du comportement... En tout cas je te remercie parce que je n'avais rien vu... »
Ma voix se faisait de plus en plus tremblante et j'arrivai difficilement à retenir mes larmes.
« Ne t'en fais pas, les parents n'ont généralement pas le recul nécessaire pour voir ce genre de choses. Cependant je ne doute pas que tu t'en serais rendu compte mais si effectivement nous avons raison, un diagnostic précoce est toujours plus prudent. Je veux que tu me tiennes au courant, d'accord ? » m'ordonna-t-il en se levant
Je me levais également, lui déposais le cahier sur la table et lui refis la bise avant de partir.
« Oh j'ai failli oublier, ça te dérange de nous ramener je... »
« Oh oui excuse moi j'avais totalement zappé, Sooha m'a prévenu je vous ramène. » me coupa-t-il avant que je passe le pas de la porte.
Je l'attendis avant d'aller chercher Hailey dans la cours toujours assise sur son banc les yeux dans le vague. Je déposais ma main sur sa tête et elle me sourit en silence avant de nous suivre. Le trajet se fit dans le silence le plus total alors qu'Hailey avait embarqué Glaïeul dans le van toute seule. Une fois à la maison elle sortit la première pour rentrer directement Glaïeul au pré pendant que j'en profitais pour remercier Simon.
« Si tu as besoin de moi je suis là » me dit il affectueusement en posant sa main sur ma cuisse.
Son geste, sa main sur ma cuisse me glaça le sang. Il ne me faisait pas peur mais je n'avais pas envie, pas envie de ce genre de relation, de complications et je ne désirais pas en plus qu'il me touche.
« J'ai surtout besoin de me retrouver seule avec ma fille » lui répondis-je froidement en descendant.
Je passais ensuite la soirée à discuter avec Hailey nous en avions besoin et puis finalement elle s'était endormie dans son lit comme une masse après avoir mangé mes lasagnes végétales comme une vorace. Je me relevai un peu sonnée de son lit mais un peu plus rassurée aussi, tout ce que je voyais chez elle c'est une petite fille perdue qui ne sait pas pourquoi et ce qu'elle doit faire dans ce monde à part aller à l'école. Je descendis à la cave pour me prendre un verre de vin et puis la bouteille fût trop vite vide mais je choisis la raison et partis me coucher.
J-29. Je préparais le petit déjeuner, allais réveiller Hailey qui se doucha pendant que je lui choisis ses habits. Aujourd'hui comme il pleuvait elle devait porter un jean avec des bottes fourrés, un tee shirt blanc et un imper jaune ciré. En sortant de la douche elle n'opposa aucune résistance et s'habilla tranquillement. Je partis donc dresser son petit déjeuner dans le silence. Suite à notre conversation d'hier je ne voyais pas trop bien quoi rajouter et j'avais honnêtement envie d'éviter le sujet pour le moment. Elle vint enfin s'assoir très mignonne dans sa tenue et je déposais un baiser sur son front avant de la servir et de m'assoir en face d'elle pour manger aussi. Je m'étais réveillée au dernier moment alors j'avalais rapidement mon thé en pensant qu'il me réveillerait un peu plus mais rien. J'allais m'habiller en vitesse pour l'emmener à l'école mais on frappa à la porte. J'ouvris en vérifiant par l'œil de Judas et je fus surprise de trouver Joe, la mine rayonnante.
« J'emmène ta fille ? » me demanda-t-elle le sourire aux lèvres
« Ça ne te dérange pas ? » lui répondis-je naturellement
« Si c'était le cas je ne serais pas là ! »
« Un point pour toi. Ça te ferait plaisir Hailey ? »
« Oui beaucoup, Ken est dans la voiture je le vois d'ici. Bisous maman je t'aime. » me cria-t-elle en partant en courant.
« C'est réglé ! » ajouta Joe en rigolant
Je la remerciais et attendis qu'ils partent pour fermer la porte. Je m'habillais puis ranger un peu la cuisine. Je m'assis ensuite devant ma baie vitrée sur le canapé quand des mouvements dehors m'interpellèrent. Je me levais pour regarder de plus près jusqu'à apercevoir de longs cheveux au vent accompagnés d'un brun qui était en ce moment aux abonnés absent, je sais désormais pourquoi. Je sortis en vitesse mais je ne vis soudain plus personne. C'est comme si en étant sorti sur la terrasse l'hallucination s'était dissipée. Je m'approchais de l'orée des bois jusqu'à ce que je sente une présence familière derrière moi. Je sentis une main le long de mon cou aussi doux qu'une caresse et je fermai les yeux sous ce contact si agréable et familier. J'aurais pu en rêver milles fois de ce moment.
« Je t'ai manqué j'espère chaton mais on est pressé. Lisbeth est là, Elijah l'a aidé à arriver plus vite et ils ont essayé d'enlever Hailey devant l'école. »
Sa voix était saccadée et rapide. Il n'avait pas le temps mais je me retournais brusquement bousculée en dehors de mon petit nuage pour me retrouver face à Dan qui tenait dans ses bras Hailey, inconsciente.
« Elle est juste droguée. Mais j'espère que tu es prête par... »
Avant qu'il n'ait pu finir je pris son visage entre mes mains et je l'embrassais de toutes mes forces, tellement fort que ses dents agrippèrent un bout de ma lèvre en me l'entaillant légèrement. Je me poussais légèrement et il toussa, cracha même le peu de sang qu'il devait avoir sur la langue. Ce n'était pas vraiment le moment de céder à certaines pulsions. Il souriait de toutes ses dents. Quand tout à coup ma main frôla celle d'Hailey, je fus comme propulser hors du temps, dans une autre dimension.
A suivre...
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