Olivia

La journée fût plutôt chiante dans l'ensemble, si on fait abstraction du fait que j'ai revu Andie et qu'on a passé la plupart du temps à se raconter des potins. Enfin, ELLE me racontait des potins plus qu'autre chose. Le reste du temps, nous nous sommes coltiné l'espèce de gangster grincheux qui n'a pas arrêté de nous dévisager. Il ne se gênait vraiment pas pour nous mettre mal à l'aise. Et puis on a juste fait trois cours, dont le plus long a bien fait office de berceuse à mon avis, puisque j'ai dormi durant presque toutes les deux heures qu'il a duré.

Rachel m'avait prévenue qu'elle finirait plus tard que moi, alors j'ai pris un taxi pour rentrer.

J'étais allongée sur le canapé devant la télévision. Awkward, ma série préférée du moment était entrain de passer. Ça faisait environ deux heures que j'étais rentrée et la nuit commençait à tomber. Un courant d'air frais me fît songer à refermer la fenêtre de la pièce — oui, celle qui donne sur le jardin de l'autre.
J'y allai de ce pas.
Mais bien-sûr... il fallait que je tombe sur lui !
Il était appuyé contre le mur de son appartement, entrain de... fumer !?
Ça alors, je ne m'y attendais pas. Mais contrairement à mes attentes, cela n'en affectait pas plus le charme qu'il exerçait sur moi. C'est bizarre, vraiment bizarre.

J'espérais profiter de l'assombrissement du temps pour l'observer alors qu'il ne me verrait pas, mais trop tard: il m'avait déjà vue. Et comme à son habitude, il me détaillait avec la plus haute précision. Ce qui ne manquait jamais de me déstabiliser.
Et pourquoi je reste là, moi?
« Sans doute parce que t'aimes bien votre petit manège, après tout... »

Au moment de refermer les volets, je remarquai quelque chose au coin de la fenêtre, coincée entre le bois et la dernière vitre : c'était une feuille — bien trop soigneusement pliée pour être une ordure à mon avis.
Je n'hésitai pas à la récupérer pour l'ouvrir.

« Mais... c'est moi ! »

C'était un portrait de moi, me représentant avec splendeur en plus !
Je n'en revenais pas. J'étais si belle que ça en réalité ?
Un sourire se dessina incontestablement sur mes lèvres, et mon réflexe suivant fût de regarder en direction du garçon qui se tenait loin en face de moi, une cigarette à la main.
Il esquissa lui aussi un sourire, et alors je compris que cette surprise venait de lui.

Ça alors, qu'il était talentueux !

J'étais tellement obnubilée à admirer le dessin que ce n'est que quelques longues secondes plus tard que je réalisai qu'il y avait un message en-dessous : « Peut-être qu'il aurait un titre si je connaissais au-moins ton prénom ».

Là, je ne pus retenir un gloussement.
Ça n'aurait pas été plus simple de me le demander directement ?
Non. Tout compte fait... je préfère cette manière là. J'adore l'originalité.

Le ronflement du moteur d'une voiture vînt m'obliger à arrêter mes rêvasseries devant une version améliorée de moi sur papier et je sursautai avant de fermer définitivement la fenêtre et tirer les rideaux.
Je me précipitai dans ma chambre et déposai le dessin sous mon oreiller quand je compris que Rachel venait d'arriver.

Toc toc toc...

— je peux entrer?

— hmm... oui, fis-je en m'étirant.

Je faisais mine de me réveiller tandis que ma cousine s'avançait puis vînt s'asseoir sur le lit.

— Alors, cette première journée, on se la raconte ? Demanda t'elle toute enthousiaste.

Je souris hébétée. Je ne sais pas pourquoi je me sentais mal à l'aise tout à coup.
Et surtout, je ne sais vraiment pas pourquoi je simulais sortir d'un sommeil... ça, par contre c'est vraiment chelou.

Après tout, je réussis quand-même à lui relater ma journée, et elle en fit de même.
J'avais cependant beau lutter de toutes mes forces pour me le sortir de la tête, je n'arrivais pas à penser à autre chose qu'à ce dessin.
Et dès que Rachel libéra ma chambre, je le sortis de sa cachette et le serrai fort contre ma poitrine en fermant les yeux. Comme si cela me soulageait d'un poids quelconque.

« Il m'a dessinée ! »
Je ne m'en étais pas encore vraiment rendue compte en fait... « il m'a dessinée, putain! »
Mon sourire était semblable à un croissant de lune: j'étais joyeuse.